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Décisions

CA Aix-en-Provence, 3e ch. a, 11 septembre 2014, n° 12/16652

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Azur Consepts (SAS)

Défendeur :

César (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Dabosville

Conseillers :

Mme Plaksine, M. Delage

Avocats :

Me Boissonnet, Me Capanni, Me Magnan, Me Esteve

TGI Marseille, du 10 août 2012, n° 11/06…

10 août 2012

I. FAITS. PROCEDURE.

Le 2 octobre 2009, la SCCV César a confié à la SAS Concept construction un marché de travaux tous corps d'état d'un montant de 1'114'144,40 euros TTC, et accepté le versement d'une somme correspondant à 10 % du marché. La SCCV César a versé une somme de 20'000 euros.

Le 4 janvier 2010, la SCCV César a confié les travaux à l'entreprise Vella pour un montant de 1'100'000 euros.

Par ordonnance du 18 juin 2010, le juge des référés du tribunal de grande instance de Marseille a condamné la SCCV César à payer à la SAS Concept construction la somme provisionnelle de 74'276,30 euros correspondant au montant de 2 chèques du 2 octobre 2009 qui avaient été rejetés.

Invoquant la nullité du marché de travaux, la SCCV César a fait assigner la SAS Concept construction devant le tribunal de grande instance de Marseille afin d'obtenir sa condamnation au paiement de la somme de 50'000 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'abandon du chantier et des désordres à reprendre, et celle de 20'000 euros en remboursement de la somme versée le 4 novembre 2009.

Par jugement du 12 juin 2012, le tribunal de grande instance de Marseille a notamment :

' rejeté la demande de la SCCV César de nullité du marché de travaux du 2 octobre 2009, la société immatriculée pouvant automatiquement par décision des associés reprendre à son compte des engagements conclus avant son immatriculation.

' prononcé la résolution du marché de travaux du 2 octobre 2009 aux torts de la SCCV César, après avoir retenu que l'abandon de chantier était justifié par l'absence de versement de la totalité des sommes prévues à la signature du contrat,

' en conséquence de la résolution, condamné la SAS Concept construction à payer à la SCCV César la somme de 20'000 euros au titre de la restitution de l'acompte, condamné la SCCV César à verser à la SAS Concept construction la somme de 8000 euros au titre de l'indemnité réparatrice de la prestation réalisée, rejeté la demande de la SAS Concept construction en paiement de la somme de 74'276,30 euros,

' rejeté la demande de la SCCV César de réparation des désordres et malfaçons et la demande de la SAS Concept construction de préjudice commercial

' ordonné l'exécution provisoire.

Par déclaration remise le 6 septembre 2012, la SAS Azur consepts venant aux droits de la SAS Concept construction, a interjeté appel du jugement précité.

Vu les dernières conclusions de la SAS Azur consepts du 22 mai 2013,

Vu les dernières conclusions de la SCCV César du 11 février 2014,

II.DECISION.

- SUR LA PROCEDURE.

La SAS Concept construction soutient que les conclusions de la SCCV César sont irrecevables car hors délais, sans cependant préciser le texte dont elle se prévaut et alors que seul le conseiller de la mise en état est compétent pour statuer sur la recevabilité de conclusions au visa de l'article 909 du code de procédure civile. La demande d'irrecevabilité doit être déclarée irrecevable.

- SUR LE FOND.

Les premiers juges ont rejeté la demande de nullité du contrat par suite de la non immatriculation de la SAS Concept Construction, après avoir retenu que la société immatriculée peut automatiquement ou par décision des associés reprendre à son compte les engagements conclus avant son immatriculation, l'absence d'immatriculation n'étant en aucune manière une cause de nullité du contrat conclu par une société antérieurement à celle-ci.

Cependant, les dispositions de l'article R 210.6 du code de commerce édictent que lors de la constitution d'une société par actions, l'état des actes accomplis pour le compte de la société en formation, avec l'indication, pour chacun d'eux, de l'engagement qui en résulterait pour la société, est tenu à la disposition des actionnaires dans les conditions prévues à l'article R. 225-14. Cet état est annexé aux statuts, dont la signature emporte reprise des engagements par la société, lorsque celle-ci a été immatriculée au registre du commerce. Sous réserve qu'ils soient déterminés et que leurs modalités soient précisées par le mandat, l'immatriculation de la société au registre du commerce et des sociétés emporte reprise de ces engagements par la société.

En l'espèce, la SAS Azur consepts ne produit ni les statuts qui selon elle ont prévu que Monsieur Lopez a reçu mandat de prendre au nom et pour le compte de la société l'engagement du contrat du 1er juillet 2009, ni le procès-verbal de l'assemblée générale du 26 janvier 2010 qui aurait repris à son compte le marché du 2 octobre 2009.

Et surtout en tout état de cause, la cour constate que le marché du 2 octobre 2009 n'a pas été souscrit par Monsieur Georges Lopez au nom de la société Concept construction en cours de formation mais par la société Concept construction elle-même représentée par Monsieur Lopez, à une date à laquelle cette dernière n'était pas encore immatriculée au registre du commerce et des sociétés et n'avait donc pas la personnalité juridique lui permettant de contracter.

Or, la nullité affectant les actes conclus par une société dépourvue d'existence juridique a le caractère de nullité absolue ; les actes ne sont pas susceptibles de confirmation ou de ratification par des actes d'exécution intervenus postérieurement à l'immatriculation.

En conséquence, il y a lieu de prononcer la nullité du marché du 2 octobre 2009 et de condamner l'appelante à restituer à la SCCV César la somme de 20'000 euros versée à la signature du marché. En revanche, au soutien de sa demande de dommages-intérêts d'un montant de 50'000 euros, la SAS Azur consepts n'explicite pas sa demande, les seules observations relatives à des dommages-intérêts ayant été formulées au titre de la demande subsidiaire de résiliation du marché. La demande de dommages-intérêts doit être rejetée.

Au terme de ces observations, le jugement doit être infirmé sauf en ce qu'il a condamné la société Concept construction à verser à la SCCV César la somme de 20'000 euros au titre de la restitution de l'acompte.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

- DÉCLARE irrecevable la demande de la SAS Azur consepts d'irrecevabilité des conclusions de la société César ;

- INFIRME le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la résolution du marché du 2 octobre 2009 et condamné la SAS Concept construction à payer la somme de 8000 euros au titre de l'indemnité réparatrice de la prestation réalisée ;

- ET STATUANT à nouveau,

- PRONONCE la nullité du contrat du 2 octobre 2009 ;

- REJETTE la demande de dommages-intérêts ;

- CONFIRME le jugement en ce qu'il a condamné la SAS Concept construction, aux droits de laquelle vient désormais la SAS Azur consepts, à payer à la SCCV César la somme de 20'000 euros au titre de la restitution de l'acompte ;

- CONDAMNE la SAS Azur consepts à payer à la SCCV César la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- CONDAMNE la SAS Azur consepts aux dépens, avec application de l'article 699 du Code de Procédure Civile au bénéfice des avocats qui en ont fait la demande.