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Décisions

Cass. crim., 19 mai 2016, n° 15-81.076

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Guérin

Rapporteur :

M. Germain

Avocat général :

M. Valat

Avocats :

SCP Gadiou et Chevallier, SCP Gatineau et Fattaccini

Paris, du 21 janv. 2015

21 janvier 2015

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3 du code pénal, L. 241-3, 4° et 5°, du code de commerce, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. Y... coupable d'abus de biens sociaux au préjudice de la société Exostore, l'a condamné à une peine de six mois d'emprisonnement avec sursis, au paiement d'une amende de 30 000 euros, ainsi qu'à la confiscation de certains des biens placés sous scellés et à la confiscation de l'ensemble des sommes bloquées dans le cadre de la présente affaire et inscrites au crédit des comptes bancaires visés par l'arrêt, et a prononcé sur les intérêts civils ;

" aux motifs qu'il est, notamment, reproché à M. Y... l'utilisation abusive de divers biens (véhicules, marchandises, machines …) appartenant à la société Exostore, soit pour favoriser la société TSBV qu'il dirigeait, soit à son profit personnel ; qu'il n'est pas contesté que la société Exostore a fait l'acquisition auprès de la société Jungheinrich, de deux gerbeurs et de deux transpalettes électriques ; que, s'agissant de ces quatre appareils, deux avaient été acquis en janvier 2002 (au prix de 10 690, 24 euros) et en février 2004 (au prix de 5 965, 65 euros) et deux autres en mars et en avril 2005 pour les sommes de, respectivement, 7 592, 97 euros et 17 978, 81 euros ; que, toutefois, ces matériels, propriétés de la société Exostore, étaient retrouvés dans les locaux de TSBV, lors de la perquisition réalisée, le 14 novembre 2006 ; que l'examen du compte fournisseur d'Exostore permettait de constater l'absence de toute facturation de location du matériel de la société Exostore à la SARL TSBV ; que M. Y... confirmait que les appareils étaient bien la propriété de la société Exostore et avaient été utilisés dans le cadre de son activité au sein de la SARL TSBV, et que « le temps passant », ils y étaient restés ; qu'il confirmait qu'il n'y avait pas eu de cession de ces appareils de la société Exostore à la société TSBV ; qu'il justifiait cela en relatant que les matériels de la société Exostore, stationnés dans la rue, avaient été entreposés dans les locaux de la société TSBV pour des raisons de sécurité ; que, toutefois, il ne pouvait expliquer les raisons pour lesquelles la société Exostore n'avait pas loué ces matériels ; qu'enfin, à l'occasion d'un transport, au cours de l'information, dans les locaux de la société TSBV, les policiers constataient que l'un des gerbeurs, immatriculé EJC- Z16, placé sous scellés, ne se trouvait plus à son emplacement initial ; que M. Y... reconnaissait avoir brisé le scellé et utilisé ce gerbeur pour décharger des sacs de riz ; qu'il résulte de ce qui précède qu'en s'appropriant des matériels, propriétés de la société Exostore, au bénéfice exclusif de la société TSBV, et sans aucune compensation pour la société propriétaire, M. Y... a fait des matériels de la SARL Exostore un usage abusif, conduisant au transfert de deux transpalettes et des deux gerbeurs électriques au profit de la société TSBV, et ce en violation de l'intérêt social de la société Exostore dont il était le gérant ; que la déclaration de culpabilité des premiers juges sera confirmée sur ce point ; que M. Y... est également mis en cause pour avoir fait procéder, en qualité de gérant de la SARL Exostore, à la vente de trois véhicules Mercedès, propriété de la société qu'il dirigeait, soit à son profit personnel, soit à celui de la société TSBV dont il était également le gérant ; qu'il apparaissait en effet que le 8 août 2002, la société Exostore avait souscrit la location en crédit bail d'un véhicule Mercedès CL 500 d'une valeur de 115 000 euros ; que, toutefois, ce véhicule était acquis par M. Y..., le 14 juin 2005, au prix de 40 000 euros (soit 34 844, 72 euros correspondant au coût de la levée d'option d'achat et 5 155, 28 euros payé par chèque de M. Y...) à l'ordre de la société Exostore ; qu'ainsi, le prévenu était devenu propriétaire d'un véhicule haut de gamme, d'une valeur initiale de 115 000 euros, affichant 8 000 km au compteur et dont la valeur argus, au moment de la cession litigieuse, était de 58 070 euros ; qu'ainsi, en s'appropriant à un prix minoré un véhicule Mercedès haut de gamme, M. Y... a appauvri le patrimoine de la société dont il était le gérant ; que la dissimulation de cette opération à l'assemblée générale du 30 juin 2005, devant conduire à son éviction, démontre la connaissance qu'avait le prévenu du caractère illicite de cette opération ; que, de même, les investigations ont démontré que la SARL TSBV avait, le 8 juin 2005, fait l'acquisition d'un véhicule utilitaire Mercedès, immatriculé 433- NES-75, pour un prix de 1 000 euros alors que sa valeur réelle s'établissait à 8 200 euros, selon l'expert judiciaire, et le 24 juin d'un véhicule utilitaire Mercedès immatriculé 558- NMF-75 pour un prix de 1 000 euros alors que sa valeur réelle s'établissait à 10 300 euros, selon le même expert ; que ces deux véhicules avaient été acquis par la SARL Exostore en 2000 et 2001, au moyen de crédits-baux soldés les 10 juillet 2003 et 25 février 2004 ; qu'il apparaissait en outre que, d'une part, l'examen du compte fournisseur de la société Exostore permettait de constater que les cessions de véhicules litigieux n'avaient été suivies d'aucun paiement, et que, d'autre part, la société TSBV avait cédé, en juillet 2006, le premier de ces véhicules, à une société tierce, au prix de 8 000 euros et que la vente du second était envisagée pour la somme de 7 500 euros ; que, toutefois, le prévenu a affirmé, lors d'un interrogatoire devant le juge d'instruction, en premier lieu, que la valeur résiduelle de ces deux camions était nulle et en second lieu, que ses beaux-frères avaient indiqué qu'ils en faisaient cadeau pour sa société, ce que ces derniers contestaient ; que le fait, pour M. Y..., d'avoir cédé, sans l'accord de ses associés, pour des montants très inférieurs à leur côte indicative argus, deux véhicules utilitaires Mercedès, propriétés de la SARL Exostore, au profit de la SARL TSBV dont il était également le gérant, et ce, quelques jours avant son éviction de la gérance de la SARL Exostore, constitue manifestement un usage abusif des biens de la première société au profit de la seconde, d'autant que la preuve n'est même pas rapportée que le produit de cette vente ait été versé sur le compte de la SARL Exostore ; qu'il résulte de ce qui précède que les faits d'abus de biens sociaux reprochés à M. Y... étaient parfaitement caractérisés s'agissant de la vente de ces trois véhicules Mercedès ; qu'il convient de confirmer la déclaration de culpabilité prononcée par les premiers juges de ce chef ;

" 1°) alors que le délit d'abus de biens sociaux est un délit intentionnel qui suppose que le dirigeant ait fait, de mauvaise foi, un usage des biens de la société qu'il savait contraire à l'intérêt de celle-ci ; qu'en se bornant, pour déclarer M. Y... coupable d'abus de biens sociaux, à relever un usage abusif de deux gerbeurs et de deux transpalettes électriques appartenant à la société Exostore au bénéfice de la société TSBV, sans démontrer, ni la moindre volonté d'appropriation de ces biens au profit de la société TSBV laquelle disposait de ses propres matériels et se bornait à leur offrir son entrepôt, tout en les laissant à la libre disposition de la société Exostore située à quelques minutes de là, ni la conscience de porter atteinte à l'intérêt social de la société Exostore, laquelle bénéficiait de l'entrepôt de ses matériels, évitant ainsi les contraventions ou les dégâts causés lorsqu'ils étaient dehors, la cour d'appel n'a pas légalement caractérisé l'intention délictueuse de M. Y... au sens des articles visés au moyen et privé sa décision de toute base légale ;

" 2°) alors que le délit d'abus de biens sociaux est un délit intentionnel qui suppose que le dirigeant ait fait, de mauvaise foi, un usage des biens de la société qu'il savait contraire à l'intérêt de celle-ci ; qu'il ressort des pièces de la procédure telles que rappelées par les premiers juges, que M. Y... avait fait estimer par un garage le prix du véhicule Mercedès haut de gamme qu'il avait racheté à la société Exostore, après avoir levé l'option d'achat, et qu'il avait en conséquence acheté ce véhicule au prix de rachat proposé par ce garage sans reprise, à savoir 40 000 euros ; qu'en se bornant, pour le déclarer coupable d'abus de biens sociaux de ce chef à relever une appropriation à un prix minoré de ce véhicule haut de gamme, ayant prétendument appauvri le patrimoine de la société Exostore, sans prendre en considération que ce prix correspondait à la proposition de rachat de ce véhicule sans reprise par le garage Mercedès, de sorte qu'aucune volonté d'agir contrairement à l'intérêt social de la société ne pouvait lui être sérieusement reprochée de ce fait, la cour d'appel n'a pas caractérisé son intention délictueuse, privant sa décision de toute base légale ;

" 3°) alors que le délit d'abus de biens sociaux est un délit intentionnel qui suppose que le dirigeant ait fait, de mauvaise foi, un usage des biens de la société qu'il savait contraire à l'intérêt de celle-ci ; qu'il n'est pas contesté en l'espèce que les deux véhicules utilitaires Mercedès qu'il est reproché à M. Y... d'avoir vendu pour la somme de 1 000 euros chacun à la société TSBV, avaient fait l'objet par la société Exostore d'une location avec option d'achat, et qu'ils avaient été acquis, à la fin de la location, moyennant les prix respectifs de 411, 61 et 356, 73 euros ; qu'en déduisant la culpabilité de M. Y... d'abus de biens sociaux du fait de la cession des ces deux véhicules, au seul regard de leur côte indicative argus, sans tenir compte de leur valeur comptable laquelle était nulle du fait de la fin de l'amortissement, de sorte que le montant de la vente exécutée par le prévenu était trois fois supérieur à la valeur d'achat par la société Exostore, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa déclaration de culpabilité de ce chef ;

" 4°) alors que la charge de la preuve appartient à la partie poursuivante et que le doute profite à l'accusé ; que, pour démontrer l'existence du délit d'abus de biens sociaux, il appartenait en conséquence à la partie poursuivante d'établir que M. Y... avait agi contrairement à l'intérêt social en s'abstenant de verser sur le compte de la société Exostore le produit de la vente des deux véhicules utilitaires litigieux ; que faute d'avoir pu établir l'absence de versement, la cour d'appel ne pouvait se borner à déduire le caractère prétendument abusif de cette cession de l'affirmation que « la preuve n'est même pas rapportée que le produit de cette vente ait été versé sur le compte de la société Exostore », sans inverser les règles gouvernant la charge de la preuve et méconnaître les textes visés au moyen.

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3 du code pénal, L. 241-3, 4° et 5°, du code de commerce, 459, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de réponse à conclusions, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. Y... coupable d'abus de pouvoirs par détournement de la clientèle de la SARL Exostore, au profit de la SARL TSBV, et l'a condamné solidairement avec la SARL TSBV à payer à la SARL Exostore la somme de 437 274 euros en réparation du préjudice consécutif au détournement de clientèle ;

" aux motifs que à compter du mois de janvier 2005, il était constaté une décroissance du chiffre d'affaires de 55 % de la SARL Exostore, imputable, selon les parties civiles, au détournement, par la société TSBV, d'une partie de sa clientèle, notamment professionnelle ; que, sur ce point, le rapprochement effectué entre la liste des divers clients professionnels de la SARL Exostore, au cours de l'année 2004 et la balance clients de 2005 de la SARL TSBV, permettait de constater que 70 % du chiffre d'affaires de la SARL TSBV était réalisé par d'anciens clients d'Exostore ; qu'en effet, il apparaissait que la société TSBV avait 135 clients de la société Exostore, dont 42 avec lesquels elle réalisait un chiffre d'affaires de 2 407 295, 92 euros, soit 60, 7 % du montant total du chiffre d'affaires réalisé au cours de l'exercice 2005 ; qu'à cet égard, M. Y... a confirmé, ainsi qu'il a été précédemment rappelé, que la société TSBV « (avait) récupéré 70 % de son chiffre d'affaires de 2005 avec des anciens clients d'Exostore » ; que, tant à l'occasion de ses déclarations devant cette cour, que dans les conclusions qu'il a déposées, M. Y... ne conteste pas le transfert de clientèle ; qu'il souligne, d'une part, que ce transfert ne saurait être qualifié de détournement, dans la mesure où il s'est effectué naturellement et en toute bonne foi, et d'autre part, que la valorisation faite par l'expert est excessive ; que tout d'abord, s'agissant des modalités mêmes du transfert de la clientèle, il résulte clairement de l'information judiciaire que M. Y... a fait usage de ses prérogatives de gérant afin de faire cesser l'activité de vente en gros de la SARL Exostore et de capter la clientèle au profit de la nouvelle société TSBV, dont il était le gérant ; qu'en effet, ce détournement de clientèle a été facilité, en premier lieur, par l'utilisation par la société TSBV de la dénomination commerciale « Exo cash & carry », provoquant volontairement une confusion dans l'esprit de la clientèle avec la SARL Exostore ; qu'en deuxième lieu, cette confusion a été volontairement renforcée par l'élaboration de cartes de fidélité au nom « d'Exostore Exo cash & carry » ; qu'en troisième lieu, et enfin, contrairement à ce qu'a affirmé le prévenu, la cessation par la SARL Exostore de l'activité de vente en gros n'a nullement été imposée par l'intervention des services vétérinaires, puisque des travaux, même modestes, auraient suffi pour que la société Exostore soit en mesure d'obtenir un « agrément entrepôt » ; qu'un tel agrément a, d'ailleurs, été sollicité et rapidement obtenu par M. Y... dans le cadre de la société TSBV ; qu'ainsi, force est de constater que la création de la SARL TSBV avait manifestement pour but le détournement de la clientèle d'Exostore, suite au contentieux opposant le prévenu à ses beaux-frères ; qu'une telle stratégie commerciale apparaît manifestement contraire à l'intérêt social de la SARL Exostore, ce dont M. Y... avait parfaitement conscience ; qu'en outre, le prévenu conteste « l'évaluation de l'expert qui se base sur la méthode du fisc (qui) ne saurait être appliquée, cette méthode (étant) faite pour appliquer une imposition, non pour l'évaluation d'une branche d'activité » ; que, s'agissant de la valorisation de la clientèle détournée, il résulte du rapport d'expertise de M. Z...que « la clientèle transférée de la société Exostore à la société TSBV représente 2 186 369 euros de chiffre d'affaires toutes taxes comprises (TTC) au titre du seul premier semestre 2005, soit approximativement un chiffre d'affaires annuel de 4 372 740 euros TTC » ; que l'expert souligne que, « sur la base d'une valeur de clientèle estimée selon les barèmes retenus par l'administration fiscale, compris entre 10 % à 40 % du chiffre d'affaires annuel TTC, la clientèle transférée de la société Exostore à la société TSBV peut être estimée entre 10 % (437 274 euros) et 40 % (1 749 095 euros) » ; qu'après avoir donné cette fourchette, l'expert relève que, « compte tenu de la stabilité de la clientèle de la SARL Exostore, je considère qu'il convient de retenir la fourchette moyenne de cette valeur, soit 1 095 185 15 euros » ; que, lors d'une confrontation organisée par le magistrat instructeur en présence du mis en examen et de l'expert, ce dernier a souligné que son évaluation correspondait à la projection sur une année de la perte du chiffre d'affaires constatée sur un semestre, à laquelle il avait appliqué des coefficients habituellement pratiqués par l'administration fiscale, compris entre 10 % et 40 % ; que la cour estime que seule la valeur plancher apparaissant certaine, il résulte tant des pièces de la procédure que du rapport d'expertise, que la clientèle détournée, évaluée sur une période de seulement six mois de fonctionnement de la SARL Exostore, doit être effectivement valorisée à la somme de 437 274 euros, conformément au montant retenu par les premiers juges ; qu'il résulte de ce qui précède que Meng Y..., ayant volontairement détourné la clientèle de la société Exostore à hauteur de 437 274 euros, la déclaration de culpabilité prononcée par les premiers juges de ce chef sera donc confirmée ;

" 1°) alors que les éléments constitutifs du délit d'abus de pouvoirs par détournement de clientèle doivent être appréciés au jour de la commission des faits reprochés au prévenu et ne sauraient être déduits de circonstances postérieures ; que, dans ses conclusions régulièrement déposées, M. Y... affirmait avec force avoir, en toute bonne foi, décidé de restructurer la société Exostore en séparant l'activité de vente au détail et l'activité de vente en gros, les frais engendrés par l'activité de gros et la marge bénéficiaire qui en était dégagée, ne présentant plus pour elle d'intérêt particulier, à un moment où il était en train d'acquérir les parts sociales détenues par ses beaux frères dans la société Exostore, les parties s'étant alors mises d'accord sur la chose et sur le prix ; qu'en se bornant à déduire la constitution du délit de la constatation d'une décroissance du chiffre d'affaires de la société Exostore à compter de janvier 2005, sans nullement prendre en considération, comme elle y était pourtant invitée par le prévenu dans ses conclusions, que les décisions de restructuration et de transfert de clientèle litigieuses étaient alors concomitantes au rachat par M. Y... de la totalité des parts sociales que ses beaux-frères détenaient dans la société Exostore, de sorte qu'il ne pouvait lui être reproché de vouloir favoriser la société TSBV au détriment de la société Exostore, dont il était sur le point d'acquérir la totalité des parts sociales sans pouvoir prévoir, à l'époque, la soudaine rétractation de ses associés, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes visés au moyen ;

" 2°) alors que, si les juges du fond apprécient souverainement l'existence et le montant du préjudice, c'est à la condition que leurs motifs ne soient pas insuffisants et répondent aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; qu'en l'espèce, pour valoriser à la somme de 437 274 euros l'évaluation de la clientèle détournée, la cour d'appel s'est expressément appuyée sur le rapport d'expertise basé sur les barèmes retenus par l'administration fiscale, compris entre 10 % et 40 % du chiffre d'affaires annuel TTC ; que, dans ses conclusions régulièrement déposées, le prévenu contestait cette méthode d'évaluation, faite pour appliquer une imposition et non pour évaluer une branche d'activité, que la doctrine autorisée prescrivait d'écarter pour les commerces de gros, au profit d'une méthode de calcul sur la base d'une ou deux années de bénéfices nets à laquelle on ajoute la valeur des éléments corporels ; qu'en se bornant à confirmer l'indemnisation fondée sur un pourcentage du chiffre d'affaires, sans même répondre aux conclusions du prévenu faisant valoir que le préjudice résultant de l'infraction prétendue ne pouvait tout au plus qu'être calculé au regard des résultats nets des précédentes années, la cour d'appel s'est abstenue de répondre à un argument déterminant des conclusions du prévenu en violation des textes visés au moyen " ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-2 et 321-1 du code pénal, L. 241-3, 4° et 5°, du code de commerce, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la SARL TSBV coupable de recel d'abus de biens sociaux s'agissant des véhicules utilitaires Mercedès, des gerbeurs et des transpalettes, de recel d'abus de pouvoirs s'agissant du détournement de clientèle, l'a condamnée au paiement d'une amende de 40 000 euros ainsi qu'à la confiscation de certains des biens placés sous scellés et à la confiscation de l'ensemble des sommes bloquées dans le cadre de la présente affaire et inscrites au crédit des comptes bancaires visés par l'arrêt, et a prononcé sur les intérêts civils ;

" aux motifs qu'il est reproché à la société TSBV d'avoir, courant 2003 à 2005, sciemment recelé des fonds et divers biens ; que trois véhicules Mercedès, des machines, des marchandises, des fonds … qu'elle savait provenir d'abus de biens et de pouvoirs commis par M. Y..., au préjudice de la société Exostore ; qu'aux termes de l'article 121-2 du code pénal, dans sa version applicable à la date des faits, « les personnes morales à l'exclusion de l'Etat, sont responsables pénalement, selon les distinctions des articles 121-4 à 121-7 du code pénal, et dans les cas prévus par la loi ou le règlement, des infractions commises, pour leur compte, par leur organe ou représentant » ; que, si la responsabilité pénale des personnes morales est encourue en cas de recel, la société TSBV ne peut être éventuellement tenue responsable que des faits pour lesquels M. Y..., son gérant, a vu sa responsabilité pénale engagée ; qu'en l'espèce, il a été rappelé comment le dirigeant de la personne morale avait sciemment commis certains faits d'abus de biens sociaux et de pouvoirs dont la société TSBV a directement profité, qu'il s'agisse de la mise à disposition de deux gerbeurs, des deux transpalettes électriques, des deux véhicules utilitaires Mercedès, ainsi que du détournement de clientèle ; qu'il n'est pas contestable que la responsabilité pénale de faits de recel de ces infractions est imputable à la SARL TSBV, au profit de laquelle elles ont toutes été commises ; qu'en conséquence, il convient de déclarer la SARL TSBV coupable des faits de recel d'abus de biens sociaux des véhicules utilitaires Mercedès, des gerbeurs et des transpalettes, et d'abus de pouvoirs s'agissant du détournement de clientèle ; qu'en outre, elle sera relaxée des chefs de recel des infractions pour lesquelles la responsabilité pénale de M. Y... a été écartée ;

" alors que la cassation à intervenir sur les deux premiers moyens dirigés contre les chefs de l'arrêt ayant déclaré M. Y... coupable d'abus de biens sociaux et d'abus de pouvoirs et ayant prononcé sur les intérêts civils, emportera nécessairement la cassation de l'arrêt en ses dispositions par lesquelles elle a déclaré la société TSBV coupable de recel de ces délits et a prononcé sur les intérêts civils " ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions régulièrement déposées devant elle et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits d'abus de biens sociaux et d'abus de pouvoirs dont elle a déclaré les prévenus coupables, et a ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;

D'où il suit que les moyens, qui reviennent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être accueillis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi.