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Décisions

CA Nîmes, 4e ch. com., 31 mars 2021, n° 20/03071

NÎMES

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Air Tourisme Instruction Service (SARL)

Défendeur :

Green Go Aircraft (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Codol

Conseillers :

M. Gagnaux, Mme Ougier

JEX d’Avignon, du 26 nov. 2020, n° 20/00…

26 novembre 2020

EXPOSÉ

Vu l'appel interjeté le 29 novembre 2020 par la SARL Air Tourisme Instruction Service (ci-après dite société Atis) à l'encontre du jugement prononcé le 26 novembre 2020 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Avignon dans l'instance n°20/00574 ;

Vu l'ordonnance en date du 1er décembre 2020 autorisant la société Atis, sur sa requête, à faire délivrer assignation à jour fixe à la société de droit hongrois Green Go Aircraft (dite société Gga) ;

Vu la signification par acte du 29 décembre 2020, à la demande de la société Atis, du projet d'assignation à jour fixe devant la cour d'appel de Nîmes, de la copie de la déclaration, de la requête et de l'ordonnance autorisant l'assignation à jour fixe, à la société Gga domiciliée à Budapest, Hongrie ;

Vu l'ordonnance de référé en date du 10 février 2021 du premier président de la cour d'appel de Nîmes ordonnant le sursis à exécution du jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Avignon le 26 novembre 2020, déboutant la société Gga de toutes ses demandes et disant n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 16 février 2021 par l'appelante et le bordereau de pièces qui y est annexé ;

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 17 février 2021 par la société Gga, intimée, et le bordereau de pièces qui y est annexé.

Suivant facture du 27 mars 2017, la société Atis -dont le siège social est en Martinique- a acquis auprès de la société de droit hongrois Gga un aéronef de type Cessna citation au prix de 496.000 euros HT.

Le prix a été payé mais l'avion n'a pas été livré comme prévu le 31 aout 2017 et aurait été immobilisé au sein de l'atelier de maintenance d'une société en voie de liquidation judiciaire.

Une mise en demeure de restituer le prix de vente était adressée à la société Gga par courrier du 15 octobre 2018, vainement.

Par acte du 31 décembre 2018, la société Atis faisait assigner la société Gga en résolution de la vente devant le tribunal mixte de commerce de Fort de France.

Sur autorisation du juge de l'exécution du tribunal de grande instance d'Avignon en date du 29 novembre 2018, et par procès verbal du 3 décembre 2018 -dénoncé le 7 décembre 2018, la société Atis a fait pratiquer la saisie conservatoire d'un aéronef Mystère falcon 20-E-5 immatriculé G-OLFE, propriété de la société Gga, stationné à l'aéroport d'Avignon-Provence, pour garantie de sa créance provisoirement évaluée à 500.000 euros.

Par exploit du 21 février 2020, la société Gga a fait assigner la société Atis devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Avignon en contestation de cette saisie conservatoire.

Par jugement en date du 26 novembre 2020, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Avignon a déclaré nulle la saisie conservatoire du 29 novembre 2018, en a ordonné la mainlevée et a enjoint à la société Atis de restituer à la société Gga l'ensemble des documents de l'aéronef, notamment ceux séquestrés par l'huissier de justice instrumentaire Il a débouté les parties de l'ensemble de leurs demandes indemnitaires et condamné la société Atis à payer à la société Gga une somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il a en effet considéré qu'en vertu des dispositions de l'article R123-9 du code de l'aviation civile, les dispositions relatives à la saisie conservatoire d'aéronefs étant dérogatoires aux dispositions de droit commun de la saisie-conservatoire, et la règle de compétence d'attribution d'ordre public, seul le juge du tribunal judiciaire d'Avignon, sur le ressort duquel était stationné l'appareil, était compétent pour en autoriser la saisie-conservatoire.

La société Atis a relevé appel de ce jugement pour voir annuler ou, à tout le moins, réformer le jugement rendu le 26 novembre 2020 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Avignon, en ce qu'il s'est déclaré incompétent au profit du juge du tribunal judiciaire d'Avignon, lieu où se trouve l'aéronef, et a déclaré ce juge seul compétent pour autoriser la saisie-conservatoire, en ce qu'il a déclaré nulle la saisie conservatoire du 29 novembre 2018 autorisée par le juge de l'exécution, ordonné la mainlevée de cette saisie et ordonné la restitution des documents de l'aéronef mais également en ce qu'il a rejeté ses demandes indemnitaires, l'a condamnée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et mis les dépens à sa charge.

En l'état de ses dernières écritures, la société Atis demande à la cour d'appel, au visa des articles L511-1, L511-3, L521-1, R511-1 et suivants, R121-2 et R522-1 du code des procédures civiles d'exécution, de l'article L213-6 du code de l'organisation judiciaire, de l'article 1240 du code civil, et des articles 32-1, 699 et 700 du code de procédure civile, de :

« juger que le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Avignon était compétent pour connaître de la demande de la société Air tourisme instruction service;

juger que la société Air tourisme instruction service fait état d'une créance paraissant fondée en son principe à l'encontre de la société Green go aircraft ;

juger que des menaces pesant sur le recouvrement de la créance de la société Air tourisme instruction service existent ;

juger que la société Green go aircraft a commis une faute en abusant de son droit d'agir ;

En conséquence,

infirmer le jugement rendu le 26 novembre 2020 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Avignon en ce qu'il a:

- statué sur l'incompétence du juge de l'exécution ;

- prononcé la nullité de la saisie conservatoire autorisée le 29 novembre 2018 et réalisée le 3 décembre 2018 par la société Atis ;

- ordonne la mainlevée de la saisie conservatoire autorisée le 29 novembre 2018 et réalisée le 3 décembre 2018 par la société Atis ;

- ordonné la restitution des documents séquestrés par l'huissier de justice instrumentaire à l'occasion de ladite saisie ;

- débouté la société Atis de ses demandes indemnitaires,

- condamné la société Atis sur le fondement des articles 699 et 700 du code de procédure civile,

confirmer le jugement rendu le 26 novembre 2020 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Avignon pour le surplus,

et statuant à nouveau,

sur la compétence matérielle,

dire et juger que le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Avignon était compétent ratione materiae pour connaître de la demande de la société Air tourisme instruction service ;

en conséquence,

rejeter l'exception d'incompétence matérielle soulevée par la société Green go aircraft ;

sur la compétence territoriale

dire et juger que le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Avignon était compétent ratione loci pour connaître de la demande de la société Air tourisme instruction service ;

en conséquence,

rejeter l'exception d'incompétence territoriale soulevée par la société Green go aircraft ;

sur la validité de la saisie pratiquée,

dire et juger que le procès verbal de saisie a été dénoncé à la société Green go aircraft ;

dire et juger que le procès verbal de saisie a été dénoncé au gardien de la chose saisie le 3 décembre 2018 ;

dire et juger que toutes les formalités applicables ont été réalisées ;

dire et juger que l'appareil saisi n'est pas affecté à des transports publics ;

En conséquence,

dire et juger que la saisie pratiquée le 3 décembre 2018 est pleinement valable ;

Sur les circonstances justifiant la saisie conservatoire,

confirmer que la société Air tourisme instruction service fait état d'une créance paraissant fondée en son principe à l'encontre de la société Green go aircraft ;

confirmer l'existence d'une menace pesant sur le recouvrement de la créance de la société Air tourisme instruction service ;

En conséquence,

confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 29 novembre 2018 ayant autorisé la saisie conservatoire de l'aéronef ;

prononcer la validité de la saisie conservatoire réalisée le 3 décembre 2018 par la société Atis ;

ordonner le maintien de la saisie conservatoire réalisée le 3 décembre 2018 par la société Atis ;

ordonner le maintien de tous les documents de l'aéronef, notamment ceux séquestrés par l'huissier de justice instrumentaire ;

condamner la société Green go aircraft à une amende civile de 10.000 euros ;

condamner la société Green go aircraft à verser à la société Air tourisme instruction service une somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

En tout état de cause,

débouter la société Green go aircraft de toutes ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires, outre appel incident ;

condamner la société Green go aircraft à payer une somme de 30.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens. »

La société Atis fait valoir que l'article R123-9 du code de l'aviation civile instituant la compétence du juge d'instance pour autoriser une saisie conservatoire sur un aéronef lorsque le propriétaire de celui-ci n'est pas domicilié en France ou que cet aéronef est de nationalité étrangère, est entré en vigueur avant la promulgation de la loi du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution et créant le juge de l'exécution. Depuis lors, le juge de l'exécution détient une compétence de principe, exclusive, et d'ordre public, conformément aux articles L511-3 du code des procédures civiles d'exécution et L213-6 du code de l'organisation judiciaire, pour autoriser les mesures conservatoires.

C'était donc à juste titre que le juge de l'exécution du tribunal de grande instance d'Avignon avait retenu sa compétence et autorisé la saisie conservatoire le 29 novembre 2018, et à tort que le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Avignon l'a déclaré incompétent par jugement du 26 novembre 2020.

Bien plus, la société Atis fait valoir que les conditions requises par l'article L511-1 du code de procédures civiles d'exécution sont réunies, sa créance paraissant fondée en son principe dès lors que la société Gga a perçu l'intégralité du prix de vente de l'avion sans jamais le livrer à la société Atis et que cette inexécution contractuelle est reconnue par la société Gga, et une menace pesant sur le recouvrement de sa créance, tenant la situation financièrement compromise et sans garantie de solvabilité présentée par la société Gga ainsi que son comportement, le prix de vente versé ayant permis de financer l'acquisition d'autres appareils et le transfert de trésorerie vers une autre société -Green go rent- ainsi que la réalisation de travaux sur un autre aéronef que celui qui était l'objet de la transaction.

Enfin, la société Atis relève les « changements de comportements » du gérant de la société Gga, Monsieur E., qui après être resté taisant face à ses sollicitations, a « refait surface » après la saisie conservatoire en se présentant « dans les locaux de la société Atis sans prévenir le 7 décembre 2018 pour évoquer ce dossier », puis a de nouveau gardé le silence avant d'opérer « une volte face totale (en sollicitant) la réouverture des débats auprès du tribunal mixte de commerce de Fort de France alors que l'affaire avait été plaidée plus d'un mois auparavant, afin de contester les demandes de la société Atis dont il avait auparavant reconnu le bien-fondé, et a saisi le juge de l'exécution de la présente affaire afin de solliciter la mainlevée de la saisie conservatoire pratiquée plus d'un an plus tôt », changements qui renforcent ses inquiétudes.

Elle conclut donc à la validité de la saisie opératoire réalisée, à la régularité des procédures diligentées et conteste tous les moyens soulevés par la partie adverse.

S'agissant de ses demandes indemnitaires, la société Atis soutient que la stratégie de l'intimée a pour objet de semer la confusion, et que sa malveillance comme sa mauvaise foi caractérisent une faute justifiant le prononcé d'une amende civile ainsi que l'octroi de dommages et intérêts à son bénéfice à hauteur de 100.000 euros.

****

La société Gga demande pour sa part à la cour, dans le dispositif de ses dernières écritures, de :

« Vu les articles R123-4, R123-9 et suivants du code de l'aviation civile,

Vu les articles L121-1 et suivants, R121-13, R141-1 et suivants, R511-1 et suivants, R522-5 et suivants du code des procédures civiles d'exécution,

Vu les articles 111 et 1240 du code civil,

Vu les articles 15 et suivants, 54, 59 et suivants, 445 et suivants, 495 et suivants, 648, 687-2, 765 et suivants, 901, 917, 920 et suivants du code de procédure civile,

Vu l'article L213-6 du code de l'organisation judiciaire,

Vu la requête et l'ordonnance autorisant la saisie de l'aéronef immatriculé G-OLFE,

Vu les actes de signification, dénonciation,

Vu les articles 10 et suivants du règlement (CE) n°1393/2007,

Vu l'article 21.4.4 du règlement intérieur national de la profession d'avocat,

Vu le jugement du tribunal judiciaire d'Avignon JEX du 10 juillet 2020,

Vu les sommations de communiquer,

In limine litis,

Dire et juger nulle la déclaration d'appel,

Dire et juger irrecevables en ses demandes la société Air tourisme instruction service,

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Dire et juger la société Green go aircraft recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions, et en son appel incident,

Débouter la société Air tourisme instruction service de toutes ses demandes, fins et conclusions,

Confirmer le jugement rendu entre les parties le 26 novembre 2020 par le juge de l'exécution près le tribunal judiciaire d'Avignon en ce qu'il :

« - Déclare nulle la saisie conservatoire du 29 novembre 2018 autorisée par le juge de l'exécution de ce siège et pratiquée par la société Air tourisme instruction service sur l'aéronef de type Mystère Falcon 20-E-5 immatriculé G-OLFE appartenant à la société Green go aircraft ;

- ordonne la mainlevée de la saisie conservatoire du 29 novembre 2018 autorisée par le juge de l'exécution de ce siège et pratiquée par la société Air tourisme instruction service sur l'aéronef de type Mystère Falcon 20-E-5 immatriculé G-OLFE appartenant à la société Green go aircraft ;

- ordonne à la SARL Air tourisme instruction service de restituer à la société Green go aircraft l'ensemble des documents de l'aéronef, notamment ceux séquestrés par l'huissier de justice instrumentaire,

- dit qu'il ne pourra en être conservé aucune copie,

- déboute la société Air tourisme instruction service de l'ensemble de ses demandes indemnitaires,

- condamne la SARL Air tourisme instruction service à payer à la SARL green go aircraft la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamne la SARL Air tourisme instruction service aux dépens ;

L'infirmer en ce qu'il :

déboute la société Green go aircraft de l'ensemble de ses demandes indemnitaires,

Statuant à nouveau, et y ajoutant,

dire et juger nulle la constitution d'avocat de la société Air tourisme instruction service devant le JEX, et en conséquence constater que la société Air tourisme instruction service n'était pas représentée devant le JEX avec toutes conséquences de droit y afférentes, notamment d'être d'office déclarée irrecevable en sa défense ;

s'entendre condamner la société Air tourisme instruction service à payer et porter à la société Green go aircraft les sommes de 300.000 euros à titre de dommages et intérêts concernant les travaux de remise en état liés à la saisie, 100.000 euros à titre de dommages et intérêts concernant le préjudice commercial, perte de chiffre d'affaire, de bénéfices, atteinte à l'image, 150.000 euros à titre de dommages et intérêts concernant la perte de chance de vendre l'aéronef, 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour l'accroissement des préjudices liés à la prolongation des effets de la saisie inhérents à la présente instance, 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour la résistance abusive et la mauvaise foi, 10.000 euros à titre de dommages et intérêts du chef des préjudices liés à la désorganisation systématique des procédures liées à l'absence du respect de tout contradictoire,

dire et juger qu'au cas où les travaux de remise en état dépasseraient la somme de 300.000 euros, la société Green go aircraft pourra saisir la juridiction par voie de conclusions aux fins d'obtenir une condamnation complémentaire de la société Air tourisme instruction service, et que dès lors l'instance restera pendante y compris pour d'autres sources de préjudices qui pourraient être actualisées à la suite des devis éventuellement complémentaires qui pourraient être nécessaires à la remise en service de l'aéronef,

s'entendre condamner la société Air tourisme instruction service à payer tous les frais liés à l'aéronef immatriculé G-OLFE pour la période entre le 3 décembre 2018 et la mainlevée effective à intervenir qui comprendront notamment les frais liés à la restitution des documents séquestrés par l'huissier, notamment les frais de parking et de hangar,

s'entendre condamner la société Air tourisme instruction service à payer et porter à la société Green go aircraft une somme de 15.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

dire que dans l'hypothèse où, à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées selon la décision à intervenir, l'exécution forcée devrait être réalisée par l'office d'un huissier de justice, le montant des sommes retenues par huissier en application de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret 96-1080 du 12 décembre 1996 (tarif des huissiers) devra être supporté par le débiteur en sus des frais irrépétibles prévus à l'article 700 du code de procédure civile,

s'entendre condamner la société Air tourisme instruction service aux entiers dépens de l'instance qui pourront être recouvrés par Maître P. selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. ».

Dans la discussion de ses conclusions, la société Green go aircraft fait valoir in limine litis,

que la déclaration d'appel est nulle, pour ne pas désigner le représentant légal de la société Atis, pour citer un chef de jugement critiqué inexistant, pour désigner en intimée une SA qui n'existe pas -la société Gga étant une SARL et non une SA,

que l'assignation, la déclaration d'appel et les conclusions de l'appelant ne lui ont pas été régulièrement signifiés et que la Société Atis est donc « irrecevable en ses demandes ».

Sur le fond, elle soutient que la saisie est nulle pour avoir été autorisée par un juge incompétent tant matériellement que territorialement, mais également parce que les conditions de forme prescrites n'auraient pas été respectées et que les conditions de fond exigées ne sont pas remplies, et qu'elle est également caduque puisque, notamment, l'assignation au fond n'aurait pas été dénoncée régulièrement.

Sur son appel incident, elle demande indemnisation des différents préjudices que la saisie diligentée lui a causés.

****

Pour un plus ample exposé il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.

DISCUSSION

Sur la procédure :

* sur la saisine de la cour

L'article 954 du code de procédure civile dispose en ses alinéas 3, 4 et 5 que :

« la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées.

La partie qui conclut à l'infirmation du jugement doit expressément énoncer les moyens qu'elle invoque sans pouvoir procéder par voie de référence à ses conclusions de première instance ».

A ce titre, la cour relève que tous les développements, dans la partie « discussion » des conclusions de la société Green go aircraft, qui tendent à voir constater la caducité de l'ordonnance ayant autorisé la saisie conservatoire de l'aéronef, sont irrecevables dès lors que la Cour n'est saisie dans le dispositif des mêmes écritures d'aucune demande en caducité de cette ordonnance.

De même, si la société Gga se plaint de « la désorganisation procédurale et du non respect du contradictoire », de la violation du devoir de loyauté de la partie adverse ainsi que de « l'absence de tout sérieux dans la rédaction du procès verbal de saisie et dans la conduite de l'huissier », aucune demande relative à des tels incidents n'y fait écho dans le dispositif de ces mêmes conclusions de telle sorte que la Cour n'en est pas davantage régulièrement saisie.

* sur la nullité de la déclaration d'appel :

L'intimée soutient que la déclaration d'appel serait nulle en ce qu'elle ne désigne pas le représentant légal de la société Atis par l'organe qui la représente légalement, c'est à dire son gérant, mais par la formule « désuète » : « son représentant en exercice ». Elle en conclut que ce n'est pas conforme aux dispositions des articles 54, 648 et 901 du code de procédure civile, et considère qu'il s'agit d'erreurs « volontaires et malignes » pour entraver l'exécution à venir, le grief étant constitué par « la cacophonie procédurale organisée avec maestria par celui qui se prétend appelant ».

L'intimée se prévaut également de ce que la déclaration d'appel mentionnerait parmi les chefs de jugement critiqués le fait qu'il se serait « déclaré incompétent au profit du juge du tribunal judiciaire d'Avignon, lieu où se trouve l'aéronef » et déclaré ce juge « seul compétent pour autoriser la saisie conservatoire », tous éléments qui ne se trouvent de fait pas dans le dispositif de la décision querellée.

Enfin, la société Gga fait valoir que l'appel aurait été formé contre une société qui n'existe pas : la SA de droit hongrois Green go aircraft, puisque la société Gga est en réalité une SARL. Elle en déduite que cette mention « sciemment erronée » démontre que les traductions non assermentées des documents ne sont pas recevables et qu'il s'agit également là d' « erreurs volontaires et malignes d'identification » ayant pour but d'ouvrir une possibilité de contestation en vue d'entraver l'exécution à venir. Elle conclut à ce titre également à la nullité de la déclaration d'appel.

L'appelante s'oppose aux moyens soulevés en relevant que toutes les mentions obligatoires citées par l'article 901 du code de procédure civile sont portées à la déclaration d'appel et que les erreurs dont l'intimée prend argument ne sont que des vices de forme desquels aucun grief n'a pu résulter.

Dans sa version en vigueur au 29 novembre 2020, l'article 901 du code de procédure civile disposait que « la déclaration d'appel est faite par acte contenant, outre les mentions prescrites par l'article 57, et à peine de nullité :(...) 4° les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible. »

L'article 57 auquel il est ainsi renvoyé exige à peine de nullité que soient précisées dans l'acte, « outre les mentions énoncées à l'article 54 », « l'indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée ou s'il s'agit d'une personne morale, de sa dénomination et de son siège social ».

Enfin, l'article 54 précise qu'à peine de nullité, la demande mentionne notamment « b) pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l'organe qui les représente légalement ; »

A la lecture de la déclaration d'appel en date du 29 novembre 2020 de la société Atis, il apparaît tout d'abord que tous les chefs du jugement expressément critiqués sont cités, la mention effectivement surabondante de certains éléments relevant de la motivation de la décision attaquée et non pas de son dispositif n'étant en tout état de cause prohibée par aucun des textes cités.

Dans cette déclaration d'appel, l'intimée est mentionnée comme la « société Green go aircraft, société anonyme de droit hongrois, ayant son siège social Szilagyi Dezsö tér 1. 2. Em. A Budapest 1011 BUDAPEST (Hongrie), et enregistrée sous le numéro 01 09 204852 le 9 avril 2015, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité en son siège social ».

L'erreur, dans la désignation de l'organe représentant légalement une personne morale dans un acte d'appel, comme dans l'indication de sa forme sociale, ne constitue qu'un vice de forme dont la nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver l'existence d'un grief.

Le grief qu'invoque l'intimée ne procède que d'une mauvaise intention qu'il prête à l'appelant, sans en justifier d'ailleurs le bien-fondé.

Dès lors que la société Gga était parfaitement identifiable et identifiée tant par sa dénomination que par l'adresse de son siège social ou ses date et numéro d'enregistrement, l'existence de ce grief n'est pas établie et les moyens soulevés ne peuvent ainsi qu'être rejetés.

Les mêmes moyens de nullité tenant à l'erreur sur la forme sociale de la société Gga ou sur la désignation de son représentant, sont soulevés par l'intimé d'une part pour soutenir la nullité de l'ordonnance autorisant la saisie (page 47 des conclusions de la société Gga), et d'autre part pour conclure à la nullité de la constitution de la société Atis devant le juge de l'exécution (page 49 des mêmes écritures).

Ils sont rejetés au bénéfice des mêmes explications s'agissant de vices de forme dont il n'est nullement démontré qu'ils aient pu causer un quelconque grief à la société Gga, étant relevé que les exigences posées par l'article 765 du code de procédure civile sont littéralement les mêmes sur ce point que celles de l'article 54 précité (« la constitution de l'avocat par le défendeur (') indique : (') b) si le défendeur est une personne morale, sa forme, sa dénomination, son siège social et l'organe qui le représente légalement. »).

* sur l'irrecevabilité des demandes en ce que l'assignation à jour fixe, la déclaration d'appel et les conclusions de l'appelante n'auraient pas été signifiées à l'intimée :

La société Gga soutient qu'en application de l'article 687-2 du code de procédure civile, la date de notification des actes à l'étranger est celle à laquelle l'acte est remis à son destinataire, qu'en vertu du règlement CE n°1393/2007 un formulaire type confirmant l'accomplissement des formalités de signification doit être établi, et qu'à défaut tant du bordereau de signification des actes que dudit formulaire, il n'est pas valablement justifié de cette signification.

A l'inverse, la société Atis fait valoir que dans le cadre de la signification d'actes à l'étranger, il appartient seulement au demandeur de transmettre les actes judiciaires aux entités requises dans le pays où est domicilié le défendeur, les entités requises étant seules ensuite en charge de diligenter la signification.

Elle soutient au visa de l'article 114 du code de procédure civile que l'inobservation des formalités prescrites par les articles 647-1, 686 et 688 du même code ne sont cause de nullité que si un grief est établi.

La société Atis affirme qu'en l'espèce, la requête, l' autorisation et l'assignation à jour fixe, ainsi que la déclaration d'appel, le jugement attaqué et ses conclusions ont été transmis aux autorités compétentes en Hongrie le 29 décembre 2020, que cette signification a été doublée d'une transmission par courrier recommandé adressé à la société Gga et que les mêmes actes ont été communiqués d'avocat à avocat.

En tout état de cause, elle déduit des nombreuses pages de conclusions de l'intimé l'absence de tout grief, celui ci ayant manifestement eu connaissance de tous les éléments au dossier.

Selon le document produit en pièce 35 par l'appelante, et par « acte d'attestation de transmission de demande de signification ou de notification dans un autre Etat membre » en date du 29 décembre 2020, la société Fradin Tronel Sassard et associés, huissiers de justice associés, atteste avoir accompli à cette date « les formalités prévues par les articles 4§3 et 9§2 du règlement (CE) n°1393/2007 du parlement européen et du conseil du 13 novembre 2007 relatif à la signification et à la notification dans les Etats membres des actes judiciaires et extrajudiciaires ».

A cet effet, elle mentionne avoir adressé par courrier recommandé avec demande d'avis de réception à l'entité requise à Budapest en Hongrie :

- le formulaire prévu par l'article 4§3 du règlement, dûment complété,

- le projet d'acte, en double exemplaire, de : assignation à jour fixe devant la cour d'appel de Nîmes,

- double exemplaire de la copie de la déclaration d'appel effectuée par la partie requérante au greffe de la cour d'appel de Nîmes (France) le 29/11/2020 à 17h12 pour l'appel enregistré sous le numéro RG 20/03071 contre une décision rendue par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Avignon (France) en date du 26/11/2020 enregistrée sous le numéro RG 20/00574,

- double exemplaire de la copie de la requête aux fins d'assignation à jour fixe établie par Maître V. Emmanuelle, avocat au barreau de Nîmes (France), sur 10 pages et de l'ordonnance rendue sur cette requête par la présidente de chambre agissant sur délégation de Monsieur le premier président de la cour d'appel de Nîmes (France) en date du 01/12/2020,

- double exemplaire de la copie d'une décision rendue contradictoirement et en premier ressort par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Avignon (France) en date du 26/11/2020, enregistrée sous le numéro RG 20/00574,

- double exemplaire de la copie des conclusions d'appel transmises au greffe de la cour d'appel de Nîmes (France) par RPVA le 29/11/2020, établies par Maître V. Emmanuelle, avocat au barreau de Nîmes (France), sur 22 pages, dans le cadre d'une procédure opposant le destinataire de l'acte à la partie requérante par devant la 4ème chambre de la cour d'appel de Nîmes (France), en vue de l'audience du 11/02/2021 à 14h30,

ainsi que double exemplaire de la traduction en langue hongroise de chacune de ces pièces, et ce, afin de signification ou de notification à la société Green go aircraft à son siège à Budapest en Hongrie.

Par le même acte, les huissiers de justice précités attestent également, « conformément à l'article 14 du règlement (CE) n°1393/2007 du 13 novembre 2007, avoir adressé le 29/12/2020, par courrier recommandé avec demande d'avis de réception, directement au destinataire les mêmes pièces (sauf formulaire de l'article 4§3) ainsi que le formulaire type figurant à l'annexe II du règlement, conformément aux article 8 paragraphes 1 et 3 du règlement, dans toutes ses versions linguistiques ».

En application de l'article 7 du règlement 1393/2007, c'est à l'entité requise en Hongrie qu'il appartient de procéder ou faire procéder à la signification ou à la notification de l'acte, et de prendre « toutes les mesures nécessaires » pour assurer que ce soit fait « dans les meilleurs délais et, en tout état de cause, dans un délai d'un mois à compter de la réception ».

Si, en vertu de l'article 10 du même règlement européen, une attestation confirmant l'accomplissement des formalités relatives à la signification ou à la notification de l'acte doit être établie au moyen d'un formulaire type et adressée à l'entité d'origine, l'omission d'un formulaire préconisé dans ce règlement n'est pas cause de nullité de la procédure de signification ou notification dans la mesure où ce serait précisément incompatible avec l'objectif de célérité et d'efficacité poursuivi.

arrêts de la cour de justice de l'union européenne en date du 16 septembre 2015 (n°C-519/13) et 2 mars 2017 (C354/15) notamment

Enfin, selon le dernier alinéa de l'article 687-2 du code de procédure civile, lorsqu'aucune attestation décrivant l'exécution de la demande n'a pu être obtenue des autorités étrangères compétentes, la notification est réputée avoir été effectuée à la date à laquelle l'acte leur a été envoyé.

Tous ces éléments permettent de retenir que la signification à l'intimée de l'assignation à jour fixe ainsi que de la requête déposée en ce sens et de l' autorisation accordée, de la déclaration d'appel, du jugement attaqué et des conclusions de l'appelante a bel et bien été régulièrement diligentée à l'initiative de la société Atis.

Les conclusions de la société Gga démontrent en elles-mêmes, par les éléments s'y rapportant qu'elles citent, que ces pièces ont bien été reçues et examinées.

Et la seule absence d'une attestation le confirmant ou du formulaire préconisé par le règlement applicable n'est pas de nature à affecter la validité ni la recevabilité de la procédure et des demandes de l'appelante.

Sur le fond :

* sur la validité de la saisie :

juge compétent :

Selon l'intimée, la saisie conservatoire réalisée le 3 décembre 2018 serait nulle pour avoir été autorisée par un juge doublement incompétent, matériellement et territorialement.

L'appelante conteste précisément la décision de première instance en ce qu'elle a déclaré la saisie nulle pour avoir été autorisée par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance d'Avignon quand elle aurait du l'être par le juge d'instance d'Avignon.

L'article R123-9 du code de l'aviation civile dispose en son premier alinea, et dans sa version applicable à la date de l' autorisation (29/11/2018), que « lorsque le propriétaire de l'aéronef n'est pas domicilié en France ou que l'aéronef est de nationalité étrangère, tout créancier a le droit de pratiquer une saisie conservatoire avec l' autorisation du juge d'instance du lieu où l'appareil a atterri ».

Il est acquis que le propriétaire de l'aéronef, la société Gga n'est pas domiciliée en France mais en Hongrie, l'aéronef étant de surcroît de nationalité étrangère.

Ce texte règlementaire de l'aviation civile est donc par principe applicable à l'espèce.

Pour autant, s'agissant des règles de compétence, l'article R121-4 du code de procédure civile les définit comme étant d'ordre public, c'est à dire s'imposant par préférence à toute autre ; et l'article R121-1 du même code précise que « en matière de compétence d'attribution, tout juge autre que le juge de l'exécution doit relever d'office son incompétence ».

Or, en vertu de l'article L213-6 du code de l'organisation judiciaire, le juge de l'exécution autorise de manière exclusive les mesures conservatoires.

Si une dérogation à cette exclusivité est posée par l'article L721-7 du code de commerce -et reprise par l'article L511-3 du code des procédures civiles d'exécution, elle est expresse et précisément définie : le président du tribunal de commerce peut connaître concurremment avec le juge de l'exécution des demandes d' autorisation aux fins de saisie conservatoire portant -notamment- sur les aéronefs, lorsqu'elles tendent à la conservation d'une créance relevant de la compétence de la juridiction commerciale et qu'elles sont demandées avant tout procès.

Cet article du code de commerce précise que c'est « dans les cas et conditions prévus par le code de l'aviation civile » dès lors que les règles de procédure et de fond fixées par ce code sont -à la différence des règles de compétence en vertu de l'article R121-4 précité, spécialement applicables aux mesures conservatoires portant sur les aéronefs.

Un texte règlementaire même spécial ne peut trouver application face à des articles législatifs plus récents et expressément déclarés d'ordre public.

Et aucun argument utile ne peut être déduit de la modification intervenue par décret du 18 septembre 2019 quant à la rédaction de l'article R123-9 du code de l'aviation civile puisque si, à la désignation du « juge d'instance », succède désormais celle du « juge du tribunal judiciaire », le juge de l'exécution n'en demeure pas moins l'un des juges du tribunal judiciaire en vertu de l'article 213-5 du code de l'organisation judiciaire.

L'article R121-2 du code des procédures civiles d'exécution dispose que « si le débiteur demeure à l'étranger ou si le lieu où il demeure est inconnu, le juge compétent est celui du lieu d'exécution de la mesure ».

Ce texte de compétence étant, en vertu de l'article R121-4 du même code, d'ordre public, et l'aéronef ayant été saisi à l'aéroport Avignon-Provence, c'est bien le juge de l'exécution d'Avignon qui était compétent le 29 novembre 2018 pour autoriser la saisie conservatoire de l'aéronef de la société Gga.

conditions de forme :

Selon l'intimée, la saisie serait nulle parce que la saisie et l'assignation au fond ne lui auraient pas été signifiées, parce que le service en charge du registre des immatriculations n'en aurait pas été informé, et parce que la mention du juge devant lequel un recours pourrait être intenté serait erronée -ce dernier moyen devant immédiatement être écarté dès lors qu'il a été précédemment retenu que le juge de l'exécution d'Avignon était compétent tant pour autoriser la saisie que pour en connaître des contestations.

Il est encore argué de l'absence de dénonciation de l'assignation au fond au gardien en vertu de l'article R511-7 et -8 du code des procédures civiles d'exécution mais aux fins de caducité de l'ordonnance -caducité qui n'est pas demandée, et la cour n'est dès lors pas régulièrement saisie de ce moyen comme il a été précédemment rappelé.

La société Atis soutient pour sa part justifier par la production de ses pièces 27, 43 et 44 de la signification au saisi tant de la saisie elle-même que de l'assignation au fond, et considère que l'article R123-4 du code de l'aviation civile qui prescrit la dénonciation au registre des immatriculations n'est pas applicable en l'espèce puisqu'il concerne les saisie et vente forcées d'aéronef, et non leur saisie conservatoire.

Selon l'acte de transmission de la demande de signification ou de notification dans un autre Etat membre en application du règlement (CE) n°1393/2007 du parlement européen et du conseil du 13 novembre 2007 dressé le 7 décembre 2018 et produit par l'appelante en pièce 19, Maître T., huissier de justice à la résidence de Nanterre, « atteste avoir accompli ce jour les formalités prévues par les articles 4§3 et 9§2 du règlement » (précité) et avoir à cet effet, « adressé par lettre recommandée avec accusé de réception à l'entité requise » à Budapest, « le formulaire F1 prévu par l'article 4§3 du règlement dûment complété », ainsi que « un projet d'acte de signification d'une saisie conservatoire de saisie d'aéronef et les pièces annexées à l'acte en double exemplaire, en langue française et traduit en langue hongroise ». Il précise avoir également adressé par lettre recommandée avec accusé de réception au destinataire, une copie certifiée conforme de l'acte, conformément aux dispositions de l'article 686 du code de procédure civile.

L'appelante produit encore en pièce 27 une attestation en date du 19 mai 2020 confirmant l'accomplissement au 14 janvier 2019 de la signification de l'acte de saisie à la société Green go aircraft par remise à une autre personne, « the company house Kft », attestation adressée en pièce jointe du mail de l'huissier de justice Maître T. daté du 18 juin 2020 et délivrée en application de l'article 10 du règlement CE 1393/2007. Et en pièce 43 figure l'accusé de réception par cette personne qui déclare être le « chargé de réception, gérant de The Company house Kft » et s'engager à transmettre l'acte à son destinataire. Surabondamment il peut être observé que cette société The company house est désignée comme « société mandatée pour la prestation » et « représentant autorisé » dans les renseignements officiels recueillis sur la société Gga (pièce 2 de l'appelante).

Selon l'acte de transmission de la demande de signification ou de notification dans un autre Etat membre en application du règlement (CE) n°1393/2007 du parlement européen et du conseil du 13 novembre 2007, dressé le 31 décembre 2018 et produit par l'appelante en pièce 20, le même huissier de justice à la résidence de Nanterre, « atteste avoir accompli ce jour les formalités prévues par les articles 4§3 et 9§2 du règlement » (précité) et avoir à cet effet, « adressé par lettre recommandée avec accusé de réception à l'entité requise » à Budapest, « le formulaire F1 prévu par l'article 4§3 du règlement dûment complété », ainsi que « un projet d'acte d'assignation devant le tribunal de commerce, en langue française, traduit en langue hongroise ». Il précise avoir également adressé par lettre recommandée avec accusé de réception au destinataire, une copie certifiée conforme de l'acte, conformément aux dispositions de l'article 686 du code de procédure civile.

Au regard du dernier alinéa de l'article 687-2 du code de procédure civile, et au bénéfice des considérations développées lors de l'examen de la recevabilité des demandes, il ressort de tous ces éléments que la dénonciation de la saisie conservatoire comme la signification de l'assignation au fond ont été régulièrement diligentées par la société Atis.

Et la société Gga en a manifestement eu connaissance en temps utile puisque l'instance au fond est toujours en cours selon ce qu'indiquent les parties, et que l'intimée a pu contester devant le juge de l'exécution la saisie conservatoire diligentée sur son aéronef.

Par ailleurs, l'article R123-4 du code de l'aviation civile dont se prévaut la société Gga est inséré dans le chapitre intitulé « saisie et vente forcée des aéronefs », entre l'article R123-3 qui impose au créancier saisissant de faire citer le propriétaire devant le tribunal de grande instance du lieu où la vente est poursuivie, « pour dire qu'il sera procédé à la vente », et l'article R123-5 qui dispose des modalités par lesquelles il est procédé à la vente et à la fixation de la mise à prix. Dès lors, lorsqu'il mentionne que « le procès verbal de saisie est transcrit au bureau chargé de la tenue du registre d 'immatriculation dans le délai de cinq jours francs augmenté des délais de distance », il s'agit clairement de la saisie vente de l'aéronef, par distinction de la « saisie conservatoire » expressément citée par l'article R123-9 suivant.

Bien plus, cette transcription se fait aux diligences de l'huissier instrumentaire en application des articles D123-1 et D123-2 du code de l'aviation civile, sans que cette formalité soit d'ailleurs imposée comme une condition de validité de la saisie.

Force est ainsi de constater que la saisie conservatoire n'a pas été diligentée le 3 décembre 2018 en violation des règles de procédure comme le soutient l'intimée.

conditions de fond :

Selon l'article L511-1 du code des procédures civiles d'exécution, « toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge l' autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement ».

La première condition ne suppose pas l'existence d'une créance certaine, liquide et exigible mais seulement une apparence de fondement de la créance.

En l'espèce, il ressort de la lecture de la facture proforma n°17T22FP3 établie le 27 mars 2017 par la société Green go aircraft à l'adresse de la société Atis et portant le « bon pour accord » ainsi que la signature et le sceau de cette dernière à la date du 31 mars 2017, que leur accord porte sur la vente d'un aéronef Cessna Citation II, C550 précisément cité, avec deux options supplémentaires, pour un prix total de 496.000 euros, à livrer en Martinique le 31 août 2017.

Il n'est pas contesté par les parties que l'avion n'a pas été livré par la société Gga à cette date, ni même après. Ce faisant, quand bien même l'aéronef aurait été immatriculé au nom de son nouvel acquéreur, ce dernier n'a pas été mis en possession physique de son bien et la livraison convenue n'a pas été réalisée.

Il n'est pas davantage contesté que le prix a été en revanche intégralement payé par la société Atis.

Il existe donc une apparence objective de créance fondée dans son principe de la société Atis sur la société Gga, suffisante pour constituer la première condition citée, toutes les contestations élevées par l'intimée quant la réalité de cette créance relevant du débat au fond dont le tribunal mixte de commerce de Fort de France est saisi.

De même, s'agissant des circonstances susceptibles de menacer le recouvrement de cette créance, il en est suffisamment justifié par l'appelante.

Ainsi, si la société Gga conteste être en difficulté financière, elle ne remet pas en cause les chiffres produits en pièce 2 qui révèlent un résultat d'exploitation dont le déficit s'aggrave de 2015 à 2016, ni ne communique des éléments de comptabilité de nature à rassurer l'appelante.

Il convient en outre de relever que l'activité de la société Gga porte sur la location de véhicules de tourisme, la location de véhicules au delà de 3,5 tonnes et la location de moyens de transport aérien (pièce 2 de l'appelante également), qu'elle revendique dans ses conclusions la seule propriété de plusieurs aéronefs comme patrimoine. Or par nature il s'agit de biens meubles mobiles et, pour les plus conséquents financièrement, volatils au sens strict du terme, de telle sorte que l'assiette sur laquelle porterait le recouvrement de ladite créance est extrêmement précaire et difficile à appréhender.

C'est donc à juste titre que la saisie conservatoire de l'aéronef a été autorisée, les conditions prescrites par l'article précité étant remplies.

disproportion de la valeur du bien saisi :

C'est vainement qu'il est argué en l'espèce d'une telle disproportion alors que, selon les dispositions de l'article R123-9 du code de l'aviation civile, il appartenait à la société Gga d'offrir de déposer un cautionnement égal au montant de la créance réclamée auprès de la caisse des dépôts et consignations, pour que cette saisie soit de plein droit levée (« le juge saisi doit donner mainlevée de la saisie... »).

La carence de la société Gga à formuler une telle offre, outre le fait qu'elle accrédite l'existence d'une menace pesant sur le recouvrement de la créance revendiquée par la société Atis, démontre que la valeur de l'aéronef saisi ne mérite pas qu'une somme bien moindre soit immobilisée.

En conclusion, il convient ainsi d'infirmer le jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Avignon le 26 novembre 2020 et de rejeter les contestations élevées relativement à la saisie conservatoire pratiquée le 3 décembre 2018, celle-ci étant régulière et valide.

* sur les demandes en indemnisation et amende civile :

S'agissant des prétentions indemnitaires de la société Gga, elles ne peuvent qu'être rejetées, dans la mesure où elles correspondent aux conséquences d'une saisie conservatoire dont la demande en nullité et mainlevée est, au principal, déboutée.

Il n'est par ailleurs justifié par l'appelante d'aucune faute qu'aurait commise la société Gga dans l'exercice de ses droits, ni d'aucun excès ou abus dans le recours qu'elle a entrepris pour contester la saisie conservatoire diligentée sur son aéronef. Les demandes en amende civile comme en dommages et intérêts à ce titre ne peuvent donc qu'être également rejetées.

Sur les frais de l'instance :

La société Green go aircraft, qui succombe, devra supporter les dépens de première instance et d'appel, et payer à la société Atis une somme équitablement arbitrée à 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

Rejette les demandes en nullité de la déclaration d'appel et de la constitution de la société Atis,

Déclare les demandes de la société Atis recevables,

Dit que le juge de l'exécution d'Avignon était compétent pour autoriser le 29 novembre 2018 la saisie conservatoire de l'aéronef Mystère falcon 20-E-5 immatriculé G-OLFE, propriété de la société Gga, stationné à l'aéroport d'Avignon-provence, réalisée le 3 décembre 2018,

Déclare cette saisie conservatoire régulière et fondée, et rejette en conséquence les demandes en nullité et mainlevée de cette saisie conservatoire,

Rejette les demandes d'indemnisations formulées,

Dit n'y avoir lieu au prononcé d'une amende civile,

Dit que la société Green go aircraft supportera les dépens de première instance et d'appel et payera à la société Atis une somme de 2.500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.