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Décisions

Cass. 3e civ., 22 juin 2023, n° 22-12.407

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

l'Araignée de la Roche

Défendeur :

Commune de Saint-Firmin

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Teiller

Rapporteur :

Mme Farrenq-Nési

Avocats :

SCP Waquet, Farge et Hazan, SCP Spinosi

Lyon, 1re ch. B, 7 déc. 2021

7 décembre 2021

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 7 décembre 2021), rendu sur renvoi après cassation (2ème Civ., 4 février 2021, pourvoi n° 20-10.685), le 21 mars 2007, la société civile L'Araignée de la Roche (la SCI) a acquis de la commune de Saint Firmin (la commune) une parcelle de terrain formant le lot C du lotissement « Sous la roche ».

2. Le permis de construire un hangar à matériel à elle accordé le 2 mars 2009 est devenu caduc au bout de deux ans, faute d'exécution des travaux.

3. Une nouvelle demande de permis faite le 4 mars 2013 ayant été rejetée aux motifs que les hangars artisanaux n'étaient pas autorisés en zone Ncc du plan d'occupation du sol (POS) et que le terrain était situé dans une zone soumise à des risques naturels, la SCI a assigné la commune en nullité de la vente, sur les fondements de l'erreur sur les qualités substantielles de la chose vendue, de l'absence de cause et du vice caché, ainsi qu'en paiement de dommages-intérêts.

Moyens

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. La SCI fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en nullité de la vente, alors :

« 1°/ que lorsque la constructibilité du terrain est un élément déterminant du consentement de l'acquéreur, la vente est nulle si la cause d'inconstructibilité préexiste à la vente ; qu'en application des articles L. 123-5, R. 315-5 et R. 315-28 du code de l'urbanisme, les dispositions d'un règlement de lotissement ne peuvent méconnaitre les règles d'urbanisme locales en vigueur ; que la cour d'appel a constaté que la constructibilité du terrain était une qualité substantielle du terrain cédé, déterminante du consentement de la SCI l'Araignée de la Roche et qu'il ressortait du plan d'occupation des sols de la commune adopté en 1987 que les parcelles acquises par la SCI l'Araignée de la Roche étaient situées en zone non constructible; qu'il résulte de ces constatations que le terrain cédé était inconstructible antérieurement à la vente ; qu'en refusant néanmoins d'annuler la vente au motif que l'arrêté municipal autorisant le lotissement avait rendu constructibles lesdites parcelles par dérogation et pour une durée de dix années et que l'inconstructibilité résultait de l'écoulement d'un délai légal que l'acquéreur ne pouvait ignorer, la cour d'appel a violé les articles L. 123-5, R. 315-5 et R. 315-28 du code de l'urbanisme dans leur version applicable au jour de l'adoption du règlement de lotissement, ensemble les articles 1109 et 1110 anciens du code civil, 1130 et 1131 nouveaux du code civil ;

2°/ que l'acte de vente, les mentions qu'il reproduit et les documents annexés n'indiquent pas que le terrain cédé est dans la zone inconstructible du POS mais se bornent à renvoyer à l'extrait du POS concernant la zone UC ; qu'en affirmant néanmoins qu'il résultait de ces actes que le caractère précaire de la constructibilité du terrain, limitée dans le temps, ne pouvait être ignoré de l'acquéreur, l'arrêt attaqué a dénaturé l'acte de vente et les actes qui lui sont annexés en violation du principe selon lequel juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ;

3°/ qu'en cas de contestation portant sur la légalité d'un acte administratif, les tribunaux de l'ordre judiciaire, statuant en matière civile doivent surseoir à statuer jusqu'à ce que la question préjudicielle de la légalité de cet acte soit tranchée par la juridiction administrative sauf s'il apparaît manifestement au vu d'une jurisprudence établie que la contestation peut être accueillie par le juge au principal ; qu'en l'espèce la cour d'appel a écarté l'exception d'illégalité du règlement de lotissement du 22 octobre 2001 autorisant la constructibilité de la parcelle vendue au seul motif que ce règlement n'avait fait l'objet d'aucun recours et que la SCI avait obtenu un permis de construire en 2009, devenu caduc par l'expiration du délai de deux ans ; qu'en refusant par des motifs inopérants de surseoir à statuer en transmettant au juge administratif la question préjudicielle de la légalité du règlement du lotissement ou de se prononcer directement sur l'illégalité manifeste du règlement de lotissement contraire au POS, l'arrêt attaqué a violé l'article 49 du code de procédure civile. »

Motivation

Réponse de la Cour

5. La cour d'appel a relevé, sans dénaturation dès lors que l'arrêté municipal d'autorisation de lotir du 22 octobre 2001, comme le certificat d'urbanisme, mentionnés ou repris et annexés à l'acte de vente, visaient le POS de la commune de Saint Firmin approuvé le 20 mars 1987, que les parcelles acquises, situées en zone non constructible de ce POS, avaient été rendues constructibles par dérogation et pour la période d'application du règlement du lotissement du 16 janvier 2001.

6. N'étant pas saisie d'une exception d'illégalité de l'arrêté municipal du 22 octobre 2001, elle a constaté qu'il n'avait fait l'objet d'aucun recours, annulation ou abrogation, et que la SCI avait obtenu un permis de construire en mars 2009, devenu caduc.

7. Ayant retenu que l'inconstructibilité ne constituait pas un défaut inhérent au terrain lors de la vente mais résultait de l'écoulement de la durée légale de dix ans de l'arrêté de lotissement du 22 octobre 2001 et que l'acquéreur, qui n'ignorait aucune des données juridiques régissant l'opération, connaissait le caractère précaire ou limité dans le temps de la constructibilité du terrain acquis, elle en a déduit à bon droit qu'aucune erreur n'avait vicié le consentement de celui-ci.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

Dispositif

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société civile immobilière l'araignée de la Roche aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société civile immobilière l'Araignée de la Roche et la condamne à payer à la commune de Saint Firmin la somme de 3 000 euros.

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux juin deux mille vingt-trois.