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Décisions

CA Bastia, ch. civ. sect. 2, 16 juin 2021, n° 19/01060

BASTIA

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

PRIM & A (S. A.S)

Défendeur :

CIMC - CORSE INGENIERIE METHODE ET CONSTRUCTION (S. A.R. L)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

GILLAND

Conseillers :

DELTOUR, MOLIES

Avocats :

Me CANAZZI, Me TADDEI, Me ALBERTINI, Me GUENOT

T.com. Bastia, du 22 nov. 2019

22 novembre 2019

Par acte sous seing privé du 31 octobre 2016, la S. A.S. Prim & A a confié à la S. A.R. L. CIMC une mission de maîtrise d'oeuvre pour la réhabilitation d'un bâtiment dans le but de le transformer en immeuble d'habitation, moyennant le versement de la somme de

130 000 euros hors taxes, selon calendrier de facturation porté au chapitre 4 du contrat.

Par avenant signé le 18 décembre 2017, les parties ont convenu de la mise en place d'une surveillance de travaux permanente et quotidienne pour une durée de 6 mois à compter du mois de janvier 2018, moyennant le versement de la somme mensuelle de 1 500 euros hors taxes par la S. A.S. Prim & A.

Suivant acte d'huissier du 13 décembre 2018, la S. A.R. L. CIMC a fait citer la S. A.S. Prim & A devant le tribunal de commerce de Bastia aux fins de voir :

- condamner la société Prim&A au paiement d'une so mme de 59 320 euros T. T.C correspondant aux factures impayées dans les comptes de la société CIMC et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 2 mai 2018, outre anatocisme,

- condamner la société Prim&A sur le fondement des dispositions de l'article 1794 du code civil à régler à la société CIMC le solde des honoraires dus en exécution des conventions, soit une somme de 41 280 euros T. T.C. assortie des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 2 mai 2018 et anatocisme,

- condamner la société Prim&A au paiement d'une somme d'un montant de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir,

- condamner la société Prim&A aux entiers dépens.'

Par décision du 22 novembre 2019, le tribunal de commerce de Bastia a :

- rejeté le caractère irrecevable des demandes,

Vu la résiliation unilatérale,

- condamné la société Prim&A à payer à la société CIMC la somme de 59 320 euros, montant de factures impayées et ce avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 2 mai 2018,

- condamné la société Prim&A à payer à la société CIMC la somme de 41 280 euros pour solde des honoraires avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 2 mai 2018,

- ordonné l'application de la capitalisation des intérêts,

- condamné la société Prim&A à payer à la société CIMC la somme de 2 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Priméa aux entiers dépens,

- rejeté pour le surplus toutes autres demandes contraires à la présente décision,

- liquidé les dépens à recouvrer par le greffe à la somme de 73,22 euros T. T.C. (Dont

20 % de T. V.A.).'

Suivant déclaration enregistrée le 17 décembre 2019, la S. A.S. Prim & A, régulièrement représentée, a interjeté appel de la décision susvisée en ce qu'elle a :

- rejeté le caractère irrecevable des demandes,

Vu la résiliation unilatérale,

- jugé que la résiliation unilatérale du contrat initial émanait de la volonté de la société Prim&A, maître de l'ouvrage, et a fait à tort, par suite, application des dispositions de l'article 1794 du code civil,

- condamné la société Prim&A à payer à la société CIMC la somme de 59 320 euros, montant de factures impayées et ce avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 2 mai 2018,

- condamné la société Prim&A à payer à la société CIMC la somme de 41 280 euros pour solde des honoraires avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 2 mai 2018,

- ordonné l'application de la capitalisation des intérêts,

- condamné la société Prim&A à payer à la société CIMC la somme de 2 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Priméa aux entiers dépens,

- rejeté pour le surplus toutes autres demandes contraires à la présente décision,

- liquidé les dépens à recouvrer par le greffe à la somme de 73,22 euros T. T.C. (Dont

20 % de T. V.A.).

Par dernières conclusions régulièrement notifiées le 29 juin 2020, la S. A.S. Prim & A a demandé à la cour de :

- Dire et juger l'appel recevable et justifié,

- Infirmer le jugement déféré N°2018 004932 rendu par le Tribunal de commerce de Bastia, en date du 22 novembre 2019, en toutes ses dispositions.

En conséquence et statuant à nouveau, la Cour de céans devra

- Dire irrecevable l'ensemble des demandes pécuniaires de la société CIMC,

- Dire infondées les demandes pécuniaires de la société CIMC,

- Rejeter comme infondées l'ensemble des demandes de la société CIMC,

- Condamner la société CIMC à payer à la SAS Prim&A la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens distrait au profit de Me Claire Canazzi, Avocat.'

Par dernières conclusions régulièrement notifiées le 2 avril 2020, la S. A.R. L. CIMC, régulièrement représentée, a demandé à la juridiction d'appel de :

- confirmer le jugement du 22 novembre 2019,

- confirmer la condamnation de la société Prim&A au paiement d'une somme de 59 320 euros T. T.C. correspondant aux factures impayées dans les comptes de la société CIMC et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 2 mai 2018, outre anatocisme,

- confirmer la condamnation de la société Prim&A sur le fondement des dispositions de l'article 1794 du code civil à régler à la société CIMC le solde des honoraires dus en exécution des conventions, soit une somme de 41 280 euros T. T.C. assortie des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 2 mai 2018 et anatocisme,

- condamner la société Prim&A au paiement d'une somme d'un montant de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Prim&A aux entiers dépens.

Par ordonnance du 2 décembre 2020, le conseiller de la mise en état a ordonné la clôture de la procédure et fixé l'affaire à plaider devant le conseiller rapporteur au 15 avril 2021 à 8 heures 30.

Le 15 avril 2021, la présente procédure a été mise en délibéré pour être rendue par mise à disposition au greffe le 16 juin 2021.

La cour, pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, fait expressément référence à la décision entreprise ainsi qu'aux dernières conclusions notifiées par les parties.

Motifs

SUR CE

Sur la recevabilité de la demande en paiement

La S. A.S. Prim & A s'étonne que la société CIMC ne se soit pas prévalue des dispositions de l'article 1227 du code civil alors qu'elle excipe d'une inexécution de sa part. Selon elle, les dispositions de l'article 1794 ne pourraient pas servir de fondement juridique aux demandes en paiement.

La société appelante relève qu'aucun décompte général définitif n'a été établi alors que la société CIMC y était tenue même en l'absence de mention du contrat à ce titre puisqu'il permet de susciter un débat contradictoire sur l'exécution du marché et la réalité des prestations réalisées.

Elle en déduit que la demande de la société CIMC est irrecevable alors au surplus qu'il existe des contestations en l'espèce, puisque la S. A.S. Prim & A se prévaut de mauvaises exécutions et d'inexécutions de ses obligations par la société CIMC.

En réponse, la S. A.R. L. CIMC observe que la convention liant les parties n'emportait pas obligation d'établir un décompte général définitif.

La S. A.S. Prim & A ne précise pas le fondement juridique de l'exception d'irrecevabilité soulevée, alors que le contrat signé par les parties le 13 octobre 2016 n'évoque aucunement l'établissement d'un décompte général définitif préalablement à la demande en paiement.

En outre, il sera rappelé qu'à défaut d'envoi d'un tel décompte général définitif au maître d'ouvrage par le maître d'œuvre, la S. A.S. Prim & A conserve la possibilité d'émettre des contestations contre les factures émises dans le cadre de la présente procédure.

Le jugement entrepris sera, dès lors, confirmé en ce qu'il a rejeté l'exception d'irrecevabilité soulevée par la S. A.S. Prim & A.

Sur le bien fondé de la demande en paiement

La S. A.S. Prim & a soutient que la société CIMC ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 1794 du code civil, alors qu'il résulte du courriel envoyé le 4 avril 2018 que la maîtresse d'œuvre a indiqué que son contrat prendrait fin malgré l'inachèvement de sa mission.

La société appelante indique avoir fait part de sa surprise à la société CIMC tout en prenant acte de sa volonté de résilier le contrat, alors que le chantier était arrêté depuis plusieurs mois.

La S. A.S. Prim & A en conclut que la société CIMC voulait quitter cette opération sans avoir achevé ses prestations, et que la résiliation ne résulte pas du fait de la maîtresse d'ouvrage mais de la maîtresse d'œuvre.

Elle ajoute que l'article 1794 du code civil ne saurait s'appliquer lorsque la partie qui l'invoque a manqué à ses obligations contractuelles et qu'un préjudice en est résulté. Or, le 4 février 2018, l'ingénieur conseil aurait pointé la société CIMC comme responsable des retards. Le compte rendu de l'ingénieur conseil du 23 février 2018 rendrait compte des retards, non conformités graves et absence de la maîtresse d''oeuvre. La S. A.R. L. Sanitherm aurait également pointé ces désordres dans un courrier du 20 mars 2018 ; plus généralement, plusieurs entreprises l'aurait alertée sur les retards pris du fait de l'absence de prises de position inhérentes aux missions d'exécution confiées à la société CIMC.

Surtout, la société appelante affirme avoir dû assumer le versement d'une indemnité de retard de 300 000 euros à la commune de Bastia au regard des retards dans la mise en oeuvre de sa mission par la société CIMC.

En réponse, la S. A.R. L. CIMC affirme que la résiliation du contrat résulte du courrier envoyé par la S. A.S. Prim & A le 10 avril 2018.

La société intimée estime, par ailleurs, que la S. A.S. Prim & A ne rapporte pas la preuve des fautes qu'elle tente de lui imputer. Elle affirme au contraire que la durée du chantier s'explique par l 'indécision chronique de la maîtresse de l 'ouvrage, alors que les comptes rendus de chantier rédigés de manière hebdomadaire attesteraient de la présence assidue et consciencieuse de la maîtresse d''oeuvre.

Elle indique que le courriel établi par M. C, ingénieur conseil, émane en fait de l'économiste qui s'était fourvoyé dans les quantités ainsi que les prestations, de sorte que l'intégralité des documents contractuels avaient dû être repris dans leur rédaction.

Elle relève qu'avant la résiliation, la société Prim & A ne lui a adressé aucun avertissement ou mise en demeure, ni aucune plainte.

En ce qui concerne la pénalité de 300 000 euros infligée par la commune de Bastia, la société CIMC relève que le retard sanctionné concerne la période du 5 septembre 2013 au 5 septembre 2017 alors qu'elle même n'a démarré sa mission qu'en février 2017. Ce retard ne saurait dès lors lui être imputé.

L'article 1794 du code civil dispose que le maître peut résilier, par sa seule volonté, le marché à forfait, quoique l'ouvrage soit déjà commencé, en dédommageant l'entrepreneur de toutes ses dépenses, de tous ses travaux, et de tout ce qu'il aurait pu gagner dans cette entreprise.

Le mécanisme ainsi prévu se distingue de la responsabilité contractuelle et vise à protéger le maître d'oeuvre en instaurant à son profit une contrepartie en cas d'exercice libre du droit de résiliation par le maître de l'ouvrage.

Dans l'hypothèse d'une faute du maître d'oeuvre, il appartient au maître de l'ouvrage de solliciter la résiliation du contrat aux torts de ce dernier ou de solliciter des dommages et intérêts.

Il sera constaté en premier lieu que la S. A.S. Prim & A ne formule pas de telles demandes dans le cadre de la présente instance.

Le 4 avril 2018, M. B représentant la S. A.R. L. CIMC a envoyé le courriel suivant à la S. A.S. Prim & A :

Monsieur,

Comme nous l'avions déjà évoqué, mon contrat arrive à échéance le 9 juin 2018. Il a été conclu pour une durée de 16 mois.

Vous trouverez ci joint l'avenant n°2 à ce contrat allant de juin 2018 à février 2019.

J'ai pris comme date de départ de ma prestation la date de réalisation initiale du constat huissier réalisé contradictoirement avec la S. A.S. Prim&A le 8 février 2017. Ceci bien que j'ai commencé ma prestation bien avant.

Je tiens à préciser que cette extension de mission ne prends pas en compte la pilotage que je ne pourrai malheureusement plus assurer.'

La S. A.S. Prim & A a répondu suivant courrier du 10 avril 2018 rédigé comme suit :

Monsieur,

En mains vos mails des 4 et 8 avril dernier, ainsi que votre proposition d'avenant n°2 au contrat de prestation de services signé entre nos parties le 31.10.2016.

Je prends note que vous tirez de la lecture de ce contrat la conclusion que son terme est fixé au 9 juin prochain.

Je vous laisse la responsabilité de cette interprétation d'un contrat rédigé par vos soins.

(...)

Ne souhaitant pas obtempérer à votre demande financière, je prends acte que vous considérez que votre contrat se termine, inachevé, le 9 juin 2018.

Devant les diverses lacunes et erreurs techniques que nous avons par ailleurs relevées à votre encontre, nous nous estimons légitimement fondés à anticiper cette date et mettre un terme dès aujourd'hui à notre collaboration dans l'intérêt de la société Prim&a.

Votre mission s'arrête ici.

Vous voudrez donc bien nous faire parvenir tous éléments nous appartenant au titre du dossier Z au siège social de la société Prim&A, 9 av. du Gl De Gaulle à Bastia -20200-, ainsi que votre note d'honoraires pour solde.

(...) '

Le contrat de prestations de services régularisé par les parties le 31 octobre 2016 prévoit que le délai de réalisation est fixé à 16 mois, soit le délai visé par la société CIMC dans son courriel.

Il ressort clairement des échanges entre les parties que la société CIMC a souhaité signer un avenant afin de proroger la date de réalisation des travaux et lui permettre d'accomplir sa mission dans un délai plus long que celui initialement prévu.

Au terme de son courrier, la S. A.S. Prim & A a, de manière paradoxale, imputé la résiliation du contrat à la société CIMC, tout en mentionnant expressément l'avenant proposé par la maîtresse d'œuvre afin de poursuivre le chantier.

En tout état de cause, la S. A.S. Prim & A a clairement indiqué souhaiter que la résiliation intervienne le jour même 'devant les diverses lacunes et erreurs techniques que nous avons par ailleurs relevées à votre encontre', prenant ainsi l'initiative de la rupture de manière non équivoque.

Elle a notamment fait état du retard dans l'avancement des travaux, de l'absence de remise d'un calendrier et du risque que les entreprises quittent le chantier. Elle a évoqué, par ailleurs, une précédente pénalité de 300 000 euros votée par la commune de Bastia et a indiqué souhaiter éviter de devoir payer de nouveau une telle somme.

Il sera tout d'abord souligné que la S. A.S. Prim & A ne justifie d'aucune mise en demeure qu'elle aurait adressée à la S. A.R. L. CIMC pour formaliser ces griefs avant le courrier de résiliation.

Il résulte de l'ensemble des documents versés au débat que le retard dans l'avancement du chantier est imputable tant à un manque de présence et de contrôle de la maîtresse d'œuvre qu'à un manque de réactivité et de prise de décisions de la maîtresse de l'ouvrage.

L'avenant du 18 décembre 2017 vise à renforcer la présence de la maîtresse d'œuvre sur le chantier à compter du mois de janvier 2018 afin d'apporter une solution au premier grief formulé.

S'agissant du retard dans l'avancement des travaux, les différents compte rendus de chantier produits par la société intimée montrent que des relances auprès de la maîtresse de l'ouvrage étaient nécessaires lors de chaque réunion mensuelle, tant pour l'approbation de devis ou plans que pour le choix des matériaux.

Cette absence de décision quant au choix des matériaux qui incombe nécessairement à la maîtresse de l'ouvrage ressort également des différents courriers versés au débat par la société appelante.

D'autre part, contrairement à ce qu'indique la S. A.S. Prim & A, les différents entrepreneurs n'ont pas menacé de quitter le chantier au terme du courrier non daté produit au débat, mais se sont inquiétés de l'arrêt du chantier faute d'approbation des plans, du choix des matériaux et des entreprises, soit des compétences incombant à la maîtresse de l'ouvrage.

La S. A.S. Prim & A produit uniquement les dernières lignes d'un courrier émanant de M. A, représentant la S. A.R. L. Sanitherm, se plaignant du manque de rigueur et de compétence de la maîtresse d'œuvre. Ce courrier n'étant pas versé dans son intégralité ni daté, il ne pourra être retenu à titre de preuve. Il sera simplement relevé qu'il n'a pas été suivi d'effet puisque la S. A.S. Prim & A ne justifie pas avoir adressé des doléances à la S. A.R. L. CIMC en cours de chantier.

Enfin, l'examen de la délibération de la commune de Bastia du 20 juin 2017 révèle que la pénalité de 300 000 euros a été réclamée au regard du retard de chantier entre le 5 septembre 2013 et le 5 septembre 2017, alors que la signature du contrat de maîtrise d'oeuvre n'est intervenue que le 31 octobre 2016, soit en toute fin de la période sanctionnée. Aucune faute de la S. A.R. L. CIMC ne saurait être établie de ce chef.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la S. A.S. Prim & A a pris l'initiative de la résiliation sans établir l'existence d'une faute de la S. A.R. L. CIMC justifiant la rupture du contrat.

Elle ne peut dès lors priver la société CIMC de la possibilité de se prévaloir des dispositions de l'article 1794 du code civil.

Sur la demande en paiement de la somme de 59 220 euros

La société appelante soutient en premier lieu que la S. A.R. L. CIMC ne démontre pas que les demandes financières correspondent aux prestations réellement réalisées, alors que le courrier du 10 avril 2018 fait état du non respect de nombreuses obligations contractuelles et de plusieurs désordres en relation avec la mission de la société.

Elle précise ne pas avoir réglé les factures litigieuses en considération des nombreuses inexécutions, mais avoir vainement attendu l'établissement d'un décompte général définitif pour faire valoir ses contestations.

Elle souligne que la somme des trois factures litigieuses s'élève à la somme de 59 220 euros et non 59 320 euros comme demandé et observe que la même nature de travaux telle que le 'démarrage'- est comptabilisée dans les factures de février et mars 2018.

En outre, elle relève que les factures font état de 'travaux en cours', sans que la réalisation ou l'avancée des travaux ne soit avérée par une pièce du dossier.

Elle souligne enfin que la facture d'octobre 2018 fait état de sommes reçues à hauteur de 55 250 euros, soit une somme inférieure à celle de 72 150 euros mentionnée sur la facture de mars 2018.

La société appelante en déduit que cette facturation ne peut servir à établir une créance liquide et exigible.

Elle souligne qu'il n'est nullement justifié ni de l'exécution ni de la réception des travaux dont le paiement est sollicité. Elle précise notamment que tous les marchés n'étaient pas passés, de sorte que la société CIMC ne saurait se prévaloir d'une créance de 19 500 euros au titre de l'assistance à établissement des marchés.

Elle entend se prévaloir des comptes rendus de chantier et de procès verbaux de constat établis à sa demande pour établir l'existence de nombreux désordres en lien avec le suivi du chantier.

En réponse, la S. A.R. L. CIMC rappelle que les factures litigieuses ont été adressées à la société appelante avant la résiliation, sans que cette dernière ne proteste sur la fidélité des facturations. Au contraire, le maître de l'ouvrage aurait sollicité, au terme de son courrier de résiliation, la 'note d'honoraires pour solde'.

Elle précise que la facture du 24 mars 2018 a fait état, par erreur, du règlement de la facture du 26 février 2018, de sorte qu'une facture rectificative a été établie le 5 octobre 2018.

Elle écarte toute double facturation et indique avoir respecté l'échéancier de règlement prévu contractuellement en fonction de l'avancement des travaux.

Elle soutient que ces factures correspondent à l'état d'avancement des travaux et relève que la société Prim & A n'apporte pas la preuve contraire.

Elle estime que les sommes de 13 000 euros au titre de l'acompte de démarrage et de 19 500 euros au titre de l'assistance à l'établissement des marchés sont incontestablement dues.

Elle ajoute que les comptes rendus de chantier et factures démontrent que l'avancement des travaux justifiait la facturation de la S. A.S. Prim & A.

La société intimée ajoute qu'elle ne saurait être responsable du défaut de conception d'un ascenseur, au surplus lorsque les plans d'exécution ont été transmis au mois de mars 2018, soit un mois avant qu'elle ne soit congédiée.

La S. A.R. L. CIMC décompose la somme de 59 320 euros comme suit :

- 3 600 euros au titre de la facture du 26 février 2018 émise pour la mission de surveillance permanente,

- 1 900 euros au titre de la facture du 30 mars 2018 émise pour la mission de surveillance permanente,

- 20 280 euros au titre de la facture du 26 février 2018 fondée sur le contrat de maîtrise d'oeuvre,

- 33 540 euros au titre de la facture du 26 mars 2018 fondée sur le contrat de maîtrise d'oeuvre.

Les factures litigieuses sont versées au débat, tout comme celles qui ont été émises les 25 avril 2018, 27 avril 2018 et 5 octobre 2018.

En premier lieu, il sera relevé que la question de l'avancement des travaux est indifférente dès lors que la demande en paiement de la S. A.R. L. CIMC est présentée sur le fondement de l'article 1794 du code civil.

Contrairement à ce qu'indique la S. A.S. Prim & A, les factures ne révèlent aucune double facturation, chaque facture étant complétée par rapport à la précédente au vu de l'avancement des travaux : il est donc normal que l'ensemble des postes de facturation demeurent apparents, même s'ils ne donnent pas lieu à une nouvelle facturation.

D'autre part, la facture du 5 octobre 2018 est en réalité une facture rectificative de celle qui a été émise le 26 mars 2018, afin de préciser que les honoraires réclamés au titre de la facture du 26 février 2018 demeuraient alors en attente de règlement.

Toutefois, la facture du 25 avril 2018 - qui n'a pas fait l'objet d'une rectification ultérieure mentionne des honoraires déjà versés à hauteur de 100 100 euros, soit le montant des factures précédentes des 26 février 2018 et 26 mars 2018. Il se déduit de ces éléments établis par la société intimée que le règlement de la facture du 26 février 2018 est intervenu entre le 26 mars et le 25 avril 2018.

D'autre part, il résulte de la facture du 30 mars 2018 que la somme de 3 000 euros a déjà été versée au titre de la facture du 26 février 2018 relative à la mission complémentaire de surveillance permanente.

La facture du 27 avril 2018 fait apparaître pour sa part des versements à hauteur de 4 500 euros, soit le paiement des factures des 26 février 2018 et 30 mars 2018 hors taxes.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, la S. A.R. L. CIMC sera déboutée de sa demande en paiement au titre des factures émises.

Le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.

Sur la demande en paiement de la somme de 41 280 euros au titre du solde des honoraires

La S. A.S. Prim & A soutient que la demande en paiement fondée sur l'article 1794 du code civil doit être rejetée dès lors que la résiliation aurait été prononcée de manière fautive par la S. A.R. L. CIMC.

En réponse, la S. A.R. L. CIMC rappelle que l'article 1794 du code civil offre au maître d'oeuvre la possibilité de facturer les prestations non exécutées dès lors que le maître de l'ouvrage prend la décision unilatérale de résilier le marché.

La S. A.R. L. CIMC fonde sa demande en paiement sur :

- une facture du 27 avril 2018 à hauteur de 5 400 euros émise pour la mission de surveillance permanente,

- une facture du 25 avril 2018 à hauteur de 35 880 euros émise au titre du contrat de maîtrise d'oeuvre.

Les factures sont versées au débat.

Ainsi qu'il a été jugé ci dessus, l'article 1794 du code civil est applicable en l'espèce, de sorte que la S. A.R. L. CIMC peut solliciter le paiement de l'ensemble des sommes auxquelles elle aurait pu prétendre si le chantier n'avait pas été résilié par la S. A.S. Prim & A.

Les factures litigieuses ont été émises en conformité avec les clauses du contrat du 31 octobre 2016 et de l'avenant signé le 18 décembre 2017 et, notamment, conformément aux prix convenus.

Faute pour la S. A.S. Prim & A de rapporter une preuve de paiement, elle sera condamnée à payer la somme totale de 41 280 euros à la S. A.R. L. CIMC ; le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur les autres demandes

Il n'est pas équitable de laisser à la S. A.R. L. CIMC les frais irrépétibles non compris dans les dépens ; la S. A.S. Prim&A sera donc condamnée à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En revanche, la S. A.S. Prim & A sera déboutée de la demande présentée sur ce fondement.

La S. A.S. Prim&A, qui succombe, sera condamnée au paiement des dépens.

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a condamné la société Prim & A au paiement d'une somme de 59 320 euros toutes taxes comprise correspondant aux factures impayées dans les comptes de la société CIMC et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 2 mai 2018, outre anatocisme,

Statuant à nouveau du chef infirmé,

Déboute la S. A.R. L. CIMC de sa demande en paiement au titre des factures impayées des 26 février 2018, 26 mars 2018 et 30 mars 2018,

Condamne la S. A.S. Prim & A à payer à la S. A.R. L. CIMC la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la S. A.S. Prim & A au paiement des dépens.