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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 10 septembre 2021, n° 19/22618

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

F., ARTIWORKS (S.A.S.U.), B. M., L., GET DOWN (S.A.R.L.)

Défendeur :

B., KRAKE (S.A.R.L.), DISTRICT 6 FRANCE PUBLISHING (S.A.S.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Brigitte CHOKRON

Conseillers :

Mme Laurence LEHMANN, Mme Agnès MARCADE

Avocats :

SELARL BDL AVOCATS, Me Michaël M., SCP JEANNE B., SELARL V. & G., SCP GRV ASSOCIES, AARPI TWELVE AVOCATS, Me Sandra O.-Z., Me Jim M.-G., SELARL BDL AVOCATS, Me Michaël M.

Paris, du 7 nov. 2019

7 novembre 2019

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.

Mme Olivia M. et M. Dan L. poursuivent depuis près de quinze ans une carrière musicale, notamment au sein du groupe « The », qu'ils forment, en tant qu'auteurs et compositeurs, d'une part, et interprètes d'autre part.

Mme M. et M. L. ont écrit et composé une 'uvre intitulée « The bridge is broken » publiée sur l'album intitulé « A Mouthful », sorti le 16 janvier 2008.

L'oeuvre a fait l'objet d'un dépôt à la Société des Auteurs, Compositeurs et Editeurs de Musique (Sacem) le 2 janvier 2006.

L'enregistrement en studio de l''uvre a été produit par la société Get Down.

Par contrat de cession et d'édition d''uvre musicale du 1er novembre 2005, Mme M. et M. L. ont cédé leurs droits patrimoniaux sur l''uvre à la société Kraked.

L'enregistrement de l'oeuvre « The bridge is broken » est commercialisé en France par la société Cinq7/ Wagram, en qualité de licenciée, suivant contrat de licence conclu avec la société Get Down le 2 juillet 2007.

En février 2015, M. Hadrien F. dit Feder, disc jockey, a publié l'enregistrement phonographique d'une 'uvre intitulée « Goodbye », créée en collaboration avec Mme Anne Lyse B., dite Lyse.

L'enregistrement phonographique de l''uvre a été produit par la société Artiworks, dirigée par M. F. dit Feder.

Cette 'uvre est éditée par la société District 6 France Publishing.

L'enregistrement de l''uvre « Goodbye » est commercialisé par la société Warner Music France, en exécution d'un contrat de licence exclusive.

Au moment de la sortie de 1'œuvre « Goodbye », Mme Olivia M. et M. Dan L. ont constaté qu'elle contenait, selon eux, une reprise à l'identique d'un extrait de l''uvre « The bridge is broken », cette reprise étant répétée pendant la majeure partie du titre « Goodbye ».

Un rapport d'analyse des deux 'uvres effectué le 6 janvier 2016 par la Sacem conclut à la reprise, par le titre « Goodbye » d'un enchaînement mélodique d'une durée inférieure à deux secondes, issu de 1'oeuvre « The bridge is broken », dont la différence avec la séquence d'origine ne résulte que d'une équalisation sonore.

Toutefois, par une lettre du 5 février 2016, la Sacem a notifié à la société Kraked que la commission des compositeurs de son conseil d'administration avait, le 26 janvier 2016, décidé qu'i1 n'existait pas de ressemblance caractérisée entre les deux 'uvreset qu'en particulier l'é1ément repris n'était pas « suffisant pour conclure à une ressemblance ».

Après de vaines tentatives de règlement amiable du litige, la société Kraked, la société Get Down, Mme M. et M. L. ont par actes d'huissiers de justice des 24 octobre 2018, 12 novembre 2018 et 22 février 2019, fait assigner la société District 6 France Publishing, Mme B., M. F. et la société Artiworks en référé devant le président du tribunal de grande instance de Paris , en contrefaçon de droit d'auteur et de droits voisins (artistes interprètes et producteurs de phonogrammes).

Appelée à l'audience de référé du 4 mars 2019, l'affaire a été renvoyée au fond devant le tribunal de grande instance de Paris , par application de l'article 811 du code de procédure civile.

Par jugement du 07 novembre 2019, le tribunal de grande instance de Paris a :

- déclaré irrecevables les demandes dirigées contre la Sacem, l'Adami et la Société Warner Music France ;

- rejeté toutes les autres fins de non recevoir ;

- rejeté les demandes fondées sur la contrefaçon de droit d'auteur ;

- rejeté les demandes fondées sur le parasitisme ;

- dit que la reproduction d'un extrait de l'enregistrement phonographique de l'oeuvre« The bridge is broken » produit par la société Get Down et interprété par Mme M., sans l'autorisation de ces derniers, au sein de l'enregistrement phonographique de l'oeuvre « Goodbye », constitue une contrefaçon des droits voisins de la société GetDown et de Mme M. ;

- dit que le préjudice patrimonial subi par la société Get Down en qualité de productrice de l'enregistrement phonographique de l'oeuvre « The bridge is broken '', peut être évalué à 35% :

- des recettes de toute nature auxquelles la société Artiworks peut prétendre en contrepartie de l'exploitation de l'enregistrement phonographique de l''uvre « Goodbye » ;

- des sommes auxquelles la société Artiworks peut prétendre auprès de toute société de gestion collective au titre de la rémunération équitable et de la copie privée ;

- condamné in solidum M. Hadrien F. et la société Artiworks à payer à la société GetDown, la somme provisionnelle de 21.800 euros, à valoir sur la réparation de son préjudice ;

- enjoint à la société Artiworks de notifier à la société Warner Music France, avec laquelle elle a conclu un contrat de licence exclusive pour l'exploitation de l'enregistrement phonographique de l''uvre « Goodbye », une indication de paiement de 35% des sommes auxquelles la société Artiworks peut prétendre en exécution dudit contrat comme de toute autre convention ayant pour objet l'exploitation de l'enregistrement précité, au profit de Get Down, et ce pour toute la durée desdites conventions et de leurs éventuels renouvellement ;

- enjoint à la société Artiworks de modifier la déclaration des enregistrements de l'oeuvre « Goodbye » qu'elle a déclarés à la Société civile des producteurs phonographiques (Scpp) de telle manière que la société Get Down perçoive 35% des sommes auxquelles la société Artiworks peut prétendre au titre des sommes mises en répartition par la Scpp en relation avec lesdits enregistrements ;

- dit que la société Artiworks devra solliciter la société Get Down en vue de son éventuel accord préalable à toute exploitation de l'enregistrement litigieux et de tous ceux qui en seraient issus, distincte des formes d°exploitation auxquelles la société Warner Music France est autorisée à procéder en exécution du contrat de licence conclu avec la société Artiworks ;

- ordonné à la société Artiworks de communiquer à la société Get Down une copie certifiée conforme à l'original du contrat de licence conclu avec la société Warner Music France, ainsi qu'une copie de l'ensemble des redditions de comptes reçues de cette société en exécution dudit contrat, relatives aux enregistrements phonographiques de l''uvre « Goodbye » produits par la société Artiworks, sous quelque forme que ce soit, y compris incorporé dans un vidéogramme, et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard courant à l'expiration d'un délai de 30 jours suivant la signification du présent jugement et pendant six mois ;

- ordonné à la société Artiworks de communiquer à la société Get Down copie de l'ensemble des redditions de comptes établies par la Scpp certifiées conformes, et mentionnant la part de la rémunération équitable et de la copie privée allouée par la Scpp au titre des enregistrements phonographiques de l''uvre « Goodbye » déclarés auprès d'elle depuis leur inscription auprès de la SCPP, et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard courant à l'expiration d'un délai de 30 jours suivant la signification du présent jugement et pendant six mois ;

- ordonné à la société Artiworks de communiquer à la société Get Down tout document certifié conforme permettant de déterminer le détail de toute autre recette qu'elle aurait perçue au titre de l'exploitation de l'enregistrement de l''uvre « Goodbye » produit par la société Artiworks et des enregistrements qui en sont issus, sous quelque forme que ce soit, y compris incorporé dans un vidéogramme ou, à défaut, une attestation d`un expert comptable certifiant l'inexistence de recettes de cette nature, et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard courant à l'expiration d'un délai de 30 jours suivant la signification du présent jugement et pendant six mois ;

- dit que l'exploitation de l'enregistrement litigieux a porté atteinte au droit à la paternité de Mme M. en qualité d'artiste interprète;

- dit que le préjudice patrimonial subi par Mme M. en qualité d'artiste interprète de l''uvre « The bridge is broken '', peut être évalué à35% des sommes mises en répartition par l'ADAMI auprès de Mme Amie Lyse B. et M. Hadrien F., en leur qualité d'artistes interprètes de l'oeuvre « Goodbye » ;

- condamné in solidum la société Artiworks et M. Hadrien F. à payer à Mme M. la somme de 5.000 euros en réparation du préjudice résultant de l'atteinte à son droit moral ;

- enjoint à Mme Anne Lyse B. et M. Hadrien F. de modifier la déclaration de leurs interprétations de l'oeuvre « Goodbye » auprès de l'Adami afin que 35% des sommes auxquelles les précités peuvent prétendre en leur qualité d'artiste interprète de ladite 'uvre soit alloué à Mme M., et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard courant à l'expiration d`un délai de 30 jours suivant la signification du présent jugement et pendant six mois ;

- enjoint à la société Artiworks de faire respecter par chacun de ses cocontractants le droit moral de Mme M., en prenant toute mesure utile à ce que les mentions de crédit relatives aux enregistrements phonographiques de l'oeuvre « Goodbye » soient présentées en identifiant ses interprètes et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard courant à l'expiration d'un délai de 30 jours suivant la signification du présent jugement et pendant six mois ;

- enjoint à Mme Anne Lyse B. et à M. Hadrien F. de communiquer à Mme M. la copie certifiée conforme de l'ensemble des redditions de comptes que l'Adami leur a adressées respectivement au titre des redevances et/ou indemnités légales qu'elle a perçues à raison de l'utilisation et / ou de l'exploitation des enregistrements phonographiques de l''uvre « Goodbye », et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard courant à l'expiration d'un délai de 30 jours suivant la signification du présent jugement et pendant six mois ;

- s'est réservé la liquidation des astreintes ;

- renvoyé les parties à la détermination amiable du préjudice et, à défaut d'accord, à sa détermination judiciaire après nouvelle assignation ;

- condamné in solidum M. Hadrien F. et la société Artiworks aux dépens et autorisé Me Edouard M., avocat, à recouvrer directement ceux dont il aurait fait l'avance sans avoir reçu provision ;

- condamné in solidum M. Hadrien F. et la société Artiworks à payer la somme de 5 000 euros à Mme M. en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'une somme de 18.000 euros à la société Get Down sur le même fondement, cette somme incluant les frais de l'expertise réalisée par Mme Ruth B. ;

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement.

A la suite de l'assignation en référé par M. Hadrien F. et la société Artiworks, de la société Get Down, Mme M. et Mme B. devant M. Le premier président aux fins de l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement, les parties sont convenues d'aménager l'exécution provisoire de certaines dispositions de cette décision selon les termes d'un protocole en date du 11 mars 2020.

Par leurs dernières conclusions, la société Get Down, Mme M. et M. L. sollicitent de la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a retenu que M. F. et la société Artiworks ont commis une contrefaçon au préjudice de la société Get Down en reproduisant un extrait du phonogramme fixant l''uvre The bridge is broken, produit par cette dernière, au sein du phonogramme fixant l''uvre Goodbye (ci-après le « phonogramme contrefaisant ») ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a retenu que la reproduction de la prestation de Mme M. en qualité d'artiste-interprète au sein du phonogramme contrefaisant porte atteinte au droit moral dont elle est titulaire en cette qualité.

- déclarer Mme M. et M. L. recevables à se prévaloir de leur droit moral d'auteur sur l''uvre The bridge is broken ;

- déclarer Mme M. et M. L. recevables à se prévaloir de leurs droits patrimoniaux de reproduction mécanique et d'exécution publique du fait de la carence de la Sacemdans la défense desdits droits ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a retenu que l''uvre revendiquée à titre principal par Mme M. et M. L. se limiterait à un extrait de l''uvre The bridge is broken ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme M. et M. L. de leur demande tendant à voir juger que la reproduction d'un extrait de l''uvre The bridge is broken au sein de l''uvre Goodbye portait atteinte aux droits d'auteur dont ils sont titulaires sur l''uvre première ;

Et, statuant à nouveau,

- juger que la revendication de Mme M. et M. L. porte, à titre principal, sur l'originalité de l''uvre The bridge is broken dans son ensemble ;

- juger que l'originalité de l''uvre The bridge is broken n'est pas contestée ;

- juger que l''uvre The bridge is broken comprend un motif constitué d'une suite de douze notes articulées selon une métrique propre, exposé une première fois dans l'introduction de ladite 'uvre puis au sein de chacun de ses quatre couplets, de sorte que ce motif est présent dans plus de la moitié de l''uvre The bridge is broken ;

- juger que l'exposition de ce motif à l'introduction le rend « bien identifiable et mémorisable », comme l'a relevé Mme l'expert, que la récurrence de ce motif tout au long de celle-ci en fait une « ritournelle instrumentale » comme l'a également relevé Mme l'expert, venant au soutien de la ligne de chant et participant de la structure harmonique de l''uvre, et qu'il constitue de ce fait « un élément de composition caractéristique » de l''uvre The bridge is broken, comme l'a également relevé Mme l'Expert ;

- juger que la combinaison de ces différents éléments, fussent-ils dépourvus de protection pris isolément, participe de l'originalité de l''uvre The bridge is broken ;

- juger que la reproduction du motif précité à l'introduction puis pendant plus de la moitié de l''uvre Goodbye, constitue une reproduction partielle contrefaisante de l''uvre The bridge is broken, en ce que ledit extrait participe tant de l'originalité de l''uvre première que de l'originalité de l''uvre seconde ;

Et, à titre subsidiaire :

- juger que la combinaison mélodique de deux Sol# en croches, d'un accord en double-croche étouffé, arpégé, et renversé, la quinte Ré étant jouée avant la fondamentale à l'octave, pour finir par la tierce Si, suivi d'un quart de soupir, puis d'une attaque sur un Si en croche, le tout faisant l'objet d'une répétition, est original, en ce que Mme M. et M. L. ont pu exprimer leurs capacités créatives lors de cette composition, résultant de la combinaison des éléments précités, fussent-ils dépourvus de protection pris isolément, en effectuant des choix libres et créatifs, aucune antériorité ne leur étant par ailleurs utilement opposée ;

- juger dès lors que la reproduction de la combinaison précitée à l'introduction puis pendant plus de la moitié de l''uvre Goodbye constitue une contrefaçon de l''uvre en cause.

En conséquence :

- condamner M. F. et Mme B. à communiquer à Mme M. et M. L. copie de l'ensemble des redditions de comptes établies par la Sacem et la Sdrm et mentionnant la part de redevances leur ayant été payée respectivement à raison de l'exploitation de l''uvreGoodbye, sous astreinte de mille (1000) euros par jour de retard au terme d'un délai de trente (30) jours ouvrés suivant la signification de l'arrêt à intervenir, et pour une durée d'un an ;

- condamner solidairement l'ensemble des personnes ayant concouru au dommage, soit M. F., Mme B., la société District 6, et la société Artiworks à payer à Mme M. et M. L. quatre-vingt pour cent (80%) du total des sommes réparties auprès de M. F. et Mme B. par la Sacem et la Sdrm au titre de l''uvre Goodbye jusqu'à la dernière répartition incluse intervenue avant la date du prononcé de l'arrêt à intervenir, concomitamment à la remise des documents visés au paragraphe précédent, à charge pour Mme M. et M. L. de répartir cette somme entre eux par moitié ;

- condamner la société District 6, M. F. et Mme B., en leur qualité d'ayants droits de l''uvre Goodbye, à régulariser auprès de la Sacem un bulletin rectificatif de l''uvreGoodbye mentionnant que la part à revenir à Mme M. et M. L. au titre des droits d'exécution publique et de reproduction mécanique perçus à raison des exploitations de l''uvre autorisées par la Sacem et la Sdrm correspond à 80% de la part initialement allouée aux auteurs et compositeurs de ladite 'uvre, sans que celle-ci puisse toutefois être inférieure à la moitié du total des droits de reproduction mécanique et aux deux tiers du total des droits d'exécution publique mis en répartition auprès de l'ensemble des ayants droits déclarés initialement, et ce au plus tard trente (30) jours avant la prochaine répartition suivant la date de prononcé de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard au terme d'un délai de trente (30) jours suivant la signification de l'arrêt à intervenir, et pour une durée d'un an ;

- condamner solidairement l'ensemble des personnes ayant concouru au dommage, soit M. F., Mme B., la société District 6 et la société Artiworks à payer à Mme M. et M. L. respectivement euros 10 000 euros en réparation de l'atteinte portée à leur droit moral d'auteur ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. L. de ses demandes fondées sur sa qualité d'artiste-interprète ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a évalué le préjudice patrimonial subi par Mme M. en qualité d'artiste-interprète à 35% des sommes mises en répartition par l'ADAMI auprès de Mme B. et M. F., en leur qualité d'artistes-interprètes du phonogramme contrefaisant ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a évalué à 5.000 euros le préjudice résultant de l'atteinte portée au droit moral de Mme M. ;

Et, statuant à nouveau :

- juger que M. L. dispose, conjointement avec Mme M., de la qualité d'artiste-interprète de l'enregistrement phonographique de l''uvre The bridge is broken produit par la société Get Down ;

- juger que le préjudice patrimonial causé par l'enregistrement B à Mme M. et M. L. en leur qualité d'artiste-interprète doit être réparé par l'octroi de 80% des sommes mises en répartition par l'Adami ou toute autre société de gestion collective de droits voisins auprès de Mme B. et M. F. au titre de la copie privée et de la rémunération équitable générées par l'enregistrement contrefaisant ;

- condamner Mme B., sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé le délai de 30 jours à compter de la signification du présent arrêt et pour une durée de trois ans, à communiquer une copie certifiée conforme des redditions de comptes qui lui ont été adressées par l'Adami et afférentes aux paiements qu'elle a reçus au titre de l'exploitation de l'enregistrement litigieux jusqu'au premier semestre 2019 inclus ;

- condamner Mme B. et M. F. solidairement à payer à Mme M. et M. L. la somme de 25 223,57 euros, en réparation du préjudice causé jusqu'au 1er semestre 2019 inclus, à répartir à parts égales entre eux, dont 8 661,09 euros déjà acquittés auprès d'un séquestre, et à parfaire à l'aune des paiements reçus par Mme B. pendant la période considérée ;

- condamner M. F. et Mme B., sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé le délai de 30 jours à compter de la signification du présent arrêt et pour une durée d'un an, à modifier la déclaration de l'enregistrement contrefaisant auprès de l'Adamiafin que 80% des sommes auxquelles Mme B. et M. F. peuvent respectivement prétendre en leur qualité d'artiste-interprète dudit enregistrement soit alloué à parts égales entre Mme M. et M. L. ;

- condamner Mme B., sous astreinte de mille euros par jour de retard dans un délai de trente jours suivant la signification de l'arrêt à intervenir, et pendant une durée d'un an, à :

- communiquer à Mme M. et M. L. une copie certifiée conforme de chaque reddition de comptes qui lui a été adressée par l'Adami depuis l'origine de l'exploitation jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir ;

- payer à Mme M. et M. L. 80% des sommes visées dans les redditions de comptes précitées ;

- condamner solidairement la société Artiworks et M. F. à payer à Mme M. et M. L. respectivement la somme de 25 000 euros en réparation de l'atteinte portée à leur droit moral (dont 5 000 euros d'ores et déjà payés à Mme M.) ;

- condamner la société Artiworks à faire mention de l'emprunt réalisé à l'interprétation de l''uvre The bridge is broken par Mme M. et M. L. telle que publiée sur l'album A Mouthful, en associant la mention « feat. The » à toute mention faisant état de la qualité de M. F. et/ou de Mme B. en tant qu'artiste-interprète du phonogramme contrefaisant, ainsi qu'à veiller au respect de cette obligation par ses cocontractants.

- infirmer le jugement en ce qu'il a évalué le préjudice patrimonial subi par la société Get Down à raison de la contrefaçon d'un extrait de l'enregistrement phonographique de l''uvre The bridge is broken à 35% des recettes de toute nature auxquelles la société Artiworks peut prétendre en contrepartie de l'exploitation du phonogramme contrefaisant ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a renvoyé à une détermination amiable dudit préjudice, ou par voie de nouvelle assignation à défaut ;

Et, statuant à nouveau :

- juger que le préjudice patrimonial subi par la société Get Down doit être évalué à 80 % des encaissements de toute nature perçus par la société Artiworks à raison de l'exploitation du phonogramme contrefaisant, après majoration par application de l'article L. 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle ;

- condamner la société Artiworks à payer à la société Get Down la somme de 310 572 euros, dont 181 212 euros restant à percevoir, en réparation du préjudice subi par la société Get Down jusqu'au terme du 1er semestre 2020, à parfaire ;

- condamner la société Artiworks, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé le délai de 30 jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, à :

- communiquer tout document certifié conforme permettant de déterminer le détail de toute autre recette que la société Artiworks aurait perçue au titre de l'exploitation de l'enregistrement de l''uvre « Goodbye » produit et des enregistrements qui en sont issus, sous quelque forme que ce soit, y compris incorporé dans un vidéogramme ou, à défaut, une attestation d'un Expert-Comptable certifiant l'inexistence de recettes de cette nature ; et pour une durée d'un an, à :

- procéder aux paiements subséquents, s'il y a lieu ;

- condamner la société Artiworks, pour la période courant à compter du second semestre 2020, sous astreinte de 1000 euros par jour de retard passé le délai de 30 jours à compter de la signification du présent arrêt et pour une durée de trois ans, à :

- communiquer à la société Get Down une copie certifiée conforme par leur auteur de toute reddition de comptes qui seront adressées par un tiers à la société Artiworks et relative à l'exploitation du phonogramme contrefaisant à compter du second semestre 2020, dans les trente jours de leur réception par la société Artiworks ;

- informer la société Get Down par écrit de la réception de tout paiement adressé par un tiers à la société Artiworks et relatif à l'exploitation du phonogramme contrefaisant à compter du second semestre 2020, dans les sept jours de ladite réception ;

- payer à la société Get Down 80 % de tout encaissement reçu par la société Artiworks à compter du second semestre 2020 et ayant pour cause l'exploitation du phonogramme contrefaisant, dans les trente jours de sa réception par Artiworks ;

- solliciter la société Get Down en vue de son éventuel accord préalable à la conclusion de tout acte ayant pour objet l'exploitation du phonogramme contrefaisant ;

- adresser une lettre signée de l'expert-comptable de la société Artiworks ou de toute société qui lui succéderait, dans les trente jours de l'arrêté des comptes annuels, chaque année, certifiant que la société Artiworks s'est acquittée de l'intégralité des créances dues à la société Get Down pour l'exercice clos, ou à défaut, le solde lui restant dû.

- juger que le réenregistrement d'une copie servile d'un extrait de l'enregistrement de l''uvre The bridge is broken par la société Artiworks et M. F. constitue des actes de parasitisme au préjudice de la société Get Down ;

- condamner solidairement M. F. et la société Artiworks à payer à la société GetDown la somme de 100.000 euros en réparation du préjudice subséquent.

- juger que la copie servile d'un extrait de l''uvre The bridge is broken par M. F. dans l''uvre Goodbye constitue un agissement parasitaire à l'égard de Mme M. et M. L. ;

- condamner M. F. à payer la somme de 100.000 euros à Mme M. et la même somme à M. L. en réparation du préjudice causé par les actes de parasitisme ;

- juger que la société Get Down et Mme M. peuvent opposer les dispositions de l'article 6 du protocole à M. F., la société Artiworks, et Mme B. depuis le 2 décembre 2020, soit quinze jours suivant la signification des conclusions de la société GetDown n°2 ;

En tout état de cause

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Artiworks et M. F. au paiement des dépens et de la somme de 5 000 euros à Mme M. en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'une somme de 18.000 euros à la société Get Down sur le même fondement, cette somme incluant les frais de l'expertise réalisée par Mme Ruth B. ;

- condamner solidairement les sociétés Artiworks, District 6 Publishing France et M. F. au titre de la procédure d'appel, aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Jeanne B., ainsi qu'au paiement de la somme de 25 000 euros à Mme M. et M. L., et à la même somme à la société Get Down en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par leurs dernières conclusions, la société Artiworks, M. F. et la société District 6 France Publishing (District 6) sollicitent de la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes dirigées contre la Sacem, l'Adami et la société Warner Music France ;

- déclarer, en tant que de besoin, M. L. et Mme M. irrecevables en leurs demandes fondées sur leurs droits patrimoniaux afférents à l''uvre « The bridge is broken » dès lors que ces droits ont été cédés à la société Kraked et en toute hypothèse apportésà la Sacem ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les demandes fondées sur la contrefaçon de droit d'auteur ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que M. L. n'a pas la qualité d'artiste-interprète de l'extrait litigieux ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les demandes subsidiaires fondées sur le parasitisme ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la reproduction d'un extrait de l'enregistrement phonographique de l''uvre « The bridge is broken » produit par la société Get Down et interprété par Mme M., sans l'autorisation de ces derniers, au sein de l'enregistrement phonographique de l''uvre « Goodbye », constitue une contrefaçon des droits voisins de la société Get Down et de Mme M. ;

En conséquence :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que le préjudice patrimonial subi par la société Get Down en qualité de productrice de l'enregistrement phonographique de l''uvre « The bridge is broken », peut être évalué à 35% :

- des recettes de toute nature auxquelles la société Artiworks peut prétendre en contrepartie de l'exploitation de l'enregistrement phonographique de l''uvre « Goodbye » ; - des sommes auxquelles la société Artiworks peut prétendre auprès de toute société de gestion collective au titre de la rémunération équitable et de la copie privée ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné in solidum M. F. et la société Artiworks à payer à la société Get Down, la somme provisionnelle de 21.800 euros, à valoir sur la réparation de son préjudice ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a enjoint à la société Artiworks de notifier à la société Warner Music France, avec laquelle elle a conclu un contrat de licence exclusive pour l'exploitation de l'enregistrement phonographique de l''uvre « Goodbye », une indication de paiement de 35% des sommes auxquelles la société Artiworks peut prétendre en exécution dudit contrat comme de toute autre convention ayant pour objet l'exploitation de l'enregistrement précité, au profit de la société GetDown, et ce pour toute la durée desdites conventions et de leurs éventuels renouvellement ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a enjoint à la société Artiworks de modifier la déclaration des enregistrements de l''uvre « Goodbye » qu'elle a déclarés à la Société civile des producteurs phonographiques (Scpp) de telle manière que la société Get Down perçoive 35% des sommes auxquelles la société Artiworks peut prétendre au titre des sommes mises en répartition par la Scpp en relation avec lesdits enregistrements ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la société Artiworks devra solliciter la société Get Down en vue de son éventuel accord préalable à toute exploitation de l'enregistrement litigieux et de tous ceux qui en seraient issus, distincte des formes d'exploitation auxquelles la société Warner Music France est autorisée à procéder en exécution du contrat de licence conclu avec la société Artiworks ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné à la société Artiworks de communiquer à la société Get Down une copie certifiée conforme à l'original du contrat de licence conclu avec la société Warner Music France, ainsi qu'une copie de l'ensemble des redditions de comptes reçues de cette société en exécution dudit contrat, relatives aux enregistrements phonographiques de l''uvre « Goodbye » produits par la société Artiworks, sous quelque forme que ce soit, y compris incorporé dans un vidéogramme, et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard courant à l'expiration d'un délai de 30 jours suivant la signification du présent jugement et pendant six mois ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné à la société Artiworks de communiquer à la société Get Down copie de l'ensemble des redditions de comptes établies par la Scpp certifiées conformes, et mentionnant la part de la rémunération équitable et de la copie privée allouée par la Scpp au titre des enregistrements phonographiques de l''uvre « Goodbye » déclarés auprès d'elle depuis leur inscription auprès de la Scpp, et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard courant à l'expiration d'un délai de 30 jours suivant la signification du présent jugement et pendant six mois ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné à la société Artiworks de communiquer à la société Get Down tout document certifié conforme permettant de déterminer le détail de toute autre recette qu'elle aurait perçue au titre de l'exploitation de l'enregistrement de l''uvre « Goodbye » produit par la société Artiworks et des enregistrements qui en sont issus, sous quelque forme que ce soit, y compris incorporé dans un vidéogramme ou, à défaut, une attestation d'un expert-comptable certifiant l'inexistence de recettes de cette nature, et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard courant à l'expiration d'un délai de 30 jours suivant la signification du présent jugement et pendant six mois ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que l'exploitation de l'enregistrement litigieux a porté atteinte au droit à la paternité de Mme M. en qualité d'artiste-interprète; dit que le préjudice patrimonial subi par Mme M. en qualité d'artiste-interprète de l''uvre « The bridge is broken », peut être évalué à 35% des sommes mises en répartition par l'Adami auprès de Mme B. et M. F., en leur qualité d'artistes-interprètes de l''uvre « Goodbye » ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné in solidum la société Artiworks et M. F. à payer à Mme M. la somme de 5.000 euros en réparation du préjudice résultant de l'atteinte à son droit moral ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a enjoint à Mme B. et M. F. de modifier la déclaration de leurs interprétations de l''uvre « Goodbye » auprès de l'Adami afin que 35% des sommes auxquelles les précités peuvent prétendre en leur qualité d'artiste-interprète de ladite 'uvre soit allouées à Mme M., et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard courant à l'expiration d'un délai de 30 jours suivant la signification du présent jugement et pendant six mois ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a enjoint à la société Artiworks de faire respecter par chacun de ses cocontractants le droit moral de Mme M., en prenant toute mesure utile à ce que les mentions de crédit relatives aux enregistrements phonographiques de l''uvre « Goodbye » soient présentées en identifiant ses interprètes et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard courant à l'expiration d'un délai de 30 jours suivant la signification du présent jugement et pendant six mois ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a enjoint à Mme B. et à M. F. de communiquer à Mme M. copie certifiée conforme de l'ensemble des redditions de comptes que l'Adami leur a adressées respectivement au titre des redevances et/ou indemnités légales qu'elle a perçues à raison de l'utilisation et/ ou de l'exploitation des enregistrements phonographiques de l''uvre « Goodbye », et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard courant à l'expiration d'un délai de 30 jours suivant la signification du présent jugement et pendant six mois ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il s'est réservé la liquidation des astreintes ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a renvoyé les parties à la détermination amiable du préjudice et, à défaut d'accord, à sa détermination judiciaire après nouvelle assignation ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné in solidum M. F. et la société Artiworks aux dépens et autorisé Me Edouard M., avocat, à recouvrer directement ceux dont il aurait fait l'avance sans avoir reçu provision ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné in solidum M. F. et la société Artiworks à payer la somme de 5.000 euros à Mme M. en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'une somme de 18.000 euros à la société GetDown sur le même fondement, cette somme incluant les frais de l'expertise réalisée par Mme Ruth B. ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné l'exécution provisoire du jugement ;

Par conséquent, et statuant à nouveau :

A titre principal :

- dire et juger que c'est à tort que le tribunal a inversé la charge de la preuve et retenu une présomption de sample ;

- dire et juger que M. F. et la société Artiworks ont démontré qu'aucun « sample » de l'enregistrement « The bridge is broken » ne peut être caractérisé au sein de l'enregistrement « Goodbye » et que le phonogramme « Goodbye » ne constitue donc pas la contrefaçon du phonogramme « The Bridge Is Broken » ;

- débouter purement et simplement la société Get Down, Mme M. et M. L. de leur action fondée sur la contrefaçon de l'enregistrement « The bridge is broken » ;

- débouter la société Get Down, Mme M. et M. L. de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

A titre subsidiaire :

- dire et juger que les demandes de Mme M. doivent être rejetées dès lors qu'elle ne dispose pas de la qualité « d'artiste-interprète » de l'extrait litigieux prétendument repris par M. F. ;

A titre infiniment subsidiaire :

- débouter la société Get Down, Mme M. et M. L. de l'ensemble des mesures sollicitées et notamment de leur demande de communication d'éléments, de modification de documentations et de condamnations pécuniaires, et, si par extraordinaire un sample serait caractérisé, ramener à de plus justes proportions les condamnations prononcées ;

- débouter la société Get Down et Mme M. de leur demande fondée sur l'inexécution du protocole ;

En tout état de cause :

- condamner la société Get Down, Mme M. et M. L. à payer à la société Artiworks, à M. F. et à la société District 6 France Publishing la somme de 25.000 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Get Down, Mme M. et M. L. aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction pour ceux d'appel au profit de la Selarl Bdlavocats en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par ses dernières conclusions, la société Kraked demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté le moyen d'irrecevabilité tiré du défaut de production de la partition de l''uvre The bridge is broken ;

- la juger éditrice de l''uvre The bridge is broken et recevable à agir en défense des droits patrimoniaux afférents à l'oeuvre A ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté ses demandes fondées sur le droit d'auteur au motif que l'examen de l'originalité ne peut porter que sur la partie d''uvre sur laquelle des droits et un monopole sont revendiqués ;

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande tendant à voir juger que la reproduction d'un extrait de l''uvre The bridge is broken au sein de l''uvreGoodbye portait atteinte aux droits d'auteur dont elle est titulaire sur l''uvre The bridge is broken;

Et, statuant à nouveau :

- juger que la reproduction d'un extrait de l''uvre The bridge is broken au sein de l''uvre Goodbye, correspondant à la combinaison de deux Sol# à la croche, puis d'un accord étouffé et renversé, la quinte Ré étant jouée avant la fondamentale Sol bécarre pour finir par la tierce Si, en arpège à la double croche, suivi d'un quart de soupir, suivi d'une résolution sur la note de Sol# à la croche, l'ensemble étant répété pendant plus de la moitié de l''uvre Goodbye, constitue une reproduction partielle contrefaisante, en ce que ledit extrait participe tant de l'originalité de l''uvre The bridge is broken que de l'originalité de l''uvre Goodbye, et qu'il est en tout état de cause original.

- infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de Mme M. et M. L. fondées sur la contrefaçon de droits d'auteur de l''uvre The bridge is broken par l''uvreGoodbye ;

Et, statuant à nouveau :

- condamner la société District 6, M. F. et Mme B. à lui communiquer copie de l'ensemble des redditions de comptes établies par la Sacem et la Sdrm et mentionnant la part de redevances leur ayant été payée respectivement à raison de l'exploitation de l''uvre Goodbye, sous astreinte de 100 euros par jour de retard au terme d'un délai de sept (7) jours ouvrés suivant la signification de l'arrêt à intervenir ;

- condamner solidairement la société District 6, M. F. et Mme B. à lui payer 80% des droits d'auteur générés par l'exploitation de l''uvre Goodbye à compter de sa divulgation jusqu'à la date du prononcé du jugement à intervenir (à répartir auprès de Mme M. et M. L., selon les termes du contrat de cession et d'édition conclu avec eux), concomitamment à la remise des documents visés au paragraphe précédent, sous astreinte de 500 euros par jour de retard au terme d'un délai de sept jours ouvrés suivant la signification de l'arrêt à intervenir ;

- condamner solidairement la société District 6, M. F. et Mme B. à lui verser une provision de 1.763 euros (soit 80% des recettes estimées), à répartir par elle entre elle, Mme M. et M. L., selon les termes du contrat de cession et d'édition conclu entre eux ;

- interdire à la société District 6, M. F. et Mme B., seuls ou conjointement, sans son accord préalable, sous astreinte de 10 .000 euros par manquement constaté au terme d'un délai de 7 jours ouvrés suivant la signification de l'arrêt à intervenir ;

- ordonner à la société District 6, M. F. et Mme B., de redéposer auprès des services de la Sacem un nouveau bulletin de déclaration de l''uvre Goodbye la mentionnant comme bénéficiaire de 80% de la part éditoriale (selon les conditions fixées par les règles sociales des organismes de gestion collective), sous astreinte de 500 euros par jour de retard au terme d'un délai de 7 jours ouvrés à compter de la signification de l'arrêt à intervenir. A titre subsidiaire,

- infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de Mme M. et M. L. fondées sur le parasitisme ;

Et, statuant à nouveau :

- juger que la copie servile d'un extrait de l''uvre « The bridge is broken » par M. F. dans l''uvre « Goodbye » constitue un agissement parasitaire à son égard ;

- condamner la société District 6 à lui payer la somme de 50.000 euros en réparation du préjudice causé par les actes de parasitisme ;

A titre subsidiaire, avant dire-droit,

- commettre tout expert qu'il lui plaira, avec pour mission de :

e) se faire remettre les enregistrements des 'uvres « The bridge is broken » et « Goodbye » tels qu'ils ont été déposés à la Sacem ;

f) procéder à la comparaison des éléments composant les 'uvres « The bridge isbroken » et « Goodbye » et relever les similitudes existant entre celles-ci dans la mélodie, l'harmonie, la construction rythmique, l'orchestration ;

g) examiner les antériorités présentées, le cas échéant ;

h) donner son avis sur la qualification du travail du compositeur de l''uvre « Goodbye » par rapport à l''uvre « The bridge is broken » et donner son avis sur l'importance quantitative et qualitative de l'emprunt de l''uvre « Goodbye» à l''uvre « The bridge isbroken », le cas échéant en consultant des sachants tels que musiciens, compositeurs et professeurs de musique.

En tout état de cause :

- condamner solidairement la société District 6, M. F. et Mme B. :

- aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Jim M.-G.,

- et, en application de l'article 700 du code de procédure civile :

- à lui payer la somme de 23.850euros (dont 3.850euros au titre des honoraires de Mme l'Expert Ruth B.), au titre de la procédure en première instance ;

- à lui payer la somme de 30.000 euros au titre de la procédure en appel.

Par ses dernières conclusions, Mme Anne-Lyse B. demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes dirigées contre la Sacem, l'Adami et la société Warner Music France ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les demandes fondées sur la contrefaçon de droit d'auteur ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que M. L. n'a pas la qualité d'artiste-interprète de l'extrait litigieux ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les demandes subsidiaires fondées sur le parasitisme ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la reproduction d'un extrait de l'enregistrement phonographique de l''uvre « The bridge is broken » produit par la société Get Down et interprété par Mme M., sans l'autorisation de ces derniers, au sein de l'enregistrement phonographique de l''uvre « Goodbye », constitue une contrefaçon des droits voisins de la société Get Down et de Mme M. ;

En conséquence :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que l'exploitation de l'enregistrement litigieux a porté atteinte au droit à la paternité de Mme M. en qualité d'artiste-interprète; dit que le préjudice patrimonial subi par Mme M. en qualité d'artiste-interprète de l''uvre « The bridge is broken », peut être évalué à 35% des sommes mises en répartition par l'Adami auprès d'elle et M. F., en leur qualité d'artistes-interprètes de l''uvre « Goodbye » ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il lui a enjoint ainsi qu'à M. F. de modifier la déclaration de leurs interprétations de l''uvre « Goodbye » auprès de l'Adami afin que 35% des sommes auxquelles les précités peuvent prétendre en leur qualité d'artiste-interprète de ladite 'uvre soit allouées à Mme M., et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard courant à l'expiration d'un délai de 30 jours suivant la signification du présent jugement et pendant six mois ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il lui a enjoint ainsi qu'à M. F. de communiquer à Mme M. copie certifiée conforme de l'ensemble des redditions de comptes que l'Adami leur a adressées respectivement au titre des redevances et/ou indemnités légales qu'elle a perçues à raison de l'utilisation et/ ou de l'exploitation des enregistrements phonographiques de l''uvre « Goodbye », et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard courant à l'expiration d'un délai de 30 jours suivant la signification du présent jugement et pendant six mois ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il s'est réservé la liquidation des astreintes ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a renvoyé les parties à la détermination amiable du préjudice et, à défaut d'accord, à sa détermination judiciaire après nouvelle assignation ;

Par conséquent, et statuant à nouveau :

A titre liminaire :

- débouter la société Get Down, Mme M. et M. L. de leur action fondée sur la contrefaçon de droits voisins par reproduction d'un extrait de l'enregistrement « The bridge is broken » au sein de l'enregistrement « Goodbye » ;

- débouter la société Kraked de son action fondée sur la contrefaçon de droit d'auteur par reproduction d'un extrait de l''uvre« The bridge is broken » au sein de l'oeuvre « Goodbye » ;

- débouter les sociétés Kraked et Get Down ainsi que Mme M. et M. L. de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions à son égard de quels que soient les moyens invoqués ;

A titre principal, si par extraordinaire la cour confirmait le jugement du chef de contrefaçon de droits voisins de la société Get Down et de Mme M. :

- débouter Mme M. de son action fondée sur l'atteinte à son droit moral en tant qu'artiste-interprète sur l'enregistrement « The bridge is broken » faute pour elle d'avoir la qualité « d'artiste-interprète » de l'extrait litigieux prétendument repris par elle ;

- débouter la société Get Down, M. L. et Mme M. de leur action fondée sur la contrefaçon de l'enregistrement « The bridge is broken » ;

- débouter Mme M., M. L. et la société Get Down de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions à son égard, quels que soient les moyens invoqués ;

A titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour confirmait le jugement du chef de l'atteinte au droit à la paternité de Mme M. en qualité d'artiste-interprète,

- dire et juger que la contribution litigieuse de Mme M. n'est pas une interprétation principale relevant de l'Adami mais une interprétation secondaire relevant de la Spedidam ;

- débouter Mme M., M. L. et la société Get Down de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions à son égard, quels que soient les moyens invoqués.

Plus subsidiairement,

- dire et juger que le périmètre des actes de contrefaçon et des atteintes au droit moral de Mme M., limités à la partie musicale de l'enregistrement litigieux, lui est étranger en sa qualité d'interprète vocale de la chanson « Goodbye ».

- dire et juger que toute part des droits voisins versés par l'Adami en vertu de ses statuts à elle en qualité de seule interprète vocale de la chanson « Goodbye » ne saurait être impactée par toute attribution d'une part de tels droits à Mme M., devant nécessairement et exclusivement être imputée sur la part de M. F. ;

- débouter la société Get Down, Mme M. et M. L. de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions à son égard quels que soient les moyens invoqués ;

A titre infiniment subsidiaire,

- ramener à de plus justes proportions le préjudice fixé et le pourcentage correspondant si par extraordinaire la cour confirmait le jugement en ce qu'il lui enjoint à modifier ses déclarations Adami ;

- condamner M. F. et les sociétés District 6 et Artiworks à la garantir de toutes condamnations quelles qu'elles soient, y compris financières à son égard.

En tout état de cause :

- condamner solidairement les sociétés Get Down et Kraked, Mme M. et M. L. à lui payer une somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner solidairement les sociétés Get Down et Kraked, Mme M. et M. L. aux entiers dépens de l'instance.

A titre liminaire, la cour constate que les chefs du jugement déclarant irrecevables les demandes dirigées contre la Sacem, l'Adami et la société Warner Music France et rejetent toutes les autres fins de non-recevoir ne sont pas critiqués en cause d'appel et qu'il n'y a pas lieu de statuer de ces chefs, la cour n'en étant pas saisie.

- Sur la recevabilité à agir de Mme M. et M. L. sur le fondement des droits patrimoniaux d'auteur

Aux termes de l'article L. 321-1, alinéa 2, du code de la propriété intellectuelle, les sociétés de perception et de répartition des droits d'auteur et des droits des artistes-interprètes et des producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes 'ont qualité pour ester en justice pour la défense des droits dont elles ont statutairement la charge'.

Il n'est pas discuté que par contrat de cession et d'édition d'oeuvre musicale en date du 1er novembre 2005, Mme M. et M. L. ont cédé à la société Kraked les droits patrimoniaux sur l'oeuvre 'The bridge is broken' arguée de contrefaçon, cette oeuvreayant fait l'objet d'un dépôt à la Sacem le 2 janvier 2006 mentionnant la société Kraked en qualité d'éditeur. Selon le contrat du 1er novembre 2005, le droit de propriété cédé à la société éditrice comporte la totalité du droit exclusif d'exploitation de l'oeuvre sous quelque forme et par quelque moyen que ce soit et comprend notamment la totalité du droit de reproduction et la totalité du droit de représentation et d'exécution publique et d'une manière générale la totalité des droits qui sont et seront reconnus et attribués aux auteurs sur leurs oeuvres par les dispositions législatives et réglementaires.

Le jugement déféré n'a pas statué sur la recevabilité à agir des auteurs sur le fondement des droits patrimoniaux mais a rejeté leurs demandes sur le fondement du droit d'auteur faute d'originalité de l'extrait de l'oeuvre 'The bridge is broken' argué de contrefaçon.

Selon l'article 1er des statuts de la Sacem les auteurs compositeurs et éditeurs membres de la Sacem lui font apport à titre exclusif du seul fait de leur adhésion à ces statuts du droit d'autoriser et d'interdire l'exécution ou la représentation publique ainsi que la reproduction mécanique de leurs oeuvres.

Mme M. et M. L. ayant cédé à la société Kraked leurs droits patrimoniaux sur l'oeuvre, seule cette dernière est recevable à agir sur ce fondement.

En conséquence, les demandes de Mme M. et M. L. formées au titre de la contrefaçon de leurs droits patrimoniaux d'auteur sont irrecevables. En revanche, ils sont recevables à agir au titre de l'atteinte à leur droit moral d'auteur.

En application de l'article 1er des statuts de la Sacem, la société Kraked ayant, par son adhésion, fait apport de l'exercice de ses droits patrimoniaux, est irrecevable, sauf carence de cette société, à agir personnellement en défense de ceux-ci.

Il ressort des éléments fournis au débat par la société Kraked que celle-ci a informé la Sacem de l'existence du titre litigieux le 28 septembre 2015, la société d'auteurs ayant répondu par courriel du 19 novembre 2015 qu'une lettre va être adressée aux ayants droits de l'oeuvre 'Goodbye'. Par courriel du 15 décembre 2015, la Saceminformait la société Kraked qu'à la suite d'une contestation de l'éditeur de l'oeuvre'Goodbye', une expertise musicale comparative allait être soumise à la commission des compositeurs du conseil d'administration. Cette analyse est datée du 6 janvier 2016. Par lettre du 5 février 2016, la société d'auteurs informait la société Krakedque la commission des compositeurs du conseil d'administration a estimé qu'il n'existait pas de ressemblance caractérisée entre les deux oeuvres au sens de l'article 33 du règlement général de la Sacem et renvoie l'appréciation de la contrefaçon à la compétence des tribunaux judiciaires.

Il ressort de ce qui précède que la Sacem, informée par la société Kraked des suspicions de contrefaçon que porte cette dernière à l'encontre de l'oeuvre 'Goodbye' a fait le choix de ne pas prendre les mesures qui sont de nature à sauvegarder les intérêts de la société Kraked.

En conséquence, la société Kraked qui démontre la carence de la Sacem à agir, est recevable à agir sur le fondement des droits patrimoniaux d'auteur dont elle dispose sur l'oeuvre 'The bridge is broken'.

Mme M. et M. L. sont quant à eux recevables à agir au titre de l'atteinte à leur droit moral d'auteur.

- Sur les atteintes au droit d'auteur

L'article L.111-1, alinéa 1er, du code de la propriété intellectuelle dispose que : 'L'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous'.

L'article L.112-1 du même code ajoute que : 'Les dispositions du présent code protègent les droits des auteurs sur toutes les oeuvres de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination'.

L'article L.112-2, 5°, précise encore que sont notamment considérées comme oeuvres de l'esprit 'les compositions musicales avec ou sans paroles'.

Une oeuvre de l'esprit ne peut cependant bénéficier de la protection par le droit d'auteur qu'à la condition qu'elle soit originale c'est-à-dire lorsqu'elle porte 'l'empreinte de la personnalité de son auteur', la notion d'antériorité étant inopérante en droit d'auteur.

Mme M. et M. L. se disent auteurs de l'oeuvre musicale 'The bridge is broken' dont la société Get Down est la productrice et la société Kraked l'éditrice.

Ils invoquent à l'appui de leur action l'oeuvre musicale 'The bridge is broken' telle que figurant sur l'album du groupe The intitulé 'A mouthful' divulgué au public le 16 janvier 2008 (pièce 3 de la société Get Down, Mme M. et M. L.). Cet enregistrement sonore est suffisant pour procéder à l'analyse de l'oeuvre.

Mme M. et M. L. ainsi que la société Kraked reprochent au titre de la contrefaçon du droit d'auteur à M. F. et à Mme B. d'avoir reproduit un extrait de l'oeuvre 'The bridge is broken' ainsi identifiée, dans l'oeuvre 'Goodbye' déposée à la Sacem le 20 novembre 2014 telle que fixée dans l'enregistrement commercialisé par la société Warner Music dont M. F. et Mme B. sont co-auteurs.

L'originalité de l'oeuvre 'The bridge is broken' revendiquée doit être appréciée dans son ensemble au regard des différents éléments, fussent-ils connus, qui la composent, pris en leur combinaison.

Il convient de relever avec la société Get Down, Mme M. et M. L. que l'originalité de l'oeuvre 'The Bride Is Broken' précédemment identifiée, prise dans son ensemble, n'est pas contestée.

Les parties d'une oeuvre considérée comme originale sont protégées par le droit d'auteur dès lors qu'elles participent comme telles à l'originalité de l'oeuvre entière.

Mme M. et M. L., se fondant sur l'avis technique établi par Mme Ruth B. le 20 novembre 2017 à la demande de la société Kraked et des membres du groupe The (Mme M. et M. L.), dont la valeur probante n'est pas utilement contestée par M. F. et les sociétés Artiworks et District 6 ce quand bien même il ne se base pas sur des partitions, l'expert ayant bien identifié les oeuvres enregistrées qu'il a examinées, expliquent que l'oeuvre comprend un motif constitué d'une suite de douze notes articulées selon une métrique propre, exposé une première fois dans l'introduction de l'oeuvre, puis au sein de chacun des quatre couplets de ladite 'uvre, l'exposition de ce motif à l'introduction le rendant « bien identifiable et mémorisable », sa reprise dans chaque couplet venant au soutien de la ligne de chant et participant de la structure harmonique de l''uvre, la récurrence de ce motif tout au long de celle-ci en faisant une « ritournelle instrumentale » et, partant, « un élément de composition caractéristique » de l'oeuvre, la combinaison de ces différents éléments, fussent-ils dépourvus de protection pris isolément, participant de l'originalité de l'oeuvre.

Néanmoins, ainsi que le font valoir à juste titre M. F. et les sociétés Artiworks et District 6, il ressort de la partition de l'oeuvre 'The bridge is broken' fournie au débat par la société Kraked (pièce 57) que l'accord litigieux résultant de l'enregistrement sur lequel se fondent Mme M. et M. L. ainsi que l'expert technique Ruth B. est un 'accident d'interprétation' ou 'accident de justesse' qui figure uniquement en introduction de l'oeuvre première et n'est pas repris dans chaque couplet, ledit accord étant par la suite joué de manière plaquée et intégrée à une suite d'accords, étant relevé que le rapport technique établi par la Sacem et précédemment cité, ne relève que la première mesure de l'oeuvre 'The bridge is broken' et précise que sa durée est de moins de 2 secondes. Ces éléments ressortent également des conclusions du rapport amiable établi le 7 novembre 2018 par M. Gérard S. à la demande de M. F. et des sociétés Artiworks et District 6, selon lesquelles l'analyse musicale comparative effectuée entre les oeuvres 'Goodbye' et 'The bridge is broken' fait apparaître deux chansons bénéficiant d'une similitude n'excédant pas une seconde environ portant sur un accord arpégé constituant l'accompagnement de guitare électrique principal de l'oeuvre 'Goodbye' et le premier accord de l'oeuvre'The bridge is broken', qui d'arpégé est joué ensuite de manière plaquée tout au long de l'oeuvre, cet accompagnement à la guitare électrique n'étant qu'un accompagnement d'instrument comme un autre et aucunement une partie soliste déterminante dans l'écriture générale de l'oeuvre.

Il convient en conséquence de considérer que la partie de l'oeuvre 'The bridge isbroken' dont la reprise est reprochée à M. F. et à Mme B. ne constitue pas contrairement à ce qui est allégué et non établi un 'gimmick' (cellule de quelques notes qui captent l'oreille de l'auditeur), n'est pas un élément déterminant qui permet de caractériser la personnalité de l'auteur, l'absence d'antériorité étant à cet égard inopérante, et ne participe pas de l'originalité de l'oeuvre première prise dans son ensemble.

C'est à juste titre que les premiers juges ont rejeté l'ensemble des demandes au titre de la contrefaçon du droit d'auteur. Le jugement mérite en conséquence confirmation de ce chef et la demande subsidiaire de la société Kraked tendant à ce qu'il soit ordonné une expertise afin d'établir la reprise contrefaisante de l'oeuvre 'The bridge is broken' par l'oeuvre 'Goodbye', non fondée, doit être rejetée.

- Sur l'atteinte aux droits voisins du droit d'auteur

Mme M., M. L. en leur qualité d'artistes interprètes et la société Get Down en sa qualité de producteur du phonogramme reprochent à M. F., Mme B. et aux sociétés Artiworks et Distric 6 la reprise par l'oeuvre 'Goodbye' d'un 'sample' c'est-à-dire un extrait de l'enregistrement 'The bridge is broken' qui est incorporé dans l'enregistrement 'Goodbye'.

M. F., Mme B. et les sociétés Artiworks et Distric 6 considèrent que ces derniers ne rapportent pas la preuve de l'existence d'un 'sample' soit la reprise d'un extrait sonore qui a été récupéré d'un précédent enregistrement.

Il ressort de l'analyse comparative non contradictoire réalisée par la Sacem le 6 janvier 2016 qu'à l'écoute de la toute première mesure de l'oeuvre 'The bridge isbroken' et de la mesure jouée a 0'04' de l'oeuvre 'Goodbye », toutes deux jouées par une guitare, il est constaté que les mélodies sont en tous points identiques, seule l'équalisation sonore, 1'amp1ification de 1'instrument fait la différence et qu'outre l'utilisation d'un même enchaînement mélodique, d'une même tessiture et d'une même tonalité de So1# mineur, il est également noté une même utilisation de 'Ghostnotes' jouées exactement sur les mêmes notes. Il est également remarqué à 1'écoute, une même attaque de ces 'Ghost notes', très probablement jouées au médiator dans les deux oeuvres et non pas en utilisant la technique du 'rasgueado' qui consiste à projeter les doigts de la main droite, un par un, comme le ferait une guitariste de flamenco, ce qui donne un son très percussif, toutes ces particularités se retrouvant à 1'identique dans les deux fragments analysés.

Dans son rapport établi le 20 novembre 2017, Mme B. considère quant à elle que le caractère faux de l'accord arpégé observé dans le Fragment 'The bridge is broken' se retrouve à l'identique dans le Fragment 'Goodbye', alors que cet "accident de justesse" est difficile à reproduire par un autre interprète avec une autre guitare. Elle précise que cette constatation laisse penser, sans qu'il soit possible de l'affirmer de façon catégorique, que le Fragment 'Goodbye' a utilisé un extrait du Fragment 'The bridge is broken'et qu'il n'est donc pas possible d'affirmer que le Fragment 'Goodbye' a samplé un extrait de l'enregistrement 'The bridge is broken', ni d'affirmer le contraire.

Néanmoins, M. F., la société Artiworks et la société District 6 fournissent au débat 48 fichiers audio reproduisant la mesure jouée par une guitare pour démontrer que la boucle rythmique de l'oeuvre 'Goodbye' a été interprétée par un guitariste mandaté par M. F. puis retravaillée par ce dernier, M. S. considérant dans son rapport en date du 7 novembre 2018 que le fichier  25 intitulé Chank Guitars main guitar x G6 wavpourrait avoir été retenu pour la version définitive du disque et précisant dans son rapport complémentaire en date du 25 avril 2019 que la qualité sonore bien supérieure et sans ratage de l'accompagnement de l'oeuvre 'Goodbye' montre que cette oeuvre ne contient pas de 'sample'. Ces éléments sont confirmés par la facture du 13 octobre 2014 de la société Scorccio (pièce 39 de M. F.) aux services de laquelle a recouru M. F. ce dont témoigne le président de cette société, M. Mark Summers, dans une attestation du 3 décembre 2019 selon laquelle 'le 13 octobre 2014, Federico R. de TIME S.p.A. (Via Sorbanella, 22/a - 25125 Brescia, Italie) m'a chargé de jouer et de produire des enregistrements originaux de guitare électrique, les mêmes enregistrements que ceux qui peuvent être entendus dans l'introduction et pendant toute la durée du morceau intitulé "Goodbye", tels que publiés par l'artiste Feder. L'enregistrement principal du fichier audio que j'ai soumis pour "Goodbye" contenait le nom de fichier suivant : 1-Boucle.guitare-SCORCCiO-120.bpm.wav (2.2 MB / 00 minutes 08 secondes / 44.1kHz / 24Bit / Stereo). De plus, je possède un total de 221 fichiers d'enregistrement audio individuels qui constituent les différentes prises de la guitare qui ont été enregistrées dans diverses combinaisons de différents modèles de guitare et amplificateurs de guitare, puis sélectionnées et combinées pour former le mix composé de l'enregistrement principal précité'. Cette facture et attestation, produites en cause d'appel, ne sont pas utilement contestées par Mme M., M. L. et la société Get Down, aux motifs que les prestations n'ont pas été effectuées avant la première divulgation de l'oeuvre 'Goodbye' sur le site Soundcloud le 7 juillet 2014. En effet, il n'est pas établi que la version mise en ligne à cette date par M. F., que celui-ci qualifie de 'maquette', comportait l'extrait litigieux figurant sur l'enregistrement déposé à la Sacem le 20 novembre 2014 et commercialisé en décembre 2014 sur les plate-forme Deezer.

Il ressort de ce qui précède que l'accord litigieux a été réenregistré par un guitariste prestataire mandaté par M. F. et qu'il n'existe aucune certitude de la reprise par l'enregistrement 'Goodbye' d'un 'sample' c'est-à-dire un extrait de l'enregistrement 'The bridge is broken' qui y aurait été incorporé.

En conséquence, les atteintes aux droits de la société Artiworks, producteur du phonogramme, et aux droits d'artiste interprète invoqués par Mme M. et M. L. ne sont pas caractérisées et le jugement déféré doit être infirmé en ce qu'il a dit que la reproduction d'un extrait de l'enregistrement phonographique de l'oeuvre « The bridge is broken » produit par la société Get Down et interprété par Mme M., sans l'autorisation de ces derniers, au sein de l'enregistrement phonographique de l'oeuvre « Goodbye », constitue une contrefaçon des droits voisins de la société GetDown et de Mme M. et prononcé les condamnations et mesures subséquentes.

- Sur les demandes au titre du parasitisme

Le parasitisme consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis.

Les demandes de Mme M. et M. L. et des sociétés Kraked et Get Down au titre de la contrefaçon de droit d'auteur et de l'atteinte aux droits voisins ayant été rejetées, ils sont recevables à former des demandes au titre des agissements parasitaires.

Néanmoins la reprise par l'enregistrement 'Goodbye' d'un extrait de moins de deux secondes de l'enregistrement 'The bridge is broken' dont il a été précédemment décidé qu'il ne constituait pas un élément déterminant de l'oeuvre première et dont il n'est pas démontré qu'il est l'objet d'un savoir faire ou d'investissements particuliers dont aurait profité sans bourse délier M. F., Mme B. ou la société Artiworks n'est pas fautive.

Les actes de parasitismes ne sont pas constitués et le jugement qui a rejeté les demandes à ce titre doit être confirmé.

- Sur la demande fondée sur l'inexécution du protocole

La société Get Down et Mme M. soutiennent que la société Artiworks, M. F. et la société District 6 n'auraient pas intégralement exécuté le Protocole conclu ente eux le 11 mars 2020 relatif à l'exécution du jugement déféré. Ils indiquent que leurs conclusions n°2 faisaient état des inexécutions précitées, constituant dès lors une interpellation suffisante des débiteurs, valant mise en demeure de ce fait.

Selon les dispositions de l'article 6 du protocole du 11 mars 2020, 'Dans le cas où l'un quelconque des Appelants n'exécuterait pas parfaitement une Obligation Essentielle exigible postérieurement au 11 mars 2020 :

a) les Intimées et le Séquestre seront de plein droit libérés à l'égard de l'Appelant défaillant concerné de l'ensemble des obligations mises à leur charge par le Protocole au terme d'un délai de quinze (15) jours suivant l'envoi d'une mise en demeure de s'exécuter, adressée par l'avocat plaidant des Intimées à l'avocat plaidant du ou des Appelants défaillants, par courriel officiel, via RPVA, et restée infructueuse, de sorte que les Intimées conserveront le bénéfice de l'exécution partielle à laquelle les Appelants auront procédé, le cas échéant, qui vaudra exécution partielle du Jugement (sans bien entendu constituer un quelconque acquiescement au jugement entrepris) ;

b) le ou les Appelants) défaillant(s) ne pourra / pourront se prévaloir d'aucune disposition de l'ordonnance rendue dans le cadre du Litige, le cas échéant, et seront irrecevables à présenter toute demande ou défense ayant pour objet ou pour effet de faire échec à l'exécution du Jugement étant toutefois précisé que dans ce cas toute éventuelle astreinte ne pourra courir qu'à compter d'un délai de 8 (huit) jours suivant mise en demeure adressée par les Intimées sollicitant l'exécution de toute mesure ordonnée par le Jugement et assortie d'une astreinte.

Ainsi que le relèvent M. F. et les sociétés Artiworks et District 6, les dispositions précitées prévoient l'envoi d'une mise en demeure par courrier officiel via RPVA ce que ne saurait constituer les conclusions n°2 de Mme M. et de la société Get Down faisant référence à l'inexécution du protocole. En outre, il apparaît que les appelants ont communiqué à Mme M. et à la société Get Down l'ensemble des documents et redditions de compte énoncés au sein du protocole et procédé au paiement de la somme de 6.730,42 euros.

La demande de la société Get Down et Mme M. à ce titre est en conséquence non fondée et sera rejetée.

- Sur les autres demandes

Les dispositions du jugement concernant les dépens et les frais irrépétibles sont également infirmées.

Parties perdantes, la société Get Down, M. L., Mme M. et la société Kraked sont condamnées in solidum aux dépens de première instance et d'appel.

La société Get Down, M. L., Mme M. sont en outre condamnés à payer à la société Artiworks, M. F. et la société District 6 une indemnité qui sera, en équité, fixée la somme de 10 .000 euros à chacun.

La société Get Down, M. L., Mme M. et la société Kraked sont condamnées in solidum à payer à Mme B. une indemnité qui sera, en équité, fixée la somme de 10 .000 euros.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Dans les limites de l'appel,

Infirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a rejeté les demandes sur la contrefaçon de droit d'auteur et les demandes fondées sur le parasitisme,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Rejette l'ensemble des demandes de la société Get Down, Mme Bouyssou M. et M. L. fondées sur l'atteinte aux droits du producteur de phonogramme et aux droits d'artiste interprète,

Y ajoutant,

Dit non recevables les demandes de Mme Bouyssou M. et M. L. au titre de la contrefaçon du droit patrimonial d'auteur de l'oeuvre 'The bridge is broken',

Rejette la demande d'expertise de la société Kraked,

Rejette la demande de la société Get Down, Mme Bouyssou M. et M. L. au titre de l'inexécution du protocole du 11 mars 2020,

Rejette toute autre demande plus ample ou contraire,

Condamne la société Get Down, M. L. et Mme Bouyssou M. à payer à la société Artiworks, M. F. et la société District 6 France Publishing une indemnité de 10 .000 euros à chacun au titre des frais irrépétibles,

Condamne in solidum la société Get Down, M. L., Mme Bouyssou M. et la société Kraked à payer à Mme B. une indemnité de 10 .000 euros au titre des frais irrépétibles,

Condamne in solidum la société Get Down, M. L., Mme Bouyssou M. et la société Kraked aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.