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Décisions

Cass. com., 18 janvier 2023, n° 21-18.130

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Vigneau

Rapporteur :

M. Riffaud

Avocat général :

Mme Guinamant

Avocats :

SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP L. Poulet-Odent

Poitiers, du 10 mai 2021

10 mai 2021

Faits et procédure

1. Selon l'ordonnance attaquée (juge-commissaire du tribunal de commerce de Poitiers, 10 mai 2021) et les productions, par un jugement du 30 avril 2020, publié au BODACC le 17 mai 2020, la société Domaine du Normandoux, gestionnaire d'une résidence hôtelière, a été mise en liquidation judiciaire, la société Actis mandataires judiciaires étant désignée en qualité de liquidateur.

2. Le 19 janvier 2021, M. [W] a saisi le liquidateur d'une revendication du mobilier garnissant le local qu'il avait donné à bail commercial à la société Domaine du Normandoux.

3. Le liquidateur lui ayant notifié son refus par une lettre recommandée du 26 janvier 2021, M. [W] a saisi le juge-commissaire de sa revendication par une requête du 2 avril 2021.

4. Le juge-commissaire a statué par une ordonnance du 16 avril 2021 dont le dispositif, présenté sous la forme de mentions à raturer, ne comporte pas de décision tandis que ses motifs portent la mention manuscrite « il y a lieu de faire droit à la demande du revendiquant ».

5. Par une ordonnance du 10 mai 2021, le juge-commissaire, saisi par le liquidateur, a ordonné la rectification de « l'erreur matérielle contenue dans l'ordonnance du 16 avril 2021 en ce qu'elle n'indique pas la décision du juge-commissaire en omettant de rayer la mention inutile et qu'il n'est pas fait droit à la demande de revendication de M. [W] ».

Recevabilité du pourvoi contestée par la défense

6. Le liquidateur conteste la recevabilité du pourvoi formé par M. [W] en invoquant un défaut d'intérêt.

7. Néanmoins, cette fin de non-recevoir, soulevée dans un mémoire en défense complémentaire qui n'a pas été remis au greffe de la Cour de cassation et notifié à l'avocat du demandeur dans le délai de deux mois à compter de la signification du mémoire du demandeur, prévu à l'article 982 du code de procédure civile, n'est pas recevable.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

8. M. [W] fait grief à l'ordonnance de rectifier celle du 16 avril 2021 et de rejeter sa demande de revendication, alors « que lorsqu'il statue sans audience sur une requête en rectification d'une erreur ou omission matérielle, le juge doit s'assurer que la requête a été portée à la connaissance des autres parties ; que, dans son ordonnance en rectification d'erreur matérielle du 10 mai 2021, le juge-commissaire, qui statuait sans audience, s'est borné à constater que la requête avait été adressée au débiteur et au contrôleur ; qu'il ne ressort ni des termes de l'ordonnance rectificative ni des productions que la requête avait été portée à la connaissance de M. [W] ; qu'en rectifiant l'ordonnance du 16 avril 2021, sans s'assurer que la requête avait été portée à la connaissance de M. [W], qui était partie à l'ordonnance dont la rectification était demandée, et qui n'a été informé de cette requête que par la notification de la décision rectificative qui lui a été faite, le juge-commissaire de la procédure de liquidation judiciaire de la société Domaine du Normandoux a violé l'article 14 du code de procédure civile, ensemble l'article 462, alinéa 3, du même code. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 14 et 462, alinéa 3, du code de procédure civile :

9. Lorsqu'il statue sans audience sur une requête en rectification d'une erreur ou omission matérielle, le juge doit s'assurer que la requête a été portée à la connaissance des autres parties.

10. Il ne résulte ni de l'ordonnance, rendue sans débats, ni des productions, que le juge-commissaire ait vérifié que la requête avait été portée à la connaissance de M. [W], avant d'accueillir la demande du liquidateur et d'ordonner la rectification demandée.

11. En statuant ainsi, le juge-commissaire a violé les textes susvisés.

Et sur le moyen relevé d'office

12. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.

Vu les articles 462 et 463 du code de procédure civile :

13. Il résulte de ces textes que constitue une omission de statuer celle par laquelle le juge omet de reprendre dans son dispositif une prétention sur laquelle il s'est expliqué dans ses motifs.

14. Pour ordonner la rectification d'une erreur matérielle affectant l'ordonnance du 16 avril 2021, l'ordonnance rectificative du 10 mai 2021 retient que c'est par suite d'une erreur que cette ordonnance n'indique pas la décision du juge-commissaire en omettant de rayer la mention inutile.

15. En statuant ainsi, quand les motifs de l'ordonnance rectifiée indiquaient qu'il y avait lieu de faire droit à la demande du revendiquant, le juge-commissaire, qui a accueilli une demande de rectification d'erreur matérielle pour réparer une omission de statuer, a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

16. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

17. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 10 mai 2021, entre les parties, par le juge-commissaire du tribunal de commerce de Poitiers ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi.