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Décisions

CA Grenoble, ch. com., 4 mai 2023, n° 2021J00017

GRENOBLE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

E. M.

Défendeur :

PIZZAIOLA (S.A.R.L.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Madame Marie-Pierre FIGUET

Conseillers :

Mme Marie-Pascale BLANCHARD, M. Lionel BRUNO

Avocats :

Me Catherine SCHULD, Me Anne BENHAMOU, AARPI FAURE-BRAC ET DURAUD AVOCATS

Gap, du 22 oct. 2021

22 octobre 2021

1. [E] [M] est immatriculée depuis le 1er juillet 2014 comme entrepreneur individuel au registre du commerce. Elle exploite depuis le 1er juin 2014 le bar connu sous l'enseigne «Bar du Rif'», sis aux [Localité 5]. Cet établissement a pour activité principale la restauration traditionnelle. [E] [M] exerce également les activités de bar, café, presse, restaurant, vente à emporter, crêperie, presse, vente d'article de fumeurs, confiseries, gérance de débit de tabac.



2. La Sarl Pizzaiola a été immatriculée le 17 novembre 2008, au titre d'une activité déclarée de restauration avec un établissement actif aux [Localité 5] depuis le 1er décembre 2008. Elle exploite un établissement saisonnier de fabrication et vente de pizzas à emporter, vente de boissons, sandwichs, petite épicerie, glaces, plats à emporter ( exercée sous forme la forme ambulante). Le gérant est [O] [P].



3. Un litige est né entre les parties concernant l'emplacement du camion pizza de la Sarl Pizzaiola, qui empêcherait la visibilité du commerce de [E] [M], ce fait constituant selon elle un acte de concurrence déloyale.



4. Le 29 mai 2020, maître [F], huissier de justice, a réalisé un constat sur l'installation du camion pizza à proximité du commerce de [E] [M]. Les 21 mai 2020, 12 juillet 2020 et 27 juillet 2020, des courriers ont été envoyés au gérant de la Sarl Pizzaiola par [E] [M] pour demander que cessent les actes de concurrence déloyale en précisant que l'installation de la Sarl Pizzaiola sur l'emplacement occupé est irrégulière.



5. Aucune solution amiable n'étant trouvée à ce litige, [E] [M] a fait assigner le 15 février 2021 la Sarl Pizzaiola par-devant le tribunal de commerce de Gap, afin notamment de faire cesser cette situation, de constater que la Sarl Pizzaiola commet des actes de concurrence déloyale, de juger que la Sarl Pizzaiola devra immédiatement et sans délai déplacer son camion de l'emplacement où il se trouve, d'ordonner la publication du jugement aux frais de la société dans un délai de quatre jours ouvrables à compter de la signification du jugement à intervenir au sein d'une édition de presse quotidienne locale sur format papier et format dématérialisé au choix de la demanderesse sans que le coût de la publication ne puisse excéder la somme de 10.000 euros, d'assortir la condamnation de publication d'une astreinte de 1.000 euros par jour de retard et par manquement, par publication, et se réserver la liquidation des astreintes.



6. Par jugement du 22 octobre 2021, le tribunal de commerce de Gap a':



- déclaré recevable mais non fondée [E] [M] en ses demandes ;

- dit que l'activité de restauration exercée par la Sarl Pizzaiola n'entre pas dans le champ d'application de l'article L310-2 du code de commerce relatif à la vente au déballage;

- en conséquence, constaté que la Sarl Pizzaiola n'a commis aucun acte de concurrence déloyale envers [E] [M];

- débouté [E] [M] de l'ensemble de ses demandes ;

- dit que l'action de [E] [M] n'est pas abusive ;

- débouté la Sarl Pizzaiola de ses demandes indemnitaires relatives «'au caractère abusif et au préjudice moral'»;

- condamné [E] [M] [E] à payer à la Sarl Pizzaiola la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens';

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit.



7. [E] [M] a interjeté appel de cette décision le 27 décembre 2021, sauf en ce que le tribunal a':



- dit que l'action de [E] [M] n'est pas abusive ;

- débouté la Sarl Pizzaiola de ses demandes indemnitaires relatives au caractère abusif et au préjudice moral.



L'instruction de cette procédure a été clôturée le 12 janvier 2023.

Moyens






Prétentions et moyens de [E] [M]':



8. Selon ses conclusions remises le 28 septembre 2022, elle demande à la cour, au visa des articles 1240 et suivants du code civil, des articles L.310-2 , R 310-8, L.310-5 du code de commerce, des articles 1er et 2 de «'l'arrêté du 9 janvier 2099'»':



- d'infirmer le jugement déféré':

- de juger que la réglementation applicable est celle de la vente au déballage;

- de juger que l'intimée ne respecte pas ladite réglementation ;

- de juger que la concluante est victime d'actes de concurrence déloyale de la part de l'intimée';

- de juger que l'intimée obstrue sciemment la visibilité du restaurant de la clientèle;

- en conséquence, de juger que l'intimée devra immédiatement déplacer son camion de l'emplacement où il se trouve et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir';

- d'ordonner la publication du jugement, aux frais de l'intimée, dans un délai de 4 jours ouvrables à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, au sein d'une édition de presse quotidienne locale sur format papier et format dématérialisé au choix de la concluante, sans que le coût de la publication ne puisse excéder la somme de 10.000 euros';

- d'assortir cette condamnation de publication d'une astreinte de 1.000 euros par jour de retard et par manquement, par publication et se réserver la liquidation des astreintes;

- de condamner l'intimée aux entiers dépens de première instance et d'appel;

- de condamner l'intimée au versement de la somme de 2.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.



L'appelante expose':



9. - que si l'intimée demande la constatation de l'absence d'effet dévolutif de la déclaration d'appel de la concluante, sinon qu'elle n'a pas valablement interjeté appel de la disposition la condamnant au paiement de la somme de 1.500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, la concluante a cependant détaillé dans sa déclaration les chefs du jugement critiqué conformément à l'article 542 du code de procédure civile'; qu'une erreur a seulement été commise concernant le montant de l'indemnité pour frais irrépétibles';



10. - sur le fond, que le 29 mai 2020, l'huissier de justice a réalisé un constat détaillé actant de l'installation du camion pizza de telle façon qu'il empêche une vision sur les commerces du parking dont celui de la concluante'; que trois courriers ont été adressés au gérant de l'intimée sans réponse';



11. - concernant l'application de la réglementation relative à la vente au déballage, que l'article L310-2 dispose que sont considérées comme ventes au déballage les ventes de marchandises effectuées dans des locaux ou sur des emplacements non destinés à la vente au public de ces marchandises, ainsi qu'à partir de véhicules spécialement aménagés à cet effet'; ainsi, que toute vente effectuée dans des lieux non habituellement consacrés au commerce est susceptible de caractériser une vente au déballage et ce, sans que l'on prenne en compte la profession du vendeur ou les caractéristiques de la vente';





12. - que si l'article L310-2 II prévoit une dérogation pour les commerçants effectuant des tournées fréquentes ou périodiques avec un véhicule, dans leur commune d'implantation ou dans les communes limitrophes, tel n'est pas le cas du camion Pizza de l'intimée, qui n'effectue pas de tournées'; qu'en outre, l'intimée ne dispose pas d'une permission ni d'une autorisation légale';



13. - que peu importe la nature des marchandises et le fait qu'elles soient ou non manufacturées, de même que le caractère traditionnelle de l'activité du vendeur'; qu'ainsi, l'intimée est mal fondée à invoquer la nature des marchandises qu'elle vend et le fait qu'elle exerce cette activité depuis plusieurs années'; que si le tribunal a retenu que l'intimée disposait d'une autorisation d'installation d'un commerce ambulant avant et après l'installation de la concluante, cela ne signifie pas que la législation relative à la vente au déballage ne s'applique pas'; qu'en réalité, l'intimée n'a disposé d'autorisations municipales que de 2010 à 2011 puis en 2015'; que le permis de stationnement établi par la mairie de Puy Saint [O] en 2019 n'a prévu qu'une autorisation pour quatre mois, conformément à la réglementation de la vente au déballage'; que les anciennes autorisations délivrées par la commune des [Localité 5] prévoyaient un emplacement en face de celui de la concluante, et non dans l'alignement de son bar';



14. - que cette installation a ainsi un caractère volontaire, caractérisant l'infraction pénale commise par l'intimée'; qu'elle ne se limite pas à une vente à emporter, mais également à un service à table, avec éclairage la nuit, et pour plus de deux mois par an contrairement à ce qu'indique sa brochure publicitaire, ce qui constitue une violation de l'article L310-2 limitant l'exercice de ce type de vente'; qu'en outre, l'intimée ne justifie d'aucune déclaration effectuée auprès de la commune pour occuper l'espace public;



15. - que si l'intimée soutient qu'elle occupe le terrain appartenant à monsieur [Z], lequel atteste l'avoir mis à disposition à durée indéterminée, ce terrain ne constitue pas un emplacement destiné à la vente ou à l'exercice d'une activité commerciale ou artisanale';



16. - concernant l'exercice d'une concurrence déloyale, qu'elle est constituée lorsque les agissements caractérisent une désorganisation de l'entreprise rivale par le biais d'un détournement de la clientèle, un dénigrement envers l'entreprise concurrente, des pratiques commerciales interdites désorganisant le marché'; que tel est le cas d'un commerçant même ambulant qui se positionne de telle façon qu'il cache la vue, sans autorisation adéquate;



17. - qu'en réalité, l'intimée et la société Le Fournil des Ecrins se sont liguées contre la concluante, puisque par arrêt du 17 février 2022, la cour d'appel de Grenoble a retenu des actes de concurrence déloyale de cette dernière société, alors que l'intimée avait attesté au profit de celle-ci dans le cadre de cette procédure'; que le constat d'huissier atteste d'un temps de présence au-delà des deux mois autorisés par la loi, ce qui constitue une pratique anti concurrentielle'; que le positionnement du véhicule de l'intimée nuit grandement à la visibilité du commerce de la concluante'; qu'il en résulte une désorganisation du commerce de la concluante, laquelle effectue de la restauration à emporter depuis 2014; que la clientèle étant principalement de passage, elle n'a pas le temps de remarquer les petites enseignes de la concluante indiquant principalement «'tabac'» et «'presse'».



















Prétentions et moyens de la Sarl Pizzaiola':



18. Selon ses conclusions remises le 21 juin 2022, elle demande à la cour, au visa des articles 562 et 901 du code de procédure civile, 1240 du code civil':



- de constater l'absence d'effet dévolutif de la déclaration d'appel';

- subsidiairement, de constater que l'appelante n'a pas valablement interjeté appel du chef du jugement la condamnant à payer à la concluante la somme de 1.500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile';

- sur le fond, de confirmer le jugement déféré';

- de débouter l'appelante de l'ensemble de ses demandes';

- de constater le caractère abusif de la procédure initiée par l'appelante';

- de condamner l'appelante à payer à la concluante la somme de 4.000 euros en réparation du préjudice subi';

- en tout état de cause, de condamner l'appelante à payer à la concluant la somme de 7.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.



Elle réplique':



19. - concernant la déclaration d'appel, qu'elle a visé en premier lieu un appel total du jugement, alors qu'il s'agit en réalité d'un appel partiel, l'ensemble du dispositif du jugement n'étant pas visé'; qu'elle ne permet pas de déterminer les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité'; que cette déclaration est ainsi dépourvue d'effet dévolutif';



20. - subsidiairement, que cette déclaration porte sur le chef du jugement ayant condamné l'appelante à payer à la concluante «'la somme de 21.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile'», alors que le jugement a fixé cette condamnation à 1.500 euros'; qu'il y a eu ainsi appel d'un chef du jugement n'existant pas';



21. - sur le fond, que l'activité de la concluante ne constitue pas une activité de vente au déballage, puisqu'elle l'exerce sans interruption sur un terrain privé, appartenant à la Sci des Deux Ponts, en vertu d'un bail à durée indéterminée alors que l'article L310-2 du code de commerce concerne les ventes effectuées sur un emplacement non destiné à cet effet qui n'est pas exploité en vertu d'un titre d'occupation'; que l'activité de la concluante est itinérante et saisonnière, puisqu'elle l'exerce l'été aux [Localité 5] et l'hiver à Puy Saint [O]'; que la commune des [Localité 5] a confirmé à plusieurs reprises la régularité de l'exercice de cette activité sur l'emplacement spécifique destiné à cet usage'; que la concluante l'exerçait depuis plus de six ans avant l'installation de l'appelante';



22. - que selon l'administration, des produits alimentaires transformés sur place ne constituent pas des marchandises au sens de ce texte'; que cette notion ne concerne que la vente de produits en l'état sans transformation'; qu'une réponse ministérielle du 7 avril 2015 confirme cette appréciation et exclut la vente de produits alimentaires confectionnés sur place dans des camions spécialement aménagés du domaine d'application de la vente au déballage';



23. - concernant la diminution de la visibilité du commerce de l'appelante, que son commerce est en retrait des fonds voisins'; qu'elle ne prouve pas que la concluante positionnerait ses deux camions en angle fermant toute vue'; que ni les photographies ni le constat produits ne corroborent les dires de l'appelante sur un manque de visibilité'; que des témoins confirment l'absence de toute gêne créée par la concluante'; que le tribunal de commerce a ainsi justement retenu que la visibilité du commerce de l'appelante est satisfaisante'; que si l'appelante soutient que la concluante exerce une activité de restauration sur place, les tables en cause sont en réalité exploitées par la société Le Fournil des Ecrins';





24. - que l'appelante n'invoque aucun dommage, alors qu'une action pour concurrence déloyale doit être fondé sur un préjudice, puisqu'elle ne réclame aucune indemnisation'; qu'elle ne justifie d'aucune perte financière, d'autant que les horaires d'ouverture de son commerce sont limités';



25. - que la présente procédure est ainsi abusive, et résulte d'une relation de voisinage personnellement dégradée, l'appelante reprochant à la concluante d'entretenir des relations cordiales avec les deux gérants des commerces situés à proximité'; qu'ainsi, monsieur [M] a déposé une plainte contre le gérant de la concluante pour des violences, conclue par un jugement de relaxe'; qu'il est établi par témoin que le gérant de la concluante a été dénigré par l'appelante auprès de la clientèle'; qu'en outre, l'appelante a mis en vente son fonds de commerce'; que la présente procédure procède ainsi d'une intention de nuire.



*****



26. Il convient en application de l'article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions susvisées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

Motivation






Motifs':





1) Sur la régularité de l'appel interjeté par madame [M]':



27. Il résulte de la déclaration d'appel que si elle a précisé qu'il s'agit d'un appel total, en réalité cet appel a exclu les dispositions du jugement ayant débouté la Sarl Pizzaiola de ses demandes au titre d'une action abusive. Il ne s'agit ainsi que d'un appel partiel. Cette erreur de plume est sans conséquence, la déclaration d'appel ayant détaillé les chefs du jugement critiqués précisément. En outre, si madame [M] a interjeté appel de sa condamnation à payer la somme de 21.500 euros à l'intimée au titre de l'article 700 du code de procédure civile, il s'agit également d'une erreur matérielle manifeste, cette condamnation ayant été fixée par le tribunal à 1.500 euros. La Sarl Pizzaiola ne justifie d'aucun grief à ce titre. Il en résulte que l'appel de madame [M] est recevable.





2) Concernant la qualification de l'activité exercée par l'intimée et l'exercice d'une concurrence déloyale':



28. La cour relève que selon l'article L310-2 I du code de commerce, sont considérés comme ventes au déballage les ventes et rachats de marchandises effectués dans des locaux ou sur des emplacements non destinés à la vente au public ou au rachat de ces marchandises ainsi qu'à partir de véhicules spécialement aménagés à cet effet. Les ventes au déballage ne peuvent excéder deux mois par année civile dans un même local, sur un même emplacement ou dans un même arrondissement. Les ventes au déballage de fruits et légumes frais effectuées en période de crise conjoncturelle ne sont pas prises en compte pour le calcul de cette limite. Les ventes au déballage font l'objet d'une déclaration préalable auprès du maire de la commune dont dépend le lieu de la vente, dont une copie est adressée concomitamment à l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation dans le département du lieu de vente. Selon l'article L310-2 II, les dispositions du I ne sont pas applicables aux professionnels effectuant, dans une ou plusieurs communes, des tournées de ventes, réalisant des ventes définies par l'article L320-2 (ventes aux enchères publiques); qui justifient d'une permission de voirie ou d'un permis de stationnement pour les ventes réalisées sur la voie publique.









29. A ce titre, le tribunal de commerce a exactement noté que selon une question écrite avec réponse N°77762, en date du 7 avril 2015 posée au ministère de l'économie concernant les ventes au déballage, publiée au JO du 4 août 2015, l'article L310-2 du code de commerce considère comme ventes au déballage les ventes et rachats de marchandises, mais que la législation ne définit pas la notion de marchandises. La réponse donnée par le ministre précise que la vente de produits alimentaires confectionnés sur place dans des camions spécialement aménagés n'entre pas dans le champ d'application de la législation sur la vente au déballage.



30. Ainsi que constaté par les premiers juges, le Kbis de la Sarl Pizzaiola précise qu'elle exploite un établissement saisonnier de fabrication et vente de pizzas à emporter, vente de boissons, sandwichs, petite épicerie, glaces, plats à emporter, l'activité commerciale étant exercée sous la forme ambulante, et ainsi que l'activité de la Sarl Pizzaiola n'entre pas dans le champ de la vente au déballage et peut donc dépasser une durée de deux mois. Il en a retiré que toute exploitation au-delà de deux mois de la Sarl est régulière dans le cadre des autres réglementations applicables. Le tribunal de commerce a également énoncé que la Sarl Pizzaiola justifie occuper le terrain où sont positionnés les camions au titre d'une location de parcelle auprès de madame [N] de 2009 à 2013'; qu'elle justifie également d'une location de parcelle auprès de la Sci les Deux Ponts de 2014 à ce jour. Il en a déduit que l'activité de la Sarl Pizzaiola est donc exercée régulièrement conformément aux activités déclarées et aux autorisations nécessaires.



31. La cour confirme que l'activité commerciale exercée par l'intimée consiste dans la vente de denrées alimentaires, dont une partie est fabriquée sur place. Selon le constat de maître [F], huissier de justice, du 5 janvier 2021, cette activité est exercée à l'aide d'un camion et d'une remorque sur laquelle est aménagé un petit bungalow. Ces véhicules, ainsi qu'un triporteur, sont stationnés en amont du commerce de l'appelante sur la commune des [Localité 5]. La Sarl Pizzaiola produit une attestation de madame [N] confirmant que l'intimée a été locataire de la parcelle Section A n°[Cadastre 2] de 2009 à 2013, d'une attestation de monsieur [Z], gérant de la Sci Les Deux Ponts, confirmant la même occupation depuis juin 2014, accompagnée d'un relevé cadastral concernant cette parcelle, qui est dans le prolongement de celles sur lesquelles sont implantées la société Le Fournil des Ecrins, puis le commerce de l'appelante, parcelle longeant la voie publique et correspondant à celle sur laquelle l'huissier [F] a constaté la présence des véhicules de l'intimée, d'une autorisation d'installation d'un commerce ambulant délivré par le maire de la commune des [Localité 5] le 23 mars 2015, pour la période du 1er juin au 15 novembre 2015, afin d'autoriser l'intimée à installer son camion sur la parcelle A [Cadastre 2] et à se raccorder au réseau électrique. En raison de l'activité exercée, il résulte de ces éléments que la Sarl Pizzaiola ne se livre pas à une activité de ventes au déballage au sens de l'article L310-2 du code du commerce et de la réponse ministérielle précitée.



32. En outre, le tribunal de commerce a rappelé que la concurrence déloyale se définit comme la commission d'actes déloyaux, constitutifs de fautes dans l'exercice d'une activité commerciale, à l'origine pour le concurrent d'un préjudice. C'est donc le fait, pour un commerçant, de faire un usage excessif de sa liberté d'entreprendre, occasionnant un préjudice. L'action en concurrence déloyale est fondée sur les articles 1240 et suivants du code civil, et ses conditions sont une faute, un préjudice, un lien de causalité entre la faute et le préjudice.



33. La cour constate en premier lieu que l'activité de la Sarl Pizzaiola n'est pas exercée déloyalement à l'égard de madame [M], puisqu'il s'agit d'une pratique commerciale qui n'est pas prohibée ainsi qu'il a été indiqué plus haut. En outre, le tribunal a exactement indiqué que [E] [M] a débuté son activité en juin 2014 alors que la Sarl Pizzaiola exerce son activité à cet emplacement depuis 2008.



34. En second lieu, le tribunal a justement relevé, concernant le positionnement des camions qui cacheraient la vue des passants sur le Bar du Rif, qu'il ressort des nombreuses photos remises dans le dossier et dans le constat d'huissier, que des enseignes (totems) en hauteur représentant le tabac (logo rouge et blanc), la presse (logo jaune) et le restaurant (enseigne lumineuse) sont visibles des passants et que la visibilité du commerce de madame [M] est satisfaisante et n'est pas obérée par les camions de la Sarl Pizzaiola.



35. Enfin, le tribunal de commerce a exactement retenu que l'appelante ne rapporte pas la preuve d'un préjudice résultant de l'activité de la Sarl Pizzaiola, comme une baisse de son activité notamment sur la vente de plats à emporter. [E] [M] ne produit en effet aucun élément comptable permettant de vérifier l'évolution de son chiffre d'affaires.



36. Il en résulte que le jugement déféré ne peut qu'être confirmé en ce qu'il a dit que l'activité exercée par la Sarl Pizzaiola n'entre pas dans le champ d'application de l'article L310-2 du code de commerce, et qu'aucun acte de concurrence déloyale n'a été commis. Le tribunal a ainsi justement débouté l'appelante de l'ensemble de ses demandes.





3) Concernant la demande reconventionnelle de la Sarl Pizzaiola':





37. Le tribunal a énoncé que le climat entre les parties est délétère et qu'il s'agit d'un conflit de voisinage entre divers commerçants au-delà des parties. Il n'a pas ainsi retenu le caractère abusif de la procédure engagée par [E] [M] et a débouté la Sarl Pizzaiola de sa demande d'indemnisation de son préjudice moral.



38. La cour relève que la Sarl Pizzaiola a sollicité la confirmation du jugement déféré. Elle n'a pas ainsi interjeté appel de la disposition ayant rejeté sa demande reconventionnelle prise d'une procédure abusive intentée par madame [M]. Cette disposition est ainsi définitive. Le jugement entrepris sera ainsi confirmé en toutes ses dispositions soumises à la cour.



39. [E] [M] succombant en son appel sera condamnée à payer à la Sarl Pizzaiola la somme complémentaire de 4.500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, outre dépens.





Dispositif

PAR CES MOTIFS



La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,



Vu les articles 562 et 901 du code de procédure civile, l'article L310-2 du code de commerce, l'article 1240 du code civil;



Déclare l'appel de [E] [M] recevable';



Confirme le jugement déféré en ses dispositions soumises à la cour;



Y ajoutant;



Condamne [E] [M] à payer à la Sarl Pizzaiola la somme de 4.500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile';



Condamne [E] [M] aux dépens exposés en cause d'appel.