CA Poitiers, 2e ch. civ., 15 juin 2004, n° 02/00834
POITIERS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Coop Atlantique (SA)
Défendeur :
Sustème U Centrale Régionale Ouest (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lernet
Conseillers :
M. Daniau, Mme Baret
Avoués :
SCP Musereau & Mazaudon, SCP Paille & Thibault
Avocats :
Me Brossy, Me Saubole
Vu I'arrêt rendu par la Cour de Céans le 4 novembre 2003, dont la teneur est réputée connue, qui, rejetant l'exception d'incompétence soulevée, a annulé la sentence arbitrale du 11 septembre 2001, en renvoyant les parties à conclure au fond, les dépens étant réservés.
Vu les conclusions régulièrement signifiées pour la SA COOP ATLANTIQUE le 26 février 2004, demandant la condamnation conjointe et solidaire de Monsieur X et de la Société Systeme U Centrale Regionale Ouest à lui verser la somme de 103 448,70 euros au titre de l'indemnisation due en application de la convention de garantie du 2 juillet 1999, ainsi que 20 000 euros au titre de l’article 700 du NCPC, en les condamnant sous la même solidarité au règlement des dépens et de l’intégralité des frais d'arbitrage.
Vu les conclusions régularisées le 3 mars 2004 pour la Société Système U Centrale Régionale Ouest, demandant à la Cour de débouter la Société COOP ATLANTIQUE de ses demandes, en la condamnant à lui payer 15 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive, et 7 500 euros au titre de I'article 700 du NCPC, tout en mettant les dépens à sa charge.
Vu la communication du dossier au Ministère Public, qui a déclaré s'en rapporter à justice le 23 mars 2004.
Vu l’ordonnance de clôture en date du 31 mars 2004, et les autres pièces de la procédure régulièrement produites.
MOTIFS DE LA DECISION :
Se référant pour un plus ample exposé des faits et moyens aux écritures des parties, et au précèdent arrêt, la Cour, à qui il appartient désormais de trancher le litige au fond en amiable composition, conformément aux dispositions de I'article 1485 du NCPC, et de l’acte de mission, constate que la SA COOP ATLANTIQUE, acquéreur aux termes d'un acte du 2 juillet 1999 de la totalité des actions de la Société SODIROUL, qui détenait la quasi-totalité du capital social de la Société ROUMADIS, entend se prévaloir de la clause de garantie de passif figurant audit acte pour faire prendre en compte par les cédants la somme de 678 579 francs correspondant à l’écart de capitaux propres entre le 30 septembre 1998, et le 11 juillet 1999, soit pendant la période intercalaire entre le bilan de référence au 30 septembre 1998, et la date de transfert de propriété., considérant que les comptes au 11 juillet 1999 démontreraient que les affaires et la situation financière des Sociétés cédées ont été affectées, et que leur gestion ne se serait pas poursuivie sur des bases normales, et que les déclarations et affirmations du cédant ont été infirmées par les résultats, ce qui doit conduire à l’application de la garantie de passif.
Pour apprécier cette prétention, il y a lieu de se référer au texte même du protocole du 2 juillet 1999, qui prévoit cette garantie de passif dans son chapitre 3, article 1.
Elle peut être mise en jeu pour toute augmentation de passif ou diminution d'actif des Sociétés cédées résultant de la mise en défaut ou de I'information de l’une ou plusieurs déclarations ou renseignements fournis, de l’omission, d'un défaut de comptabilisation, ou d’une comptabilisation incomplète dans les écritures ou comptes sociaux antérieurs au 12 juillet 1999.
La source, la cause ou l’origine doit être dans la provision antérieure au 12 juillet 1999, et doit résulter de faits commerciaux, de responsabilité civile, d'obligations relatives à l’hygiène, à la sécurité ou aux règles d'urbanisme ou d'environnement, d'origine fiscale, parafiscale, sociale ou autre, insuffisamment comptabilisés au 11 juillet 1999.
La Cour relève que le débat concerne une perte, c'est à dire une différence entre les produits et les charges et provisions, constatée et provisionnée au moment du bilan arrêté au 11 juillet 1999, et non d'une diminution d'actif ou d'une augmentation de passif non comptabilisée à cette date, et révélée ultérieurement, le passif concernant les dettes de la Société.
Il n'est ni soutenu, ni allégué que cette prise en charge des pertes soit contractuellement prévue au protocole, dans l’hypothèse où celles-ci dépasseraient le prix provisoire.
Si les acquéreurs indiquent par contre que ces pertes intercalaires seraient la conséquence de déclarations erronées les ayant induits en erreur, force est néanmoins de constater qu'aucun élément concret n'est communique, ni démontré en ce sens, le constat de pertes importantes ne suffisant pas à démontrer une anormalité dans la gestion ou dans les déclarations.
Il apparait au contraire qu'en l’espece, la Société COOP ATLANTIQUE, professionnel confirmé de la grande distribution, ne pouvait ignorer les importantes difficultés financières des cédants, les acculant à la vente, le prix plutôt bas de la transaction dans un contexte de "guerre des enseignes" et le séquestre de 100 % du prix provisoire ne pouvant qu'induire la nécessaire continuation de la dégradation de la situation financière de la Société cédée.
Il appartenait dans ce cas à la Société COOP de prendre des précautions supplémentaires, et d'anticiper contractuellement cette dégradation par une clause supplémentaire dans le protocole, lesdites pertes intercalaires ne pouvant ici rentrer dans le seul cadre de la mise en jeu de la garantie de passif, puisque résultant d'une gestion déficitaire, mais ne présentant aucune anormalité, et ne trouvant pas leur cause dans des évènements autres que ceux survenus dans la marche habituelle des affaires.
La Société COOP ATLANT1QUE sera donc déboutée de ses demandes.
La Société Système U Centrale Régionale Ouest, qui ne démontre pas de préjudice autre que celui réparé par la solution apportée au litige, sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts.
L'équité commande de condamner la Société COOP ATLANTIQUE au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du NCPC, et de lui faire supporter les entiers dépens.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
DEBOUTE la Société COOP ATLANTIQUE de ses demandes,
DEBOUTE la Société SYSTEME U Centrale Régionale Ouest de sa demande de dommages et intérêts,
CONDAMNE la Société COOP ATLANTIQUE à payer à la Société SYSTEME U Centrale Régionale Ouest la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du NCPC,
CONDAMNE la Société COOP ATLANTIQUE aux entiers dépens, qui pourront pour ceux d'appel être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du NCPC.