Livv
Décisions

CA Paris, Pôle 1 ch. 5, 12 août 2022, n° 22/11725

PARIS

Arrêt

Autre

PARTIES

Défendeur :

Haras des Sources (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Avocats :

Me Sueur, Me Alfonsi, Me Blondel

T. com. Meaux, du 7 juin 2022, n° 202200…

7 juin 2022

Vu les statuts de la société par actions simplifiée Haras des Sources, qui a pour activité 'école élémentaire d'équitation et pensions de chevaux', a été immatriculée le 20 mars 2018 et a été constituée à parts sociales égales entre M. [L] [W], président, et M. [D] [P], directeur général ;

Vu l'assignation en date du 25 mars 2022 au moyen de laquelle M. [L] [W] et la société ont attrait M. [D] [P] devant le juge des référés du tribunal de commerce de Meaux en révocation de son mandat social de directeur général à raison de perte de confiance, d'agissements graves et de fautes de gestion de nature à compromettre le fonctionnement de la société ;

Vu l'ordonnance contradictoire en date du 7 juin 2022 du juge des référés qui a notamment :

- dit n'y avoir lieu à écarter des pièces des débats,

- débouté M. [D] [P] de ses demandes,

- prononcé la révocation judiciaire de M. [D] [P] de son mandat de directeur général et l'a condamné au paiement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu la déclaration d'appel de M. [D] [P] en date du 21 juin 2022 ;

Vu les dernières conclusions en date du 8 août 2022 de M. [D] [P], à la suite de l'assignation qu'il a fait délivrer le 13 juillet 2022 à la société Haras des Sources et à M. [L] [W] au moyen desquelles il sollicite l'arrêt de l'exécution provisoire de l'ordonnance et la condamnation de M. [L] [W] à lui payer la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions en date du 27 juillet 2022 de la société Haras des Sources et de M. [L] [W] qui s'opposent à ces demandes et sollicitent la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

MOTIFS

Dans l'hypothèse d'une ordonnance de référé dont l'exécution provisoire est de droit, son arrêt par le premier président en cas d'appel, est subordonné par l'article 514-3 du code de procédure civile à l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation de la décision entreprise et au risque de conséquences manifestement excessives entraîné par ladite exécution.

En l'espèce, les deux associés se font respectivement et essentiellement griefs pour M. [W] à l'égard de M. [D] [P], d'avoir distrait matériellement et comptablement des sommes remises par chèques et en espèces par les clients de la société comme cela résulterait des attestations produites à telle enseigne que ce dernier aurait représenté, mais seulement après l'introduction de l'action en justice, plus de 12 000 euros, d'avoir profité des équipements et prestations de la société pour les besoins de sa propre entreprise Equitransformance sans contrepartie et pour les besoins d'entretien de ses propres chevaux, pour M. [D] [P] à l'égard de M. [W], d'avoir bénéficié de son logement sur place sans contre partie, d'avoir également appréhendé des sommes revenant à la société et d'avoir mis à la disposition de tiers les installations et prestations de la société sans contrepartie.

Le juge des référés n'a pas pris de mesures justifiées par l'existence d'un différend au sens de l'article 872 du code de procédure civile ou, même en présence d'une contestation sérieuse, pris des mesures conservatoires destinées à faire cesser un trouble manifestement illicite puisqu'il n'a pas prononcé la suspension provisoire des fonctions de directeur général de M. [D] [P] ou encore procédé à la nomination d'un administrateur provisoire mais a prononcé la révocation judiciaire de son mandat social, ce qui revêt un caractère non provisionnel.

S'il est exact que les conditions dans lesquelles les dirigeants d'une société par action simplifiée peuvent être révoqués sont fixées, dans le silence à cet égard des articles L 227-1 et L 227-5 et suivants du code de commerce, par ses statuts qui stipulent en l'espèce en leur article 15 que ' le directeur général et les directeurs généraux délégués sont révocables par le même organe (associé unique ou décision collective des associés prise à la majorité simple) et selon les mêmes règles de quorum et de majorité nécessaire à sa nomination' et que 'le directeur général et les directeurs généraux délégués révoqués sans justes motifs peuvent obtenir des dommages-intérêts. Ils sont également révocables par décision de justice pour cause légitime', la contestation par M. [D] [P] du pouvoir du juge des référés pour y procéder constitue un moyen d'infirmation de l'ordonnance non dénué de sérieux.

En revanche, le risque de conséquences manifestement excessives de l'exécution provisoire dans l'attente de la décision d'appel à intervenir n'est pas démontré dès lors que M. [P] - qui tout comme M. [W] a obtenu le paiement d'une partie de son compte courant d'associé - objective insuffisamment sa situation financière, que les éléments produits sur les comptes récents de la société ne montrent pas un risque de voir le situation comptable et financière de cette dernière compromise étant rappelé que M. [P] dispose de ses droits d'associé et que son éloignement du lieu d'exploitation résulte tant des conséquences déduites par M. [W] de la décision judiciaire entreprise que des relations personnelles désormais gravement compromises entre les deux associés puisqu'il y a lieu d'observer que, postérieurement à l'ordonnance et quelle que soit la véracité des déclarations des parties, M. [P] a déposé une plainte pénale pour la soustraction frauduleuse d'un cheval dont il revendique la propriété et qu'il n'a pu retrouver au haras du fait de M. [W] tandis que ce dernier a déposé une main courant relative à des menaces de 'mettre le feu aux écuries' qui auraient été formulées par M. [P].

En conséquence de ce qui précède, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande d'arrêt de l'exécution provisoire de la décision entreprise, de condamner M. [D] [P] aux dépens de l'incident, l'équité commandant de ne pas prononcer de condamnation en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

- Déboute M. [D] [P] de sa demande tendant à obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire de la décision entreprise ;

- Dit n'y avoir lieu au prononcé d'une condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne M. [D] [P] aux dépens de l'incident.

ORDONNANCE rendue par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.