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Décisions

CA Montpellier, 2e ch. civ., 4 juin 2020, n° 19/06938

MONTPELLIER

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Bebon

Conseillers :

Mme Gregori, Mme Sarret

Avocats :

Me Gadel, Me Coderch-Herre

JEX Perpignan, du 7 oct. 2019, n° 19/022…

7 octobre 2019

EXPOSE DU LITIGE

Au cours de l'année 2007, X… a confié la construction de sa maison d'habitation à la SARL GPSB et à Y…, entrepreneur en maçonnerie, chargé du gros oeuvre.

Suite à un certain nombre de désordres invoqués par X…, un litige est survenu entre les parties et a donné lieu à deux expertises successives confiées à Messieurs Philippot et Bec qui ont conclu à la nécessité de reprises.

Par ordonnance en date du 15 juin 2009 rendue par le juge de l'exécution de Perpignan et renouvelée les 4 mai 2012, 13 avril 2015 et 22 mars 2018, X… a été autorisé à prendre une hypothèque judiciaire provisoire sur un immeuble appartenant à Y… et cadastré section AB nº 338 à Cabestany d'une contenance de 8a 97 ca.

Saisi par Y… d'une demande de substitution de cette hypothèque par la garantie d'un séquestre d'une partie du prix de vente entre les mains du notaire chargé de la vente de ce terrain, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Perpignan a, par jugement en date du 7 octobre 2019, fait droit à cette demande et a ainsi :

- ordonné en cas de finalisation de la vente entre Y… et Z… et A… la mainlevée de l'hypothèque judiciaire provisoire prise le 15 juin 2009 par le juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de Perpignan renouvelée les 4 mai 2012, 13 avril 2015 et le 22 mars 2018 en garantie de la somme de 100 000 € sur l'immeuble cadastre section AB nº 338 à CABESTANY, d'une contenance de 8a 97 ca,

- dit que le coût de cette hypothèque et de sa mainlevée seront à la charge de Y…,

- ordonné la mise sous séquestre de la somme de 120 000 euros entre les mains de Me Catherine Picamal notaire à la résidence de CERET, N°10 boulevard Jean Moulin jusqu'à l'obtention d'une décision de justice définitive au fond concernant le litige opposant Y… et X… et relatif à la construction de la maison d'habitation de ce dernier,

- débouté les parties de toutes prétentions plus amples ou contraires,

- condamné Y… aux entiers dépens de l'instance,

- dit que la présente décision sera communiquée à Me Picamal , notaire .

Par déclaration en date du 21 octobre 2019, X… a relevé appel de tous les chefs de cette décision.

Dans ses dernières conclusions du 16 avril 2020, auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, X… demande à la Cour de :

- réformer le jugement dont appel,

- Principalement, débouter Y… de sa demande à voir ordonner la mainlevée de l'hypothèque judiciaire provisoire prise le 15 juin 2009 et renouvelée depuis sur l'immeuble lui appartenant cadastrée Section AB nº 338 à CABESTANY aux fins de garantie de la somme de 100 000 € ,

-Subsidiairement, dans l'hypothèse où la Cour confirmerait le jugement en ce qu'il a ordonné la mainlevée de l'inscription hypothécaire,

- dire et juger que la somme qui sera mise sous séquestre entre les mains de Maître Catherine PICAMAL, notaire à CERET, ne saurait être inférieure à la somme de 200 000 €,

-dans cette hypothèse, dire et juger que les frais d'hypothèque et de sa mainlevée seront à la charge de Y…,

-En toutes hypothèses, condamner Y… à payer à X… la somme de 3 000 € par application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions du 17 avril 2020, auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, Y… demande à la Cour de :

- dire et juger X… irrecevable en sa demande tendant à ce qu'il soit dit et jugé que la somme qui sera mise sous séquestre entre les mains de Maître Catherine PICAMAL, notaire à CÉRET, ne saurait être inférieure à la somme de 200.000 euros, et que dans cette hypothèse les frais d'hypothèque et de mainlevée soient mis à la charge de Y…,

Subsidiairement concernant cette prétention, et en toutes hypothèses concernant le reste,

- confirmer le jugement rendu le 7 octobre 2019 par le juge de l'exécution de Perpignan en toutes ses dispositions, sauf à préciser que la mainlevée de l'hypothèque interviendra en cas de finalisation de la vente entre Y… et la SCI KOSA,

- débouter X… de ses demandes,

- condamner X… à payer à Y… la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles,

- condamner X… aux dépens.

MOTIFS DE LA DECISION

Il convient de rappeler qu'en application de l'article L 511- 1 du code de procédures civiles d'exécution, il n'appartient pas au juge de l'exécution de statuer sur la réalité de la créance ou d'en fixer le montant lorsqu'il est amené à statuer sur les conditions d'une mesure conservatoire autorisée, mais de se prononcer sur le caractère vraisemblable d'un principe de créance .

Il sera ainsi relevé que la demande de substitution d'une autre garantie formée par Y… en application à la consignation d'une somme entre les mains d'un notaire ne remet pas en cause la validité de la mesure conservatoire initiale ni les conditions de son autorisation.

Dans ce cadre, la demande principale soutenue par l'appelant consisterait à lui maintenir le bénéfice de l'hypothèque judiciaire provisoire limitant sa garantie à hauteur de 100 000€.

Toutefois, l'article L 512-1 alinéa 2 du code de procédures civiles d'exécution invoqué par M Y… dispose que le juge de l'exécution peut, à la demande du débiteur, substituer à la mesure conservatoire initialement prise et non contestée dans les conditions de son autorisation, toute autre mesure propre à sauvegarder les intérêts des parties.

Il appartient alors au juge de l'exécution selon les dispositions prévues par l'article R 511-4 et R 511- 5 du même code de préciser les modalités de la mesure qu'il entend autoriser, le débat sur l'insuffisance de la garantie discutée en première instance rendant recevable l'extension de la demande portant sur le montant auquel le créancier entend subordonner à titre subsidiaire la garantie de ses droits.

Pour autant, il sera constaté que la consignation entre les mains du notaire d'une somme de 120 000€ proposée par le débiteur potentiel est dores et déjà supérieure au montant garanti par l'inscription d'hypothèque provisoire initiale.

D'autre part, ce montant est également supérieur à la créance que X… entendait faire valoir sur la base de désordres constatés dans le cadre du rapport d'expertise Philippot et estimés à 115 000€ après apurement des comptes, étant précisé que les dits désordres engagent également la responsabilité de SARL GPSB.

La créance évolutive pour des désordres complémentaires examinés dans le cadre d'un second rapport Bec n'est pas garantie par la mesure initiale; par ailleurs, cet expert constate que les tassements de terrain ayant donné lieu à un certain nombre de fissurations étaient difficilement prévisibles par les entreprises, et que les désordres engagent également la responsabilité SARL GPSB ce qui permettra au maître de l'ouvrage de s'adresser à plusieurs débiteurs pour le recouvrement de sa créance en cas de condamnation.

Enfin, ces deux sociétés sont actuellement in bonis et Y… est dûment assuré par la société Allianz AG ; il n'est nullement acquis qu'il ne pourrait bénéficier de la garantie de son assureur au regard de la nature des désordres et de la police d'assurance qu'il produit aux débats ni que sa solvabilité pour assumer une somme restant à sa charge et excédant le montant du séquestre soit à ce jour en péril.

Dans ces conditions, l'ordonnance sera confirmée dans son intégralité, sauf à substituer la SCI KOSA, futur acquéreur du bien, aux acquéreurs initiaux dans le cadre d'un nouveau compromis de vente en date du 6 janvier 2020.

Les dépens d'appel seront laissés à la charge de X…, qui ne peut revendiquer l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à son profit.

Il sera en revanche condamné à payer à Y… la somme de 1.500€ sur ce même fondement.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme l'ordonnance en toutes ses dispositions, sauf substituer la SCI KOSA à Z… et A…,

Y ajoutant,

Condamne X… à payer à Y… la somme de 1.500€ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute autre demande,

Laisse les dépens d'appel à la charge de X….