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Décisions

CA Aix-en-Provence, 1re et 9e ch. réunies, 2 mai 2019, n° 18/11831

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Lyonnaise de Banque (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Thomassin

Conseillers :

Mme Lefebvre, M. Tatoueix

JEX Digne-Les-Bains, du 21 juin 2018, n°…

21 juin 2018

Faits, procédure et prétentions des parties :

Par acte authentique établi le 24 juillet 2006, en l'étude de Me D.-J.-R., notaires à Marseille, la société Lyonnaise de Banque a consenti à monsieur Patrice M. et son épouse, Pasqualina S., tous deux kinésithérapeutes, un prêt du montant initial de 377 208 € remboursable en 300 échéances de 2 054.05 € chacune au taux de 4.30 % l'an hors assurance, pour financer l'acquisition d'un bien immobilier situé à [...], constituant une villa de 4 pièces avec garage.

Dix contrats de réservation ont ainsi été signés par les époux M., auprès des résidences Jardin des vignerons, Suites Villages Colommiers, les jardins de Vénis, résidence Oc, avec divers financements auprès des banques, dans le cadre de VEFA :

- BPI

- CAMEFI

- CIFFRA

- CIC LYONAISE DE BANQUE

- CREDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE

- BANQUE PALATINE

- UCB CETELEM .

A la suite d'impayés, la société Lyonnaise de Banque a pris le 17 juillet 2017, un nantissement judiciaire de parts sociales dans une SCI SLMP, dont monsieur M. est associé de même que son épouse, madame Pasquilina S., pour avoir garantie et paiement d'une somme de 529 505.14 €. Ce nantissement a été dénoncé le 17 et 18 juillet 2017 à chacun des époux.

Par acte du 2 août 2017, monsieur et madame Patrice M. ont contesté la mesure devant le juge de l'exécution de Digne les Bains, lequel, par jugement du 21 juin 2018 (RG17-888) a :

- débouté monsieur et madame M. de toutes leurs demandes,

- validé la mesure d'exécution,

- condamné solidairement monsieur et madame M. à payer la somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, en laissant à leur charge les dépens de procédure.

Le jugement écarte notamment la qualité de consommateurs des époux M., la prescription biennale, la nullité du procès verbal de nantissement au motif d'un décompte insuffisant et la demande en dommages et intérêts.

Cette décision, notifiée par lettre recommandée dont monsieur M. et madame S. ont signé l'accusé de réception le 30 juin 2019, a fait l'objet d'un appel de leur part le 13 juillet 2018 (RG 18-11831).

Leurs moyens et prétentions étant exposés dans des conclusions en date du 12 octobre 2018 monsieur et madame M. demandent à la cour de :

- les déclarer recevables en leurs contestations,

- infirmer le jugement,

A titre préliminaire,

- juger nul l'acte de nantissement judiciaire de parts sociales à défaut d'un décompte suffisamment précis,

- en ordonner mainlevée immédiate,

A titre principal,

- juger que les demandes de la banque CIC Lyonnaise de Banque se heurtent à l'autorité de chose jugée à la suite d'un jugement du 26 février 2014 et d'un arrêt de la cour d'appel d'Aix en Provence du 24 juin 2016, sur la base du même titre notarié établi le 24 juillet 2006,

- dire que l'acte de prêt n'a pas de caractère exécutoire,

- juger l'action prescrite,

- retenir au profit des époux M., leur qualité de consommateurs et la mise en oeuvre de l'article L137-2 du code de la consommation,

- annuler en conséquence l'acte de nantissement judiciaire, en ordonner mainlevée,

- condamner la CIC Lyonnaise de Banque à payer la somme de 20 000 € de dommages et intérêts et 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Subsidiairement,

- constater une déchéance du terme prononcée le 9 mars 2010, un nantissement le 17 juillet 2017, - sur le fondement de l'article L137-2 du code de la consommation, la prescription de la créance de la banque,

- dès lors juger la nullité de l'acte de nantissement et en ordonner mainlevée immédiate,

En conséquence,

- la créance étant prescrite, dire que la banque n'a pas d'intérêt à agir,

- la déclarer irrecevable,

- la débouter de l'ensemble de ses demandes,

- ordonner la mainlevée de la mesure conservatoire,

- constater les irrégularités de l'acte notarié et des chaînes de procurations, alors que celle des époux M. n'est pas annexée à l'acte de prêt, l'absence de paraphe du notaire sur les pages 7 à 27 de l'acte, en requalifiant l'acte en sous seing privé de sorte que la banque n'a pas de titre exécutoire,

- prononcer l'annulation du nantissement et en ordonner mainlevée immédiate,

A titre infiniment subsidiaire,

- dire que la banque doit supporter ses frais irrépétibles,

En tout état de cause,

- débouter la banque de toutes ses prétentions,

- la condamner pour son acharnement injustifié à leur payer la somme de 20 000 € à titre de dommages et intérêts, et celle de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux dépens d'instance en ce compris, les frais de délivrance et de mainlevée de l'acte de nantissement judiciaire.

Monsieur et madame M. rappellent que leur dossier s'inscrit dans l''affaire Apollonia' actuellement en cours d'instruction à Marseille, société qui gestionnaire et agent immobilier, a abusé de nombreux investisseurs particuliers en leur vendant des biens immobiliers sous prétexte de défiscalisation.

Ils contestent la mesure de nantissement pour divers motifs à savoir :

- en application de l'article R524-1 du code des procédures civiles d'exécution, un décompte des sommes dues non conforme, car trop sommaire, et ne leur permettant pas de vérifier le montant de la dette,

- un procés verbal de nantissement qui ne précise pas la date, le montant et le nombre d'échéances impayées, nul, sur le fondement de l'article 114 du code de procédure civile,

- un jugement de Digne les Bains en date du 26 février 2014, a retenu la prescription biennale et annulé une saisie attribution en date du 10 juin 2013 entre les mains de la société Odalys, tandis que la cour d'appel d'Aix en Provence, le 24 juin 2016 a confirmé la mainlevée avec substitution de motif puisque le dossier ne comportait pas une copie exécutoire de l'acte de prêt. Il y aurait autorité de chose jugée,

- monsieur M. et son épouse sont tous deux kinésithérapeutes, et non professionnels et la cour a déjà jugé que le contrat était soumis aux dispositions du code de la consommation, sur la volonté des parties,

- en raison de la date des mensualités impayées non régularisées qu'ils situent au moins en février 2010, voire en décembre 2009, la créance est prescrite, sur le fondement de l'article L137-2 du code de la consommation, ce depuis le 9 mars 2012, après une déchéance du terme prononcée le 9 mars 2010,

- comme déjà jugé, la banque ne justifie pas d'un titre exécutoire, la nécessité, pour le notaire, de parapher et signer la copie exécutoire paraît s'étendre aussi aux annexes de l'acte, en application des articles 8, 14 et 34 du décret du 26 novembre 1971,

- la cour d'appel de Riom dans un dossier similaire a décidé d'un sursis à statuer afin de vérifier les conditions de consentement à l'acte des emprunteurs.

Ses moyens et prétentions étant exposés dans des conclusions en date du 15 octobre 2018, la société Lyonnaise de Banque demande à la cour de :

- débouter les époux M. de toutes leurs demandes,

- confirmer entièrement le jugement dont appel,

- rejeter la demande de nullité de l'acte de nantissement, le décompte étant satisfaisant,

- dire que les emprunteurs ne peuvent invoquer l'autorité de chose jugée, sur la prescription de la créance, la cour ayant uniquement sanctionné la non production d'un acte notarié revêtu de la formule exécutoire,

- dire que les emprunteurs ne sont pas des consommateurs au sens de l'article L218-2 du code de la consommation, mais agissaient dans le cadre d'une opération professionnelle, une activité professionnelle principale n'en excluant pas une autre, accessoire,

- juger qu'ils ne peuvent se prévaloir de la prescription abrégée, la banque n'ayant pu accepter de se soumettre à ce dispositif législatif apparu deux ans après la contraction du prêt,

- retenir en tout état, que la banque a interrompu la prescription par la saisine du tribunal de Marseille selon conclusions du 7 mai 2010, le juge de l'exécution ne pouvant préjuger du déboutement au fond, tandis que l'effet interruptif perdurera jusqu'à cette décision,

- dire irrecevable le moyen du défaut d'annexion des procurations cité uniquement dans le dispositif des écritures et non développé dans les moyens des conclusions, tandis qu'il ne fait pas perdre à l'acte son caractère authentique,

- retenir la ratification du mandat par l'exécution partielle par les époux M. de leurs obligations, sans réserve et sans avoir invoqué la nullité du prêt conformément aux dispositions des articles 1338 et 1998 du code civil,

- dire que l'action en nullité de l'acte se prescrit par 5 ans en application de l'article 1304 du code civil et ne survit pas à un commencement d'exécution,

- juger que les emprunteurs n'ont aucune qualité pour contester le pouvoir de représentation du prêteur qui a validé l'acte et ne le remet pas en cause,

- dire que le nantissement n'est pas abusif et rejeter les dommages et intérêts en l'absence de faute, de préjudice et de lien de causalité,

- confirmer le jugement sur les frais irrépétibles et y ajoutant, condamner solidairement les époux M. à lui payer la somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, avec distraction au profit de Me R., avocat.

La procédure de nantissement est soumise aux articles R532-3 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, il suffit de se reporter au PV de nantissement pour vérifier qu'il comporte le détail de la dette. La contestation systématique et globalisée de monsieur M. n'est pas adaptée à l'espèce. Il n'y a pas autorité de chose jugée car l'arrêt du 24 juin 2016 n'a pas confirmé la prescription mais substitué des motifs, en raison de l'absence de production du titre exécutoire qui, cette fois est produit. La prescription biennale de l'article L218-1 du code de la consommation ne joue pas car les époux M. ne sont pas des consommateurs mais des professionnels, monsieur M. est inscrit au RCS comme loueur de meublés professionnel. La banque n'a pu vouloir se soumettre volontairement au code de la consommation alors qu'elle ignorait la qualité de professionnels des époux M., qui ne l'ont pas informée de leurs projets immobiliers globaux et de leur envergure, pour elle ils étaient loueurs non professionnels. Les échéances impayées sont celles du 10/12/2009 au 10/02/2009 (pièce 14) et la déchéance du terme a été prononcée le 09/03/2009 (en réalité malgré cette erreur de frappe le 9 mars 2010). La prescription a été interrompue moins de 5 ans après (et même moins de 2 ans après). Le juge du fond a été saisi le 5 octobre 2010 et un sursis à statuer a été décidé le 17 juin 2010 dont les effets se poursuivent durant toute l'instance. Il y a eu ratification des actes et les époux M. ne peuvent plus se prévaloir de la nullité, ils ont remboursé sans réserve les échéances jusqu'en 2009, n'ont jamais invoqué la nullité du prêt et disent expressément qu'ils ne l'invoquent pas, ils conservent la propriété de leur bien dont ils perçoivent les loyers et au demeurant, cette nullité est prescrite après 5 ans. Le paraphe du notaire sur chaque feuille ne concerne pas les annexes. L'action n'est nullement abusive car la société Lyonnaise de Banque est impayée depuis 10 ans, et la vente du bien immobilier, donné en hypothèque représente des aléas pour un bien surévalué ce que les époux M. affirment eux mêmes.

Il est ici renvoyé, pour l'exposé complet et détaillé des moyens et prétentions des parties à leurs écritures, en application de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 18 décembre 2018.

Motivation de la décision :

* sur l'autorité de chose jugée des précédentes décisions :

Le juge de l'exécution de Digne les Bains a statué, le 26 février 2014 sur la validité d'une saisie attribution, diligentée par la société Lyonnaise de Banque à l'encontre de monsieur et madame Patrice M., en date du 10 juin 2013 à eux dénoncée le 17 juin 2013 (RG13-981).

Sur appel de la société Lyonnaise de Banque dont l'action avait été jugée prescrite sur le fondement de l'article L137-2 du code de la consommation par le premier juge, la cour d'appel d'Aix en Provence (RG 2016-594), le 24 juin 2016, a estimé, par substitution de motifs, que l'établissement bancaire ne justifiait pas détenir de titre exécutoire, car il n'avait produit qu'une copie du document, et a confirmé l'annulation de la mesure de saisie attribution du 10 juin 2013 entre les mains de la société Odalys.

Cette décision ne peut avoir d'incidence sur le présent litige qui concerne une mesure d'exécution distincte, un nantissement de parts sociales dans la SCI SLMP, dès lors que les conditions de mise en oeuvre de l'article 480 du code de procédure civile ne sont pas réunies, à défaut d'identité des parties et d'objet du litige, alors que la prescription de l'action en paiement n'a au demeurant pas été retenue en appel en raison d'une substitution de motifs.

* sur les irrecevabilités :

Le moyen juridique, tiré du défaut d'annexion des procurations, cité uniquement dans le dispositif des écritures et non développé dans les moyens des conclusions rédigées par monsieur et madame M., ne constitue pas une irrecevabilité dès lors que le dispositif des écritures, particulièrement détaillé, certes mêlé de prétentions et de moyens, qui saisit la cour d'appel, aborde l'argumentation qui soutient leur demande, en application de l'article 954 du code de procédure civile. Il n'y a pas lieu d'admettre de ce chef, une irrecevabilité de cette prétention.

* sur l'absence de titre exécutoire :

Monsieur et madame Patrice M. exposent dans leurs écritures que selon l'article 8 du décret du 26 novembre 1971 devenu article 21 et 22 du nouveau décret 'les pièces annexées à l'acte doivent être revêtues d'une mention constatant cette annexe et signée du notaire. Les procurations sont annexées à l'acte à moins qu'elles ne soient déposées aux minutes du notaire rédacteur de l'acte. Dans ce cas, il est fait mention dans l'acte du dépôt de la procuration au rang des minutes.'

Le premier juge a déjà souligné que les époux M. ont exécuté partiellement le contrat de prêt en remboursant durant trois années les mensualités, perçus les loyers, bénéficié des avantages fiscaux liés au montage juridique adopté, ce qui par cette exécution volontaire vaut ratification de l'acte.

Il sera relevé que contrairement à ce qui a pu être jugé dans d'autres instances, en particulier l'arrêt de la cour d'appel du 24 juin 2016, le titre notarié produit aux débats en original, comporte en sa dernière page, la formule exécutoire, la signature et le tampon notarial qui identifient le document avec la mention 'le 21 août 2006, la présente copie exécutoire à ordre a été remise au créancier sus nommé, pour lui valoir titre exécutoire à concurrence de 377 208 000 €, restant due à ce jour'.

Les 6 premières pages de l'acte authentique ont été rédigées par le notaire et sous sa responsabilité, elles comportent chacune, la signature des parties et celle du notaire.

Monsieur et madame M. indiquent de manière contradictoire qu'un clerc de notaire dont l'identité ne figure pas, a signé ou... n'a pas signé l'acte authentique (page 20 de leurs conclusions) mais la cour d'appel n'a pu observer cette irrégularité, le nom du notaire, et le paraphe de celui ci, Me J., apparaissent sur le document critiqué, comme rappelé ci dessus.

Ont été annexés à l'acte et conformément aux exigences textuelles rappelées ci dessus, les documents sous seing privé antérieurement signés par les parties, pour faire corps avec le titre exécutoire, constituant les pages 7 à 27, et sur lesquels effectivement le notaire a porté à chaque entête de document, c'est à dire en page 7 (substitution de pouvoir), 8 (offre de prêt), 25 (prorogation de validité de l'offre de prêt), 26 (certificat d'adhésion à l'assurance), la mention de l'annexion de la pièce avec sa signature. La continuité des documents ainsi annexés, vérifiable par leur cohérence ou la numérotation des pages ne laisse aucun doute, il n'y a pas à exiger que la signature du notaire soit portée sur chaque page recto et verso, les mentions d'annexion existantes en l'espèce sont donc suffisantes.

Les renvois et modifications de l'acte, ont été mentionnés au nombre de 0 (page 6 de l'acte), les procurations sont mentionnées comme reçues aux minutes notariales à la date du 8 décembre 2005 (page 1de l'acte). Il n'y a donc pas d'irrégularités.

Monsieur et madame M. invoquent également des difficultés sur les procurations quant à la représentation des parties, en particulier de l'établissement prêteur, mais il s'agit là d'une nullité relative, que seul ce dernier est recevable à invoquer, puisqu'elle protège ses droits, et alors qu'une régularisation, une ratification est toujours possible. Ce qui est le cas, la Lyonnaise de Banque ne remettant pas en cause pour sa part, la validité des signatures et l'habilitation donnée pour la représenter à l'acte dont elle se prévaut.

* sur la qualité de consommateur et la prescription applicable :

Le prêt souscrit sous seing privé et qui a été annexé à l'acte authentique, s'intitule 'offre de prêt immobilier' mentions suivies entre parenthèses du visa des articles L312-1 et suivants du code de la consommation. Un autre paragraphe des conditions particulières, article 23-1 du contrat, rappelle les exigences de cette disposition légale quant au maintien de l'offre de prêt et à son délai d'acceptation par les emprunteurs. Mais ces indications générales, ne suffisent pas à caractériser une soumission volontaire des parties au régime protecteur du code de la consommation, et d'ignorer les circonstances particulières de conclusion du financement. La Lyonnaise de banque écrit, sans être démentie par les pièces produites, qu'elle ignorait l'importance et la nature des projets professionnels des époux M. et le fait qu'ils avaient adopté le statut de loueur professionnel avec inscription au RCS auquel aucun élément du contrat ne fait référence.

Il ressort des écritures de monsieur et madame M., que mis en confiance par la société Apollonia et son apparent professionnalisme, les époux M., ont, en très peu de temps, signé 10 contrats de réservation pour des ventes en l'état futur d'achèvement représentant un investissement total de 2 204 243 € et 10 offres de prêt auprès de divers organismes financiers dont la CIC Lyonnaise de Banque. Dans le cadre de ces opérations et bien que monsieur et madame M. aient eu une activité principale de kinésithérapeutes, une inscription au registre du commerce a été souscrite avec le statut de loueur de meublés professionnels afin en particulier de bénéficier d'avantages fiscaux.

Ces éléments ne permettent pas de retenir que les époux M., lors de ces opérations étaient de simples consommateurs, mais bien au contraire, ils doivent être considérés en raison de l'ampleur de l'opération, comme des professionnels ne pouvant dès lors bénéficier du régime protecteur du code de la consommation comme ils y prétendent. L'article L137-2 du code de la consommation devenu L218-2 du même code ne peut leur permettre d'invoquer la prescription biennale et c'est donc la prescription de 5 ans qui les concerne.

De même, le manquement au devoir de conseil, en raison de leur qualité de professionnels de la location, outre d'ailleurs leur activité de kinésithérapeutes, leur permettant d'appréhender les risques de financements trop lourds et non adaptés à leur capacité financière avec la prise en compte prudente d'un aléa, n'est pas caractérisé, d'autant que la société Lyonnaise de Banque, indique sans être valablement contredite par les éléments du dossier, qu'elle ignorait le contexte d'investissement massif et professionnel réalisé.

La déchéance du terme a été prononcée le 9 mars 2010 et la Lyonnaise de banque indique devant le tribunal de grande instance de Marseille, avoir interrompu la prescription par ses demandes, tandis qu'une décision de sursis à statuer fait perdurer cette interruption jusqu'à l'issue de l'instance, ce qui est exact et sera retenu. En effet, par des conclusions du 7 mai 2010 devant le tribunal de grande instance, la société Lyonnaise de Banque sans s'opposer à un sursis à statuer, décidé le 17 juin suivant par le juge de la mise en état, a reconventionnellement sollicité au titre de cet emprunt, la condamnation solidaire de monsieur et madame M. à lui payer la somme de 380 137.25 € outre intérêts au taux conventionnel de 4.3 % l'an jusqu'à parfait paiement, ce qui est un acte interruptif de prescription (RG09-15029).

* sur la nullité du nantissement judiciaire :

Monsieur et madame M. soutiennent que le décompte qui figure à l'acte de nantissement n'est pas suffisamment précis. Sa lecture permet cependant, au moyen d'un décompte annexe lui correspondant, à la date du 4 mai 2017, de distinguer, le capital restant du au 9 mars 2010, date de déchéance du terme, tel qu'il apparaissait sur le tableau d'amortissement contractuel, les échéances de retard pour 6 162.15 €, soit trois échéances ventilées en capital et intérêts, le taux d'intérêt du prêt et son montant de majoration ainsi que les dates de calcul appliquées.

L'argument selon lequel ce décompte est insuffisant et ne peut être vérifié, ne sera pas admis d'autant que préalablement à la déchéance du terme et comme l'observe l'établissement financier, monsieur et madame M. avaient été destinataires d'un décompte lors de la mise en demeure de payer du 12 février 2010 et que dans leurs conclusions, ils situent à juste titre le premier impayé non régularisé au mois de décembre 2009 (page 13) ce qui établit qu'ils ont parfaitement analysé le décompte.

* sur les dommages et intérêts :

La motivation qui précède qui confirme le bien fondé de l'action de l'établissement financier ne permet pas de faire droit à la demande de dommages et intérêts. Il n'est pas démontré un comportement fautif, abusif, de la part de l'établissement financier resté non désinteressé depuis plusieurs années alors qu'il n'est nullement démontré une intention de nuire, ou l'aspect ruineux de la mesure d'exécution, destinée, au delà de la garantie hypothècaire existante à obtenir paiement.

* sur les frais irrépétibles et les dépens :

Il est inéquitable de laisser à la charge du CIC Lyonnaise de Banque les frais irrépétibles engagés dans l'instance, une somme de 1 500 € lui sera allouée et mise à la charge de monsieur et madame Patrice M.. La somme allouée en première instance sera confirmée.

Par ces motifs :

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi,

DECLARE monsieur et madame M. recevables en leurs prétentions,

CONFIRME le jugement déféré,

Y ajoutant,

CONDAMNE monsieur et madame Patrice M., solidairement, à payer à la Lyonnaise de Banque la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE monsieur et madame Patrice M., solidairement, aux dépens avec droit de recouvrement direct des frais dont il aura fait l'avance sans avoir reçu provision préalable, au profit de Me R., avocat.