Cass. com., 7 juillet 2009, n° 07-21.803
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Avocats :
SCP Coutard, Mayer et Munier-Apaire, SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Gadiou et Chevallier
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 16 octobre 2007), que courant 1998, la société Sobel industries, holding d'un groupe de sociétés dirigées par MM. Christian et Georges X... et spécialisées dans la fabrication et l'installation d'appareils de chauffage, a sollicité le concours de la Société générale (la banque) pour le financement à concurrence de 14 300 000 francs d'un plan de développement ; qu'en octobre 1998, la banque a consenti à la société Sobel industries ainsi qu'à ses filiales françaises les sociétés Sobelec, Sicelec, Cecobel et Spider, un découvert en compte globalement limité à 3 550 000 francs, découvert confirmé par un courrier du 14 janvier 1999, puis, le 26 mai 1999, a accordé à la société Sobel industries un prêt d'un montant réduit à 7 150 000 francs, le déblocage des fonds étant subordonné à la régularisation, avant le 30 juin 1999, de diverses garanties ; que le 8 juin 1999, la banque a rejeté, pour défaut de provision, des chèques émis par les sociétés, puis a refusé de débloquer le prêt ; que le redressement judiciaire de la société Sobel industries et celui des sociétés Sobelec et Spider a été ouvert les 18 et 22 juin 1999 ; que ces trois sociétés ont fait l'objet d'un plan de continuation homologué le 31 décembre 2002 ; que les sociétés Abes heating et SIT, filiales belges de la société Sobel industries, ont été mises en liquidation le 22 novembre 1999, M. Y... étant désigné aux fonctions de curateur ; que les sociétés Sobel industries, Sobelec et Spider (les sociétés), MM. Christian et Georges X... ainsi que M. Y..., ès qualités, ont recherché la responsabilité de la banque ;
Sur le deuxième moyen et le troisième moyen, pris en sa troisième branche du pourvoi n° U 07 21.803, le premier moyen et le deuxième moyen, pris en sa troisième branche du pourvoi n° U 08 14.240, rédigés en termes pour partie identiques, réunis :
Attendu que les sociétés, M. Y..., ès qualités, et MM. Christian et Georges X... reprochent à l'arrêt d'avoir rejeté la demande en indemnisation des conséquences de l'ouverture de procédures collectives à l'encontre des sociétés du groupe Sobel et rejeté le surplus des demandes des sociétés tendant, notamment, à voir condamner la banque à leur payer différentes sommes à titre de dommages intérêts, pour refus de déblocage du prêt, rejet fautif de chèques et inexécution de ses obligations, d'avoir débouté M. Y..., ès qualités, de ses demandes tendant à la condamnation de la banque à lui payer différentes sommes en réparation des préjudices subis par les sociétés Abes heating et SIT, et d'avoir mis à la charge des sociétés les dépens auxquels elles ont été condamnées solidairement entre elles, alors, selon le moyen :
1°/ que la lettre du 14 janvier 1999 de la banque autorise un découvert de 3 550 000 francs et précise "découvert global utilisable sur diverses sociétés du groupe à savoir Sobelec, Sicelec, Cecobel, Spider" ; qu'en affirmant que le montant global de 3 550 000 francs de découvert mentionné dans ce courrier, était global et utilisable sur les diverses sociétés du groupe, ce qui intégrait également le découvert de la société Sobel industries, la cour d'appel a dénaturé ce document, en violation de l'article 1134 du code civil ;
2°/ que les juges du fond ne peuvent valider une brusque rupture par la banque du découvert autorisé, pour cause de dépassement de celui-ci, sans constater au préalable la réalité de ce dépassement au jour de la rupture ; qu'en l'espèce, en se bornant à énoncer, par un motif hypothétique, que les sociétés du groupe Sobel reconnaissent que le total de 3 550 000 francs aurait été dépassé, sans le constater elle-même, et en ne vérifiant pas si la dernière lettre de la banque ayant trait au découvert autorisé, n'était pas celle du 8 juin 1999 portant rupture du crédit et refus d'honorer les valeurs présentées, et si elle ne se référait pas expressément, non à un découvert global pour le groupe, mais à des découverts, société par société, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1134 du code civil et L. 312-13 du code monétaire et financier ;
3°/ que contrairement à ce qu'a affirmé la cour d'appel, les sociétés, dans leurs conclusions déposées le 16 août 2007, n'avaient pas reconnu qu'un découvert total de 3 550 000 francs aurait été dépassé puisqu'elles contestaient cette globalisation et se référaient aux découverts autorisés pour chaque société du groupe en précisant qu'ils n'étaient, précisément, pas dépassés ; qu'en affirmant le contraire, la cour d'appel a dénaturé lesdites conclusions en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
4°/ que dans ses conclusions, M. Y..., ès qualités, avait fait valoir qu'il ressortait des divers documents de la banque que le découvert autorisé devait être apprécié société par société pour des montants déterminés, ce que la banque n'avait elle-même pas respecté, puisque les courriers du 9 juin 1999 adressés à Sicelec et Sobelec leur faisaient interdiction d'émettre des chèques en raison de découverts, respectivement de 324 836,54 francs et de 1 484 615,79 francs, quand leurs autorisations étaient respectivement de 400 000 francs et de 2 000 000 francs, de sorte qu'en rejetant les chèques de ces sociétés, qui généraient la part la plus importante du chiffre d'affaires externe du groupe, et non ceux émis par les sociétés Sobel industries, Spider et Cecobel, elle avait mis à mort le groupe Sobel ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5°/ que dans ses conclusions, M. Y..., ès qualités, avait aussi fait valoir que, même dans l'hypothèse où on estimerait que le découvert devait être apprécié globalement, il apparaissait que le dépassement invoqué était un faux motif car, la banque ayant elle-même estimé dès le 28 mai 1999, que les conditions d'octroi du prêt mises à la charge des emprunteurs étaient réunies, cette réserve de crédit de 7 150 000 francs constituait une provision suffisante qui interdisait formellement à la banque de rejeter brusquement, le 8 juin suivant, les chèques litigieux, au prétexte d'un dépassement de crédit, alors surtout qu'antérieurement, elle en avait autorisé de bien supérieurs; qu'en omettant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
6°/ qu'après avoir elle-même constaté que la société Sobel industries s'est vu consentir par acte du 26 mai 1999 un prêt de 7 150 000 francs sous condition de régularisation d'un certain nombre de garanties avant le 30 juin 1999 et relevé qu'après le 7 avril 1999 la banque a réclamé et obtenu le 21 avril 1999 des éléments comptables démontrant que les conditions du prêt étaient remplies, confirmé son accord de principe le 28 avril 1999 et, après réception des éléments nécessaires à la signature, notamment le 12 mai 1999 du déblocage de l'apport complémentaire, a signé le contrat de prêt le 26 mai 1999, la cour d'appel ne pouvait, pour débouter les sociétés et M. Y..., ès qualités, de leur action en responsabilité contre la banque pour rejet des chèques et refus de déblocage des fonds du prêt accordé en mai 1999, affirmer qu'il n'était pas justifié que les conditions d'octroi du prêt étaient remplies par celles-ci le 8 juin 1999 ; que la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles 1134 et 1147 du code civil à l'égard de la société Sobel industries, et l'article 1382 du même code à l'égard des sociétés Sobelec et Spider et des sociétés Abes heating et SIT ;
7°/ que la cour d'appel, qui a elle-même constaté que les conditions contractuelles du prêt avaient été remplies dès le mois de mai 1999, ne pouvait juger qu'elles ne l'étaient plus à la date du rejet des chèques, le 8 juin 1999, en se bornant à se référer à des exigences non contractuelles, ou à des circonstances intervenues postérieurement et sans vérifier si la banque n'avait pas elle-même considéré et écrit, dès le 28 mai 1999, que les conditions d'octroi du prêt mises à la charge des emprunteurs étaient réunies et si les conditions manquantes n'étaient pas de la responsabilité de la banque ou de ses filiales, ni si en tout état de cause ces conditions étaient réunies le 30 juin, terme fixé par la banque, qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil ;
8°/ que les principes de bonne foi et de loyauté, qui s'imposent au banquier dispensateur de crédit, s'opposent, même en cas de situation irrémédiablement compromise, à ce qu'une banque, qui connaît parfaitement la situation économique de son client, rompe brusquement l'octroi de l'ensemble des découverts autorisés pour chacune des sociétés d'un groupe, au prétexte d'un dépassement du découvert global autorisé de 3 550 000 francs pour l'ensemble du groupe ; qu'en jugeant le contraire, tout en constatant que, dans le même temps, la banque avait conclu un prêt de 7 150 000 francs , qui devait être débloqué dans les jours suivants, et qu'elle avait retiré également son offre de financement, le 8 juin 1999, avant le terme du 30 juin 1999, contractuellement fixé pour l'accomplissement de l'ensemble des conditions posées, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du code civil ;
9°/ que le banquier, qui connaît la situation désespérée de son client doit refuser tout crédit et l'en aviser aussitôt loyalement ; qu'en l'espèce, dès lors qu'elle constatait que dès l'année 1998, les parties avaient négocié un crédit, et que ce n'est qu'après que la banque ait réuni toutes les informations sur sa cliente qu'elle lui a octroyé un prêt de 7 150 000 francs par contrat du 26 mai 1999, la cour d'appel ne pouvait débouter les sociétés et M. Y..., ès qualités, de leurs actions en responsabilité contre la banque en affirmant que dès la fin 1998, la situation économique était compromise et la déconfiture consommée lors de l'octroi du crédit, et qu'il importe peu que la banque ait éventuellement su que la situation de l'emprunteuse était désespérée, puisqu'il ressortait au contraire de ces énonciations, que dans ce contexte, la banque était en faute pour avoir conclu le contrat de prêt de 7 150 000 francs, puis pour avoir refusé de l'exécuter, prétexte pris d'un dépassement de découvert, et en rejetant soudainement deux chèques émis par des sociétés du groupe Sobel industries ; qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a méconnu les articles 1134 et 1147 du code civil ;
10°/ qu'en affirmant qu'il importe peu que la banque ait éventuellement su que la situation de l'emprunteuse était désespérée, quand précisément cette recherche était nécessaire pour apprécier la bonne ou la mauvaise foi de la banque, la cour d'appel a entaché sa décision d'un manque de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
11°/ que le banquier est fautif s'il ne débloque les fonds d'un prêt qu'il a octroyés, sans avertissement préalable de son client ; qu'en l'espèce, pour écarter toute faute de la banque la cour d'appel ne pouvait se borner à affirmer que la banque n'avait pas retardé abusivement l'instruction du dossier, car il lui appartenait de rechercher si elle n'avait pas eu un comportement fautif et déloyal en laissant croire qu'elle octroierait un prêt de 7 150 000 francs après de longs mois de négociations, en signant le 26 mai 1999 le contrat avec la société Sobel industries puis, quelques jours plus tard, en le résiliant unilatéralement et indirectement, par le rejet de deux ordres de paiement, sans mise en garde ni information préalables et avant même l'expiration du délai contractuel laissé à la société Sobel industries pour réunir toutes les garanties exigées par la banque ; qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil, vis-à-vis de la société Sobel industries et au regard de l'article 1382 du code civil vis-à-vis des autres sociétés du groupe Sobel industries ;
Mais attendu que l'arrêt retient, d'un côté, que les conditions contractuellement convenues lors de la signature du contrat de prêt le 26 mai 1999, pour le déblocage des fonds prêtés, n'étaient pas réunies au 8 juin 1999, date de présentation des chèques au paiement, sans que ce retard fût imputable à la banque, d'un autre côté, que les sociétés du groupe avaient profité du découvert accordé par la banque pour des montants différents dont le total additionné s'élevait à 3 550 000 francs, qu'il résultait du courrier du 14 janvier 1999 de la banque que le découvert consenti pour ce montant était stipulé global et utilisable sur les diverses sociétés du groupe, les dépassements ponctuels intervenus à partir du 8 janvier 1999 étant insusceptibles de traduire l'acceptation tacite, par la banque, d'un découvert permanent d'un montant supérieur, enfin, que les chèques présentés au paiement le 8 juin 1999 s'élevaient à 708 852 francs et qu'entre les 4 et 8 juin le montant du solde débiteur a oscillé entre 3 761 000 francs et 3 770 000 francs, ce dont il résulte que la banque n'a pas commis de faute en rejetant les chèques en raison du dépassement global du découvert consenti ; que par ces seuls motifs, et abstraction faite du motif surabondant critiqué à la troisième branche, la cour d'appel, qui ne s'est pas contredite et a répondu aux conclusions invoquées en effectuant les recherches prétendument omises, a, sans dénaturation, légalement justifié sa décision ; que le moyen, qui manque en fait dans sa dixième branche, ne peut être accueilli ;
Sur le troisième moyen, pris en ses deux premières branches du pourvoi n° U 07 21.803, et le deuxième moyen, pris en ses deux premières branches du pourvoi n° U 08 14.240, rédigés en termes identiques :
Attendu que les sociétés, M. Y..., ès qualités, et MM. Christian et Georges X... font le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en matière commerciale la preuve est libre ; qu'en l'espèce, pour justifier de l'accord de principe donné par la banque au cours de l'année 1998 pour l'octroi d'un prêt de 14 300 000 francs, les sociétés et M. Y..., ès qualités, avaient produit aux débats différents courriers ainsi que les conditions générales des sociétés ICD investissements et de la Sofaris, par lesquels ces organismes confirmaient qu'ils accordaient, pour ce montant, leur garantie à la banque, et facturaient à la Sobel industries une prime d'assurances ainsi que trois procès-verbaux d'audition du dossier pénal, de MM. Z..., A... et B..., et une attestation de M. C..., confirmant l'accord de principe donné pour ce montant, puis le changement unilatéral ultérieur de la banque, à la fin 1998 ; qu'en opposant aux sociétés Sobel industries l'absence d'engagement écrit de la banque et une impossibilité de prouver l'accord litigieux par des déclarations de tiers, la cour d'appel a violé l'article L. 110-3 du code de commerce ;
2°/ que le juge ne peut rejeter une prétention dont il est saisi sans analyser toutes les pièces justificatives qui lui sont soumises ; qu'en l'espèce, pour justifier de l'accord de principe donné par la banque au cours de l'année 1998 pour octroyer un prêt de 14 300 000 francs, les sociétés et M. Y..., ès qualités, avaient produit aux débats différents courriers ainsi que les conditions générales des sociétés ICD investissements et de Sofaris, par lesquels ces organismes confirmaient qu'ils garantissaient ledit montant à la banque et la facture de cette prestation adressée à la société Sobel industries, trois procès-verbaux d'audition du procès pénal, de MM. Z..., A... et B..., et une attestation de M. C..., confirmant l'accord de principe donné pour ce montant, puis le changement unilatéral ultérieur de la banque, à la fin 1998 ; qu'en se bornant à se référer de manière générale aux courriers, attestations et déclarations de tiers et à une déclaration non identifiée, faite lors de l'instruction pénale, et en affirmant que rien ne venait les confirmer, la cour d'appel, qui a statué par voie générale, sans analyser, même sommairement les pièces susvisées, n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que c'est par une appréciation souveraine des éléments de preuve versés aux débats que la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'entrer dans le détail de l'argumentation des parties et n'a pas statué par voie générale, a retenu que la banque n'avait pris aucun engagement écrit d'accorder le prêt de 14 300 000 francs qui lui était réclamé et qu'un engagement de cette sorte ne pouvait se déduire des moyens de preuve invoqués par les sociétés du groupe Sobel, constitués de courriers, attestations et déclarations de tiers dépourvus du pouvoir d'engager la banque; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen du pourvoi n° U 07 21.803, et le troisième moyen du pourvoi n° U 08 14.240, rédigés en termes identiques, réunis :
Attendu que les sociétés, M. Y..., ès qualités, et MM. Christian et Georges X... font le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen :
1°/ que le banquier ne peut dénoncer un concours financier sans préavis qu'au cas où la situation du bénéficiaire du crédit s'avère irrémédiablement compromise ; qu'en l'espèce, pour dire que le refus, opposé le 8 juin 1999 par la banque de débloquer les fonds correspondants au contrat de prêt conclu le 26 mai 1999 était justifié, il appartenait à la cour d'appel de constater, qu'à cette date là, la situation des sociétés du groupe Sobel était irrémédiablement compromise ; qu'en se bornant à se référer à sa situation durant l'année 1998, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 313-12 du code monétaire et financier ;
2°/ que la situation irrémédiablement compromise ne s'assimile ni à un état de cessation de paiement, ni à une situation déficitaire, dès lors que l'entreprise bénéficie de la confiance des organismes sociaux et fiscaux, de celle de partenaires importants et de perspectives de développements sérieuses ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait se borner à dire la situation du groupe Sobel industries irrémédiablement compromise, en affirmant simplement que certaines sociétés étaient déficitaires, que son passif exigible dépassait l'actif disponible en 1998, que les comptes étaient fictifs selon le rapport de Mme D... et que peu importaient les moratoires fiscaux ou sociaux, sans rechercher si les sociétés du groupe Sobel industries ne bénéficiaient pas du soutien des organismes sociaux et fiscaux, de celui de leurs actionnaires, apportant 7 000 000 francs, de leurs partenaires, dont EDF et l'Anvar, par leurs subventions, et même de celui de la banque, qui a accordé le 26 mai 1999 un crédit de 7 150 000 francs, et sans vérifier si les perspectives de développements n'étaient pas sérieuses, du fait de leur savoir-faire et des besoins du marché ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a entaché son arrêt d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 313-12 du code "des marchés financiers" ;
3°/ que toute décision doit être motivée ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait affirmer la fictivité des comptes ou l'existence d'artifices comptables, en se référant aux rapports de Mme D... déposés dans la procédure collective, pourtant déniés par cette dernière, et en affirmant qu'ils ne sont pas utilement combattus, sans répondre aux conclusions des sociétés et de M. Y..., ès qualités, qui faisaient valoir que les comptes avaient été validés par le procès pénal initié sur la plainte de la banque, sans violer l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que le banquier, qui connaît la situation désespérée de son client ne peut, de bonne foi, continuer à négocier les conditions d'un crédit, ni le finaliser par un accord, et il doit en aviser aussitôt loyalement son client ; qu'en l'espèce, dès lors qu'elle a retenu que dès l'année 1998 la situation du groupe était désespérée, la cour d'appel ne pouvait juger qu'aucune faute ne pouvait être retenue à l'encontre de la banque, bien qu'elle ait réuni toutes les informations sur sa cliente avant de lui octroyer un prêt de 7 150 000 francs par contrat du 26 mai 1999, puisqu'il s'en déduisait nécessairement que la banque connaissait à ce moment-là la situation désespérée de la société Sobel industries ou aurait dû la connaître, qu'elle devait en avertir sa cliente et refuser de conclure le contrat qu'elle a ensuite unilatéralement remis en cause, un mois plus tard, au prétexte d'un dépassement de découvert autorisé ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil à l'égard de la société Sobel industries, et l'article 1382 du code civil à l'égard des autres sociétés du groupe Sobel ;
5°/ que le banquier est fautif, lorsqu'il négocie un concours bancaire pendant de longs mois, laissant croire de façon erronée à son client qu'il octroiera le crédit, qu'il lui refusera finalement; qu'en l'espèce, après avoir affirmé la situation désespérée des sociétés du groupe Sobel industries dès 1998, il appartenait à la cour d'appel de rechercher, si, en cet état, la banque n'avait pas été en faute, en poursuivant néanmoins la négociation, puis en lui accordant le prêt de 7 150 000 francs en mai 1999, laissant sa cliente dans la croyance erronée que les fonds seraient débloqués, avant de rompre unilatéralement le contrat, le 8 juin 1999 ; qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel qui a rejeté les demandes de la société Sobel industries comme celles des autres sociétés du groupe Sobel, a entaché son arrêt d'un défaut de base légale au regard des articles 1134,1147 et 1382 du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt retient que les conditions contractuelles de déblocage des fonds prêtés nétaient pas réunies au 9 juin 1999 et qu'à cette date le découvert global consenti par la banque aux sociétés du groupe Sobel avait été atteint, ce dont il résulte que les rejets des chèques litigieux par la banque ne pouvant constituer une dénonciation de ses concours, les dispositions de l'article L. 313-12 du code monétaire et financier ne sont pas applicables ;
Attendu, en deuxième lieu, qu'ayant rappelé les décisions de non-lieu intervenues sur les plaintes de la banque pour escroquerie et présentation de comptes inexacts, et relevé le caractère très optimiste des comptes, établis, selon les explications fournies par les sociétés en cause, sur la base de projections futures supposant une introduction en bourse espérée fin 1998, laquelle n'a pas eu lieu, la cour d'appel a satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, en troisième lieu, que l'arrêt retient, par une motivation circonstanciée, que la chronologie des faits ne confirme pas les tergiversations fautives reprochées à la banque dans l'instruction de la demande de prêt, que la banque a légitimement demandé en janvier 1999, après l'échec du projet d'introduction en bourse et après que le découvert en compte d'un montant de 3 550 000 francs consenti le 16 octobre 1998 n'eut pas été remboursé à l'échéance prévue du 31 décembre 1998, la remise d'une nouvelle situation de trésorerie et attendu qu'il soit justifié du financement complémentaire de 7 150 000 francs qu'elle n'avait pas été chargée de rechercher, lequel a été finalement obtenu auprès de la société mère de la société Sobel industries le 6 avril 1999 ; que l'arrêt relève encore qu'après avoir réclamé le 7 avril 1999 de nouveaux éléments comptables obtenus le 21 avril 1999, la banque a confirmé son accord de principe le 28 avril 1999 et après réception des éléments nécessaires à la signature, notamment le 12 mai 1999 du déblocage de l'apport complémentaire, a signé le contrat de prêt le 26 mai 1999 dans un délai qui ne témoigne d'aucune temporisation coupable ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'effectuer une recherche qui ne lui était pas demandée, a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que le premier moyen du pourvoi n° U 07 21.803 ne serait pas de nature à permettre l'admission de ce pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois.