Cass. com., 24 mai 2023, n° 21-22.398
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Vigneau
Rapporteur :
M. Riffaud
Avocat général :
Mme Henry
Avocat :
Me Occhipinti
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 18 juin 2021), le 3 octobre 2014, l'URSSAF de Picardie (l'URSSAF) a signifié à la société Conseil assistance patrimoine (la société CAP) une contrainte émise le 1er octobre 2014.
2. La société CAP a formé une opposition à la contrainte devant une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale qui, par un jugement du 9 janvier 2018, a annulé cette contrainte, fixé la créance de l'URSSAF à une certaine somme et condamné la société CAP au paiement de cette somme.
3. L'URSSAF a relevé appel de ce jugement puis, le 11 octobre 2019, la société CAP a été mise en liquidation judiciaire. Son liquidateur est intervenu à l'instance, ainsi que la société débitrice elle-même.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa seconde branche
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. La société CAP fait grief à l'arrêt de déclarer son intervention irrecevable et de fixer la créance de l'URSSAF à la somme de 983,03 euros, alors « que lorsqu'une instance tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent pour une cause antérieure au jugement d'ouverture de sa liquidation judiciaire est en cours à la date de ce jugement, le débiteur a le droit propre de se défendre dans cette procédure ; que la cour d'appel a constaté que la société Conseil assistance patrimoine avait formalisé en 2014 une opposition à une contrainte délivrée par l'URSSAF, sur laquelle le tribunal des affaires de sécurité sociale avait statué par jugement du 9 janvier 2018 et que la société Conseil assistance patrimoine avait été placée en liquidation judiciaire par jugement du 11 octobre 2019 ; qu'en estimant l'intervention de la société Conseil assistance patrimoine représentée par son gérant irrecevable au motif inopérant que les débats étaient clos devant le tribunal des affaires de sécurité sociale à la date d'ouverture de la procédure collective, quand la société Conseil assistance patrimoine avait un droit propre, malgré la liquidation, à contester la créance de l'URSSAF à tout stade de la procédure, la cour d'appel a violé l'article L. 641-9 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 641-9 du code de commerce :
6. Le débiteur dessaisi de l'administration et de la disposition de ses biens, dont les droits et actions sur son patrimoine sont exercés par le liquidateur, conserve le droit propre de se défendre sur le recours formé contre la décision fixant, après reprise d'une instance en cours lors du jugement d'ouverture, une créance à son passif ou le condamnant à payer un créancier.
7. Pour déclarer irrecevable l'intervention de la société CAP, l'arrêt énonce que l'instance n'est plus en cours si les débats ont déjà eu lieu avant le jugement d'ouverture, puis retient que si le tribunal des affaires de sécurité sociale a été saisi d'une opposition à la contrainte formée par la société CAP alors qu'elle était in bonis, l'instance n'était plus en cours à la date du prononcé de la liquidation judiciaire puisque les débats étaient clos. Il en déduit que, compte tenu de sa liquidation judiciaire, la société CAP est irrecevable à se défendre et doit être représentée par son liquidateur.
8. En statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses constatations que la société CAP avait été mise en liquidation judiciaire le 11 octobre 2019, soit après que l'URSSAF avait relevé appel du jugement la condamnant à paiement, de sorte que l'instance était en cours et que la société CAP avait un droit propre à y défendre, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai.