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Décisions

CA Paris, Pôle 4 ch. 10, 8 juin 2023, n° 20/04204

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Acticia Conseil (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Papin

Conseillers :

Mme Morlet, M. Najem

Avocats :

Me Buttard, Me Macchetto, Me Boude, Me Arnol

CA Paris n° 20/04204

8 juin 2023

Faits et procédure

Mme [Y] [K], veuve [M], née le [Date naissance 3] 1929, a entre le 30 septembre 2013 et le 31 octobre 2014 passé 26 commandes pour un coût total de 1 208,40 euros sur les catalogues des enseignes « Les Délices d'Annie » et « Délices & Gourmandises », exploitées à cette époque par la SAS Consortium Publicitaire Européen (CPE), ensuite dénommée société Acticia Conseil (même numéro dans le registre du commerce et des sociétés, décision emportant changement de dénomination non produite aux débats).

Sur cette même période, la société CPE/Acticia Conseil a adressé à Mme [M] de multiples courriers lui faisant part de l'attribution de prix constitués de chèques d'un montant compris entre 8 550 et 9 500 euros.

Estimant que les documents qu'elle avait reçus lui annonçaient de manière certaine qu'elle avait gagné les prix mentionnés, le conseil de Mme [M] a par courrier du 26 décembre 2014 mis en demeure la société CPE/Acticia Conseil de lui régler la somme de 401 550 euros correspondant au montant de ses 43 gains (un chèque de 8.550 euros, douze chèques de 9 000 euros et trente chèques de 9 500 euros, selon elle).

Faute de solution amiable, Mme [M] a par acte du 5 mai 2015 assigné la société CPE/Acticia Conseil en paiement devant le tribunal de grande instance de Paris.

Le Conseil National des Associations Familiales Laïques (CNAFAL), association de consommateurs, est volontairement intervenu à l'instance par conclusions signifiées le 26 septembre 2016.

Mme [M] est entretemps décédée, le [Date décès 2] 2017, en cours d'instance.

Saisi par la société CPE d'une fin de non-recevoir relative à la recevabilité de l'intervention du CNAFAL, le juge de la mise en état, par ordonnance du 25 août 2017, a :

- constaté qu'il n'est pas compétent pour connaître de la demande de la société CPE tendant à voir déclarer irrégulière l'intervention volontaire du CNAFAL,

- déclaré irrecevable devant la présente juridiction la demande de la société CPE tendant à voir déclarer irrégulière l'intervention volontaire du CNAFAL, cette dernière relevant de la compétence de la juridiction saisie au fond,

- débouté [Y] [M] et le CNAFAL de leurs demandes de provision pour le procès,

- condamné la société CPE à supporter les dépens de l'incident,

- condamné la société CPE à verser à [Y] [M] la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et au CNAFAL la somme de 1 000 euros sur ce même fondement,

- renvoyé l'examen de l'affaire en mise en état.

M. [Z] [M], fils héritier d'[Y] [M], venant aux droits de sa mère, est volontairement intervenu à l'instance devant le tribunal par conclusions signifiées le 11 septembre 2017.

La société CPE a par acte du 9 octobre 2017 interjeté appel de l'ordonnance du 25 août 2017, intimant M. [M] et le CNAFAL devant la Cour d'appel de Paris.

Le juge de la mise en état, par ordonnance du 30 novembre 2017, a sursis à statuer sur l'ensemble des demandes dans l'attente de l'arrêt de la cour d'appel sur le recours engagé contre l'ordonnance du juge de la mise en état du 25 août 2017.

La Cour, par arrêt du 7 juin 2018, a confirmé l'ordonnance du juge de la mise en état du 25 août 2017.

 

Le tribunal, devenu tribunal judiciaire, par jugement du 30 janvier 2020, a :

- déclaré M. [M], venant aux droits d'[Y] [M], recevable en son intervention volontaire

- débouté M. [M] de sa demande en paiement de la somme de 401 550 euros,

- annulé les 26 contrats conclus entre le 30 septembre 2013 et le 31 octobre 2014 entre [Y] [M] et la société CPE/Acticia Conseil,

- condamné la société Acticia Conseil à payer à M. [M] la somme de 1 208,40 euros en remboursement des commandes,

- débouté M. [M] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral,

- déclaré le CNAFAL recevable en son intervention volontaire,

- condamné la société Acticia Conseil à payer au CNAFAL la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice causé à l'ensemble des consommateurs,

- débouté le CNAFAL de sa demande de cessation de la pratique commerciale agressive et de sa demande de publication,

- débouté la société Acticia Conseil de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamné la société Acticia Conseil à payer les sommes suivantes sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile :

. 3 000 euros à M. [M], venant aux droits d'[Y] [M],

. 3 000 euros au CNAFAL,

- condamné la société Automobiles d'Europe aux dépens,

- ordonné l'exécution provisoire,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires qui ont été reprises dans l'exposé du litige.

M. [M] a par acte du 25 février 2020 interjeté appel de ce jugement, intimant la société Acticia Conseil devant la Cour.

Moyens M. [M], dans ses dernières conclusions n°7 signifiées le samedi 18 février 2023 à 19 heures 56, demande à la Cour de :

- le dire recevable et bien fondé en son appel,

- dire :

 que feue [Y] [M] a été ciblée par la société CPE/Acticia Conseil en raison de sa vulnérabilité liée, notamment, à son âge et à son isolement géographique,

 que la société CPE/Acticia Conseil a adressé à feue [Y] [M] 43 annonces de gains ne mettant pas suffisamment en évidence, à première lecture et dès leur annonce, l'existence d'aléas affectant l'attribution des gains annoncés,

 que la société CPE/Acticia Conseil a accompagné l'envoi de ces publipostages de pratiques exacerbant la croyance légitime de feue [Y] [M] dans les gains et les engagements apparents pris par ce professionnel,

 que la charge de la preuve d'une éventuelle absence de croyance légitime de feue [Y] [M] dans les gains annoncés pèse sur la société CPE/Acticia Conseil,

 que la preuve à l'encontre de feue [Y] [M] ne peut pas être rapportée par tous moyens mais uniquement par des modes de preuve admissibles,

 qu'en l'espèce, une telle preuve fait défaut,

 que la société CPE/Acticia Conseil ne rapporte pas la preuve que feue [Y] [M] eût été une cliente « active » ou « multi commande » de Vitrine Magique et non, en réalité des 3 Suisses,

 que la société CPE/Acticia Conseil ne rapporte pas la preuve que le fichier clients de recrutement qu'elle invoque ne provient pas, en réalité, des 3 Suisses,

 que la société CPE/Acticia Conseil ne rapporte pas la preuve que Vitrine Magique ou encore les 3 Suisses auraient adressé, à l'égard de feue [Y] [M], des loteries publicitaires,

 que la société CPE/Acticia Conseil ne rapporte pas la preuve que Vitrine Magique ou encore les 3 Suisses auraient adressé, à l'égard de feue [Y] [M], des loteries publicitaires similaires à celles en débats,

 que la société CPE/Acticia Conseil ne rapporte pas la preuve que feue [Y] [M] était rompue aux loteries publicitaires, ni de surcroît à des loteries déloyales telles que celles en cause,

 que la société CPE/Acticia Conseil ne produit pas aux débats les courriers que feue [Y] [M] lui aurait prétendument adressés et qui auraient générés les courriers que la professionnelle prétend lui avoir adressés en retour tels que produits en pièces adverses n°2 à 4,

 que la société CPE/Acticia Conseil ne rapporte pas la preuve que feue [Y] [M] lui eût écrit avant que son conseil ne prenne l'attache de la professionnelle pour réclamer ses gains,

 que la société CPE/Acticia Conseil ne rapporte pas la preuve que les courriers qu'elle aurait prétendument adressés à feue [Y] [M] auraient été reçus par la consommatrice,

 que la pièce adverse n°37 doit être écartée des débats ou a minima ignorée,

 que les pièces adverses n°2 à 4, 10 et 37 sont sans valeur probante pour l'appréciation de la croyance légitime de feue [Y] [M] dans les gains eu égard aux moyens et griefs invoqués et exposés,

 que les deux bons de commande produits en pièces adverses n°5 et 35 sont insuffisants et dénués de valeur probante pour établir une absence de croyance légitime de feue [Y] [M] dans les gains eu égard, notamment, à leurs caractéristiques, contenus, formulations et conjugaisons, dates,

 que les mentions apposées par un professionnel (ayant recours à des loteries) sur des factures, et en l'occurrence au dos de factures, ou en encore en petits caractères, sont eu égard à la temporalité de l'envoi de ces documents et à leur forme et contenu, hors débats et sans effet pour l'application de l'article 1371 du code civil, et notamment en l'espèce,

 que ni l'attitude ordonnée de feue [Y] [M], ni le nombre de commandes passées, ni le nombre de produits commandés, ne sont de nature à établir une absence de croyance légitime de la consommatrice dans les gains d'autant que ces attitudes et comportements sont symptomatiques de la population séniore, ciblée par l'intimée, dont relevait la consommatrice et qu'ils ont été provoqués et entretenus par la société CPE/Acticia Conseil et ses pratiques,

 que le comportement des proches de feue [Y] [M] à l'époque des faits et pratiques est sans incidence, directe comme indirecte, sur l'appréciation de la croyance légitime de la consommatrice dans les gains annoncés et le comportement économique, au demeurant incohérent, de la défunte, victime des effets psychologiques des pratiques et techniques déployées et qui vivait la plus grande majorité du temps seule et en province isolée,

 que, en toute circonstance, la société CPE/Acticia Conseil ne rapporte par la preuve de l'absence de croyance légitime, ni de la mauvaise foi de feue [Y] [M] dans les gains,

 que la mauvaise foi de la société CPE/Acticia Conseil, dont partie consécutive et inhérente au délit de pratique commerciale trompeuse dont elle a été définitivement reconnue coupable au détriment des consommateurs, doit conduire à considérer et retenir qu'elle ne peut quoi qu'il soit valablement pas opposer aux consommateurs qu'elle a ciblés et qui en ont été victimes une absence ou une disparation de leur croyance légitime dans les gains qu'elle leur a annoncés,

 que ce motif s'applique, le cas échéant, à feue [Y] [M],

 que la société CPE/Acticia Conseil, par ses faits volontaires et en application de l'article 1371 du code civil, s'est engagée à délivrer à [Y] [M] une somme totale de 401 550 euros à titre de gains,

 que, si la Cour devait retenir que feue [Y] [M] devait être considérée comme n'ayant plus pu avoir de croyance légitime dans les gains annoncés passé une certaine date à compter de la première sollicitation qui lui a été faite par la société CPE/Acticia Conseil et que cette dernière soit légitime et fondée à le lui opposer, elle devrait alors faire une application distributive, sur le plan temporel, du dispositif légal applicable à l'instar du tribunal de grande instance de Montpellier dans un jugement du 17 février 2015 (RG n°13/03466) en lui allouant, venant aux droits de feue [Y] [M], les sommes représentatives des gains auxquels [Y] [M] a légitimement cru jusqu'à la date à laquelle elle n'a plus pu y croire,

 que la société CPE/Acticia Conseil n'a pas exécuté ses engagements et n'a pas délivré les gains annoncés,

 que, ayant eu recours à une pratique commerciale agressive au préjudice de feue [Y] [M], la société CPE/Acticia Conseil lui a effectivement causé un préjudice moral (né des tracas et soucis inhérents et consécutifs à la pratique illicite et dommageable à laquelle il a été recouru) réel et établi devant être indemnisé,

 que la demande reconventionnelle formée par la société CPE/Acticia Conseil au titre de la procédure abusive est irrecevable faute pour elle de l'avoir formée aux termes de son appel incident en date du 15 août 2020,

 qu'aucune procédure abusive au détriment de la société CPE/Acticia Conseil ne saurait être caractérisée, pas plus qu'un préjudice,

 que par [sic] l'action de la société CPE/Acticia Conseil a en revanche, elle, et ce en cause d'appel, dégénéré en abus qui lui a été préjudiciable et été source d'un préjudice moral réparable,

En conséquence,

- réformer le jugement, uniquement en ce qu'il :

 l'a débouté de sa demande en paiement de la somme de 401 550 euros,

 l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral,

Et, statuant de nouveau sur ces chefs seuls infirmés,

- condamner la société Acticia Conseil à lui verser, ès qualités d'héritier de feue [Y] [M], en application de l'article 1371 du code civil, à titre principal pour cette prétention, la somme de 401 550 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2014, date de la mise en demeure, et anatocisme dans les conditions de l'article 1154 devenu 1343-2 du code civil,

Ou, à défaut et à titre subsidiaire pour cette prétention, à la somme représentative de la totalité des gains annoncés jusque la date à laquelle la Cour considérerait qu'[Y] [M] n'aurait plus pu avoir de croyance légitime dans les gains annoncés, pouvant être (bien que contesté) :

 le 23 août 2014 (date du prétendu « bon » invoqué par l'intimée selon sa pièce adverse n°5), auquel cas il devrait être fait droit à la demande à hauteur de 382.550 euros (pièces n°1 à 14 et 16 à 42),

 le 27 février 2014 (date du « bon » invoquée par l'intimée selon sa pièce adverse n°34), auquel cas il devrait être fait droit à la demande à hauteur de 65.000 euros (pièces n°1, 2, 3, 5, 7, 8 et 23),

 le 13 novembre 2013 (date du prétendu « et fallacieux » courrier qui aurait été adressé par la professionnelle à la consommatrice en réponse à la « fantasmée » demande d'information l'ayant précédée, pièce adverse n°2 et pièce n°107), auquel cas il devrait être fait droit à la demande à hauteur de 27 500 euros (pièces n°1 à 3),

 le 14 octobre 2013 (date de la première facture post première commande selon la pièce adverse n°21), auquel il devrait être fait droit à la demande à hauteur 9 000 euros (pièce n°1),

avec, quoiqu'il en soit, intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2014, date de la mise en demeure, et anatocisme dans les conditions de l'article 1154 devenu 1343-2 du code civil,

- condamner la société Acticia Conseil à lui verser, en application des articles L120-1, L122-11 et suivants, devenus L121-1 et suivants, L122-12 et suivants, devenus L132-10 et suivants du code de la consommation, et de l'article 1382 devenu 1240 du code civil, la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral né des pratiques commerciales agressives commises à son détriment et dont elle s'est trouvée victime,

- condamner la société Acticia Conseil à lui verser la somme de 1 000 euros de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral consécutif à l'abus de procédure de l'intimée,

- condamner la société Acticia Conseil à lui verser la somme de 25 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Acticia Conseil aux entiers dépens d'appel, avec distraction [au profit de son conseil],

- débouter la société Acticia Conseil de l'ensemble de ses demandes, fins, prétentions et moyens contraires, dont notamment de son appel incident.

La société CPE/Acticia Conseil, dans ses dernières conclusions n°4 signifiées le mardi 22 février 2023 à 0 heure 20 demande à la Cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [M] de ses demandes, fins et conclusions sur le quasi-contrat ainsi que sur le préjudice moral,

I - Sur son appel incident,

- le dire recevable et bien fondé,

En conséquence,

- réformer le jugement en ce qu'il a considéré que feue [Y] [M] avait été victime de pratiques commerciales réputées agressives et fait droit aux demandes additionnelles formées par M. [M] sur la nullité des contrats de commande passés auprès d'elle,

Statuant à nouveau,

- déclarer M. [M] irrecevable en ses demandes additionnelles fondées sur la nullité des contrats de commande passés auprès d'elle et celles fondées sur la pratique commerciale déloyale notamment agressive,

- subsidiairement, déclarer M. [M] mal fondé de ces chefs, et l'en débouter,

II - Sur l'irrecevabilité des demandes formées pour la première fois dans les écritures de l'appelant du 27 janvier 2023,

Sur les demandes subsidiaires de différentes condamnations,

- juger qu'il s'agit de demandes nouvelles formées pour la première fois dans les conclusions n°6 de l'appelant,

- en conséquence, juger cette demande irrecevable,

- subsidiairement, juger qu'elle est infondée,

- débouter M. [M] de sa demande,

Sur la demande d'indemnisation au titre du préjudice moral formée pour la première fois le 27 janvier 2023,

- juger qu'il s'agit d'une demande nouvelle formée pour la première fois dans les conclusions n°6 de l'appelant,

- en conséquence, juger cette demande irrecevable,

- subsidiairement, juger qu'elle est infondée,

- débouter M. [M] de sa demande,

Sur la demande de condamnation outre intérêts, à compter de la mise en demeure avec anatocisme,

- juger qu'il s'agit d'une demande nouvelle formée pour la première fois dans les conclusions n°6 de l'appelant,

- en conséquence, juger cette demande irrecevable,

- subsidiairement, juger qu'elle est infondée,

- débouter M. [M] de sa demande,

Sur la demande de rejet de la pièce n°37,

- juger qu'il s'agit d'une demande nouvelle formée pour la première fois dans les conclusions n°6 de l'appelant,

- en conséquence, juger cette demande irrecevable,

- subsidiairement, juger qu'elle est infondée,

- débouter M. [M] de sa demande,

III - Reconventionnellement,

- juger que « cette » demande formée à titre d'appel incident dès les premières écritures qu'elle a signifiées est recevable,

- en tout état de cause, en application de l'article 567 du code de procédure civile, les demandes reconventionnelles sont également recevables en appel,

- juger au surplus qu'elle est fondée,

- en conséquence, condamner M. [M] à lui payer la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

En tout état de cause,

- débouter M. [M] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- condamner M. [M] à lui payer la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

 

La clôture de la mise en état du dossier a été ordonnée le 22 février 2023.

M. [M] a le 1er mars 2023 signifié des conclusions de procédure, demandant à la Cour d'écarter des débats et ne pas retenir dans son arrêt à intervenir les conclusions remises et notifiées par la société Acticia Conseil le 22 février 2023 à 0 heures 20, jour de la clôture.

La société Acticia Conseil a le 29 mars 2023 à son tour signifié des conclusions de procédure, demandant à la Cour de :

- à titre principal, débouter M. [M] de sa demande de rejet des débats de ses dernières conclusions notifiées antérieurement à l'ordonnance de clôture,

- subsidiairement, si la Cour devait rejeter ses dernières conclusions, rejeter également les conclusions notifiées le 18 février 2013 par M. [M], ainsi que les neuf nouvelles pièces communiquées.

L'affaire a été appelée à l'audience du 30 mars 2023.

Ce jour, la Cour, après en avoir délibéré, a refusé d'écarter les dernières conclusions signifiées le 22 février 2023 par la société Acticia Conseil, considérant qu'elle répondait aux septièmes et dernières écritures de M. [M] signifiées le samedi 18 février 2023 à 19 heures 56, en fin de semaine et trois jours avant la clôture prévue, avec de nouvelles demandes, des demandes augmentées et neuf pièces supplémentaires, d'une part, et que l'intimée doit avoir la parole en dernier, d'autre part.

L'affaire a été plaidée et mise en délibéré au 8 juin 2023 Motivation

Motifs

La Cour ne revient pas sur les propos non juridiques tenus de part et d'autre par les parties, ni sur les paragraphes liminaires de leurs conclusions portant des accusations également réciproques, qui n'enrichissent pas les débats.

Sur les promesses de gains

Les premiers juges ont observé que si [Y] [M] avait reçu 43 promesses de gains au titre desquelles l'existence d'un aléa n'était pas clairement mise en évidence, la société CPE/Acticia Conseil lui avait adressé plusieurs courriers d'information laissant apparaître cet aléa, de sorte que l'intéressée - consommatrice normalement attentive - ne pouvait avoir la croyance légitime d'avoir gagné. Aussi M. [M], héritier et ayant-droit d'[Y] [M], a été débouté de sa demande de paiement de la somme de 401 550 euros alléguée comme ayant été gagnée.

M. [M] reproche aux premiers juges d'avoir ainsi statué. Il y avait selon lui promesses de gain de la part de la société CPE/Acticia Conseil sans que l'aléa soit mis en lumière, de sorte que les gains annoncés étaient dus. Il estime que sa mère, [Y] [M], était « ciblée » en raison de sa vulnérabilité (âge et isolement), que les 43 annonces de gains ne mettent pas suffisamment en évidence, à première lecture et dès leur annonce, l'existence d'aléas affectant l'attribution des gains annoncés, que la société CPE/Acticia Conseil fait preuve de pratiques exacerbant la croyance légitime dans les gains et les engagements apparents pris par ce professionnel, que la charge de la preuve d'une éventuelle absence de croyance légitime dans les gains annoncés pèse sur la société CPE/Acticia Conseil, preuve non rapportée ici, que la société CPE/Acticia Conseil opère une confusion avec la pratique des 3 Suisses, que la preuve n'est pas faite de ce que sa mère était « rompue » aux loteries publicitaires, ni à des loteries « déloyales », que la société CPE/Acticia Conseil procède par affirmations sans preuve, que la pièce adverse n°37 doit être écartée des débats ou a minima ignorée, que les pièces adverses n°2 à 4, 10 et 37 sont sans valeur probante pour l'appréciation de la croyance légitime de sa mère dans les gains eu égard aux moyens et griefs invoqués et exposés, que deux bons de commande (pièces adverses n°5 et 35) sont insuffisants et dénués de valeur probante pour établir une absence de croyance légitime de feue [Y] [M] dans les gains eu égard, notamment, à leurs caractéristiques, contenus, formulations et conjugaisons, dates, que les mentions apposées sur des factures (au dos ou en petits caractères) sont hors débats et sans effet pour l'application de l'article 1371 du code civil, que l'attitude ordonnée de sa mère, le nombre de commandes et le nombre de produits commandés ne sont pas de nature à établir une absence de croyance légitime de la consommatrice dans les gains d'autant que ces attitudes et comportements sont symptomatiques de la population séniore, ciblée, que le comportement des proches d'[Y] [M] à l'époque des faits et pratiques est sans incidence, directe comme indirecte, sur l'appréciation de la croyance légitime de la consommatrice dans les gains annoncés et que la société CPE/Acticia Conseil ne rapporte pas la preuve de l'absence de croyance légitime de sa mère dans les gains ni de sa mauvaise foi. Faisant valoir la propre mauvaise foi de la société CPE/Acticia Conseil, M. [M] soutient que celle-ci, par ses faits volontaires et en application de l'article 1371 du code civil, s'est engagée à délivrer à [Y] [M] une somme totale de 401 550 euros à titre de gains. A titre subsidiaire, il sollicite une application distributive par l'allocation des sommes représentatives des gains auxquels [Y] [M] a légitimement cru jusqu'aux dates auxquelles elle aurait pu ne plus y croire. Elle affirme ainsi que la société CPE/Acticia Conseil n'a pas exécuté ses engagements et n'a pas délivré les gains annoncés et demande qu'elle y soit condamnée. Elle se défend enfin de toute demande nouvelle, au titre de l'anatocisme et de ses prétentions subsidiaires.

La société Acticia Conseil ne critique pas le jugement sur ce point. Elle affirme qu'[Y] [M] ne pouvait avoir la croyance légitime de la réalité du gain et argue de sa propre bonne foi. Elle soutient que le caractère manifestement aléatoire des jeux et de l'attribution des prix principaux était bien mis en évidence à première lecture, dès l'annonce du gain, dans les documents publicitaires qu'[Y] [M] a reçus, pour s'être vue rappelée à nouveau dès ses premières commandes, ainsi que sur toutes ses factures, le caractère aléatoire des jeux, pour avoir expressément confirmé en participant avoir pris connaissance du caractère aléatoire des jeux et avoir accepté le règlement, ou en n'ayant par ailleurs pas participé à tous les jeux sollicités. Elle fait ensuite valoir l'absence de croyance légitime d'[Y] [M], consommatrice normalement attentive, d'avoir gagné le prix principal, aux motifs qu'un consommateur qui n'est pas en mesure de justifier de ses bons de participation alors qu'il produit un dossier soigneusement confectionné, élaboré et commenté durant plus d'un an, et qui a mis plus d'un an à adresser une mise en demeure, ne peut soutenir avoir légitimement cru avoir gagné à 43 reprises le prix principal, qu'[Y] [M], dont aucune altération ou déficience mentale n'est établie (ni même alléguée), n'a jamais légitimement cru avoir gagné la somme réclamée, qu'elle était particulièrement familière des loteries publicitaires puisqu'elle était déjà cliente d'une autre société de vente par correspondance, « Vitrine Magique », utilisant également le mode promotionnel des loteries publicitaires, qu'elle a fait preuve d'un comportement cohérent tout au long de sa relation commerciale avec elle, comportement qui traduit une capacité de discernement et l'exercice d'un libre arbitre éclairé dans la mesure où elle par ailleurs a choisi de ne pas participer à certains des jeux sollicités démontrant ainsi sa parfaite compréhension du procédé. Elle argue ici de l'absence de preuve de la participation d'[Y] [M] aux 43 loteries litigieuses. La société CPE/Acticia Conseil considère en conséquence que le tribunal a à bon droit écarté le quasi-contrat alors que la présentation des jeux ne pouvait tromper un consommateur normalement attentif devant prendre connaissance de l'ensemble des documents qui lui étaient adressés, que le caractère aléatoire du jeu avait été suffisamment rappelé à [Y] [M] qui n'était ni isolée, ni démunie de tout esprit normalement critique, que M. [M] échoue à démontrer que sa mère a eu la croyance légitime d'avoir gagné la somme annoncée dans chacun des courriers qui lui étaient destinés. Elle fait enfin valoir l'irrecevabilité de la demande d'anatocisme de M. [M] et de ses demandes subsidiaires, nouvelles en cause d'appel.

 

Sur ce,

1. sur les documents reçus par [Y] [M]

M. [M] verse aux débats l'intégralité des documents originaux reçus - et conservés - par [Y] [M], sa mère, entre le 30 septembre 2013 et le 31 octobre 2014 (ses pièces n°1 à 43), documents publicitaires évoquant des loteries et annonçant des gains.

Chacun de ces documents porte la mention d'un numéro « de client » différent, mais toutes les factures adressées à l'intéressée après commandes ne font figurer qu'un seul et même numéro « de client », le n°033159897.6. Si la société CPE/Acticia Conseil fait état, à ce sujet, d'un seul et même code client « général » et de l'attribution « pour chaque média » d'un numéro de client « distinct pour des raisons de traçabilité » (souligné dans ses conclusions), explication lacunaire et manquant de clarté, la Cour retient que les numéros différents portés sur les 43 documents litigieux permettent d'exclure la réalité de doublons.

Les pièces n°1 et 2 sont composées de plusieurs documents épars et similaires, la pièce n°11 d'un document en double page et les pièces n°40 et 42 de documents au format A3 en double page. Outre ces documents, sont produites 38 enveloppes avec leur contenu, distinct des pièces n°1, 2, 11, 40 et 42. Aucun des documents adressés à [Y] [M] ne précise qu'il s'agit d'une relance ou d'un rappel, aucun des documents ne fait référence à un précédent envoi (la pièce n°5 fait seulement état d'un « nouveau chèque#, en remplacement, du premier, (') prêt à [') être envoyé », la pièce n°9 indique qu'il s'agit d'un « DERNIER AVIS (AVANT ANNULATION DE VOS DROITS) » et la pièce n°28 qu'il s'agit d'un « DERNIER AVIS / - avant livraison immédiate du plus bel Ordinateur portable Multimédia / - et l'attribution du chèque de 9 500 €* ! »). Lorsque des numéros gagnants sont annoncés comme étant attribués à [Y] [M] (composés de neuf chiffres regroupés par trois), ils sont différents à chaque envoi. La date exacte des envois n'est spécifiée ni sur les enveloppes (sauf dans trois cas), ni sur les documents qu'elles contiennent (à l'exception de la mention de la date d'un « dépôt » sur quelques uns des documents). Mais les années, 2013 et 2014, sont mentionnées, les fac-similés de chèques sont datés (jour/mois/année), une date figure parfois sur les documents au titre de la « remise [du] prix ». Ces dates sont toujours différentes.

Il est ainsi établi, contrairement aux affirmations contraires de la société CPE/Acticia Conseil, qu'aucune des pièces communiquées devant la Cour ne l'est en double.

Ce sont ces originaux que la Cour examine, et non leurs copies intégrales ou partielles.

2. sur l'existence d'un quasi-contrat engageant la société CPE/Acticia Conseil

Les quasi-contrats sont, aux termes de l'article 1371 du code civil en sa version applicable en l'espèce antérieure au 1er octobre 2016, date d'entrée en vigueur de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des obligations, les faits purement volontaires de l'homme dont il résulte un engagement quelconque envers un tiers, et quelquefois un engagement réciproque des deux parties.

Ainsi, l'organisateur d'une loterie qui annonce un gain à une personne dénommée, sans mettre en évidence l'existence d'un aléa, s'oblige par ce fait purement volontaire à le délivrer.

Le quasi-contrat susceptible d'obliger la société CPE/Acticia Conseil à paiement au profit d'[Y] [M] est celui qui résulte d'un engagement certain d'attribution du lot, de l'absence de mise en évidence de l'aléa dans l'obtention du lot et de la croyance de la consommatrice en l'existence du gain, trois conditions cumulatives.

 

(1) sur l'engagement certain d'attribution des lots

M. [M] verse aux débats 43 documents publicitaires évoquant des loteries et annonçant des gains, adressés entre le 30 septembre 2013 et le 31 octobre 2014 à sa mère, [Y] [M].

Les présentations et énoncés - des enveloppes et des documents qu'elles contiennent - sont différents d'un courrier à l'autre, mais présentent des similarités. Les déclarations annonçant un gain sont signalées avec des caractères particulièrement apparents et ponctuées de points d'exclamation, parfois en caractères majuscules et gras, parfois en couleur (notamment rouge). Les mentions qui figurent sur ces documents sont ainsi libellées (liste non exhaustive) : « CONFIRMATION D'ENVOI », « Information pour Mme [M] : "envoi d'un chèque de 9 000,00 €* dans les conditions du règlement joint contrôlé par Huissier de Justice" », ou encore « CERTIFICAT NATIONAL D'ATTRIBUTION » certifiant que « le numéro 050.768.543 gagne bien 9 000,00 € ! », qu'il « A ETE CERTIFIE que ce numéro est bien celui de Mme [M] ! » et que « dans ce cas, la Direction Générale va payer à Mme [M] la somme de 9 000,00 Euros qu'elle a ABSOLUMENT gagnée*. C'est obligé », ou « SOUS 7 JOURS / REMISE DE 9 500,00 EUROS* » ou alors « Concerne la somme de 9 500,00 €* à mettre en paiement », ou « C'EST OFFICIEL ET CONFIRME ! Vous, Mme [Y] [M], êtes la GRANDE GAGNANTE d'un chèque de 9 000,00 €* », « Remise de 9 500,00 €* », « DECLARATION OFFICIELLE RELATIVE AUX 9 500,00 €* VOUS CONCERNANT », « DECLARATION D'IDENTIFICATION / 9 500,00 €* », « MME [M], VOUS ETES LA GRANDE GAGNANTE OFFICIELLE DES 9 500,00 EUROS* », « C'est officiel, Mme [Y] [M], vos initiales OC associées au Département 45 ont été déclarées gagnantes des 9 500,00 €* » (souligné dans le document), « Visa pour chèques », « Vous avez gagné 9.500,00 Euros*, c'est absolument vrai », « C'EST OFFICIEL ET CONFIRME ! Vous, Mme [Y] [M], êtes la GRANDE GAGNANTE du chèque de 9 500,00 €* », « RAPPEL UNIQUE PRIX A VISER : 9 500,00 €* », « Mme [M], le "chèque Garanti" qui vous revient est déjà prêt à vous être envoyé / Nous vous certifions que le paiement des chèques bancaires de 9.500,00 €* est validé », « remise de "neuf mille cinq cents euros" > 9 500,00* € », « Bénéficiaire exclusif du Gain de 9 500,00 €* > VOIR A L'INTERIEUR », « DERNIER AVIS /- avant livraison immédiate du plus bel Ordinateur Portable Multimédia / - et l'attribution du chèque de 9 500,00 €* ! », « Le Bureau des Engagements Financiers confirme à MME [Y] [M] qu'elle est l'unique grande gagnante* du Tirage au sort pour la remise de 9 000,00 Euros », « PRIX PRINCIPAL : 1 CHEQUE BANCAIRE DE 9 000,00 €* » [ou 9.500 euros], « AVIS DE VERSEMENT BANCAIRE* : 1er prix à viser : 9.500,00€* », ou encore « C'EST DESORMAIS OFFICIEL, Mme [M] est notre 99ème [ou autre selon les cas] cliente grande gagnante ! A ce titre, elle gagne la somme de 9 500,00 €* ! », « PLI GAGNANT# », etc. Les présentations sont également différentes, certains documents prenant l'apparence de documents fiscaux, les termes « officiel », « confidentiel » et « confirmé » apparaissant la plupart du temps. Sont ajoutées des mentions prétendument manuscrites et signées à l'adresse personnelle d'[Y] [M] et la copie de « chèques bancaires » (ou « chèque spécimen ») signés et/ou certifiés émis à l'ordre de l'intéressée.

La lecture de ces documents évoque à première lecture un engagement de la part de la société CPE/Acticia Conseil, organisateur de la loterie. Dans tous les cas en effet, sur l'ensemble des documents versés aux débats, [Y] [M] est nominativement désignée comme étant la gagnante, ou l'unique gagnante, d'une somme d'argent, de 8 550 euros, de 9 000 euros ou encore de 9 500 euros. Cette annonce est présentée à plusieurs reprises sur un même document, en caractères particulièrement apparents au vu de leur taille, couleur et police, dans des termes et une présentation suggérant un caractère officiel, acquis et incontestable. Ce caractère sérieux de l'annonce est renforcé par l'entité qui se présente pour notifier le gain à l'intéressée, sous les termes de « direction générale », « direction financière », « Services Administratifs et Financiers », « correspondance financière », « département financier », « département juridique », « service finances », « bureau central », « Bureau de Liquidation des Gains », etc., par la mention d'une validation d'ores et déjà réalisée par un huissier de justice, par la mention d'une « certification » (généralement dans un encadré sur fond rouge ou jaune) ou la qualification de « document authentique », par la présentation du document, qui cherche parfois à ressembler à un document de l'administration fiscale (couleurs rouges et bleues, logo ressemblant à la charte graphique de l'administration française).

Les annonces, en caractères majuscules, de taille importante, alternant les couleurs pour accentuer la mention du gain annoncé et son caractère prétendument certain, sont certes toutes suivies d'un astérisque, signe typographique qui signale nécessairement et notoirement une note ou explication. Cependant, seule une « lecture minutieuse » et une « recherche fastidieuse », ainsi que l'ont justement observé les premiers juges, permet de localiser et lire la note explicative liée à cet astérisque, qui figure sur les enveloppes en petits caractères et latéralement (et non dans le sens de lecture des mentions principales) et, sur les documents, également en petits caractères et généralement en haut de page.

Il résulte ainsi de l'examen des documents adressés à [Y] [M] que leur présentation, tant dans sa forme que dans son contenu, l'ajout de mentions manuscrites nominatives et l'annexe de fac-similés de chèques à son ordre laissent apparaître, à première lecture et sans ambiguïté à ce stade, l'engagement certain de la société CPE/Acticia Conseil, organisateur de la loterie, de l'attribution du lot annoncé à l'intéressée expressément nommée.

(2) sur la mise en évidence de l'aléa

Une loterie est un jeu de hasard au titre duquel seul un tirage au sort, aléatoire, désigne le gagnant. L'organisateur d'une loterie qui annonce un gain à une personne dénommée sans mettre en évidence l'existence d'un aléa s'oblige par ce fait purement volontaire à le délivrer.

Sur la mention de l'existence d'un tirage au sort

La note attachée aux astérisques figurant en marge de l'annonce des gains dans les documents adressés à [Y] [M] mentionne, sur chacun des documents examinés, dans des termes identiques ou proches : « *si vous êtes désigné gagnant par Huissier (art. 6) et que votre numéro personnel indiqué sur le timbre est conforme au présent règlement, soit le N°('), nous pourrons alors affirmer : (') » et suit la mention du gain.

Non seulement la note explicative doit être recherchée et n'apparaît pas avec évidence à première lecture, mais ses termes n'attirent en outre pas l'attention, clairement sans ambiguïté, sur le caractère seulement conditionnel et incertain du gain annoncé. La note, en petits caractères, précise certes que l'intéressée nommée, [Y] [M], ne se trouve effectivement gagnante du lot annoncé qu'à la condition (« si ») d'être désignée comme telle, désignation qui semble pourtant avérée, déjà acquise, aux termes des mentions principales du document, examinées au précédent paragraphe.

Les documents publicitaires adressés à [Y] [M] ne laissent pas figurer, par des mentions apparentes et claires, et ne permettent donc pas de comprendre sans interprétation, que le numéro gagnant qui lui est attribué doit encore être confirmé - par un tirage au sort - pour donner lieu à l'attribution effective du lot annoncé. Ledit numéro gagnant est en effet indiqué comme résultant lui-même d'un tirage au sort, ce qui prête nécessairement à confusion.

La note liée à l'astérisque indique qu'un tirage au sort est prévu, sous le contrôle d'un « Huissier » ou d'un « Huissier de Justice », mention qui vient confirmer le caractère officiel et sérieux de l'annonce. L'identité de l'huissier n'est cependant pas mentionnée à cet endroit, mais seulement aux termes de l'article 1 des « Règlement[s] officiel[s] de Jeu », lorsque ceux-ci ont été joints aux envois, qu'[Y] [M] les a conservés et que M. [M] a été en mesure de les produire aux débats.

Les documents litigieux font en effet état, toujours au droit d'une mention en petits caractères en marge, du règlement de jeu « joint ». La société CPE/Acticia Conseil n'établit cependant pas que ce règlement ait été systématiquement annexé à ses envois. Sur la demande présentée le 20 mai 2013 par M. [R] [F], inspecteur de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (Direction Départementale de la Cohésion Sociale et de la Protection de la Population, DDCSPP), à Me [S] [H], huissier de justice dépositaire desdits règlements, celui-ci a communiqué l'ensemble de ceux qui ont été déposés en son étude en 2013 (soit une vingtaine, en moyenne, chaque mois). Les pièces versées aux débats, dont certaines des mentions (et notamment, souvent, les numéros des règlements) sont biffées et ne permettent pas en l'état de vérifier la concordance avec les règlements adressés à [Y] [M]. Les règlements de jeu communiqués par M. [M], effectivement reçus par sa mère, mentionnent certes l'existence de tirages au sort, pour la désignation du « grand gagnant » (article 5), puis, au titre de l'attribution du prix, pour la désignation d'un « pré-gagnant » et, enfin, pour la désignation du gagnant définitif (article 6), mais leurs termes et présentations sont confus pour un non professionnel, présentent une lecture malaisée et ne permettent pas de comprendre facilement le mécanisme de ces tirages au sort.

Il apparaît ainsi que si les documents litigieux font état de ces tirages au sort, ces mentions ne sont pas lisibles à première lecture et ne permettent pas clairement de comprendre à quel stade du jeu (avant ou après tirage au sort) l'intéressée en cause, [Y] [M], se trouve au moment de leur réception. Les termes des documents laissent en effet accroire que le tirage au sort (ou, à tout le moins, qu'un tirage au sort) est déjà intervenu, de sorte que l'intéressée peut légitimement ne pas penser à l'existence d'un second tirage.

Sur la mention de l'aléa

Sur les enveloppes adressées à Mme [M] et les documents qu'elles contiennent, concernant les loteries organisées par la société CPE/Acticia Conseil, apparaissent les mentions « jeu[x] soumis à aléas et à tirage au sort », « jeu[x] soumis à aléas / tirage[s] au sort par Huissier » ou « jeu[x] gratuit[s] sans obligation d'achat soumis à aléas et à tirage au sort par Huissier de Justice » ou une mention rédigée en des termes similaires, parfois en caractères majuscules, mais toujours en petits caractères en marge de document.

La mention de l'aléa n'est donc pas visible, clairement, dès l'annonce du gain et à première lecture de cette annonce (sur les enveloppes, puis sur les documents qu'elles contiennent).

La société CPE/Acticia Conseil ne peut se prévaloir de cette mention de l'aléa a posteriori au verso des factures adressées à [Y] [M] en suite de ses commandes auprès des enseignes « Les Délices d'Annie » ou « Délices et Gourmandises ». Au verso desdites factures est seulement indiqué que sa participation aux jeux est bien enregistrée (ce que la société CPE/Acticia Conseil oublie lorsqu'elle affirme qu'il n'est pas justifié de ladite participation). Au recto figurent les bordereaux de retour des articles, un bon de commande vierge pour de nouvelles commandes et les « ENGAGEMENTS » de la société pour l'« ENTIERE SATISFACTION » du consommateur. Est certes indiqué, dans un paragraphe liminaire, que « l'attribution du prix principal mis en jeu est aléatoire et soumise à conditions comme précisé dans le règlement de jeu joint aux documents (…) reçus ». Cependant, le titre de ce document et les trois paragraphes signalés en caractères gras (« 1. Conditions d'achat », « 2. Satisfait ou remboursé » et « 3. Droits du consommateur ») lient ce document aux commandes de l'intéressée, correspondant à des conditions générales de vente, et non à sa participation aux loteries, de sorte qu'elle pouvait ne pas voir la mention de l'aléa concernant celles-ci dans un document relatif aux seules commandes de produits.

L'aléa n'est en outre pas caractérisé, et renvoie non seulement à l'existence d'un tirage au sort, mais également au respect par [Y] [M] de la procédure de réponse et participation.

Sur l'acceptation de l'aléa par [Y] [M]

Seuls deux bons de participation aux loteries d'[Y] [M] sont versés aux débats par la société CPE/Acticia Conseil (sans qu'il ne puisse être reproché à l'intéressée, ni son fils, de ne pas en avoir conservé des copies).

Ainsi, [Y] [M] a le 27 février 2014 signé un formulaire de « DEMANDE OFFICIELLE POUR ATTRIBUTION DES 9 000,00 €* » et bien coché les cases concernant la « réception du "Chèque pour Gain de 9 000,00 euros" édité avec [son] nom, [qu'elle renvoie] pour preuve d'accès à la remise de 9 000,00 €* » et la mention de sa prise de « connaissance du règlement du jeu soumis à aléas ». Elle a également le 23 août 2014 signé un « FORMULAIRE DE RECLAMATION 2014 », sollicitant « ce jour le chèque de 9500,00 Euros* », attestant avoir « pris connaissance de [son] n° personnel et du fait que le jeu était soumis à aléas » et acceptant « le règlement ».

Ces deux documents ne peuvent prouver qu'[Y] [M] a bien eu connaissance, et accepté, le règlement de jeu et la présence d'aléas pour l'ensemble des 43 attributions de lots dont elle a reçu notification. L'acceptation du règlement et des aléas par la signature de l'intéressée doit en outre être analysée au regard de la croyance qu'elle pouvait avoir des gains annoncés.

Ces deux documents, d'ailleurs, attestent de cette croyance.

(3) sur la croyance d'[Y] [M] en l'existence du gain

La croyance qu'a pu avoir [Y] [M] de l'existence de ses gains doit être appréciée in concreto, par référence à la réaction d'un consommateur moyen, avisé et attentif.

Aucun élément du débat n'atteste de déficiences ou altérations mentales dont [Y] [M] aurait alors pu souffrir en 2013 et 2014, à l'époque où elle recevait les annonces de gains litigieuses. Née en 1929, elle était cependant alors âgée de 84 ans, veuve, et vivait seule. Dans ce cadre, les annonces ont pu la conforter dans l'idée qu'elle avait bien gagné les lots annoncés.

[Y] [M] a pu un moment, en début de procédure, indiquer que sa première commande auprès de l'enseigne « Délices et Gourmandises » datait du mois de février 2014. La société CPE/Acticia Conseil justifie cependant d'une première commande de sa part dès le 8 octobre 2013 (date de la signature d'un chèque tiré de son compte au profit de ladite société). L'intéressée en a « pris acte » selon les termes des écritures de son fils. Il ne peut en tout état de cause lui être reproché, alors qu'elle était âgée de plus de 84 ans et vivait seule au moment de cette première commande, de ne pas avoir su la dater avec précision et avoir fait une erreur de quelques mois. Ce seul point ne peut établir une mauvaise foi de l'intéressée.

Il résulte des écritures de la société CPE/Acticia Conseil qu'elle a « recruté » [Y] [M] alors que celle-ci était cliente d'une autre société de vente par correspondance, par le biais d'une location ponctuelle de 37 292 adresses et l'intermédiaire d'un courtier, la société Locadresses. Le contrat de location de fichiers n'est pas versé aux débats, mais la facture dressée par cet intermédiaire le 29 août 2013 fait bien état au titre de la désignation du produit concerné de « Vitrine Magique ». Les débats des parties concernant l'identité de la société dont [Y] [M] était initialement cliente, Vitrine Magique ou Les 3 Suisses, est sans emport en l'espèce dans la mesure où ces deux sociétés pratiquent des loteries. En outre et en tout état de cause, le fait qu'[Y] [M] ait été cliente de Vitrine magique et/ou des 3 Suisses ne fait pas de celle-ci une consommatrice « bien plus informée et avisée que la moyenne » ainsi que l'affirme la société CPE/Acticia Conseil, alors que ne sont pas établies ses habitudes de consommation, son profil de cliente auprès de l'une ou l'autre des sociétés de vente, le type de loteries proposées par l'une ou l'autre des sociétés ou encore la pratique et l'ancienneté de la pratique d'[Y] [M] desdites loteries.

Aucun élément du dossier, en effet, ne démontre qu'[Y] [M], âgée de 84 ans, aurait été « rompue » aux loteries commerciales et autres jeux proposés dans les catalogues de vente par correspondance, et encore moins au type même de loteries en l'espèce litigieuses, telles qu'organisées par la société CPE/Acticia Conseil.

Si, ensuite, la société CPE/Acticia Conseil affirme avoir par trois fois au moins adressé des courriers à [Y] [M] lui rappelant la procédure de tirage au sort et l'existence d'un aléa, ce point n'est pas établi, contrairement à ce qui a été retenu par les premiers juges.

La preuve de demandes d'[Y] [M] ayant justifié ces trois courriers n'est pas rapportée.

Il n'est ensuite pas établi que les courriers allégués par la société CPE/Acticia Conseil aient effectivement été envoyés à [Y] [M], et encore moins qu'ils aient été reçus.

La société CPE/Acticia Conseil verse aux débats trois courriers des 13 novembre 2013, 28 février et 16 juin 2014 adressés à [Y] [M], la première éditée sous l'entête de « Délices et Gourmandises » et les deux autres sous l'en-tête des « Délices d'Annie ». Aux termes de ces lettres, la société prend acte des demandes de l'intéressée et l'informe de ce que « pour chaque jeu, un numéro de participation est attribué à chaque destinataire », puis qu'« un tirage au sort est effectué par huissier de justice » et qu'ainsi, « pour être bénéficiaire de la dotation principale, il convient de renvoyer son bon de participation dûment complété dans les délais réglementaires mais également d'être confirmé grand gagnant par l'huissier de justice après la clôture du jeu », et lui rappelle que le règlement du jeu est joint au message publicitaire, qu'il est demandé sur le bon de participation « de confirmer [que le participant a] pris connaissance du règlement du jeu, de son caractère aléatoire et [qu'il l'accepte] ».

La SAS France Informatique (M. [U] [J]) « atteste » le 9 février 2016 de la « génération » de ces trois courriers types les 13 novembre 2013, 28 février et 16 juin 2014. Ce document ne porte cependant pas les mentions requises par l'article 202 du code de procédure civile pour constituer un témoignage probant. La société informatique indique en outre n'avoir aucun lien avec la société CPE/Acticia Conseil, mais précise cependant qu'elle était « en charge de l'exploitation du système d'informations permettant la gestion des bases de données des clients français et anglais de la société CONSORTIUM PUBLICITAIRE EUROPEEN (CPE) ». La « génération » des lettres dont fait état la société France Informatique n'implique en tout état de cause, et contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, aucunement leur envoi effectif à [Y] [M], envoi (et réception) dont il n'est pas justifié en l'espèce.

Il n'y a pas lieu d'écarter des débats la pièce n°37 communiquée par la société CPE/Acticia Conseil, ainsi que le demande M. [M] (non au dispositif de ses conclusions, mais dans le cadre de ses motifs). Cette pièce a en effet régulièrement été versée aux débats dès la première instance et soumise à la discussion contradictoire des parties. Il s'agit d'un procès-verbal de constat d'huissier dressé le 13 avril 2017 à la demande de la société CPE/Acticia Conseil, contre lequel il n'est justifié d'aucune inscription de faux. L'huissier fait état de la création lettres types par la société France Informatique sur ordre du service client de la société CPE/Acticia Conseil (ce qui n'est pas contradictoire avec les explications de la société informatique dans son « attestation » précitée, qui précise que le service client mène les opérations de courrier de réponse, alors que celles-ci peuvent être « gérées » par une entreprise extérieure). Mais si ce procès-verbal n'a pas à être écarté des débats, force est de constater qu'il n'apporte pas la preuve des conditions exactes dans lesquelles sont « générés » les courriers types de la société CPE/Acticia Conseil (et notamment les trois courriers évoqués plus haut, prétendument adressés à [Y] [M]). L'huissier reprend les explications données par M. [J], directeur général de la société France Informatique, quant au « process » de génération des courriers, laissant entendre que les courriers en cause ont été édités en suite de « réclamations » d'[Y] [M], sans faire état de constatations personnelles. En outre et en tout état de cause, si l'huissier expose que « les lettres-types sont créées par FRANCE INFORMATIQUE et imprimées puis expédiées par courrier postal par FRANCE INFORMATIQUE qui les remet après affranchissement toujours par FRANCE INFORMATIQUE à la poste », précisant que « FRANCE INFORMATIQUE conserve tout l'historique des créations et envois des lettres-types lesquelles comportent chacune un type de code par lettre-type » (caractères gras et soulignés dans le procès-verbal) et a pu observer le fichier et la réalité d'une « génération » de courriers à destination d'[Y] [M] en réponse à des « réclamations » de sa part, il n'a pu établir la réalité de l'envoi effectif de ces courriers, et encore moins de leur réception par l'intéressée.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a estimé que la mention figurant dans les factures émises en suite de ses commandes de produits auprès des enseignes « Les Délices d'Annie » et « Délices et Gourmandises » attirait suffisamment son attention sur l'aléa attaché aux loteries litigieuses et que l'attestation de la société France Informatique établissait l'envoi à [Y] [M] de lettres lui rappelant ce caractère aléatoire.

Faute de preuve de la réception par [Y] [M] des courriers et explications de la part de la société CPE/Acticia Conseil, la première, au vu des documents qui lui ont été envoyés, de leurs termes et de l'absence de mention claire et apparente d'aléas, a légitimement pu croire en l'existence des gains annoncés.

Il s'évince des développements qui précèdent que la société CPE/Acticia Conseil a répété de manière très apparente, sans nuance donnant à penser à un quelconque aléa, son engagement de payer la somme attribuée à [Y] [M], déclarée gagnante sous contrôle d'un huissier de justice, d'une part, que seule une lecture minutieuse permettait de découvrir en caractères minuscules, souvent serrés et grisés, quelques rares allusions au caractère aléatoire du gain promis, la case à cocher qui mentionnait l'existence d'un aléa étant suivie d'une autre case, davantage mise en évidence, qui visait à réclamer l'attribution immédiate du gain annoncé, d'autre part, et que le règlement était trop peu apparent et trop confus pour permettre au consommateur d'en déduire l'existence d'un aléa, enfin. Est au regard de ces éléments établi un engagement certain de la société d'attribuer les lots en cause.

Le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a estimé qu'[Y] [M] avait connaissance du caractère aléatoire des loteries et qu'il n'était pas démontré qu'elle ait pu avoir la croyance d'avoir gagné.

3. sur les conséquences du quasi-contrat

Au regard de l'engagement de la société CPE/Acticia Conseil, celle-ci était tenue de délivrer les gains annoncés, sans pouvoir subordonner cette obligation au renvoi par [Y] [M] des bons de participation.

Un tel engagement inconditionnel découle d'ailleurs de l'impossibilité pour [Y] [M] de rapporter la preuve de l'envoi de ses réponses et bons de participation. En effet, quand bien même les documents qu'elle a reçus l'invitent, pour se voir attribuer ses lots, à répondre « très vite », à « renvoyer [son] "Formulaire d'endossement à [son] Bénéfice" dûment complété et signé », à « répondre dans les plus brefs délais, suivant la procédure indiquée (…) afin de recevoir [son] gain », à « renvoyer [son] "Récépissé d'Acceptation de Chèque#" dûment complété et signé », etc. (caractères soulignés ou gras des documents), aucun des courriers n'est clairement daté et aucun desdits documents, en outre, ne précise que les réponses ou bons de participation doivent être adressés à la société CPE/Acticia Conseil par voie recommandée avec avis de réception, ni ne prévoit de procédure permettant à la société d'acter la réception et d'en aviser le consommateur. La preuve de l'envoi de la réponse, dans ce cadre, est particulièrement difficile pour celui qui décide de participer au jeu et de faire valoir ses gains. Il ne saurait être reproché à [Y] [M] d'avoir utilisé des lettres simples, dont elle ne peut ainsi pas justifier.

Le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a débouté M. [M], héritier et ayant -droit de sa mère [Y] [M], de toute demande d'attribution des gains annoncés.

Statuant à nouveau, la Cour condamnera la société CPE/Acticia Conseil à payer à M. [M], ès qualités, l'ensemble des lots annoncés comme gagnés par [Y] [M]. Or l'intéressée s'est vue attribuer :

- la somme de 9 000 euros aux termes des pièces n°1 et 2, 6 et 7, 21 et 22 et 29 à 35 (correspondant à la somme totale de 13 X 9 000 = 117 000 euros),

- la somme de 9.500 euros aux termes des pièces n°3 à 5, 8 à 20, 23 à 28, 36 à 40, 42 et 43 (correspondant à la somme totale de 29 X 9 500 = 275 500 euros),

- la somme de 8 550 euros aux termes de la pièce n°41.

La société CPE/Acticia Conseil sera en conséquence condamnée à payer la somme totale de 117 000 + 275 500 + 8 550 = 401.050 euros.

4. sur les intérêts, l'anatocisme et les demandes subsidiaires

La condamnation prononcée à l'encontre de la société CPE/Acticia Conseil portera intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2014, date du courrier que le conseil de M. [M] lui a adressé et la mettant en demeure de régler les gains annoncés, conformément aux dispositions de l'article 1153 ancien (1231-6 nouveau) du code civil.

M. [M] a réclamé que ces intérêts portent eux-mêmes intérêts dès la première instance, et cette demande, renouvelée en cause n'appel n'est donc pas nouvelle devant la Cour et apparaît en conséquence parfaitement recevable. L'anatocisme ainsi réclamé sera prononcé, en application de l'article 1154 ancien (1343-2 nouveau) du code civil.

La condamnation de la société CPE/Acticia Conseil au vu des preuves apportées par M. [M] rend sans objet ses demandes subsidiaires selon les dates à partir desquelles [Y] [M], sa mère, aurait au plus tard pu prendre connaissance de l'aléa attaché aux loteries litigieuses (demandes recevables en cause d'appel au visa des articles 564 et 566 du code de procédure civile, alors qu'il ne s'agit que de minorer la demande principale pour répondre aux moyens soulevés par la société, qu'elles tendent aux mêmes fins que la demande principale en paiement).

Sur les pratiques commerciales déloyales et la validité des contrats

Les premiers juges, sur le fondement du code de la consommation, ont estimé qu'[Y] [M] avait été victime de pratiques commerciales susceptibles d'altérer de manière substantielle son comportement économique et de la porter à passer des commandes dans l'espoir de percevoir les gains issus des loteries. Devant ces pratiques déloyales, ils ont prononcé la nullité des 26 contrats de commande passés par l'intéressée auprès de la société CPE/Acticia Conseil (exerçant sous les enseignes « Les Délices d'Annie » ou « Délices et Gourmandises ») et condamné la société à rembourser ces commandes.

La société CPE/Acticia Conseil reproche aux premiers juges d'avoir ainsi statué. Elle fait en premier lieu valoir l'irrecevabilité des demandes additionnelles de M. [M] de ce chef, qui ont évolué au cours du litige et cumulent deux fondements juridiques exclusifs l'un de l'autre. Subsidiairement, elle argue de l'absence de bien-fondé de ces demandes, estimant que la participation aux jeux n'est pas conditionnée par un achat, que Mme [M] a expressément accepté le principe de recevoir des offres et que les pratiques déloyales alléguées (et notamment les pratiques agressives) ne sont pas démontrées.

M. [M] ne critique pas le jugement de ce chef. Il rappelle que sa mère a reçu 43 publipostages personnalisés sur une période d'un an, que la défense de la société CPE/Acticia Conseil plaidant qu'aucun gain n'a été attribué à [Y] [M] malgré les annonces en ce sens révèle une pratique agressive, que le versement des gains annoncés était subordonné à une commande, cas également réputé agressif, que sa mère a reçu de « très nombreux appels téléphoniques commerciaux », que ces pratiques ont eu pour objet, et pour effet, d'altérer le libre choix et de vicier le consentement de l'intéressée.

Sur ce,

1. sur la recevabilité des demandes

M. [M] n'a pas présenté, dès l'assignation à comparaître devant les premiers juges délivrée à la société CPE/Acticia Conseil par acte du 5 mai 2015, de demandes tendant à l'annulation des commandes passées auprès de celle-ci et d'indemnisation du chef de pratiques commerciales déloyales. Ces prétentions n'ont été formulées qu'au droit de ses conclusions signifiées le 5 janvier 2016.

La société CPE/Acticia Conseil a soulevé devant les premiers juges l'irrecevabilité de telles demandes additionnelles, présentées en méconnaissance du principe de l'immutabilité du litige et de l'interdiction du cumul de plusieurs fondements pour une même demande, mais les magistrats n'y ont pas répondu.

(1) sur l'immutabilité du litige

L'article 4 du code de procédure civile énonce que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties, fixées dans l'acte introductif d'instance et les conclusions en défense et précise que l'objet du litige peut être modifié par des demandes incidentes lorsque celles-ci se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.

L'article 70 du même code dispose que les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.

La demande initiale et principale de M. [M] porte sur l'engagement de la société CPE/Acticia Conseil à attribuer à sa mère [Y] [M] les gains annoncés par 43 courriers, sur le fondement de l'existence d'un quasi-contrat à ce titre.

Les deux autres demandes de M. [M], en annulation de contrats et en indemnisation, fondées sur les dispositions du code de la consommation, constituent des demandes additionnelles et se trouvent en l'espèce recevables, alors qu'elles sont en lien direct avec la demande initiale, s'appuyant sur la même technique commerciale de la société CPE/Acticia Conseil, mise en œuvre par celle-ci par le biais des multiples documents publicitaires adressés à [Y] [M], annonçant des gains d'une part, et l'amenant à commander des produits auprès de enseignes de la société d'autre part.

(2) sur le cumul des fondements juridiques

Une partie se saurait présenter une même demande sur deux fondements juridiques exclusifs l'un de l'autre.

La Cour constate que la société CPE/Acticia Conseil ne démontre pas le caractère exclusif des fondements invoqués par M. [M].

Il s'avère en tout état de cause que ce dernier ne présente pas contre la société CPE/Acticia Conseil une même demande sur deux fondements différents (le quasi-contrat et les pratiques commerciales déloyales), mais trois demandes, la première sur le fondement du quasi-contrat défini par l'article 1371 du code civil et de l'engagement de la société, les deux autres (en annulation de contrats et indemnisation) sur le fondement du code de la consommation au titre des pratiques commerciales déloyales. Les demandes étant distinctes et ne tendant pas aux mêmes fins, elles peuvent s'appuyer sur des fondements juridiques distincts.

Ajoutant au jugement qui n'a pas statué sur ce point, la Cour dira les demandes additionnelles en annulation de contrats et indemnisation présentées par M. [M] à l'encontre de la société CPE/Acticia Conseil, du chef de pratiques commerciales déloyales, recevables.

2. sur l'existence de pratiques commerciales agressives

M. [M] ne peut solliciter l'examen des loteries proposées par la société CPE/Acticia Conseil à l'aune des dispositions du code de la consommation, alors qu'il a obtenu une indemnisation sur le fondement des quasi-contrats qu'elles constituaient et de l'engagement de ladite société à attribuer les gains annoncés.

Peuvent donc seulement être évoquées, à ce stade, les commandes passées par [Y] [M] parallèlement à ces loteries.

L'article L120-1 I du code de la consommation tel qu'applicable à l'époque des courriers litigieux émanant de la société CPE/Acticia Conseil, en 2013 et 2014, dispose que les pratiques commerciales déloyales sont interdites. Il précise qu'une pratique commerciale est déloyale lorsqu'elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu'elle altère, ou est susceptible d'altérer de manière substantielle, le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l'égard d'un bien ou d'un service et énonce que le caractère déloyal d'une pratique commerciale visant une catégorie particulière de consommateurs ou un groupe de consommateurs vulnérables en raison d'une infirmité mentale ou physique, de leur âge ou de leur crédulité s'apprécie au regard de la capacité moyenne de discernement de la catégorie ou du groupe. En son point II, cet article renvoie aux dispositions des articles L121-1 et L121-16 pour la définition des pratiques commerciales déloyales et aux articles L122-11 et L122-11-1 pour les pratiques commerciales trompeuses.

M. [M] fait état de nombreux appels téléphoniques qu'aurait reçu sa mère pendant cette période de la part de la société CPE/Acticia Conseil, pratique qui n'est aucunement démontrée par sa propre attestation du 10 mars 2015, alors qu'il est partie à l'instance, fils de l'intéressée dont il reprend les propos à ce titre, ni par l'attestation du 11 mars 2015 de Mme [A] [E], épouse de M. [M], belle-fille de l'intéressée, quand bien-même celle-ci indique avoir constaté les appels reçus par sa belle-mère, tous les jours de la semaine en début de matinée, provenant d'une personne se présentant comme étant le directeur de « Délices et Gourmandises » et l'avertissant de ses gains.

Mais [Y] [M], alors âgée de 84 puis 85 ans, a sur une durée d'un an (13 mois), entre le 30 septembre 2013 et le 31 octobre 2014, reçu au moins 43 documents publicitaires de la part de la société CPE/Acticia Conseil. Elle a été amenée à commander, au moins 25 fois (25 factures de la société CPE/Acticia Conseil, sous les enseignes « Les Délices d'Annie » ou « Délices et Gourmandises » sont produites aux débats, et non 26 factures comme retenu par les premiers juges) des gâteaux, confitures et friandises sucrées.

Les documents adressés à [Y] [M] laissent entendre à celle-ci que le chèque de gains lui serait adressé « à réception de [sa] commande » (pièces n°1 et 2) ou dès que sa « réponse avec [sa] commande [serait] reçue » (pièce n°5), voire qu'une « commande [était] indispensable (') pour valider le traitement de [son] dossier » (pièces n°3, 4, 8, 9 et 11), qu'une « commande [était] indispensable pour recevoir [son] chèque personnel sous quelques jours » (pièces n°14, 15, 16, 17 et 18) et que cette commande permettait l'envoi immédiat du chèque (pièces n°7, 19, 20, 21, 22 et 28), qu'à tout le moins une commande est « indispensable » pour recevoir le « chèque garanti sous 48h » (ou « DE MANIERE PRIORITAIRE ») à défaut de quoi l'envoi serait différé (pièces n°23, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37 et 38), que la validation de son dossier, l'envoi du formulaire de réponse et du bon de commande étaient liés (pièces n°29, 30, 39, 40, 41, 42 et 43), « que sans commande de [sa] part, le chèque de 9 500,000 Euros ne pourra pas [lui] être accordé » (pièces n°10, 12, 13, 24 et 25), ou encore lui rappelant la commande « car sinon [M. [W] [I], directeur, se serait] donné toute cette peine pour rien » (propos culpabilisants, pièces n°26 et 27).

Les achats d'[Y] [M] étaient donc faits à partir de formulaires liant clairement l'attribution du chèque de gain annoncé et la commande de produits (gâteaux, bonbons, friandises sucrées).

Une telle pratique de la part de la société CPE/Acticia Conseil est susceptible de modifier le comportement économique d'un consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, et a en l'espèce nécessairement altéré le comportement d'[Y] [M], consommatrice de 84 ans et vivant seule, l'incitant à commander des produits qu'elle n'aurait pas achetés si les sollicitations n'étaient pas si nombreuses et n'étaient pas liées à l'attribution annoncée d'une somme d'argent importante.

Elle constitue une pratique commerciale agressive, au sens de l'article L122-11 I du code de la consommation (tel qu'applicable au moment des commandes incriminées), du fait de l'usage de sollicitations ici répétées et insistantes et d'une contrainte morale venue altérer de manière importante la liberté de choix d'[Y] [M], altérant son consentement (ici non pleinement éclairé), étant par ailleurs rappelé que l'article L122-11-1 répute agressives au sens de l'article L122-11 précité les pratiques commerciales qui ont pour objet, notamment (point 8°), de donner l'impression que le consommateur a déjà gagné, gagne ou gagnera en accomplissant tel acte un prix ou un autre avantage équivalent, alors que, en fait, soit il n'existe pas de prix ou autre avantage équivalent, soit l'accomplissement d'une action en rapport avec la demande du prix ou autre avantage équivalent est subordonné à l'obligation pour le consommateur de verser de l'argent ou de supporter un coût (soit, en l'espèce, de commander des produits).

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a prononcé la nullité des contrats (commandes d'[Y] [M] auprès des enseignes « Les Délices d'Annie » et « Délices et Gourmandises ») et condamné la société CPE/Acticia Conseil à lui restituer les sommes dépensées au titre de ces commandes (soit la somme totale de 1.208,40 euros qui correspond bien aux 25 commandes - et non 26 - dont il est justifié en cause d'appel), en application de l'article L122-15 du code de la consommation, tel qu'applicable à l'espèce, qui dispose que lorsqu'une pratique commerciale agressive aboutit à la conclusion d'un contrat, celui-ci est nul et de nul effet.

Sur les demandes de dommages et intérêts

Les premiers juges ont considéré qu'il n'était pas justifié de la réalité d'un préjudice moral subi par [Y] [M], non déjà réparé par la restitution du prix des commandes. Concernant la demande indemnitaire de la société CPE/Acticia Conseil, ils ont estimé que la procédure abusive de M. [M], alléguée, par celle-ci, n'était pas établie.

M. [M], ès qualités pour sa mère, critique le jugement qui l'a ainsi débouté de sa demande indemnitaire, faisant valoir le préjudice indéniable de sa mère, âgée, psychologiquement manipulée et contrainte et qui a dû réaliser qu'elle avait été flouée. Il réclame la condamnation de la société CPE/Acticia Conseil à lui payer, ès qualités, la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral subi par sa mère. Il ne critique pas le rejet de la demande de dommages et intérêts de la société CPE/Acticia Conseil.

M. [M] demande également, en son nom propre, la condamnation de la société CPE/Acticia Conseil à lui payer la somme de 1 000 euros en indemnisation d'un préjudice moral né du fait de l'abus de procédure de celle-ci en cause d'appel.

La société CPE/Acticia Conseil reproche aux premiers juges d'avoir rejeté sa demande indemnitaire, alors qu'elle a été calomniée, agressée, discréditée et accusée de mentir, a dû faire face à des demandes procédurales intempestives et des accusations de manœuvres dilatoires. Elle estime cette demande recevable et réclame la condamnation de M. [M] à lui payer, en indemnisation, la somme de 15.000 euros. Elle s'oppose à la propre demande de celui-ci en réparation du préjudice de sa mère, et soulève l'irrecevabilité de sa demande à titre personnel, nouvelle en cause d'appel.

Sur ce,

Tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer (article 1382 ancien - 1240 nouveau - du code civil).

1. sur la demande indemnitaire de M. [M] ès qualités

L'annonce de gains certains par la société CPE/Acticia Conseil à [Y] [M], nommément désignée, et le lien fait entre l'attribution effective de ces gains et la nécessité de passer commande de friandises caractérisent un comportement fautif. Celui-ci a nécessairement causé à l'intéressée, qui s'est trouvée manipulée, voire humiliée et culpabilisée, un préjudice moral distinct de celui qui est réparé par l'octroi desdits gains et le remboursement de ses achats.

Le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a débouté M. [M], venant aux droits de sa mère, de sa demande de dommages et intérêts. Statuant à nouveau, la Cour condamnera la société CPE/Acticia Conseil, en réparation du préjudice moral subi par [Y] [M], à payer à M. [M] ès qualités la somme de 2 500 euros.

2. sur la demande indemnitaire personnelle de M. [M]

La demande personnelle de dommages et intérêts de M. [M] devant la Cour de céans est certes nouvelle en cause d'appel mais est présentée en réponse à ce qu'il considère comme un abus de droit constitué depuis ses dernières conclusions du 20 janvier 2023, et se trouve en conséquence recevable en application de l'article 564 du code de procédure civile.

Mais M. [M], qui est appelant devant la Cour de céans, ne saurait reprocher à la société CPE/Acticia Conseil un abus de procédure. Il ne peut pas plus le lui reprocher au vu de la défense opposée par la société CPE/Acticia Conseil dans le cadre de propos liminaires peu juridiques dénonçant des abus et outrances de l'appelant, présentés sur une vingtaine de pages dans ses écritures du 23 janvier 2023, alors que lui-même adopte dans ses propres conclusions une dizaine de pages de propos en réponse, dénonçant à son tour des outrances et abus, inutiles à la résolution du litige.

Ces propos liminaires, de part et d'autres, engagent les seuls conseils des parties et révèlent un conflit entre eux, sans qu'aucun ne soit nécessaire ni utile à l'examen du recours de M. [M] contre le jugement du tribunal.

M. [M] sera en conséquence débouté de sa demande personnelle de dommages et intérêts.

3. sur la demande indemnitaire de la société CPE/Acticia Conseil

Contrairement aux indications de la société CPE/Acticia Conseil de ce chef, M. [M] ne soulève pas l'irrecevabilité de sa demande de dommages et intérêts, d'ailleurs déjà présentée, et rejetée, devant les premiers juges.

Le comportement fautif de la société CPE/Acticia Conseil à l'égard d'[Y] [M] ne permet pas de retenir de la part de son fils et ayant droit, M. [M], une procédure abusive.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté ladite société de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les dépens et frais irrépétibles

Le sens de l'arrêt conduit à la confirmation du jugement en ses dispositions relatives aux dépens de première instance (mis à la charge de la société CPE/Acticia Conseil) et les frais irrépétibles mis à la charge de la même société au profit de M. [M].

Ajoutant au jugement, la société CPE/Acticia Conseil, qui succombe devant la Cour, sera condamnée aux dépens d'appel, avec distraction au profit du conseil de M. [M] qui l'a réclamée, en application des articles 696 et suivants du code de procédure civile.

Tenue aux dépens, la société CPE/Acticia Conseil sera condamnée à payer à M. [M] la somme équitable de 10 000 euros en indemnisation des frais exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens, conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Dispositif Par ces motifs,

La Cour, dans les limites de sa saisine,

Confirme le jugement en ce qu'il a annulé les contrats conclus entre le 30 septembre 2013 et le 31 octobre 2014 entre [Y] [K], épouse [M] et la SAS Consortium Publicitaire Européen (CPE), désormais dénommée SAS Acticia Conseil, et a condamné cette dernière à payer à M. [Z] [M], en sa qualité d'ayant droit de la première, la somme de 1 208,40 euros en remboursement des commandes, puis en ce qu'il a débouté ladite société de sa demande de dommages et intérêts, ainsi qu'en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance,

Infirme le jugement en ce qu'il a débouté M. [Z] [M], en sa qualité d'ayant droit d'[Y] [K], épouse [M], de sa demande en paiement de la somme de 401.550 euros et de sa demande de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice moral,

Statuant à nouveau et ajoutant au jugement,

Dit M. [Z] [M], en sa qualité d'ayant droit d'[Y] [K], épouse [M], recevable en ses demandes additionnelles en annulation de contrats et indemnisation présentées à l'encontre de la SAS Consortium Publicitaire Européen (CPE), désormais dénommée SAS Acticia Conseil, du chef de pratiques commerciales déloyales, ainsi qu'en sa demande personnelle de dommages et intérêts,

Condamne la SAS Consortium Publicitaire Européen (CPE), désormais dénommée SAS Acticia Conseil, à payer à M. [Z] [M], en sa qualité d'ayant droit d'[Y] [K], épouse [M], les sommes de :

- 401 050 euros au titre des gains annoncés par les courriers adressés à [Y] [K], épouse [M], entre le 30 septembre 2013 et le 31 octobre 2014, avec intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2014 et capitalisation des intérêts dus pour une année entière au moins,

- 2 500 euros en réparation du préjudice moral subi par [Y] [K], épouse [M],

Dit n'y avoir lieu à examiner les demandes subsidiaires présentées par M. [Z] [M],

Déboute M. [Z] [M] de sa demande personnelle de dommages et intérêts,

Condamne SAS Consortium Publicitaire Européen (CPE), désormais dénommée SAS Acticia Conseil, aux dépens d'appel, avec distraction au profit de Me Alexis Macchetto,

Condamne SAS Consortium Publicitaire Européen (CPE), désormais dénommée SAS Acticia Conseil, à payer à M. [Z] [M] la somme de 10 000 euros en indemnisation de ses frais irrépétibles d'appel.