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Décisions

Cass. 2e civ., 21 octobre 2004, n° 02-15.758

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dintilhac

Rapporteur :

M. Boval

Avocat général :

M. Kessous

Avocats :

SCP Waquet, Farge et Hazan, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Reims, du 25 mars 2002

25 mars 2002

Joint les pourvois n° V 02-15.758 et n° W 02-15.759 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués (Reims, 25 mars 2002), que la société BET X... avait obtenu de la société Banque Petrofigaz (la Banque Petrofigaz) un prêt garanti, d'une part, par un engagement de délégation de créances par lequel la société BET X... cédait et déléguait à la Banque Petrofigaz toutes les sommes que Gaz de France pourrait lui devoir, d'autre part, par une caution solidaire de M. X... ;

que la société BET X... ayant été mise en liquidation judiciaire avant d'avoir entièrement remboursé le prêt, la Banque Petrofigaz a assigné M. X..., en qualité de caution, devant le tribunal de commerce d'Epernay qui l'a condamné au paiement de la somme réclamée ; que M. X..., qui a interjeté appel de ce jugement devant la cour d'appel de Reims, avait parallèlement obtenu du tribunal de commerce de Paris qu'il condamne Gaz de France à lui payer la même somme à titre de dommages-intérets pour le préjudice que l'établissement lui aurait causé en faisant certains paiements directement à la société BET X... en violation de l'engagement de délégation ; que Gaz de France a formé appel et soulevé une exception de connexité que la cour d'appel de Paris a accueillie en ordonnant "le renvoi de l'affaire devant la cour d'appel de Reims afin qu'elle soit instruite et jugée avec celle déjà soumise à cette Cour et opposant M. X... à la société Petrofigaz" ; que, sans joindre les deux affaires ainsi que cela lui était demandé, la cour d'appel de Reims a statué le 25 mars 2002 par deux arrêts distincts, dont l'un réforme le jugement du tribunal de commerce de Paris et déboute M. X... de ses demandes contre Gaz de France, et dont l'autre confirme le jugement du tribunal de commerce d'Epernay ;

Sur le premier moyen du pourvoi n° W 02-15.759, après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du nouveau Code de procédure civile :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir refusé de joindre les instances l'opposant à la Banque Petrofigaz, d'une part, et à Gaz de France, d'autre part, alors, selon le moyen :

1 / qu'une cour d'appel n'est compétente que pour connaître de l'appel des jugements des juridictions situées dans son ressort ; qu'en l'espèce, la compétence de la cour d'appel de Reims, pour statuer sur l'appel du jugement du 27 avril 1998 rendu par le tribunal de commerce de Paris, était exclusivement justifiée par l'existence d'un lien de connexité entre l'affaire Gaz de France et l'affaire Petrofigaz justifiant de les faire instruire et juger ensemble ; qu'en refusant de joindre les instances et en statuant néanmoins sur l'appel du jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris ne dépendant pas de son ressort, la cour d'appel a méconnu les limites de sa compétence et violé l'article R. 212-2 du Code de l'organisation judiciaire ;

2 / que le jugement qui statue dans son dispositif sur une exception de procédure a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée ;

qu'en l'espèce, par arrêt du 19 février 1999, la cour d'appel de Paris avait décidé qu'il existait entre les deux instances un lien de connexité justifiant le renvoi de l'affaire Gaz de France devant la cour d'appel de Reims afin qu'elle soit instruite et jugée avec celle opposant M. X... à Petrofigaz ;

qu'en refusant pourtant de juger les deux affaires ensemble, la cour d'appel a méconnu l'autorité de la chose jugée par la cour d'appel de Paris et violé l'article 480 du nouveau Code de procédure civile ;

3 / qu'aux termes de l'article 105 du nouveau Code de procédure civile, la décision rendue sur l'exception de connexité s'impose à la juridiction de renvoi ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé ce texte ;

Mais attendu que la jonction étant une mesure d'administration judiciaire, non sujette à recours, le moyen n'est pas recevable ;

Sur le second moyen du pourvoi n° W 02-15.759 :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande tendant à voir condamner Gaz de France à lui payer des dommages-intérêts, alors, selon le moyen :

1 / qu'ayant constaté que Gaz de France, délégué, s'était engagé à effectuer des paiements directs entre les mains de la Banque Petrofigaz, délégataire, pour garantir le remboursement du prêt par BET X..., déléguant, et que le prêt n'était toujours pas remboursé, la cour d'appel devait en déduire que Gaz de France restait tenu de verser directement à la banque les sommes qu'il pouvait devoir à BET X... ;

qu'en décidant pourtant que dès le mois de mai 1988, Gaz de France s'était définitivement libéré de tout engagement au titre de la délégation, de sorte qu'il n'avait commis aucune faute à l'égard de M. X... en procédant à des paiements ultérieurs auprès de BET X..., la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 1275 et 1382 du Code civil ;

2 / que, dans ses conclusions, M. X... faisait valoir que le crédit utilisé par BET X... était de 550 000 francs, soit un montant supérieur à celui des versements allégués par Gaz de France s'élevant à 545 595,57 francs ; qu'en retenant que "Gaz de France a rempli ses engagements en versant à Petrofigaz, entre octobre 1987 et mai 1988, une somme totale de 545 595,57 francs, correspondant au montant non contesté du crédit utilisé par BET X...", la cour d'appel a dénaturé les conclusions de M. X... et violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que pour rejeter la demande de dommages-intérêts, la cour d'appel a, non seulement estimé que M. X... ne démontrait pas que Gaz de France avait commis une faute, mais aussi retenu qu'il n'établissait pas que la faute incriminée aurait été à l'origine du préjudice qu'il alléguait ; que, par ces seuls motifs, abstraction faite de ceux critiqués par le moyen, l'arrêt est légalement justifié ;

Et sur le moyen unique du pourvoi n° V 02-15.758 :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt rendu dans l'affaire l'opposant à la Banque Petrofigaz d'avoir refusé de prononcer la jonction de cette procédure avec celle qui l'oppose à Gaz de France ; qu'il réclame l'annulation de l'arrêt par voie de conséquence de la cassation de la décision rendue dans cette autre affaire sur son moyen critiquant le refus de jonction ;

Mais attendu que ce moyen de cassation ayant été déclaré irrecevable, le présent moyen ne peut qu'être rejeté ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois.