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Décisions

CA Aix-en-Provence, 2e ch., 21 mars 2013, n° 12/09761

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Polyclinique du Parc Rambot (SA)

Défendeur :

M. De Carrière

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Aubry Camoin

Conseillers :

M. Fohlen, M. Prieur

Avocats :

Me Thiery Secchi, Me Filio Lolignier, Me Bruzzo, Me Simoni, Me Garriot

T. com. d'Aix en Provence, du 21 mai 201…

21 mai 2012

EXPOSE DU LITIGE

La SAS SCANNER DU PARC RAMBOT immatriculée le 17 novembre 2004 au registre du commerce et ayant pour activité l'exploitation d'un scanner installé dans les locaux de la Polyclinique située 2 avenue du docteur Aurientis à Aix en Provence, a été constituée entre deux actionnaires :

• la Société Civile de Moyens IMAGERIE MEDICALE RAMBOT qui détenait à l'origine 51 actions • la SA POLYCLINIQUE DU PARC RAMBOT qui détenait à l'origine 49 actions

Le Président de la SAS SCANNER DU PARC RAMBOT était la SCM IMAGERIE MEDICALE RAMBOT.

Le 14 avril 2009, la SA POLYCLINIQUE DU PARC RAMBOT a cédé à la SCM IMAGERIE MEDICALE RAMBOT 15 actions de la SAS SCANNER DU PARC RAMBOT et les statuts de cette société ont été modifiés en conséquence sur décision de l'assemblée générale extraordinaire de la même date.

La SELARL IMAGERIE MEDICALE DU PARC RAMBOT est devenue associé unique de la SCM IMAGERIE MEDICALE RAMBOT par rachat de la totalité des parts de cette société et aux termes d'une délibération du 23 novembre 2011 publiée le 30 novembre 2011, a décidé la dissolution anticipée sans liquidation de la SCM IMAGERIE MEDICALE RAMBOT dans les conditions de l'article 1844-5 alinéa 3 du code civil.

Par courrier du 13 mars 2012, le conseil de la SELARL IMAGERIE MEDICALE DU PARC RAMBOT a adressé à la SA POLYCLINIQUE DU PARC RAMBOT une convocation à une assemblée générale ordinaire ayant notamment pour ordre du jour la constatation de la transmission des actions de la SCM à la SELARL et la nomination d'un nouveau président suite à la dissolution sans liquidation de la SCM.

Par courrier du 19 mars 2012, la SA POLYCLINIQUE DU PARC RAMBOT a fait connaître son désaccord sur l'ordre du jour et a demandé à ce que l'entrée du nouvel associé fasse l'objet non d'une constatation mais d'un agrément par résolution de l' assemblée générale extraordinaire conformément aux statuts de la SAS SCANNER DU PARC RAMBOT selon lesquels :

• l'agrément d'un nouvel associé doit résulter d'une décision de l'assemblée générale extraordinaire • l'assemblée générale extraordinaire, à la différence de l'assemblée générale ordinaire, statue à la majorité renforcée d'au moins 2/3 des actionnaires représentant les 3/4 du capital social

Par requête du 29 mars 2012, la SELARL IMAGERIE MEDICALE DU PARC RAMBOT a saisi le Président du Tribunal de Commerce d'AIX EN PROVENCE d'une requête aux fins de désignation d'un mandataire ad hoc avec mission de convoquer une assemblée générale ordinaire ayant pour ordre du jour la nomination du président de la SAS SCANNER DU PARC RAMBOT.

Par ordonnance de la même date, le Président du Tribunal de Commerce a fait droit à cette requête et a désigné Maître DE CARRIERE en qualité de mandataire ad hoc.

Par requête du 5 avril 2012, la SA POLYCLINIQUE DU PARC RAMBOT a saisi le Président du Tribunal de Commerce d'une requête aux fins d'extension de la mission du mandataire ad hoc à la convocation d'une assemblée générale mixte ayant pour ordre du jour l'agrément du nouvel associé en l'occurrence la SELARL IMAGERIE MEDICALE DU PARC RAMBOT en assemblée générale extraordinaire et le remplacement du président de la SAS SCANNER DU PARC RAMBOT en assemblée générale ordinaire.

Par ordonnance du 6 avril 2012, le Président du Tribunal de Commerce a fait droit à cette requête.

Par acte du 17 avril 2012, la SELARL IMAGERIE MEDICALE DU PARC RAMBOT a fait assigner la SA POLYCLINIQUE DU PARC RAMBOT et Maître DE CARRIERE es qualités en référé devant le Tribunal de Commerce aux fins de voir prononcer la rétractation de l'ordonnance du 6 avril 2012 et condamner la SA POLYCLINIQUE DU PARC RAMBOT à lui payer la somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens.

Par ordonnance contradictoire du 21 mars 2012, le juge des référés du Tribunal de Commerce a :

• ordonné la rétractation de l'ordonnance du 6 avril 2012 • confirmé l'ordonnance du 29 mars 2012 désignant Maître DE CARRIERE en qualité de mandataire ad hoc de la SAS SCANNER DU PARC RAMBOT, • condamné la SA POLYCLINIQUE DU PARC RAMBOT au paiement de la somme de 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, • condamné la SA POLYCLINIQUE DU PARC RAMBOT aux dépens.

Par déclaration au greffe de la Cour du 31 mai 2012, la SA POLYCLINIQUE DU PARC RAMBOT a régulièrement relevé appel de cette décision.

Le 12 juin 2012, Maître DE CARRIERE es qualités de mandataire ad hoc, a réuni une assemblée générale ordinaire des associés de la SAS SCANNER DU PARC RAMBOT qui a désigné monsieur Eric B. membre de la SELARL, aux fonctions de président de la société pour une durée de trois exercices.

Par conclusions du 4 février 2013, la SA POLYCLINIQUE DU PARC RAMBOT demande à la Cour au visa des articles 495 et suivants, 872 et 873 du code de procédure civile, L 227-9 du code de commerce, de :

• réformer l'ordonnance entreprise, et statuant à nouveau • déclarer la requête de la concluante du 5 avril 2012 bien fondée, • confirmer l'ordonnance rendue le 6 avril 2012, sauf éventuellement en son dernier point relatif à l'accomplissement par le mandataire ad hoc de tous les actes de gestion courante, • impartir au mandataire ad hoc un délai de 8 jours à compter de la décision à intervenir pour procéder aux convocations requises en vue de la tenue de l'assemblée générale mixte, • prononcer la nullité des décisions prises lors de l'assemblée générale ordinaire qui s'est tenue le 12 juin 2012 sur convocation du mandataire ad hoc, • débouter la SELARL IMAGERIE MEDICALE DU PARC RAMBOT de toutes ses demandes, fins et conclusions, • condamner la SELARL IMAGERIE MEDICALE DU PARC RAMBOT au paiement de la somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, • la condamner aux entiers dépens de l'instance, ceux d'appel avec distraction.

Au soutien de ses demandes, elle fait valoir les moyens suivants :

• Il y a lieu de réunir une assemblée générale extraordinaire pour statuer sur l'agrément de la SELARL IMAGERIE MEDICALE DU PARC RAMBOT en qualité de nouvel associé conformément à l'article XI des statuts de la SAS SCANNER DU PARC RAMBOT ainsi que pour statuer sur la dévolution des actions et modifier en conséquence l'article VIII des statuts selon lequel les actions sont nominatives, • Par application de l'article L 227-9 du code de commerce applicable aux SAS, « les statuts déterminent les décisions qui doivent être prises collectivement par les associés dans les formes et conditions qu'ils prévoient. » • la demande concernant la rétractation de l'ordonnance querellée concernant l'accomplissement des actes de gestion courante ne constitue pas une demande nouvelle, et en tout état de cause, le statut de mandataire ad hoc est incompatible avec les actes de gestion courante, • l'ordonnance querellée a été valablement notifiée à la SELARL le 6 avril 2012 et lui est opposable.

Par conclusions du 24 septembre 2012, la SELARL IMAGERIE MEDICALE DU PARC

RAMBOT demande à la Cour au visa des articles 564, 495, 497 et 503 du code de procédure civile, de :

• confirmer l'ordonnance déférée, • déclarer irrecevables les nouvelles demandes de la SA POLYCLINIQUE DU PARC RAMBOT, • condamner la SA POLYCLINIQUE DU PARC RAMBOT au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, • la condamner aux entiers dépens de l'instance, ceux d'appel avec distraction.

Elle soutient les moyens suivants :

• les nouvelles demandes formées par la SA POLYCLINIQUE DU PARC RAMBOT concernant la mission du mandataire ad hoc et les décisions prises lors de l'assemblée générale ordinaire réunie le 12 juin 2012 par le mandataire ad hoc sont irrecevables par application de l'article 564 du code de procédure civile, • l'ordonnance du 6 avril 2012 n'a pas été signifiée à la concluante et cette entorse au principe du contradictoire justifie à lui seul la rétractation de l'ordonnance, • Les statuts de la SAS SCANNER DU PARC RAMBOT n'imposent pas l'agrément de la SELARL après dissolution sans liquidation de la SCM • l'article XIII des statuts de la SAS SCANNER DU PARC RAMBOT prévoit un agrément en cas de cession d'action mais non en cas de fusion, scission, dissolution, une cession d'action n'étant en rien similaire à une dévolution opérée dans le cadre d'une transmission universelle du patrimoine, ainsi qu'il résulte des articles L 227-14 et L 227-17 du code de commerce, • la dissolution de la SCM n'a pas été un moyen de détourner la clause d'agrément mais une manière de rationaliser l'organisation de l'activité de la SELARL dont tous les associés sont médecins radiologues et exercent à la polyclinique, • les statuts de la SAS SCANNER DU PARC RAMBOT doivent être mis à jour mais en tout état de cause, les mouvements des actions composant le capital social d'une SAS sont formalisés dans un registre de mouvement des titres et sont soumis au principe de la libre négociabilité auquel toute entorse doit être expressément prévue, • La mission du mandataire ad hoc résultant de l'ordonnance du 6 avril 2012 est inapplicable dès lors que le terme « agrément » recouvre une opération juridique précise en l'occurrence la cession de titres.

Par conclusions du 21 novembre 2012, Maître DE CARRIERE es qualités demande à la Cour au visa des articles 495, 497 et 503 du code de procédure civile et L 611-3 et suivants du code de commerce, de :

• confirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions, • condamner la SA POLYCLINIQUE DU PARC au paiement de la somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, • la condamner aux entiers dépens.

Maître DE CARRIERE es qualités expose les moyens suivants :

• il n'appartient pas au concluant en qualité de mandataire ad hoc d'assurer la gestion courante de la société ainsi que le mentionne l'ordonnance du 6 avril 2012, • l'assemblée générale ordinaire ayant été réunie, la mission du mandataire ad hoc a pris fin, • eu égard aux dispositions statutaires et légales, la dissolution anticipée de la SCM et la transmission de ses titres à la SELARL ne requérait ni agrément ni information préalable.

MOTIFS DE LA DECISION

1 Sur les demandes nouvelles formées par la SA POLYCLINIQUE DU PARC RAMBOT

L'ordonnance de référé entreprise ayant été rendue le 21 mars 2012 et l'assemblée générale ordinaire ayant été réunie par le mandataire ad hoc le 12 juin 2012, la SA POLYCLINIQUE DU PARC RAMBOT ne pouvait à l'évidence demander en première instance la nullité des décisions prises à cette occasion.

La demande de ce chef sera en conséquence déclarée recevable par application de l'article 566 du code de procédure civile selon lequel les parties peuvent en cause d'appel ajouter toutes les demandes qui sont l'accessoire, la conséquence ou le complément des demandes et défenses soumises au premier juge.

La demande relative aux actes de gestion courante du mandataire ad hoc qui s'analyse en un désistement partiel et non en une demande nouvelle est recevable.

2 Sur le fond

Selon l'article L 227-13 du code de commerce :

« Les statuts de la société [par actions simplifiée] peuvent soumettre toute cession d'actions à l'agrément préalable de la société. »

Aux termes de l'article L 227-17 du code de commerce :

« Les statuts [de la société par actions simplifiée] peuvent prévoir que la société associée dont le contrôle est modifié au sens de l'article L 233-3 doit, dès cette modification, en informer la société par actions simplifiée. Celle ci peut décider, dans les conditions fixées par les statuts, de suspendre l'exercice des droits non pécuniaire de cet associé et de l'exclure.

Les dispositions de l'alinéa précédent peuvent s'appliquer dans les mêmes conditions, à l'associé qui a acquis cette qualité à la suite d'une opération de fusion, de scission ou de dissolution. ».

La SCM IMAGERIE MEDICALE DU PARC RAMBOT immatriculée au registre du commerce le 22 février 1988 et associée majoritaire de la SAS SCANNER DU PARC RAMBOT, avait pour associés quatre médecins radiologues et la SELARL MEDICALE DU PARC RAMBOT immatriculée au registre du commerce le 15 mai 2007.

Le 23 novembre 2011, la SELARL MEDICALE DU PARC RAMBOT est devenue associé unique de la SCM IMAGERIE MEDICALE DU PARC RAMBOT par rachat de la totalité des parts, et a décidé la dissolution sans liquidation de la SCM aux termes d'une délibération du 23 novembre 2011 publiée le 30 novembre 2011, la SELARL devenant ainsi associé majoritaire de la SAS SCANNER DU PARC RAMBOT par suite de la transmission universelle du patrimoine.

La clause XIII des statuts de la SAS SCANNER DU PARC RAMBOT intitulée « clause d'agrément » prévoit conformément à l'article L 227-13 du code de commerce que « dans le cas de projet de la cession de tout ou partie des actions détenues par un actionnaire, cette cession totale ou partielle ne sera possible qu'avec l'accord express des autres actionnaires. »

Les statuts ne contiennent aucune clause d'information en cas de fusion, scission, dissolution telle que prévue par l'article L 227-17 du code de commerce.

Les clauses XI et XII selon lesquelles l'agrément d'un nouvel associé doit obligatoirement être pris en assemblée générale extraordinaire statuant à la majorité renforcée constituent les modalités pratiques de la mise en oeuvre de la clause XIII relative à la cession d'action nécessitant l'accord

express des autres actionnaires, et ne concernent pas les opérations de fusion dissolution qui ne sont pas prévues par les statuts.

La répartition des actions prévue par l'article VIII des statuts reste inchangée si ce n'est que la SELARL vient aux droits de la SCM.

L'ordonnance de référé entreprise, en ce qu'elle a ordonné la rétractation de l'ordonnance du sur requête du 6 avril 2012 et confirmé l'ordonnance sur requête du 29 mars 2012, sera en conséquence confirmée en toutes ses dispositions.

3 - Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

La SA POLYCLINIQUE DU PARC RAMBOT qui succombe sera déboutée de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et supportera les entiers dépens de première instance et d'appel.

Il convient en équité de condamner la SA POLYCLINIQUE DU PARC RAMBOT à payer

à la SELARL IMAGERIE MEDICALE DU PARC RAMBOT la somme de 3 000 euros et à Maître DE CARRIERE es qualités de mandataire ad hoc la somme de 2 000 euros, par application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions en ce compris les dépens,

Ajoutant,

Déclare recevables en cause d'appel les demandes formées par la SA POLYCLINIQUE DU PARC RAMBOT relatives à la mission de l'administrateur ad hoc et aux décisions prises le 12 juin 2012 par l'assemblée générale ordinaire de la SAS SCANNER DU PARC RAMBOT réunie par le mandataire ad hoc,

Déboute la SA POLYCLINIQUE DU PARC RAMBOT de toutes ses demandes, fins et conclusions,

Condamne la SA POLYCLINIQUE DU PARC RAMBOT à payer à la SELARL IMAGERIE MEDICALE DU PARC RAMBOT la somme de 3 000 euros et à Maître DE CARRIERE es qualités de mandataire ad hoc de la SAS SCANNER DU PARC RAMBOT la somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SA POLYCLINIQUE DU PARC RAMBOT aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.