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Décisions

CA Montpellier, 5e ch. A, 4 juin 2015, n° 14/06120

MONTPELLIER

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Nest AS (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Gregori

Conseillers :

Mme Conte, M. Muller

JEX Narbonne, du 5 août 2014, n° 14/0045…

5 août 2014

Suivant ordonnance sur requête de la Société de droit danois NEST AS, en date du 21 octobre 2013, le juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de NARBONNE a, au visa de l'article R 221-28 du code des procédures civiles d'exécution ordonné avant même le début de toute opération de saisie, la remise à Maître Philippe L., huissier de justice, en qualité de séquestre et de gardien des objets saisis, de l'ensemble des objets prêtés par Georges EL A., au profit de la Commune de Narbonne dans le cadre de l'exposition du centenaire de la naissance de Charles T. et dit que 'ladite saisie' ne devra être pratiquée qu'à la fin de l'exposition.

En exécution de cette ordonnance, Maître L. a dressé, les 21, 22, 23 et 24 octobre 2013 un procès-verbal de saisie-conservatoire, en 'garantie de la somme de 12.699,18 €'.

Poursuivant la rétractation de l'ordonnance sur requête et la nullité de l'acte de saisie, Georges EL A. a saisi le juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de CRETEIL qui s'est déclaré territorialement incompétent, au profit du juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de NARBONNE, lequel, par jugement du 05 août 2014 a :

- rétracté l'ordonnance du 21 octobre 2013 ;

- annulé le procès-verbal de saisie-conservatoire dressé par Maître L. les 21, 22, 23 et 24 octobre 2013 ;

- condamné la Société NEST AS à payer à Georges EL A. la somme de 5.000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive et celle de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par déclaration reçue le 11 août 2014, la Société NEST AS a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions notifiées le 16 mars 2015, l'appelante sollicite l'infirmation du jugement et la condamnation de l'intimé au paiement des sommes de 5.000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive et de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle invoque un contrat de cession à elle consenti le 08 décembre 2006 par l'intimé des oeuvres d'art et bibelots reçus par legs de Charles T., ainsi que des créances résultant de plusieurs décisions de justice justifiant la mise en oeuvre d'une 'procédure d'exécution'.

Elle observe que le rejet antérieur par le juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de Créteil d'une requête aux fins de saisie-conservatoire de biens 'prétendument' propriétés de Georges EL A. n'a aucune incidence sur la présente procédure.

Par conclusions notifiées le 19 février 2015, Georges EL A. demande à la Cour de confirmer le jugement et de condamner l'appelante au paiement de 10.000 € de dommages et intérêts pour appel abusif et de la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Il fait valoir que :

- la demande de mise sous séquestre reposait sur deux motifs contradictoires à savoir la prétendue propriété des objets exposés et la détention d'une créance de 12.699,18 € ;

- l'huissier instrumentaire au vu de l'autorisation de mise sous séquestre a dressé un procès-verbal de saisie-conservatoire, sans autorisation préalable du juge de l'exécution ;

- les associés de la Société NEST AS ont été condamnés le 14 mai 2014 par le Tribunal Correctionnel de PARIS, du chef d'escroquerie à son encontre, à 18 mois de prison ferme et 400.000 € de dommages et intérêts, l'exécution provisoire étant ordonnée pour les dispositions civiles de la décision ;

- les objets saisis, constitués de souvenirs personnels de Georges EL A., sont insaisissables ;

- le contrat de vente dont le prix n'a jamais été réglé par NEST AS, ne concernait pas les objets visés par la saisie-conservatoire.

MOTIFS DE L'ARRET

S'agissant de l'ordonnance sur requête, autorisant la mise sous séquestre des objets prêtés par Georges EL A. à la Commune de Narbonne dans le cadre d'une exposition, le premier Juge a exactement relevé, pour ordonner sa rétractation, qu'étaient allégués au soutien de la requête et de façon contradictoire, un acte sous-seing privé en date du 08 décembre 2006 de cession à la Société NEST AS d'oeuvres d'art et bibelots ayant appartenu à Charles T. et une créance de 12.699,18 €, que la Société NEST AS s'y déclarait propriétaire des objets litigieux, qu'en réalité la cession prétendument intervenue en décembre 2006 est relative à l'intégralité des droits d'auteurs et d'artistes interprètes de Charles T., que le gérant de droit et le gérant de fait de la Société NEST AS ont été à raison de cette cession condamnés pour escroquerie par le Tribunal Correctionnel de Paris, par jugement du 14 mai 2014 qui, assorti de l'exécution provisoire en ce qui concerne ses dispositions civiles, a alloué à Georges EL A. des dommages et intérêts à hauteur de 4.000.000 €, que les requérants omettant d'informer le juge de la procédure pénale ou tout au moins d'un litige en cours, ont, en outre, fait preuve d'un défaut de loyauté, l'ensemble de ces éléments justifiant la rétractation de l'ordonnance.

Par ailleurs, poursuivant comme il est dit au procès-verbal de saisie des 21, 22, 23, 24 octobre 2013, 'l'exécution d'une ordonnance rendue sur requête le 21 octobre 2013 par le juge de l'exécution' la Société NEST AS a fait pratiquer, par Maître L. huissier de justice à Narbonne, la saisie-conservatoire des biens litigieux.

L'ordonnance visée n'ayant autorisé 'avant même le début de toute opération de saisie' que la mise sous séquestre des biens, la mesure conservatoire pratiquée au visa de ladite ordonnance, est entachée de nullité.

C'est également à bon droit que le premier Juge a condamné la Société NEST AS au paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive, sa mauvaise foi ou son erreur grossière étant caractérisée par le fait de dissimuler dans le cadre de sa requête, l'existence d'un litige en cours, d'arguer d'un contrat de cession ayant en fait pour objet des droits d'auteur et de faire pratiquer une mesure conservatoire en visant une décision du juge de l'exécution n'emportant pas l'autorisation d'y procéder.

Ces mêmes motifs conduisent à condamner la Société NEST AS à payer à l'intimé, la somme de 3.000 € de dommages et intérêts pour appel abusif.

La Société NEST AS, tenue aux dépens d'appel, doit être condamnée à payer à Georges EL A., la somme de 3.000 € au titre des frais non taxables par lui exposés.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

DIT l'appel recevable ;

CONFIRME le jugement ;

CONDAMNE la Société NEST AS à payer à Georges EL A., la somme de 3.000 € de dommages et intérêts pour appel abusif et celle de 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNE la Société NEST AS aux dépens d'appel.