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Décisions

Cass. 1re civ., 4 mars 1997, n° 95-10.045

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lemontey

Rapporteur :

M. Sargos

Avocat général :

M. Gaunet

Avocats :

SCP Waquet, Farge et Hazan, Me Vuitton

Versailles, du 3 nov. 1994

3 novembre 1994

Attendu que la société d'HLM Habitat et Résidence (la société) a, en application de l'article L. 242-1 du Code des assurances, passé avec la compagnie des Assurances générales de France un contrat d'assurance de dommages obligatoire concernant deux immeubles à usage d'habitation locative qu'elle faisait édifier, la réception intervenant en juillet 1980 ; que plusieurs locataires ont, le 27 janvier 1987, assigné la société devant un tribunal d'instance en réparation de troubles provoqués par un mauvais entretien des lieux loués, une insuffisance du chauffage et des phénomènes d'humidité ; que cette juridiction a, par des jugements des 29 octobre 1987 et 17 novembre 1988, ordonné une expertise dont le rapport a été déposé le 1er mars 1989 ;

Attendu que le 15 décembre 1988 la société a fait aux AGF une première déclaration de sinistre consistant en des infiltrations d'eau par les terrasses ; qu'ensuite, le 8 mars 1989, elle a fait une deuxième déclaration de sinistre, parvenue à l'assureur le 9 mars, concernant des détériorations de panneaux extérieurs, les AGF désignant un expert le 17 mars 1989 ; qu'enfin, le 27 février 1990, la société a fait une troisième déclaration de sinistre, reçue le 1er mars 1990 par l'assureur, concernant des fissurations aux niveau des chaînages de planchers, balcons et acrotères, les AGF commettant un expert le 15 juin 1990 ; que cet assureur n'ayant pas respecté le délai de 60 jours imparti par le troisième paragraphe de l'article L. 242-1 du Code des assurances pour notifier à son assuré sa décision quant au principe de la mise en jeu des garanties prévues au contrat, la société lui a fait savoir par lettre recommandée avec avis de réception que la garantie était acquise et qu'elle était en droit de procéder à la réparation des dommages ;

Attendu que les AGF, assignées le 5 mars 1991 devant le tribunal de commerce, ont, d'une part, proposé une indemnité de 711,60 francs pour le premier sinistre, et opposé la prescription biennale pour les deux autres ; que l'arrêt confirmatif attaqué a donné acte à l'assureur de son offre, qu'il a estimé justifiée, pour le premier sinistre, et accueilli le moyen tiré de la prescription pour les deux autres sinistres aux motifs, propres ou adoptés, que l'expiration du délai de 60 jours ne pouvait faire obstacle à une telle fin de non-recevoir, que le point de départ de la prescription se situait à la date de l'assignation des locataires et que la désignation d'un expert par l'assureur à la suite des deuxième et troisième déclarations de sinistre n'était pas interruptive de prescription ;

Sur le premier moyen, pris en sa sixième branche, et le second moyen réunis : (sans intérêt) ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 242-1 du Code des assurances ;

Attendu qu'il résulte du troisième alinéa de ce texte que l'assureur a un délai maximal de 60 jours, courant à compter de la réception de la déclaration du sinistre, pour notifier à l'assuré sa décision quant au principe de la mise en jeu des garanties prévues par le contrat ; que la cour d'appel, qui a constaté que les AGF n'avaient pas invoqué la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action tendant à la mise en jeu de sa garantie avant l'expiration de ce délai, a dès lors violé le texte susvisé ;

Sur le même moyen, pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches réunies : (sans intérêt) ;

Et sur la cinquième branche du moyen :

Vu l'article L. 114-2 du Code des assurances ;

Attendu que toute désignation d'expert a un effet interruptif de prescription ;

D'où il suit qu'en déniant, par adoption des motifs du premier juge, tout effet interruptif de prescription à la désignation d'un expert par les AGF à la suite de la déclaration des deuxième et troisième sinistres, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais en ses seules dispositions concernant la prescription des déclarations de sinistres faites les 8 mars 1989 et 27 février 1990, l'arrêt rendu le 3 novembre 1994, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen.