Cass. com., 14 juin 2023, n° 21-14.841
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Ergo Insurance (Sté), Baltic Transline (Sté)
Défendeur :
Labeyrie Fine Foods France (Sasu)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Vigneau
Rapporteur :
Mme Fontaine
Avocats :
SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, SARL Le Prado - Gilbert
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 octobre 2020), ayant vendu 22,5 tonnes de harengs surgelés à la société française Delabli, aux droits de laquelle vient la société Labeyrie Fine Foods France, la société islandaise Iceland Pelagic (la société Pelagic) a confié l'acheminement de la marchandise à un commissionnaire de transport, la société polonaise Euro Forwarding and Shipping Agency (la société EFSA), qui en a confié le transport de Pologne vers la France à la société lituanienne Baltic Transline UAB (la société Baltic), assurée par la société lituanienne Ergo Insurance (la société Ergo).
2. N'ayant pas reçu livraison de la marchandise, remise le 24 avril 2013 par erreur à la société Ledun Pêcheurs d'Islande (la société Ledun PI), la société Delabli a refusé de payer la facture émise le 19 avril 2013 par le vendeur.
3. Après avoir indemnisé la société Pelagic, qui, par acte subrogatoire du 15 avril 2016, lui a cédé son droit d'agir contre la société Baltic, la société EFSA a assigné cette dernière en responsabilité devant une juridiction lituanienne, laquelle a retenu la responsabilité du transporteur.
4. Les sociétés Baltic et Ergo ont versé à la société EFSA certaines sommes en exécution de la décision lituanienne.
5. Le 20 avril 2018, soutenant être subrogées dans les droits du vendeur de la marchandise, les sociétés Baltic et Ergo ont assigné la société Delabli, qui avait entre-temps acquis le fonds de commerce de la société Ledun PI, en paiement de la facture du 19 avril 2013 et, subsidiairement, en revendication de la marchandise.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en ses première, troisième et quatrième branches, et le second moyen
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
7. Les sociétés Baltic et Ergo font grief à l'arrêt de constater la prescription de leur action en paiement de la facture du 19 avril 2013 et de les dire en conséquence irrecevables à agir, alors « que l'indication sur une facture de la date d'exigibilité des sommes qu'elle porte ne vaut pas en soi accord des parties sur cette date d'exigibilité ; qu'en supposant même que la cour d'appel ait implicitement considéré qu'un tel accord des parties puisse résulter des mentions de la facture du 19 avril 2013, son arrêt est entaché d'un manque de base légale au regard de l'article L. 441-6 I du code de commerce, dans sa version modifiée par la loi du 20 novembre 2012. »
Réponse de la Cour
8. Aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
9. Après avoir énoncé que, selon l'article L. 110-4 du code de commerce, les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes et constaté que les parties ne contestaient pas que le point de départ de ce délai était, conformément à l'article 2224 du code civil, l'exigibilité de l'obligation de l'acheteur, l'arrêt relève que leur désaccord porte sur la date à laquelle le paiement était exigible.
10. Après avoir énoncé que, selon l'article L. 441-3 du code de commerce, dans sa rédaction alors applicable, la facture mentionne la date à laquelle le règlement doit intervenir, l'arrêt retient que, la facture litigieuse mentionnant, au titre du paiement, « due date : 19.04.13 », la créance du vendeur était exigible à compter de cette date, rien n'interdisant aux parties de prévoir le paiement du prix avant la remise de la marchandise.
11. Ayant ainsi retenu que le vendeur avait lui-même fixé l'exigibilité de sa facture au 19 avril 2013, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations et énonciations rendaient inopérante, a légalement fixé le point de départ du délai de prescription à cette date.
12. Le moyen n'est pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi.