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Décisions

Cass. com., 9 mai 1990, n° 88-18.264

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Hatoux

Rapporteur :

Mme Loreau

Avocat général :

M. Montanier

Avocat :

SCP Lyon-Caen, Fabiani et Liard

Paris, 4e ch., du 30 juin 1986

30 juin 1986

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 juin 1988) que M. Claude Moreaud, directeur général adjoint de la société anonyme Girki (la société Girki) a signé le 5 décembre 1977, au nom de la société, avec l'Institut de retraite interprofessionnelle des cadres supérieurs d'entreprises (l'IRICASE), un contrat d'adhésion destiné à permettre aux cadres de la société Girki de percevoir une retraite complémentaire ; qu'à la date de l'adhésion, seuls figuraient sur la liste des bénéficiaires M. Robert Moreaud, président, et M. Claude Moreaud, directeur général adjoint ; que ceux-ci ayant quitté la société respectivement en 1979 et 1981, les nouveaux dirigeants ont refusé de payer les cotisations des exercices 1980 à 1984 en excipant de la nullité du contrat ; qu'accueillant l'exception ainsi soulevée, la cour d'appel a prononcé l'annulation de la convention litigieuse et a ordonné la restitution à la société Girki des cotisations déjà versées ;

Sur le premier moyen pris en ses deux branches :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de s'être prononcé comme il a fait aux motifs que la rémunération des mandataires sociaux ne pouvait être déterminée, quelles qu'en soient les modalités, que par une décision du conseil d'administration qui, en l'espèce, n'avait pas été prise, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'une convention passée avec un organisme de retraite et ayant pour effet de permettre à l'ensemble des collaborateurs de la société, y compris les mandataires sociaux, percevant une rémunération sous forme de salaire, de percevoir une retraite complémentaire, ne relève pas des dispositions des articles 110 et 115 de la loi du 24 juillet 1966 relatifs à la rémunération des seuls président et directeurs généraux ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé, par fausse application, les articles 110 et 115 de la loi du 24 juillet 1966 ; alors, d'autre part, que la volonté du président et du directeur général d'éluder l'application des articles 110 et 115 de la loi du 24 juillet 1966 ne pouvait résulter que de l'impossibilité, pour tout cadre supérieur atteignant le niveau de rémunération requis, de bénéficier de la convention conclue avec l'Iricase ; qu'ainsi, en ne relevant aucune circonstance de nature à démontrer que tout autre cadre supérieur de la société, dont le salaire viendrait à dépasser par la suite le seuil d'assujettissement, ne pourrait également devenir bénéficaire du contrat litigieux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe "fraus omnia corrumpit" ;

Mais attendu qu'ayant retenu que la retraite complémentaire prévue au contrat litigieux, pour laquelle la société devait payer immédiatement une contribution proportionnelle au salaire, constituait une rémunération différée des mandataires sociaux, la cour d'appel, abstraction faite de tous autres motifs surabondants visés par le moyen, a décidé à bon droit qu'elle relevait de la décision du seul conseil d'administration ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt d'avoir annulé la convention litigieuse, alors, selon le pourvoi, que, le tiers co-contractant d'une société anonyme ne saurait se voir opposer la nullité d'une convention conclue avec le président sans l'autorisation du conseil d'administration, lorsqu'il a commis une erreur légitime ; qu'en l'état d'une convention ayant pour effet d'intéresser non seulement les mandataires sociaux mais aussi l'ensemble des cadres supérieurs de la société, la cour d'appel de Paris ne pouvait s'abstenir de rechercher si l'Iricase n'avait pu légitiment croire au pouvoir du président de conclure un tel contrat, sauf à priver sa décision de base légale au regard de l'article 113 de la loi du 24 juillet 1966,

Mais attendu qu'après avoir relevé que l'Iricase était un professionnel de la constitution et de la gestion des régimes de retraite et à ce titre était censé connaître la nature d'une retraite complémentaire et les conditions d'octroi d'un tel avantage à des mandataires sociaux, la cour d'appel a retenu que la qualité des seuls bénéficiaires du contrat était connue de l'Iricase, de sorte que celui-ci aurait dû s'assurer de l'existence d'une décision du conseil d'administration en leur faveur ; que la cour d'appel a ainsi procédé à la recherche prétendument omise ; que le moyen n'est donc pas fondé ; 

Sur le troisième moyen :

Attendu qu'il est enfin reproché à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait, alors, selon le pourvoi, que l'exception de nullité d'une convention passée sans l'autorisation du conseil d'administration ne peut être soulevée dès lors que cette convention a déjà reçu exécution avec l'intervention de l'organe social seul capable de confirmer le contrat nul ; qu'ainsi, dès l'instant où elle relevait le paiement jusqu'en 1980 des cotisations par la société Girki, la cour d'appel ne pouvait s'abstenir de rechercher si cette exécution du contrat pendant plus de trois ans n'impliquait pas qu'il avait été ratifié par l'assemblée générale, sauf à priver sa décision de base légale au regard de l'article 105 de la loi du 24 juillet 1966 ;

Mais attendu qu'il ne ressort ni de ses conclusions ni de l'arrêt, que l'Iricase ait soutenu devant la cour d'appel l'argumentation contenue dans le moyen ; que celui-ci est donc nouveau et mélangé de fait et de droit, irrecevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.