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Décisions

Cass. 1re civ., 12 décembre 2006, n° 05-19.219

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

Paris, du 1er juill. 2005

1 juillet 2005

Attendu que Michel X... a été placé sous le régime de la tutelle par jugement du 5 juin 2001 ; que, par ordonnance du 13 août 2002, le juge des tutelles a autorisé M. Y..., en sa qualité de gérant de tutelle de Michel X..., à vendre de gré à gré un bien immobilier situé ... à Paris 10e, moyennant le prix de 106 715 euros payable comptant ; que le 4 septembre suivant, M. Y... a régularisé, au nom du majeur protégé, la vente de l'immeuble au prix précité ; que Michel X... est décédé le 31 octobre 2002 ; que son légataire universel, M. Z..., a, par requête du 9 juillet 2004, formé tierce opposition à l'ordonnance rendue le 13 août 2002 ;

Sur le moyen unique, pris en ses quatre premières branches :

Attendu que M. Z... fait grief au jugement attaqué (tribunal de grande instance de Paris, 1er juillet 2005), d'avoir dit qu'il était irrecevable en son recours alors, selon le moyen ;

1 / que le majeur sous tutelle est recevable à exercer un recours contre la décision autorisant le tuteur à procéder à la vente de l'un de ses biens, qu'il estime avoir été prise en fraude de ses droits ; qu'en décidant le contraire, le tribunal de grande instance a violé les articles 581, 583, 1214 et 1215 du nouveau code de procédure civile ;

2 / que la représentation du majeur par son tuteur et l'autorisation préalable du juge des tutelles de la vente d'un bien ne garantit pas à la personne protégée l'accès à un tribunal en vue de faire trancher la contestation prise de ce que l'autorisation de conclure la vente a été obtenue par le tuteur en fraude de ses droits ; qu'en décidant le contraire, le tribunal de grande instance a violé l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3 / que, en jugeant que M. X... avait été représenté dans le cadre de la procédure diligentée par M. Y... devant le juge des tutelles, le tribunal de grande instance a méconnu le droit pour M. X... de se défendre lui-même ou d'être représenté ou assisté par un défenseur de son choix, et a ainsi violé l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4 / que, en jugeant irrecevable le recours de M. Z... ayant pour objet de faire sanctionner une atteinte au droit de propriété de M. X... aux droits duquel il se trouvait, le tribunal de grande instance a violé l'article 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention ;

Mais attendu que le tribunal de grande instance a justement relevé que le recours formé contre les décisions des juges des tutelles qui n'ordonnent, ni le placement du majeur protégé sous une mesure de protection, ni une aggravation de la mesure, ne peuvent faire l'objet que d'un recours soumis au régime général instauré par les articles 1214 et 1215 du nouveau code de procédure civile rendu applicable à la tutelle des majeurs par l'article 1243 du même code de sorte que le recours n'est pas ouvert à la personne protégée, qui, du fait de l'instauration de la mesure de tutelle et en application des dispositions de l'article 502 du code civil, est privée du droit d'ester en justice ; qu'en application de ces dispositions légales, c'est donc régulièrement, hors toute preuve d'une fraude ou d'une violation des articles 6 ou 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, que l'ordonnance attaquée a été notifiée au gérant de tutelle et non au majeur protégé, certes partie à l'instance, mais dont la protection et la garantie des droits est assurée par l'intervention du juge des tutelles pour prévenir tout conflit d'intérêt susceptible de se présenter ; que, dès lors, Michel X..., légalement représenté, ne pouvant former tierce opposition à l'ordonnance rendue, M. Z..., son ayant cause universel, continuateur de la personne du défunt, était irrecevable en sa tierce opposition ; que par ces énonciations, le tribunal de grande instance a légalement justifié sa décision ;

Sur le moyen unique pris en sa cinquième branche :

Attendu que M. Z... fait encore le même grief au jugement attaqué alors selon le moyen, que les parties doivent être mises en demeure de répondre aux conclusions du ministère public avant la clôture des débats ; qu'en donnant la parole au ministère public en dernier au cours des débats et en prononçant leur clôture sans offrir à M. Z..., qui n'avait pas eu précédemment connaissance des dites conclusions, la possibilité de prendre la parole pour répliquer aux observations ainsi formulées par le ministère public, le tribunal de grande instance a violé l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu que les parties ayant la possibilité, en application de l'article 445 du nouveau code de procédure civile, de répondre par écrit, après la clôture des débats, aux arguments développés oralement par le ministère public, le grief n'est pas fondé ;

Sur le moyen unique pris en sa sixième branche :

Attendu que M. Z... fait enfin le même grief au jugement attaqué alors selon le moyen, que la publicité des débats s'impose devant tout tribunal ; qu'en statuant à huis clos alors que sur tierce opposition le juge des tutelles avait également statué à huis clos, le tribunal de grande instance a violé le principe de publicité des débats et violé l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu qu'en vertu des dispositions de l'article 446 du nouveau code de procédure civile, la nullité pour inobservation de la publicité des débats ne peut être ultérieurement soulevée si elle n'a pas été invoquée avant la clôture des débats, que cette règle n'est pas contraire à l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il ne résulte ni du jugement ni des productions que M. Z..., qui était assisté d'un avocat, ait soulevé l'irrégularité invoquée devant les juges du fond ; que le grief n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Z... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les deux demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze décembre deux mille six.