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Décisions

Cass. 1re civ., 12 septembre 2018, n° 17-19.490

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

Paris, du 14 fév. 2017

14 février 2017

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que D... Z..., auteur-interprète de sketches et de chansons, et interprète d'oeuvres dont il n'était pas l'auteur, sous le pseudonyme G..., avait conclu avec la société Productions et éditions Paul B... (la société PPL), des contrats d'enregistrement en tant qu'artiste-interprète et des contrats de cession et d'édition des oeuvres dont il était l'auteur ; que, le 3 décembre 1981, il a divorcé de Véronique X... qui a reçu, au titre du partage des acquêts de communauté, la totalité des redevances attachées à l'exploitation des enregistrements phonographiques effectués en tant qu'interprète par son ex-époux entre le 16 octobre 1975 et le 15 mai 1981, ainsi que la totalité des droits d'auteur relatifs aux oeuvres publiées ou déclarées au répertoire des sociétés d'auteurs pendant la même période ; que D... Z... est décédé le [...], laissant pour héritiers ses deux fils, MM. Y... et H... Z... (les consorts Z...) ; que ces derniers et Véronique X... ont assigné la société PPL, en présence de M. A..., auteur de la musique de certaines des chansons en cause, aux fins de voir juger, d'une part, que trente-et-un enregistrements de D... Z... effectués avant le 16 octobre 1975 et après le 15 mai 1981 relèvent de la succession de ce dernier et que la société PPL est tenue de régler aux consorts Z... les redevances provenant de la vente des phonogrammes et de l'exploitation de ces enregistrements, d'autre part, que celle-ci a manqué à son obligation d'exploiter les oeuvres et enregistrements de G... afférents à la période comprise entre 1993 et 1995, et qu'elle leur doit réparation de ce chef ;

Sur les deuxième et cinquième moyens, ci-après annexés :

Attendu que ces moyens ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le premier moyen :

Attendu que les consorts Z... font grief à l'arrêt de statuer sur les demandes, alors, selon le moyen, que les conclusions postérieures à l'ordonnance de clôture, par lesquelles une partie demande la révocation de celle-ci, sont recevables ; qu'en ne visant, pour statuer sur les demandes respectives des parties, que les conclusions déposées le 13 novembre 2015 par la société PPL et le 10 novembre 2015 par les consorts Z... et Véronique X..., sans se prononcer sur les conclusions déposées par ces derniers le 19 novembre 2015, par lesquelles ils ont sollicité la révocation de l'ordonnance de clôture prononcée le 17 novembre 2015, la cour d'appel a violé les articles 16 et 783 du code de procédure civile ;

Mais attendu que la demande de rabat de l'ordonnance de clôture n'avait été formée que par des conclusions spécialement adressées au conseiller de la mise en état, de sorte qu'en l'absence de décision de celui-ci, les consorts Z... avaient la possibilité de réitérer cette demande devant la formation de jugement ; qu'il ne saurait donc être fait grief à cette dernière de ne pas avoir statué sur une demande qui ne lui était pas adressée ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que les consorts Z... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande formée au titre d'un défaut d'exploitation, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; qu'il résulte tableau reproduit en page 101 du rapport d'expertise que durant les années 1993, 1994, 1995 et 1996, l'album intitulé « Les inoubliables » a été vendu à 31 812 exemplaires (8 627 + 11 178 + 8 982 + 3 025), celui intitulé « L'intégrale » à 16 555 exemplaires (9 433 + 2 922 + 4 200) et celui intitulé « Les irrésistibles » à 129 658 exemplaires, soit un total de 178 025 exemplaires sur l'ensemble de la période ; qu'en retenant, pour débouter les consorts Z... de leur demande indemnitaire au titre d'une insuffisance de l'exploitation des enregistrements et oeuvres de G... durant cette période, que s'agissant de l'exploitation phonographique, il ressort du rapport d'expertise que 178 025 exemplaires du disque « Les inoubliables » ont été vendus, de même que 130 000 exemplaires de l'album « Les irrésistibles », la cour d'appel a dénaturé ledit rapport en violation du principe susvisé ;

2°/ que l'éditeur est tenu d'assurer à l'oeuvre une exploitation permanente et suivie et une diffusion commerciale, conformément aux usages de la profession ; que le producteur a également l'obligation d'exploiter les enregistrements qu'il a produits ; qu'en retenant, pour débouter les consorts Z... de leurs demandes indemnitaires au titre d'une insuffisance de l'exploitation des enregistrements et oeuvres de G... durant les années 1993 à 1996, que l'exploitation moindre du catalogue pendant cette période peut s'expliquer par les relations conflictuelles entre les parties ayant pu entraîner une réaction attentiste de la société PPL, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à exclure un manquement de cette société en violation de l'article L. 132-12 du code de la propriété intellectuelle, ensemble l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil ;

3°/ que les juges du fond ne peuvent statuer par voie de simple affirmation, sans indiquer les éléments de preuve sur lesquels ils se fondent pour tenir un fait pour établi ; qu'en se bornant à affirmer, pour débouter les consorts Z... de leurs demandes indemnitaires au titre d'une insuffisance de l'exploitation des enregistrements et oeuvres de G... durant les années 1993 à 1996, que l'exploitation moindre du catalogue pendant cette période peut s'expliquer par une conjoncture économique moins propice aux ventes, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant constaté que les enregistrements litigieux avaient été exploités pendant la période considérée et avaient fait l'objet d'une exploitation accessoire sous forme graphique des oeuvres dans deux ouvrages, la cour d'appel a pu en déduire que la réalité de l'exploitation des oeuvres, ainsi établie, excluait tout manquement contractuel de la part de la société PPL ; que le moyen, inopérant en ce qu'il critique des motifs surabondants en ses deuxième et troisième branches, est sans portée en sa première ;

Mais sur le troisième moyen, pris en sa troisième branche :

Vu l'article L. 212-3 du code de la propriété intellectuelle ;

Attendu que, selon l'alinéa 1er de ce texte, sont soumises à l'autorisation écrite de l'artiste-interprète la fixation de sa prestation, sa reproduction et sa communication au public, ainsi que toute utilisation séparée du son et de l'image de la prestation lorsque celle-ci a été fixée à la fois pour le son et l'image ; que la fixation est constituée par la première incorporation de la prestation de l'artiste dans un support ;

Attendu que, pour rejeter les demandes des consorts Z... au titre des neuf sketches, [...] l'arrêt retient que la fixation doit permettre la communication de l'oeuvre au public dans la mesure où ce qui déclenche l'application du droit est un acte d'exploitation, qu'ainsi la simple captation du son ne constitue pas une fixation, dès lors que ce son doit être ensuite travaillé en vue de l'établissement du master permettant la reproduction en nombre, qu'ainsi la fixation se définit comme l'acte d'exploitation qui marque le terme des opérations de production, entendues comme un processus de mise en forme technique et artistique impliquant différentes opérations sur divers enregistrements, et qu'en conséquence, la date de fixation pour chacun des sketches litigieux est celle du master ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du troisième moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que n'est pas rapportée la preuve que les neuf sketches figurant sur le phonogramme "Enregistrement public volume 2" [...] ont été fixés, au sens du jugement entrepris et de l'arrêt, antérieurement au 15 octobre 1975, l'arrêt rendu le 14 février 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Condamne la société Productions et éditions Paul B... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à MM. Y... et H... Z..., agissant tant en leur nom personnel qu'ès qualités, la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze septembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour MM. Y... et H... Z..., agissant tant en leur nom personnel qu'ès qualités.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré Mme Véronique X... et les consorts Z... irrecevables en l'ensemble de leurs demandes de résiliation et/ou résolution des contrats d'enregistrement, de cession et d'édition conclus par D... Z..., dit G..., comme étant des prétentions nouvelles en cause d'appel, d'avoir dit qu'il n'est pas rapporté la preuve par les consorts Z... et Mme Véronique X... de ce que les neuf sketches figurant sur le phonogramme « enregistrement public, volume 2 » ont été fixés, au sens du jugement entrepris et du présent arrêt, antérieurement au 15 octobre 1975, d'avoir débouté les consorts Z... de leurs demandes en paiement relatives au titre de ventes du sketch [...] et au titre des ventes des références RCA MLP et MLPK numéros 1001, 1002, 1004, 1007, 1008, 1009 et 1010, en conséquence d'avoir condamné la société Productions et Editions Paul B... à payer aux consorts Z... la seule somme de 409 268, 88 euros au titre des redevances dues sur les 12 sketches fixés avant le 15 octobre 1975 ou après le 15 mai 1981, pour la période comprise entre le troisième trimestre 1987 et le 15 janvier 2009, d'avoir condamné la société PPL à payer aux consorts Z... une redevance de 15% sur l'exploitation des seuls douze enregistrements susdits pour la période postérieure au 17 septembre 2009 jusqu'au jour de l'arrêt, d'avoir fait injonction à la société PPL de communiquer aux consorts Z... l'ensemble des décomptes relatifs à ces seuls douze enregistrements depuis le 17 septembre 2009 jusqu'au jour de l'arrêt, d'avoir condamné la société PPL à payer aux consorts Z... la seule somme de 20 000 euros à titre de provision à valoir sur le paiement définitif des redevances qui leur sont dues pour la période postérieure au 17 septembre 2009 jusqu'à l'arrêt, d'avoir, confirmant le jugement, rejeté la demande formée par les consorts Z... au titre d'un défaut d'exploitation, enfin d'avoir débouté les consorts Z... et Mme Véronique X... de leur demande de liquidation de l'astreinte définitive prononcée par ordonnance du juge de la mise en état en date du 27 avril 2007 ;

AUX MOTIFS QUE la cour d'appel a déclaré statuer au regard des conclusions récapitulatives déposées le 13 novembre 2015 par la société PPL, appelante, et des conclusions récapitulatives déposées par les consorts Z... et Mme X... le 10 novembre 2015, avant de préciser que l'ordonnance de clôture a été rendue le 17 novembre 2015 (arrêt p.6 à 10) ;

ALORS QUE les conclusions postérieures à l'ordonnance de clôture par lesquelles une partie demande la révocation de celle-ci, sont recevables ; qu'en ne visant, pour statuer sur les demandes respectives des parties, que les conclusions déposées le 13 novembre 2015 par la société PPL et le 10 novembre 2015 par les consorts Z... et Mme X..., sans se prononcer sur les conclusions déposées par ces derniers le 19 novembre 2015, par lesquelles ils ont sollicité la révocation de l'ordonnance de clôture prononcée le 17 novembre 2015, la cour d'appel a violé les articles 16 et 783 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré Mme Véronique X... et les consorts Z... irrecevables en l'ensemble de leurs demandes de résiliation et/ou résolution des contrats d'enregistrement, de cession et d'édition conclus par D... Z..., dit G..., comme étant des prétentions nouvelles en cause d'appel ;

AUX MOTIFS QUE « II : SUR LA RECEVABILITE DES DEMANDES EN RESILIATION ET/OU RESOLUTION DES CONTRATS D'ENREGISTREMENT, DE CESSION ET D'EDITION :

Considérant que la SARL PPL soulève à titre principal l'irrecevabilité de ces demandes qui constituent selon elle des prétentions nouvelles au sens de l'article 564 du code de procédure civile, au regard des dernières conclusions régularisées en première instance ;

qu'elle fait valoir que les consorts Z... et Mme Véronique X... n'ont pas formulé de telles demandes dans leurs dernières écritures de première instance signifiées le 14 mai 2009 et qu'il est indifférent qu'ils aient pu présenter de telles demandes dans des conclusions antérieures puisque les demandes non conservées dans les dernières écritures d'un plaideur sont réputées avoir été abandonnées par ce dernier ;

qu'elle ajoute que ces demandes en résiliation et/ou résolution ne tendent pas aux mêmes fins que l'action en responsabilité qui laisse subsister le contrat ;

considérant que les consorts Z... et Mme Véronique X... répliquent avoir déjà formulé ces demandes en première instance jusque dans leurs dernières conclusions récapitulatives du 06 mai 2002 précédant le jugement mixte du 20 décembre 2002 ayant pour objet la nomination d'un expert et qu'il ne peut être soutenu qu'ils ont abandonné ces demandes puisque le jugement du 20 décembre 2002 a statué avant dire droit sur celles-ci ;

qu'ils soutiennent que leurs conclusions sur ouverture du rapport après dépôt de celui-ci ne sauraient déterminer à elles seules, l'objet du litige et qu'échappent à l'obligation de récapitulation, les conclusions qui ne font que répondre aux questions posées par le jugement avant dire droit, de telle sorte que l'objet du litige doit être apprécié en tenant compte à la fois des conclusions récapitulatives du (6) mai 2002 et des conclusions en ouverture du rapport d'expertise du 17 septembre 2009 ;

qu'ils ajoutent que ces demandes de résiliation concernent les mêmes contrats dont il est demandé l'exécution et que ces deux actions tendent vers l'exercice d'un même droit : la force obligatoire des contrats et leur bonne exécution, et donc tendent aux mêmes fins ;

considérant ceci exposé, que selon l'article 753 du code de procédure civile, applicable devant le tribunal de grande instance « les parties doivent reprendre dans leurs dernières conclusions les prétentions et moyens présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et le tribunal ne statue que sur leurs dernières conclusions déposées » ;

que devant la cour d'appel l'article 564 du code de procédure civile dispose qu' « à peine d'irrecevabilité relevée d'office les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions » ;

qu'il résulte de l'application de ces deux textes que sont irrecevables les prétentions reprises en cause d'appel par une partie, dès lors que celle-ci ne les avaient pas rappelées dans ses dernières conclusions déposées en première instance et qu'elle était réputée les avoir abandonnées ;

considérant que dans leurs conclusions récapitulatives de première instance du 06 mai 2002 Mme Véronique X... et les consorts Z... demandaient à titre subsidiaire la résolution et/ou la résiliation des contrats d'enregistrement, de cession et d'édition conclus par D... Z... entre le 28 mars 1974 et le 28 mars (1979) et du contrat audiovisuel du 13 décembre 1988 conclu par Mme Véronique X... ;

que le tribunal de grande instance de Paris, dans son jugement mixte du 20 décembre 2002, a déclaré ces demandes recevables, ordonnant avant dire droit une mesure d'expertise afin de fournir au tribunal « tous éléments lui permettant d'appréhender l'ensemble des exploitations dont les enregistrements précités ont été l'objet » et de déterminer « le montant des sommes dues en exécution des contrats conclus les 28 mars 1974 et le 28 mars 1979 ; les modalités et l'importance de l'exploitation des oeuvres de G... » ;

considérant que suite au dépôt du rapport d'expertise, les consorts Z... et Mme Véronique X... ont encore conclu le 14 mai 2009 sans reprendre leurs demandes de résiliation et/ou résolution de ces contrats ; que la SARL PPL a également conclu sur le fond le 10 juillet 2009 après dépôt du rapport d'expertise ;

considérant que les conclusions soumises aux prescriptions du deuxième alinéa de l'article 753 précité sont celles qui déterminent l'objet du litige ou qui soulèvent un incident de nature à mettre fin à l'instance ; qu'à la suite du dépôt du rapport d'expertise le 15 janvier 2009 l'instruction de l'affaire s'est trouvée reprise sur les points non tranchés au fond par le jugement mixte du 20 décembre 2002 et qu'ainsi les conclusions des consorts Z... et de Mme Véronique X... en date du 14 mai 2009, bien qu'intitulées « Conclusions en ouverture du rapport d'expertise », ne se contentent pas de répondre exclusivement aux conclusions du rapport d'expertise mais reprennent longuement de la page 10 à la page 55 l'intégralité des faits de la cause et l'ensemble de leurs prétentions déterminant l'objet du litige ;

que dès lors en application de l'article 753 susvisé, Mme Véronique X... et les consorts Z... sont présumés avoir dans leurs dernières conclusions du 14 mai 2009, abandonné leurs demandes en résiliation et/ou résolution des contrats en cause faute d'avoir repris ces demandes dans les dites conclusions, étant rappelé que cette présomption est irréfragable ;

considérant qu'il s'ensuit qu'en application des dispositions de l'article 564 précité ces demandes, présentées devant la cour, sont irrecevables comme constituant des prétentions nouvelles ne tendant pas aux mêmes fins que leurs demandes en paiement de redevances lesquelles laissent subsister les contrats, ce sans qu'il y ait donc lieu à statuer sur la demande soulevée à titre subsidiaire par la SARL PPL en irrecevabilité de ces demandes comme se heurtant à l'autorité de chose jugée » ; (arrêt p.11 à 13)

1) ALORS QUE l'action en exécution d'un contrat et l'action en résiliation de celui-ci constituent sous deux formes différentes l'exercice d'un même droit et tendent aux mêmes fins ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevables comme nouvelles les demandes en résiliation formées par les consorts Z..., que celles-ci ne tendent pas aux mêmes fins que leurs demandes en paiement de redevances lesquelles laissent subsister les contrats, la cour d'appel a violé l'article 565 du code de procédure civile ;

2°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE la demande de résiliation judiciaire d'un contrat à exécution successive avec effet à la date de la décision à intervenir, tend aux mêmes fins que la demande en exécution dudit contrat formée au titre de la période s'étendant jusqu'à ladite décision ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevables comme nouvelles les demandes en résiliation formées par les consorts Z..., que celles-ci ne tendent pas aux mêmes fins que leurs demandes en paiement de redevances lesquelles laissent subsister les contrats, la cour d'appel a violé l'article 565 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris sauf en ce qu'il a retenu dans son calcul des redevances dues aux consorts Z... les neufs sketches figurant sur le phonogramme « Enregistrement public, volume 2 » et sur le quantum de la somme allouée au titre des redevances dues, d'avoir dit qu'il n'est pas rapporté la preuve par les consorts Z... et Mme Véronique X... de ce que les neuf sketches suivants figurant sur le phonogramme « Enregistrement public, volume 2 » ont été fixés au sens du jugement entrepris et du présent arrêt, antérieurement au 15 octobre 1975 : [...], d'avoir condamné la société PPL à payer aux consorts Z... la somme de 409 268,88 euros au titre des redevances dues sur les douze sketches suivants fixés avant le 15 octobre 1975 ou après le 15 mai 1981, pour la période comprise entre le troisième trimestre 1987 et le 15 janvier 2009 : [...], « [...] », d'avoir condamné la société PPL à payer aux consorts Z... une redevance de 15% sur l'exploitation des seuls douze enregistrements susdits pour la période postérieure au 17 septembre 2009 jusqu'au jour de l'arrêt, d'avoir fait injonction à la société PPL de communiquer aux consorts Z... l'ensemble des décomptes relatifs à ces seuls douze enregistrements depuis le 17 septembre 2009 jusqu'au jour de l'arrêt, ce sous astreinte provisoire d'une durée de trois mois et de cent euros par jour de retard à compter d'un délai de deux mois suivant la signification de l'arrêt, et d'avoir condamné la société PPL à payer aux consorts Z... la seule somme de 20 000 euros à titre de provision à valoir sur le paiement définitif des redevances qui leur sont dues pour la période postérieure au 17 septembre 2009 jusqu'à l'arrêt ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE

« III : SUR LA NOTION DE FIXATION :

Considérant que le jugement mixte du 20 décembre 2002 a définitivement jugé que sont susceptibles de revenir aux consorts Z... les redevances tirées de l'exploitation des phonogrammes qui ont été fixés avant le 15 octobre 1975 ou après le 15 mai 1981 et qu'il importe donc de déterminer en premier lieu la notion de fixation ;

que la SARL PPL affirme que la « fixation » d'un phonogramme s'entend de l'action consistant à figer l'oeuvre dans le but de la diffuser auprès du public et que seule la réalisation de la bande mère (« master » marque la fin du processus de confection de l'oeuvre, figeant une version expurgée des imperfections issues de l'enregistrement initial ;

qu'elle soutient donc que la notion de « fixation »se distingue nettement de celle « d'enregistrement » car elle évoque la captation durable de la version aboutie d'une oeuvre qui permet seule sa reproduction en vue de sa diffusion au public ;

qu'elle affirme dès lors que les consorts Z... n'administrent pas la preuve qui leur incombe de ce que les sketches litigieux ont été « fixés », soit avant le 15 octobre 1975, soit après le 15 mai 1981 ;

considérant que les consorts Z... répliquent que la fixation des sketches doit d'entendre de l'enregistrement de l'interprétation et se distingue de la réalisation du master de commercialisation, l'objet du droit de l'artiste-interprète étant l'interprétation d'une oeuvre de l'esprit, peu important sa matérialisation ;

qu'ils en concluent que la fixation s'entend de la toute première incorporation matérielle sur un support permettant sa reproduction ultérieure, c'est-à-dire de son enregistrement ; que dès lors c'est au jour de l'enregistrement des interprétations de D... Z..., et donc lors des spectacles s'agissant des enregistrements publics, que doit être déterminée la date de fixation ;

qu'ils demandent donc à la cour de retenir la date de l'enregistrement des interprétations de D... Z...comme date de fixation et en conséquence d'infirmer sur ce point le jugement entrepris, l'appréciation du tribunal procédant d'une confusion entre l'objet de la protection (la prestation de l'artiste) et le support ;

qu'ils demandent d'en déduire que chacun des 31 enregistrements appartient au patrimoine des ayants-droit de D... Z... ;

considérant ceci exposé, que le code de la propriété intellectuelle ne donne aucune définition de la fixation d'une interprétation ; que seul le traité de l'OMPI de 1996 complétant sur ce point la Convention de Rome, définit en son article 2, sous c), la fixation comme « l'incorporation de sons, ou des représentations de ceux-ci, dans un support qui permette de les percevoir, de les reproduire ou de les communiquer à l'aide d'un dispositif » ;

considérant que la fixation doit permettre la communication de l'oeuvre au public dans la mesure où ce qui déclenche l'application du droit est un acte d'exploitation ; qu'ainsi la simple captation du son ne constitue pas une fixation dès lors que ce son doit être ensuite travaillé en vue de l'établissement du master permettant la reproduction en nombre ;

que dès lors la fixation se définit comme l'acte d'exploitation qui marque le terme des opérations de production, entendues comme un processus de mise en forme technique et artistique impliquant diverses opérations sur divers enregistrements ;

considérant en conséquence, que c'est à juste titre que les premiers juges ont dit que la date de fixation pour chacun des sketches litigieux doit être celle du master » ; (arrêt p.14)

ET AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES QUE

« Sur la notion de fixation :

ainsi qu'il a été rappelé, il ressort du jugement du 20 décembre 2002 précité que sont susceptibles de revenir aux consorts Z... les redevances tirées de l'exploitation des phonogrammes qui ont été fixés avant le 15 octobre 1975 ou après le 15 mai 1981. Il importe donc de déterminer la notion de fixation.

Les consorts Z... rappellent que la convention de ROME, en son article 3 alinéa b), a défini le phonogramme comme étant « toute fixation exclusivement sonore des sons » ; que de plus l'article 2 b du traité OMPI définit la fixation comme étant « l'incorporation de sons ou de représentations de ceux-ci dans un support qui permet de les percevoir, de les reproduire ou de les communiquer à l'aide d'un dispositif ». Ils en concluent que la fixation serait une notion juridique qui correspondrait à l'incorporation de sons dans un support, et qui interviendrait au moment où la prestation de l'artiste-interprète est pour la première fois enregistrée sur ce support. Ils considèrent en conséquence que c'est la date à laquelle chacun des sketches a été enregistré par G... qui doit être prise en compte.

A l'inverse, la société PPL et Monsieur A... estiment qu'il convient d'opérer une distinction entre la notion de captation et celle de fixation. Selon eux en effet, la captation d'une interprétation d'une oeuvre de l'esprit ne correspond pas toujours à l'enregistrement qui est finalement fixé sur un phonogramme puisqu'elle constitue essentiellement une matière première qui, accompagnée éventuellement de captations prises lors d'autres représentations ou enregistrements, aboutit finalement à ce qui figurera sur le phonogramme considéré. Ils précisent qu'un artiste peut modifier ses textes tous les soirs, oubliant parfois certains mots, l'interprétation étant de qualité variable selon les représentations ou les enregistrements. En l'espèce, ils font référence à des propos de G... repris dans un article publié dans le journal France Soir du 8 novembre 1975, et figurant en annexe du rapport d'expertise, par lesquels l'artiste expliquait : « J'écris, je répète, je me le dis, je me l'écoute, je le joue en public et huit jours après c'est bon pour un an. J'écris le sketch en le jouant. Il a d'abord trois pages, c'est un brouillon d'art dramatique, en le répétant j'en fais une heure, après il reste un quart d'heure ». Ils reprennent également une part de l'audition par l'expert de Monsieur D..., ingénieur du son chez Pathé Marconi qui a participé à l'élaboration des phonogrammes de G..., dans laquelle il indiquait : « A l'époque, il s'agissait de bandes magnétiques avec les ciseaux et le scotch
Au montage, on virait tout ce qui était hésitation, trou de mémoire, etc. Ensuite, une phrase se révélait plus efficace si on inversait le sujet et le complément. Un jour le ton montait, c'était plus intéressant que quand le ton descendait ». Pour les défendeurs, le phonogramme finalement exploité serait donc la combinaison d'un grand nombre de captations en public ou en studio, aucun des sketches dont il est question dans la présente procédure n'ayant jamais été interprété par l'artiste tel quel. En conséquence, la notion de fixation correspond selon eux à celle de l'enregistrement final fixé sur le phonogramme, c'est-à-dire le master, destiné à être reproduit en nombre.

Cela étant, dans le silence de la loi française qui ne donne aucune définition de la fixation, il convient de s'en rapporter dans un premier temps à la jurisprudence qui, caractérisant le producteur de phonogramme comme étant la personne qui, notamment, « prend l'initiative de son enregistrement et de sa fixation », détermine ainsi explicitement que les deux notions ne sont pas identiques.

De fait, alors que l'enregistrement est la simple retenue d'un son initial pour ne pas le perdre, sans forcément avoir l'intention d'en faire un autre usage que la conservation, sans connaître tout du moins l'usage qui en sera fait plus tard, et qui est donc tourné avant tout sur l'artiste et son entourage, la fixation au contraire a pour destination l'exploitation du son, éventuellement travaillé, en vue de sa communication au public, et est donc tournée vers l'extérieur. Par ailleurs, la définition que donne F... Robert du verbe fixer, à savoir « Etablir de manière durable une place, sur un objet déterminé », évoque clairement une composante figée, une notion d'intangibilité. Ainsi, la fixation n'est pas quelque chose d'éphémère, susceptible de modification ou d'amélioration, mais au contraire quelque chose de solide, d'immuable, que les années n'altèreront en rien.

Alors que la bande magnétique ou l'enregistrement digital peuvent être changés au gré de la volonté de l'artiste ou de son producteur, et à cet égard les propos de G... et de son ingénieur du son, rappelés ci-dessus, sont éloquents, il n'en va pas de même du master, lequel, tel un moule en matière de sculpture ou des épreuves ayant fait l'objet d'un bon à tirer en matière d'édition, ne peut plus être modifié, et a pour destination des reproductions multiples.

La date de fixation retenue pour chacun des sketches litigieux sera donc celle du master » ; (jugement p.6, 7, 8)

1°) ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que dans son jugement avant dire droit du 20 décembre 2002, le tribunal de grande instance de Paris a « déclar(é) MM. Y... et H... Z... irrecevables en leur action en paiement fondé sur les enregistrements effectués par leur père et fixés entre le 15 octobre 1975 et le 15 mai 1981 » et a donné à l'expert une mission portant sur « les seuls enregistrements et contrats de cession pour lesquels les demandeurs sont déclarés recevables à agir, ce qui lui impose notamment de préciser les enregistrements fixés avant le 15 octobre 1975 » ; qu'en retenant, pour juger que la date de fixation de chacun des sketches litigieux est celle du master sur lequel ils ont été initialement reproduits, que le jugement du 20 décembre 2002 a « définitivement jugé que sont susceptibles de revenir aux consorts Z... les redevances tirées de l'exploitation des phonogrammes qui ont été fixés avant le 15 octobre 1975 ou après le 15 mai 1981 », la cour d'appel a dénaturé cette décision en violation du principe susvisé ;

2°) ALORS QUE dans leurs conclusions, MM. Z... et Mme X... rappelaient que la notion de fixation devait, par application de l'état liquidatif de la communauté formée par D... Z... et Mme X... tel qu'homologué par le jugement de divorce du 3 décembre 1981 et attribuant à l'épouse « les redevances attachées à l'exploitation des droits d'enregistrements phonographiques effectués par Monsieur Z... en tant qu'interprète » entre le 16 octobre 1975 et le 15 mai 1981, être déterminé en référence au jour de l'enregistrement des différentes interprétations en cause (concl. du 10 novembre 2015, p.35); qu'en retenant que la date de fixation de chacun des sketches litigieux était celle du master du phonogramme sur lequel ils ont été initialement reproduits, sans rechercher le sens que revêtait la notion de « fixation » au regard des termes employés dans ledit acte liquidatif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134, désormais 1103, du code civil ;

3°) ALORS QUE sont soumises à autorisation écrite de l'artiste-interprète la fixation de sa prestation, sa reproduction et sa communication au public, ainsi que toute utilisation séparée du son et de l'image de la prestation lorsque celle-ci a été fixée à la fois pour le son et l'image ; qu'en retenant, pour juger que la date de fixation de chacun des sketches litigieux est celle du master du phonogramme sur lequel ils ont été initialement reproduits, et non de l'enregistrement, que la fixation doit permettre la communication de l'oeuvre au public dans la mesure où ce qui déclenche l'application du droit est un acte d'exploitation, la cour d'appel a violé l'article L. 212-3 du code de la propriété intellectuelle.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il a rejeté la demande formée par les consorts Z... au titre d'un défaut d'exploitation ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE

« VI : SUR LES DEMANDES AU TITRE D'UN DEFAUT D'EXPLOITATION :

Considérant que les consorts Z... présentent également des demandes en dommages et intérêts respectivement de 369.772,53 € et de 375.769,69 € en réparation des préjudices subis du fait de l'inexploitation des enregistrements et des oeuvres de D... Z... sur la période comprise entre 1993 et le premier semestre 1996 ;

qu'ils rappellent que l'obligation permanente de l'éditeur est une obligation légale et constante nécessitant une démarche active de l'éditeur et s'appuyant en l'espèce sur des exploitations non seulement graphiques mais surtout sonores ;

qu'ils affirment que le catalogue de D... Z... est resté inexploité entre 1993 et le premier semestre 1996, contrairement à ce qu'a pu considérer l'expert ; que le volume des ventes pour cette période est en effet « considérablement faible » comparé à d'autres périodes où l'exploitation était suivie, les ventes comptabilisées par la SACEM en 1993 correspondant à des ventes antérieures d'au moins une année en raison des délais inhérents au processus de répartition ; que la lecture des feuillets SACEM pour la période comprise entre 1994 et le deuxième semestre 1996 montre que les droits phonographiques sont quasi nuls ;

qu'ils en concluent que la SARL PPL a bien manqué à son obligation d'exploitation des oeuvres dont il était l'éditeur, les droits de diffusion radio et télévision ne découlant pas du travail de la SARL PPL mais résultant des autorisations délivrées par la SACEM ;

qu'ils ajoutent que l'exploitation graphique des oeuvres ne constitue qu'une exploitation secondaire à l'obligation principale concernant les enregistrements sonores et que ces exploitations graphiques ne permettent donc pas à la SARL PPL d'affirmer avoir satisfait à son obligation d'exploitation continue et permanente ;

considérant que la SARL PPL conclut sur ce point à la confirmation du jugement entrepris qui a rejeté les demandes des consorts Z... relatives à un défaut d'exploitation en faisant valoir que ceux-ci n'administrent pas la preuve qui leur incombe d'un manquement à son obligation d'exploiter les oeuvres dont il est l'éditeur et d'un préjudice personnel direct et certain résultant d'un tel manquement ;

considérant ceci exposé, que les parties reprennent devant la cour leurs moyens et arguments déjà développés devant les premiers juges et qu'il apparaît que c'est par des motifs pertinents et exacts que la cour adopte, que le tribunal a relevé que même si l'exploitation des enregistrements et des oeuvres a pu être moindre pendant la période considérée, ce qui peut s'expliquer notamment par les relations conflictuelles entre les parties ayant pu entrainer une réaction attentiste de la part de la SARL PPL, que par une conjoncture économique moins propice aux ventes, il apparaît que pendant cette période, selon le rapport d'expertise, 178.025 exemplaires du disque « Les inoubliables » ont été vendus, de même que 130.000 exemplaires de l'album « Les irrésistibles », auxquels il convient d'ajouter l'exploitation accessoire (mais néanmoins à prendre en compte) sous forme graphique des oeuvres dans deux ouvrages « G..., les inoubliables » et « G..., ses textes et chansons » ;

qu'ainsi il est démontré la réalité d'une exploitation de ces oeuvres pendant la période considérée, excluant tout manquement fautif de la part de la SARL PPL ;

que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté l'ensemble des demandes relatives à un défaut d'exploitation » ; (arrêt p.23 et 24)

ET AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES QUE

« Sur le défaut d'exploitation :

les consorts Z... considèrent également subir un préjudice tenant au fait que la société PPL se serait abstenue d'exploiter les enregistrements et oeuvres de G... sur la période allant de 1993 à 1995. Ils constatent à cet effet que la seule exploitation qui aurait été faite durant cette période réside dans la vente de l'album « Les inoubliables ». Ils ajoutent que les chiffres de vente figurant dans le rapport d'expertise démontreraient que très peu de ventes auraient été réalisées durant cette période, puisque si les ventes se sont selon eux élevées en moyenne à 98.369 exemplaires par année sur les années 1988 à 1992, elles n'ont atteint que 9.581 exemplaires par an sur la période 1993 à 1996. Ils ajoutent que la société PPL se serait abstenue de faire la moindre publicité aux enregistrements de G... durant la période envisagée, jusqu'à la commercialisation par Sony de certains enregistrements au cours du second semestre de l'année 1996. Ils réclament donc les sommes de 248.669 € au titre de l'absence d'exploitation des enregistrements, et de 252.702 € au titre de l'absence d'exploitation des oeuvres.

La société PPL réfute l'absence d'exploitation qui lui est ainsi imputée, et conclut au rejet de ces demandes aux motifs qu'elles seraient le pendant de la demande des consorts Z... tendant à obtenir l'annulation des contrats d'enregistrements ainsi que des contrats de cession et d'édition des oeuvresde G.... Par ailleurs, elle rappelle que plus de 250.000 albums de G... ont été vendus entre 1993 et 1996 que de nombreux sketches de G... ont été diffusés sur les radios et chaînes de télévision durant cette période, et qu'elle a procédé à une exploitation graphique des oeuvres en cause. Enfin, elle argue du fait qu'aucun nouveau sketch n'aurait été créé par G... depuis 1981.

Cependant, ainsi que le relève l'expert, 178.025 exemplaire du disque « Les inoubliables » ont été vendus durant cette période, auxquels il convient d'ajouter l'album « Les irrésistibles » qui aurait été vendu à 130.000 exemplaires en 1996 d'après la société PPL. De plus, deux ouvrages « G... les inoubliables » et « G... ses textes et chansons » ont été publiés dans ces années, alors que les droits perçus par la société PPL au titre de l'exploitation radiophonique et audiovisuelle s'est élevée à la somme de 48.308 € pour les années 1993 à 1996.

Ainsi, même s'il est possible de constater que l'exploitation durant cette période a été moindre, ce qui peut s'expliquer tant par les relations conflictuelles entre les parties qui ont pu entraîner une réaction attentiste de la part de la société PPL que par une conjoncture moins propice aux ventes, les chiffres ci-dessus rappelés suffisent à établir la réalité d'une exploitation, laquelle exclut en conséquence un comportement fautif de la part de la société PPL.

En conséquence, les demandes relatives à un défaut d'exploitation seront rejetées » ; (jugement p.19)

1°) ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; qu'il résulte tableau reproduit en page 101 du rapport d'expertise que durant les années 1993, 1994, 1995 et 1996, l'album intitulé « Les inoubliables » a été vendu à 31 812 exemplaires (8 627 + 11 178 + 8 982 + 3 025), celui intitulé « L'intégrale » à 16 555 exemplaires (9 433 + 2 922 + 4 200) et celui intitulé « Les irrésistibles » à 129 658 exemplaires, soit un total de 178 025 exemplaires sur l'ensemble de la période ; qu'en retenant, pour débouter les consorts Z... de leur demande indemnitaire au titre d'une insuffisance de l'exploitation des enregistrements et oeuvres de G... durant cette période, que s'agissant de l'exploitation phonographique, il ressort du rapport d'expertise que 178 025 exemplaires du disque « Les inoubliables » ont été vendus, de même que 130 000 exemplaires de l'album « Les irrésistibles », la cour d'appel a dénaturé ledit rapport en violation du principe susvisé ;

2°) ALORS QUE l'éditeur est tenu d'assurer à l'oeuvre une exploitation permanente et suivie et une diffusion commerciale, conformément aux usages de la profession ; que le producteur a également l'obligation d'exploiter les enregistrements qu'il a produits ; qu'en retenant, pour débouter les consorts Z... de leurs demandes indemnitaires au titre d'une insuffisance de l'exploitation des enregistrements et oeuvres de G... durant les années 1993 à 1996, que l'exploitation moindre du catalogue pendant cette période peut s'expliquer par les relations conflictuelles entre les parties ayant pu entrainer une réaction attentiste de la société PPL, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à exclure un manquement de cette société en violation de l'article L. 132-12 du code de la propriété intellectuelle, ensemble l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil ;

3°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent statuer par voie de simple affirmation, sans indiquer les éléments de preuve sur lesquels ils se fondent pour tenir un fait pour établi ; qu'en se bornant à affirmer, pour débouter les consorts Z... de leurs demandes indemnitaires au titre d'une insuffisance de l'exploitation des enregistrements et oeuvres de G... durant les années 1993 à 1996, que l'exploitation moindre du catalogue pendant cette période peut s'expliquer par une conjoncture économique moins propice aux ventes, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il a rejeté la demande des consorts Z... tendant à la liquidation de l'astreinte définitive prononcée par ordonnance du juge de la mise en état en date du 27 avril 2007 et d'avoir débouté les consorts Z... de leur demande de liquidation de cette astreinte en tant qu'elle est à nouveau présentée devant la cour ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE

« VII : SUR LA DEMANDE DE LIQUIDATION DE L'ASTREINTE DEFINITIVE ORDONNEE PAR LE JUGE DE LA MISE EN ETAT LE 27 AVRIL 2007 :

Considérant que les consorts Z... et Mme Véronique X... reprennent devant la cour leur demande de liquidation de l'astreinte définitive prononcée par le juge de la mise en état dans son ordonnance du 27 avril 2007 ;

qu'ils rappellent qu'au préalable, le juge de la mise en état avait, par ordonnance en date du 15 juillet 2005, ordonné la communication par la SARL PPL d'un certain nombre de documents dans le délai de deux mois à compter de la notification de sa décision, sous astreinte provisoire de 100 € par jour de retard ;

qu'ils indiquent qu'aucune pièce n'ayant été communiquée, ils ont à nouveau saisi le juge de la mise en état qui, par ordonnance du 27 avril 2007, a liquidé l'astreinte provisoire à la somme de 15.000 € et a fixé à 5.000 € par jour de retard pendant un délai de trois mois passé le délai d'un mois à compter de la signification de sa décision, le montant de l'astreinte définitive ;

qu'ils rappellent que cette ordonnance a été signifiée le 07 mai 2007 et frappée d'appel le 11 mai 2007 mais que par ordonnance du 15 juin 2007 le premier président de la cour d'appel de Paris a suspendu l'exécution provisoire de plein droit dont était assortie cette ordonnance ;

qu'ils font encore valoir que l'appel interjeté contre cette ordonnance a été déclaré irrecevable par arrêt de cette cour en date du 25 janvier 2008 et que par ailleurs la cour de cassation, par arrêt du 21 février 2008, a cassé l'ordonnance du Premier président en date du 15 juin 2007, de telle sorte que la SARL PPL était bien tenue de communiquer l'ensemble des pièces visées par les ordonnances des 15 juillet 2005 et 27 avril 2007 et qu'elle n'a jamais satisfait à cette obligation ;

qu'ils exposent que par ordonnance en date du 12 septembre 2008 le juge de la mise en état a rejeté leur demande de liquidation de l'astreinte définitive au motif que l'expert avait rendu le 13 avril 2007 une note de synthèse faisant figurer un premier chiffrage de leur préjudice ;

qu'ils soutiennent que c'est à tort que la liquidation définitive de l'astreinte a ainsi été rejetée par le juge de la mise en état et qu'il est manifeste que la SARL PPL n'a pas satisfait à son obligation de communication de documents et que l'ordonnance rendue le 12 septembre 2008 par le juge de la mise en état ne bénéficie pas de l'autorité de la chose jugée ;

qu'ils en concluent que la cour était saisie de l'entièreté du litige, elle est compétente pour liquider l'astreinte prononcée par le juge de la mise en état dans son ordonnance du 27 avril 2007 ; qu'ils réclament à ce titre la somme totale de 450 000 € ;

considérant que la SARL PPL réplique que le juge de la mise en état, qui s'était réservé le pouvoir de liquider l'astreinte fixée le 27 avril 2007, a, par ordonnance du 12 septembre 2008, rejeté la demande de liquidation de cette astreinte et que le tribunal a, à bon droit, affirmé dans le jugement entrepris qu'il n'était pas compétent pour liquider cette astreinte ;

considérant, ceci exposé, que l'article L. 131-3 du code des procédures civiles d'exécution dispose que « L'astreinte, même définitive, est liquidée par le juge de l'exécution, sauf si le juge qui l'a ordonnée reste saisi de l'affaire ou s'en est expressément réservé le pouvoir » ;

que par ordonnance en date du 27 avril 2007, le juge de la mise en état a liquidé à la somme de 15.000 € l'astreinte provisoire ordonnée par sa précédente ordonnance du 15 juillet 2005 et a fixé à 5.000 € par jour de retard pendant un délai de trois mois passé le délai d'un mois à compter de la signification de son ordonnance, le montant de l'astreinte définitive destinée à assurer la communication des pièces non produites à ce jour ;

considérant que la cour de cassation, en cassant le 21 février 2008 l'ordonnance du Premier président de cette cour qui avait arrêté l'exécution provisoire de l'ordonnance du 27 avril 2007, alors frappée d'appel, a rappelé que le juge de la mise en état, qui restait saisi, avait le pouvoir de liquider l'astreinte provisoire qu'il avait ordonnée le 15 juillet 2005 ;

considérant que pour les mêmes motifs le juge de la mise en état, qui restait toujours saisi, était tout aussi le seul compétent pour liquider l'astreinte définitive prononcée par son ordonnance du 27 avril 2007 ;

considérant que les consorts Z... et Mme Véronique X... étaient d'autant plus convaincus de la compétence exclusive du juge de la mise en état que c'est bien ce magistrat qu'ils ont saisi en 2008 pour demander la liquidation de cette astreinte définitive ; qu'ils en ont été déboutés par ordonnance en date du 12 septembre 2008 ;

considérant que c'est donc à bon droit que les premiers juges ont rejeté leur nouvelle demande en liquidation de cette astreinte ; que la présente cour, qui n'est saisie de la connaissance du litige que par l'effet dévolutif du seul jugement du 19 février 2010, n'a pas plus compétence pour procéder à la liquidation de cette astreinte qui était de la seule compétence du juge de la mise en état ;

qu'en conséquence le jugement entrepris sera confirmé de ce chef, les consorts Z... et Mme Véronique X... étant en outre déboutés de leur demande en liquidation d'astreinte en tant qu'elle est présentée devant la cour ; » (arrêt p.24, 25, 26)

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE

« Sur la liquidation de l'astreinte :

les consorts Z... demandent au Tribunal de liquider l'astreinte prononcée par le juge de la mise en état dans son ordonnance du 27 avril 2007.

Néanmoins, ainsi que le relève à juste titre la société PPL, c'était au juge de la mise en état, qui a rendu la décision (
), qu'il appartenait de liquider éventuellement l'astreinte en application des dispositions de l'article 35 de la loi du 9 juillet 1991.

Dès lors, la demande en liquidation de l'astreinte sera rejetée » ; (jugement p.20 et 21)

ALORS QUE l'astreinte est liquidée par le juge de l'exécution, sauf si le juge qui l'a ordonnée reste saisi de l'affaire ou s'en est expressément réservé le pouvoir ; que la juridiction du fond encore saisie de l'affaire est compétente pour statuer sur une demande de liquidation d'une astreinte prononcée par le juge de la mise en état ; qu'en retenant, pour débouter les consorts Z... de leur demande tendant à la liquidation de l'astreinte définitive prononcée par le juge de la mise en état dans son ordonnance du 27 avril 2007, que c'est à bon droit que les premiers juges se sont déclarés incompétents pour statuer sur cette demande compte tenu de la compétence exclusive du juge de la mise en état pour statuer sur une telle demande, la cour d'appel a violé l'article L. 131-3 du code des procédures civiles d'exécution.