Cass. com., 17 décembre 2013, n° 12-25.638
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Avocats :
SCP Waquet, Farge et Hazan, SCP Yves et Blaise Capron
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 juin 2012), que M. X... a acheté du matériel à la société CTI, dont M. Y... était le gérant ; qu'après le versement de plusieurs acomptes, le dernier paiement soldant la commande est intervenu le 7 juin 2004 ; que par acte sous seing privé du 23 février 2005, M. Y... a cédé à la société Mp holding ses parts de la société CTI qui a été mise en redressement puis en liquidation judiciaires par jugements des 10 octobre 2005 et 23 janvier 2006, Mme Z... étant désignée liquidateur ; que ne pouvant obtenir la délivrance du matériel, M. X... a assigné M. Y... en dommages-intérêts ;
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à M. X... la somme de 23 629,60 euros à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ que tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que M. Y... faisait valoir que M. X... n'avait pas soldé le prix de ses marchandises à la date de l'inventaire du stock du 23 avril 2004 ; qu'en se bornant à affirmer que cette assertion serait fausse en ce qui concerne le four dont M. X... aurait soldé le prix le 28 février 2001, sans préciser les éléments de preuve retenus à l'appui de cette affirmation ni a fortiori, analyser ces éléments même de façon sommaire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que les parties à un contrat de vente sont libres de déroger aux dispositions de l'article 1583 du code civil qui ne sont pas d'ordre public ; qu'elles peuvent le faire sans avoir à stipuler expressément une clause dite de réserve de propriété ; qu'en se fondant pour dire que le maintien du matériel vendu à M. X... dans l'inventaire du stock de la socitété CTI serait fautif, sur l'absence de stipulation expresse d'une clause de réserve de propriété, sans rechercher si précisément le fait pour le dirigeant de la société CTI d'avoir maintenu le matériel impayé dans l'inventaire des stocks de la société ainsi considérée comme propriétaire de ce matériel, ajouté à la mention figurant dans les attestations rédigées par M. Y..., à chaque paiement d'acompte, selon laquelle le prix du matériel devra être soldé au départ de l'acquéreur pour la République du Congo démocratique le tout conforté par l'absence de demande de livraison de ce matériel par l'acquéreur, ne manifestaient pas précisément la volonté des parties de subordonner le transfert de propriété du matériel destiné à être acheminé à l'étranger, au paiement intégral de son prix, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1583 du code civil ;
3°/ que ne constitue pas une faute personnelle séparable de ses fonctions de dirigeant de la société CTI, le fait pour M. Y... d'avoir maintenu le matériel vendu par la société CTI à M. X..., dans l'inventaire des stocks de cette société ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu, d'une part, que le moyen ne tend, sous le couvert d'un grief non fondé de violation de la loi, qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine par laquelle la cour d'appel a estimé qu'il résultait des pièces versées aux débats que M. X... avait payé le prix du four le 28 février 2001 ;
Attendu, d'autre part, que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain de rechercher la commune intention des parties que la cour d'appel a estimé que la vente en cause était conclue dès l'accord de la société CTI et de M. X... sur la chose et sur le prix ;
Attendu, enfin, que l'arrêt retient qu'un dirigeant social ne pouvant ignorer que la vente est un contrat consensuel conclu dès l'accord des parties sur la chose et sur le prix, M. Y... devait exclure de l'inventaire du stock du 23 avril 2004, manifestement destiné aux acquéreurs, les éléments acquis par M. X..., et que, pour expliquer la présence du matériel sur l'inventaire du stock, M. Y... indique que M. X... n'a pas soldé le prix de ces marchandises à la date du 23 août 2004, ce qui est faux en ce qui concerne le four et ne pouvait être pris en compte pour les autres éléments qu'en présence d'une clause de réserve de propriété, inexistante en l'espèce ; que l'arrêt retient encore que c'est à la suite de cette faute grossière que les successeurs de M. Y..., s'estimant légitimement propriétaires du matériel, en ont disposé ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, établissant que M. Y... avait commis une faute intentionnelle d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal des fonctions sociales, l'arrêt est légalement justifié ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.