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Décisions

CA Douai, 8e ch. sect. 3, 12 janvier 2012, n° 10/08855

DOUAI

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

M. Le Responsable du Pôle de Recouvrement Spécialisé du Nord

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Charbonnier

Conseillers :

Mme Convain, M. Pety

JEX Lille, du 6 déc. 2010

6 décembre 2010

Le 13 avril 2010, M. le responsable du pôle de recouvrement spécialisé de Lille a fait signifier à Mme Anne Françoise S. un procès-verbal de saisie conservatoire de meubles.

Par acte d'huissier en date du 29 septembre 2010, M. Dominique L. a fait assigner M. le responsable du pôle de recouvrement spécialisé du Nord devant le juge de l'exécution aux fins de voir ordonner la mainlevée de la saisie conservatoire dressée le 13 avril 2010 et en déduire toutes les conséquences de droit, faisant valoir que le procès-verbal de saisie conservatoire était nul aux motifs qu'il ne détaillait pas suffisamment les meubles saisis, qu'il ne faisait pas de distinction entre les biens insaisissables et ceux qui ne l'étaient pas, qu'il ne faisait pas mention de son absence, que l'huissier de justice n'avait pas coché les cases de son procès-verbal et que certaines mentions prévues par l'article 221 du décret du 31 juillet 1992 ne figuraient pas sur le procès-verbal de saisie.

M. le responsable du pôle de recouvrement spécialisé du Nord a demandé au juge de l'exécution de confirmer l'ordonnance rendue le 12 mars 2010 l'autorisant à saisir les biens meuble situés au [...], de déclarer la saisie conservatoire, instrumentée le 13 avril 2010, bien fondée, de déclarer le procès-verbal établi le 13 avril 2010 conforme aux textes en vigueur, de débouter Monsieur Dominique L. de l'ensemble de ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux dépens.

Il a soutenu que sa créance qui trouvait son origine dans une notification de redressement fiscal, était bien fondée en son principe ; que par ailleurs, la description des biens saisis était suffisamment précise, que ces biens étaient tous saisissables, que le procès-verbal de saisie ayant été établi au nom de Mme Anne-Françoise S., ce document n'avait pas à mentionner l'absence de M. Dominique L., absence qui au demeurant n'était pas susceptible de lui faire grief puisqu'il avait pu contester l'acte en cause ; qu'enfin, toutes les mentions à porter sous peine de nullité sur le procès-verbal de saisie conservatoire y figuraient bien.

Par jugement en date du 6 décembre 2010, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lille a déclaré valide la saisie conservatoire pratiquée le 13 avril 2010 par le responsable du pôle de recouvrement sur les biens meubles de M. Dominique L. et Mme Anne-Françoise S., mais en a cantonné les effets aux deux seuls biens suivants : le jetski portant le numéro TL. 900707 et la moto de marque Kawasaki KZ 1300 immatriculée 2048 WY 17, débouté les parties du surplus de leur demande et laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens.

Monsieur le responsable du pôle de recouvrement spécialisé du Nord a relevé appel de ce jugement.

À l'appui de son appel, M. le responsable du pôle de recouvrement spécialisé du Nord fait valoir que les rappels d'impôts sont dus par Monsieur et Madame L. S. ; que du fait de leur séparation, les époux résident séparément ; que Mme S. est restée au domicile conjugal, soit au [...] ; que lors du passage de l'huissier, en date du 13 avril 2010, Mme S. était présente et n'a pas précisé que les meubles ne lui appartenaient pas ; que de fait, il existe une présomption de propriété en ce qui concerne les biens qui sont au domicile de Mme S. ; qu'en conséquence, l'inventaire des biens, se trouvant à l'adresse, a été dressé et le procès-verbal a été établi au préjudice de Mme S. Anne-Françoise ; que dans ces conditions, M. Dominique L., étranger à la saisie conservatoire pratiquée entre les mains de Mme S., n'avait pas qualité pour contester la validité de la saisie pratiquée ; sur le fond, il soutient que la description des biens saisis est suffisamment détaillée et permet d'identifier et d'individualiser les objets saisis par l'huissier de justice.

Il demande donc à la cour de réformer le jugement entrepris et statuant à nouveau de déclarer M. Dominique L. irrecevable en ses demandes et à défaut de valider la saisie des biens meubles à titre conservatoire dans sa totalité et de condamner M. Dominique L. à lui verser une indemnité de 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre au paiement des entiers frais et dépens.

La SCP H. P., société civile professionnelle d'huissiers de justice qui intervient volontairement, demande à la cour de dire et juger que son intervention volontaire est recevable et, au visa des dispositions des articles 31 et 122 du code de procédure civile, de dire et juger que Monsieur Dominique L. n'a pas qualité à agir pour solliciter la nullité de l'acte de saisie conservatoire du 13 avril 2010 et en conséquence de dire et juger que ses demandes sont irrecevables, de constater que les biens objets de la saisie conservatoire du 13 avril 2010 ont été suffisamment bien décrits par la concluante, de constater que M. Dominique L. ne rapporte dans tous les cas pas la preuve de ce qu'une description imprécise lui causerait un préjudice justifiant la nullité de l'acte de saisie conservatoire du 13 avril 2010 et en conséquence d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré sauf en ce qu'il a déclaré valide la saisie des biens suivants : le jetski portant le numéro TL. 900707 et la moto de marque Kawasaki KZ 1300 immatriculée 2048 WY 17 et de condamner M. Dominique L. à lui verser la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel.

Elle soutient que M. Dominique L. n'est pas concerné par la mesure de saisie conservatoire puisqu'elle a été uniquement dénoncée à son ex-épouse et porte sur les biens de cette dernière ; qu'il n'a donc pas qualité à agir afin de solliciter la nullité de l'acte de saisie conservatoire puisqu'il n'a pas la qualité de saisi ; sur le fond, elle soutient que les biens saisis sont suffisamment décrits et qu'aucune confusion n'est possible ; que dans tous les cas, la nullité prévue par l'article 221 du décret du 31 juillet 1992 est une nullité pour vice de forme qui ne peut être invoquée qu'à charge de prouver un grief et qu'à aucun moment, M. Dominique L. ne rapporte la preuve du préjudice que lui cause la prétendue absence de description détaillée des biens objet de la saisie conservatoire.

M. Dominique L., cité par acte d'huissier en date du 13 mai 2011 délivré en l'étude de l'huissier instrumentaire, n'a pas constitué avoué. L'arrêt sera rendu par défaut conformément aux dispositions de l'article 473 du code de procédure civile.

Selon ce qu'autorise l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour l'exposé du surplus de leurs moyens.

Sur ce,

Attendu qu'il résulte des éléments du dossier que par ordonnance de non-conciliation en date du 24 septembre 2009, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Lille a attribué à Mme Anne-Françoise S. épouse L. la jouissance du domicile conjugal sis [...] et ordonné la remise des vêtements et objets personnels ; que le divorce des époux L. S. a été prononcé par jugement en date du 12 août 2010 ;

Attendu que par ordonnance sur requête rendue le 12 mars 2010, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lille a autorisé le comptable du pôle de recouvrement spécialisé du Nord "à procéder à la saisie conservatoire des meubles situés au domicile de M. L. Dominique et de son épouse Madame née S. Anne-Françoise au [...]" pour sûreté et conservation de la créance de l'État évaluée en principal et accessoires à la somme de 457 206 € ;

Qu'agissant à la demande du comptable du pôle de recouvrement spécialisé des impôts de Lille et en vertu de l'ordonnance sur requête rendue par le juge de l'exécution de Lille en date du 12 mars 2010, Me Yves P., huissier de justice associé à Lille, a signifié à la personne de Mme Anne-Françoise S. à son domicile [...] un procès-verbal de saisie conservatoire de ses biens mobiliers pour obtenir le paiement de la somme principale de 457 206 € au titre des créances fiscales ;

Attendu que la mesure de saisie conservatoire litigieuse n'étant diligentée qu'à l'encontre de Mme Anne-Françoise S. au domicile de cette dernière, M. Dominique L. qui n'a dès lors pas la qualité de saisi est irrecevable à agir pour demander la nullité et la mainlevée de la saisie conservatoire pratiquée entre les mains de Mme Anne-Françoise S. au motif que le procès-verbal de saisie conservatoire dressé le 13 avril 2010 ne serait pas conforme aux dispositions de l'article 221 du décret du 31 juillet 1992 en ce qu'il comporterait des irrégularités de forme, seule Mme Anne-Françoise S., débiteur saisi, étant recevable à contester la régularité de cet acte de saisie conservatoire ;

Que les demandes de M. Dominique L. seront donc déclarées irrecevables ; que le jugement déféré sera en conséquence infirmé ;

Attendu que M. Dominique L., partie perdante, sera condamné aux dépens de première instance et d'appel par application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile et à payer à Monsieur le responsable du pôle de recouvrement spécialisé du Nord et à la SCP H. P., huissiers de justice associés à Lille, la somme de 500 € chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS ;

Statuant publiquement et par défaut ;

Reçoit l'appel en la forme ;

Donne acte à la SCP H. P., huissiers de justice associés à Lille, de son intervention volontaire ;

Infirme le jugement ;

Statuant à nouveau ;

Déclare irrecevables les demandes formées par M. Dominique L. ;

Condamne Monsieur Dominique L. à payer à M. le responsable du pôle de recouvrement spécialisé du Nord et à la SCP H. P., huissiers de justice associés à Lille, la somme de 500 € chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Monsieur Dominique L. aux dépens de première instance et aux dépens d'appel lesquels pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.