CA Montpellier, 5e ch. A, 2 avril 2015, n° 14/00711
MONTPELLIER
Arrêt
Infirmation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Muller
Conseillers :
Mme Conte, Mme Gregori
Hélène M. et Stéphane G. s'étant séparés après 7 années de vie commune, ce dernier a été autorisé, suivant ordonnance du 29 juillet 2013 du juge de l' exécution du Tribunal de Grande Instance de Montpellier à pratiquer, entre les mains de Maître N. notaire, une saisie conservatoire du prix de la vente d'un immeuble situé à EGAT, propriété de Hélène M., pour sûreté de la somme de 50.000 € correspondant aux travaux d'amélioration, générateurs de plus-value, réalisés sur le chantier pendant la vie commune.
Prétendant à la rétractation de cette décision, Hélène M. a saisi le juge de l' exécution du Tribunal de Grande Instance de Montpellier qui, par jugement du 13 janvier 2014 a :
- dit que le juge de l' exécution du Tribunal de Grande Instance de Montpellier était compétent pour statuer sur la demande d'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire ;
- débouté Hélène M. de ses demandes de rétractation de l'ordonnance du 29 juillet 2013 et de dommages et intérêts ;
- dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par déclaration reçue le 29 janvier 2014, Hélène M. a interjeté appel de cette décision.
Par conclusions notifiées le 10 février 2015, l'appelante demande à la Cour de :
- ordonner la main-levée de la mesure conservatoire atteinte de caducité, dès lors que l'ordonnance du 29 juillet 2013 l'autorisant n'a pas été signifiée à la saisie ;
- ordonner la main-levée de la mesure conservatoire tenant l'absence de créance paraissant fondée en son principe ;
- condamner Stéphane G. au paiement des sommes de 20.000 € de dommages et intérêts et de celle de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle soulève en premier lieu, l'incompétence du juge de l' exécution du Tribunal de Grande Instance de Montpellier pour autoriser la saisie conservatoire, alors qu'était pendante devant le Tribunal de Grande Instance de PERPIGNAN, une procédure de référé-rétractation d'une ordonnance sur requête, rendue le 03 juillet 2013 par le Président du Tribunal de Grande Instance et autorisant Stéphane G. à faire délivrer au notaire rédacteur de l'acte de vente, une sommation lui interdisant de se dessaisir du prix de l'immeuble à hauteur de 50.000 €.
Elle soutient, que la mesure conservatoire est caduque, la décision l'autorisant ne lui ayant pas été signifiée dans les 8 jours.
Elle conteste l'existence d'une apparence de créance, tenant l'absence de toute pièce justifiant la réalisation de travaux de l'ampleur invoquée par l'intimé.
Par conclusions notifiées le 23 janvier 2015, Stéphane G. sollicite la confirmation de l'ordonnance entreprise et la condamnation de l'appelante au paiement de la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Il observe que l'existence d'une créance paraissant fondée en son principe, fondée sur l'enrichissement sans cause résultant de la réalisation d'importants travaux de transformation et de rénovation du chalet, propriété de l'appelante, ressort des motifs du jugement rendu le 19 février 2013, par le Tribunal de Grande Instance de PERPIGNAN.
Il soutient par ailleurs, que le recouvrement de sa créance est menacé à la fois par les manoeuvres procédurales dilatoires de l'appelante et par la vente de l'immeuble susceptible de faire obstacle aux opérations d'expertise ordonnée par le jugement du 19 février 2013.
MOTIFS DE L'ARRET
Il convient en premier lieu, de relever que le premier Juge a retenu à bon droit, la compétence, pour autoriser la mesure de saisie conservatoire du juge de l' exécution du Tribunal de Grande Instance de Montpellier, en relevant d'une part, que les compétences du juge de l' exécution étant selon l'article L 213-6 du Code de l'organisation judiciaire, exclusives et d'ordre public et s'exerçaient en l'espèce, nonobstant le référé rétractation en cours d'une précédente ordonnance sur requête, ayant autorisé la même saisie conservatoire et finalement rétractée par le Juge des référés, d'autre part, que le juge compétent pour autoriser une mesure conservatoire est, en application de l'article R 511-2 code des procédures civiles d' exécution , le juge de l' exécution du lieu où demeure le débiteur.
Par ailleurs, l'absence de signification dans le délai de huitaine à Hélène M. de l'ordonnance autorisant la saisie conservatoire, ne saurait entraîner la caducité de la saisie, une telle formalité n'étant prévue par aucun texte et l'appelante opérant une confusion avec la signification dans les 8 jours de l'acte de saisie prescrite par l'article R 522-5 du code des procédures civiles d' exécution .
L'article 511-1 dispose que 'toute personne dont la créance paraît fondée en son principe, peut solliciter du juge, l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur... si elle justifie de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement'.
S'agissant de l'existence de la première des deux conditions cumulatives exigées par ce texte, Stéphane G. se prévaut d'une créance, fondée sur l'enrichissement sans cause née de travaux effectués dans le chalet de Hélène M., entre les années 2000 et 2007, lesquels, compte-tenu de leur importance, ne trouvent pas leur cause dans sa contribution aux charges communes.
Pour étayer ses prétentions, l'intimé produit des requêtes et décisions de justice, à l'exclusion de factures ou procès-verbal de constat, dont le jugement du 19 février 2013 du Tribunal de Grande Instance de PERPIGNAN, ordonnant une expertise des travaux invoqués.
Il est certes énoncé au motifs de ce jugement que Stéphane G. produit :
- 4 factures en espagnol pour de faibles montants ;
- 1 facture pour 2 poutres non traitées de 229 € ;
- 2 factures de poteaux, lames, lambourde et plancher de terrasse pour 696,80 € et 751,76 € ;
- 1 facture de lambris de 326 € ;
- une attestation de Monsieur A. constatant l'importance des améliorations apportées au chalet ;
- une seconde attestation relatant que Stéphane G. a réalisé de nombreux travaux d'entretien.
Le jugement qui ne tranche aucune partie du principal et se limite à ordonner une expertise, ne lie pas la Cour, ni au demeurant le juge de l' exécution dans on appréciation, de l'existence d'une apparence de créance.
Compte-tenu de la modicité des factures invoquées produites aux débats par l'appelante et alors qu'il n'est pas établi que les matériaux acquis par l'intimé aient été employés à l'amélioration de l'immeuble, propriété de Hélène M., qui justifie par la production d'attestation, avoir elle-même réalisé des travaux sur l'immeuble, il doit être considéré que la créance dont se prévaut Stéphane G., trouvant sa source dans un enrichissement sans cause au profit de l'appelante, n'apparaît pas fondée en son principe.
Il y a donc lieu de rétracter l'ordonnance du juge de l' exécution du 29 juillet 2013, autorisant la saisie conservatoire et d'ordonner la main-levée de cette mesure.
L'existence d'un abus dans la mise en oeuvre de la mesure conservatoire n'étant pas démontrée, il n'y a pas lieu à dommages et intérêts de ce chef.
Stéphane G. tenu aux dépens, doit être condamné à payer à Hélène M., la somme de 1.500 € au titre des frais non taxables, par elle exposés.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
DIT l'appel recevable ;
INFIRME l'ordonnance déférée ;
ET statuant à nouveau :
RETRACTE l'ordonnance du 29 juillet 2013 du juge de l' exécution du Tribunal de Grande Instance de PERPIGNAN ;
ORDONNE la main-levée de la saisie conservatoire de créance pratiquée le 30 juillet 2013 par Stéphane G. à l'encontre de Hélène M. entre les mains de Maître Patrice N., notaire ;
DIT n'y avoir lieu à dommages et intérêts ;
CONDAMNE Stéphane G. à payer à Hélène M., la somme de 1.500 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE Stéphane G. aux dépens de l'instance et d'appel.