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Décisions

Cass. 2e civ., 25 janvier 1999, n° 98-12.758

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Buffet

Rapporteur :

Mme Borra

Avocat général :

M. Chemithe

Avocat :

Me Choucroy

Paris, 8e ch. civ., sect. D, du 13 janv.…

13 janvier 1998

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la compagnie GPA Fokker 100 limited, munie d'un titre exécutoire a fait pratiquer une saisie conservatoire sur un appareil "Boeing 747" appartenant à la compagnie nationale Air Gabon garé dans un hangar de l'aéroport d'Orly Sud ; que la compagnie nationale Air Gabon a saisi un juge de l'exécution d'une demande de mainlevée de la saisie conservatoire, dont elle a été déboutée par une décision qu'elle a frappée d'appel ;

Sur le pourvoi principal de la compagnie GPA Fokker :

Attendu que la compagnie GPA Fokker 100 limited, fait grief à l'arrêt attaqué de déclarer nulle la saisie conservatoire, alors que, selon le moyen, d'une part, un aéronef qui n'est pas affecté à des transports publics ou à un service d'Etat peut faire l'objet d'une saisie conservatoire ;

que la cour d'appel, qui a constaté que lors de la saisie de l'appareil celui-ci se trouvait garé dans les hangars de l'aéroport d'Orly Sud pour y subir une opération de grande visite dite "grand entretien D23" par Air France, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, d'où il résultait que l'aéronef n'était pas affecté à des transports publics ou à un service d'Etat lors de la saisie, et a donc violé l'article L. 123-2 du Code de l'aviation civile par fausse application ;

d'autre part, en vertu de l'article 68 de la loi du 9 juillet 1991, aux termes duquel en matière de mesures conservatoires une autorisation préalable du juge n'est pas nécessaire lorsque le créancier se prévaut d'un titre exécutoire, tout créancier a le droit de pratiquer une saisie conservatoire d'un aéronef de nationalité étrangère ou dont le propriétaire n'est pas domicilié en France sans l'autorisation du juge ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel a violé le texte susvisé par refus d'application et l'article R. 123-9 du Code de l'aviation civile ;

Mais attendu qu'ayant constaté que lors de la saisie, l'appareil se trouvait garé dans un hangar pour y subir une opération dite "grand entretien D2", la cour d'appel, qui a relevé que cette situation était temporaire et qu'à l'issue de l'opération l'avion devait reprendre ses vols à destination du Gabon, a souverainement retenu que le fait de subir une "grande visite" n'avait pas fait perdre à l'appareil son affectation aux transports publics ;

Et attendu que l'arrêt énonce justement que les saisies d'aéronef sont régies par le seul Code de l'aviation civile, et en déduit exactement que même munie d'un titre exécutoire, la compagnie GPA devait obtenir l'autorisation du juge de l'exécution pour pratiquer une saisie conservatoire ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le pourvoi incident de la compagnie nationale Air Gabon :

Vu l'article 1382 du Code civil ;

Attendu que pour refuser d'indemniser le préjudice résultant pour la compagnie nationale Air Gabon de la saisie pratiquée à son encontre l'arrêt retient qu'un précédent arrêt rendu le 13 mars 1997, lui a déjà alloué une certaine somme à titre indemnitaire à la suite d'une autre saisie pratiquée le 22 mai 1995, sur le même appareil, et que les deux saisies ayant été concomitantes, la société ne saurait prétendre à réparation d'un préjudice qui a déjà été indemnisé ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la compagnie nationale Air Gabon demandait réparation d'un préjudice résultant de l'indisponibilité de l'aéronef, pour une période autre que celle pour laquelle elle avait été indemnisée par l'arrêt du 13 mars 1997, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté la compagnie Air Gabon de sa demande en paiement de dommages-intérêts du chef du préjudice d'exploitation, l'arrêt rendu le 13 janvier 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.