Cass. com., 3 décembre 1996, n° 94-21.796
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bézard
Rapporteur :
Mme Pasturel
Avocat général :
M. Mourier
Avocats :
SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, Me Bertrand, Me Choucroy, SCP Peignot et Garreau, Me Ricard, SCP Rouvière et Boutet
Donne acte à la société CIAT de son désistement envers la société Entreprise Léon Ballot BTP, le conseil général du département du Val-d'Oise, la société Mercier et la société Ducatel investissements ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 septembre 1994), que la société Compagnie industrielle d'applications thermiques (CIAT), spécialisée dans la fabrication de matériels de climatisation et de ventilation, a vendu avec réserve de propriété des appareils à la société Minéo, qui, dans le cadre de contrats de sous-traitance, les a elle-même revendus à la société Entreprise industrielle, à la société Fougerolle et à la filiale de celle-ci, la société Pollet, titulaires de marchés publics de travaux conclus avec la région Ile-de-France, et à M. Machureau ; qu'après la mise en redressement judiciaire de la société Minéo, la société CIAT, invoquant le défaut de règlement de trois factures, a saisi le juge-commissaire d'une requête en revendication du prix restant dû, dirigée contre la région Ile-de-France, les sociétés Fougerolle et Pollet et M. Machureau puis, après le rejet de sa requête, les a assignés en paiement devant le Tribunal ; que celui-ci a confirmé l'ordonnance du juge-commissaire et ordonné à la société Entreprise industrielle de payer la somme de 91 229,49 francs à M. Libert, administrateur de la procédure collective ; que la cour d'appel a confirmé ces dispositions, ordonné à la société Pollet de payer à l'administrateur la somme de 76 072,53 francs et débouté la société CIAT de sa demande en paiement dirigée contre M. Machureau ;
Sur le premier moyen, pris en ses cinq branches :
Attendu que la société CIAT fait grief à l'arrêt de l'avoir déboutée de sa revendication alors, selon le pourvoi, d'une part, que les conditions générales d'achat, stipulaient que les commandes étaient passées à ces conditions, et que toutes autres clauses ne pouvaient être opposées à l'acheteur, à moins d'avoir fait l'objet d'une acceptation écrite de sa part ; qu'en déclarant que l'acheteur avait ainsi exclu de la relation contractuelle, cela de manière expresse, ferme et irrévocable, toute clause de réserve de propriété, la cour d'appel a dénaturé à la fois les termes et la portée des bons de commande, en violation de l'article 1134 du Code civil ; alors, d'autre part, qu'une clause de réserve de propriété remplit les conditions requises pour l'exercice de l'action en revendication dès lors que, stipulée par écrit par le vendeur et adressée à l'acheteur, elle a été acceptée par celui-ci en raison de son exécution du contrat en connaissance de cause ; qu'en prenant seulement en compte le fait qu'avant d'avoir eu connaissance de la clause de réserve de propriété stipulée dans les conditions générales de vente annexées aux accusés de réception des commandes, l'acquéreur en avait exclu l'application, sans vérifier qu'en prenant livraison des marchandises et en exécutant le contrat en connaissance de cause il l'avait implicitement mais nécessairement acceptée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 121 de la loi du 25 janvier 1985 ; alors, encore, que le juge ne peut fonder sa décision sur des faits qui ne sont pas dans le débat ; qu'en l'espèce, où le litige portait sur les conséquences à déduire du fait que les accusés de réception adressés à l'acheteur de marchandises commandées et livrées en 1989 comportaient une clause de réserve de propriété, tandis que les conditions générales d'achat l'auraient exclue de la relation contractuelle, le juge ne pouvait prendre l'initiative d'objecter que les accusés de réception produits n'auraient pas été probants dans la mesure où, datés de 1988 et de 1990, ils n'auraient pas concerné les marchandises revendiquées ; qu'en se fondant ainsi sur une circonstance étrangère au débat la cour d'appel a violé les articles 4 et 7 du nouveau Code de procédure civile ; alors, en outre, que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne pouvait, dès lors, soulever d'office le moyen tiré de ce que, pour les commandes litigieuses, la société CIAT n'aurait pas établi avoir adressé à l'acquéreur des accusés de réception comportant une clause de réserve de propriété, circonstance non contestée par aucune des parties, sans les inviter au préalable à présenter leurs observations sur ce point ; qu'en se déterminant de la sorte, la cour d'appel a violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, enfin et au demeurant, que les accusés de réception produits aux débats portaient respectivement les dates des 12 juin, 5 juillet et 6 décembre 1989, et visaient effectivement des commandes passées par l'acquéreur les 7 et 30 juin ainsi que le 29 novembre 1989 ; qu'en affirmant que, datés de 1988 et 1990, les accusés de réception produits ne concernaient pas les appareils commandés et livrés en 1989 dont le prix était revendiqué, la cour d'appel les a dénaturés
en violation de l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que les conditions générales d'achat de la société Minéo contenaient une clause aux termes de laquelle " toutes nos commandes sont passées aux présentes conditions d'achat, toutes clauses ne figurant ni dans les présentes conditions générales ni dans notre commande (et à plus forte raison toutes clauses contraires) doivent faire l'objet de notre acceptation écrite. Les accusés de réception de nos fournisseurs ne sauraient nous être opposés pour ce qui concerne ces clauses ", la cour d'appel, dont l'arrêt ne peut être atteint par les griefs faits par les troisième, quatrième et cinquième branches à des motifs surabondants, a fait l'exacte application de l'article 121 de la loi du 25 janvier 1985, dans sa rédaction applicable en la cause, en retenant, hors toute dénaturation, que la contradiction entre les conditions générales de vente et les conditions générales d'achat excluait l'existence de tout accord des parties sur l'application de la clause de réserve de propriété, de sorte que la société CIAT ne pouvait se prévaloir du silence opposé par la société Minéo au reçu des factures et des accusés de réception des commandes comportant la clause susvisée pour en déduire que la société Minéo l'avait acceptée tandis qu'elle en avait, au contraire, expressément écarté l'application sauf acceptation écrite non alléguée en l'espèce ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses trois branches : (sans intérêt) ;
Et sur le troisième moyen : (sans intérêt) ;
PAR CES MOTIFS :