Cass. 2e civ., 12 octobre 2006, n° 04-18.727
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Favre
Rapporteur :
Mme Leroy-Gissinger
Avocat général :
M. Domingo
Avocats :
SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, SCP Tiffreau
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal de grande instance de Paris, 25 mars 2004), rendu en dernier ressort, que, sur des poursuites de saisie immobilière diligentées par la société BNP Paribas (la banque) à l'encontre de Mme X..., celle-ci a, le jour de l'audience d'adjudication, invoqué la nullité de la procédure de saisie immobilière, en soutenant que des irrégularités avaient entaché les conditions dans lesquelles avait eu lieu la visite du bien saisi ;
Sur le premier moyen :
Attendu que Mme X... fait grief au jugement d'avoir statué comme il l'a fait, alors, selon le moyen :
1 / qu'il appartient aux juges devant lesquels l'affaire a été débattue d'en délibérer ; que cette formalité substantielle est prescrite à peine de nullité ; qu'en ce qu'il indique à la rubrique "composition du tribunal" : "magistrats ayant délibéré : M. Delphin, vice-président, Mme Leclercq-Carnoy, vice-président, Mme Jenny, juge", sans fournir la moindre précision sur la composition du tribunal lors des débats, le jugement attaqué, qui ne permet pas de savoir si ce sont bien les juges devant lesquels l'affaire a été débattue qui en ont délibéré, ne satisfait pas aux exigences de l'article 447 du nouveau code de procédure civile et devra être annulé en application de l'article 458 du même code ;
2 / que le jugement doit être signé par l'un des juges qui en ont délibéré ; que cette formalité substantielle est prescrite à peine de nullité ; qu'en ce qu'il indique tout à la fois qu'ont délibéré "M. Delphin, vice-président, Mme Leclercq-Carnoy , vice-président, Mme Jenny, juge" et qu'il a été signé par "le président", sans autre précision, le jugement attaqué, dont les mentions n'établissent pas qu'il aurait été signé par un magistrat ayant participé au délibéré, ne satisfait pas aux exigences de l'article 456 du nouveau code de procédure civile et devra être annulé en application de l'article 458 du même code ;
Mais attendu que les magistrats mentionnés dans le jugement comme ayant délibéré sont présumés être ceux-là même qui ont assisté aux débats ;
Et attendu que la mention "président", portée avant la signature au pied du jugement, ne peut désigner que le magistrat ayant présidé l'audience et participé, en cette qualité, au délibéré ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du nouveau code de procédure civile :
Attendu que Mme X... fait grief au jugement d'avoir déclaré mal fondé son incident sur publicité, alors, selon le moyen :
1 / que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'aucun moyen non soulevé par les parties ne peut être examiné d'office sans que celles-ci aient été amenées à présenter leurs observations à ce sujet ; qu'en relevant, d'office, et sans provoquer préalablement les explications des parties à cet égard, un moyen pris de l'existence d'une ordonnance sur requête, qui aurait donné lieu à communication lors de son exécution mais dont la signification n'aurait pas pu avoir lieu en raison de l'absence de la partie saisie, le tribunal a méconnu le principe de la contradiction, violant ainsi l'article 16 du nouveau code de procédure civile ;
2 / que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement ; que la partie qui fait état d'une pièce s'oblige à la communiquer à toute autre partie à l'instance ; qu'en se déterminant en considération d'une ordonnance sur requête, qui aurait donné lieu à communication lors de son exécution mais dont la signification n'aurait pas pu avoir lieu en raison de l'absence de la partie saisie, qui n'a pas été soumise au débat contradictoire des parties, le tribunal a violé les articles 16 et 132 du nouveau code de procédure civile ;
3 / que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motif ; qu'en retenant tout à la fois, à l'appui de sa décision, que "l'ordonnance sur requête critiquée ne donne lieu à communication que lors de son exécution, ce qui fût le cas en l'espèce" et que "la signification n'(a) toutefois pu avoir lieu en raison de l'absence de la partie saisie lors de la visite", le tribunal, qui a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;
4 / que copie de la requête et de l'ordonnance doit être laissée à la personne à laquelle elle est opposée ; qu'en se bornant à énoncer, à l'appui de sa décision, que "l'ordonnance sur requête critiquée est par essence non contradictoire et ne donne lieu à communication que lors de son exécution, ce qui fût le cas en l'espèce, la signification n'ayant toutefois pu avoir lieu en raison de l'absence de la partie saisie lors de la visite", le tribunal, qui s'est déterminé à partir de motifs dont il ne résulte pas qu'il aurait été satisfait à ces exigences, destinées à faire respecter le principe de la contradiction, a violé les articles 16 et 495 du nouveau code de procédure civile, ensemble l'article 6 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
5 / qu'en se bornant à énoncer, à l'appui de sa décision, que "l'ordonnance sur requête critiquée est par essence non contradictoire et ne donne lieu à communication que lors de son exécution, ce qui fût le cas en l'espèce, la signification n'ayant toutefois pu avoir lieu en raison de l'absence de la partie saisie lors de la visite", le tribunal a également violé l'article 544 du code civil, ensemble l'article 1 du Protocole n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu que le vice entachant la notification de l'ordonnance sur requête ayant autorisé un huissier de justice à faire visiter les lieux avant la vente n'est pas une cause de nullité de la procédure de saisie immobilière ;
D'où il suit que le moyen est inopérant ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.