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Décisions

CA Saint-Denis de la Réunion, ch. civ., 16 avril 2019, n° 18/00771

SAINT-DENIS DE LA RÉUNION

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bricogne

Conseillers :

Mme Gaudy, Mme Flauss

JEX Saint-Denis de la Réunion, du 17 mai…

17 mai 2018

Par exploits d'huissier du 5 avril 2017, le nantissement provisoire des parts sociales de M. D. dans les sociétés EURL Villanova Novamonde, EURL Via Augusta, SCI Shabina XV, SARL Valstone, SCI Compagnie 1931 et SCI Sully a été opéré à la demande de M. B. en exécution d'une ordonnance de référé du président du tribunal de grande instance du 15 mai 2014, d'un jugement du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Saint-Denis du 25 août 2016 et d'un arrêt de la cour d'appel de Saint-Denis du 17 janvier 2017.

Par exploits d'huissier du 6 avril 2017, lesdits nantissements ont été dénoncés à M. D..

Par acte d'huissier du 19 octobre 2017, M. D. a saisi le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Saint-Denis aux fins de mainlevée des nantissements en se prévalant de la nullité de ceux-ci et de celle des actes de dénonciation à raison de la méconnaissance de l'article R.532-5 du code des procédures civiles d'exécution prévoyant qu'une copie du titre en vertu duquel la sûreté a été prise doit être annexée à la dénonciation.

Par jugement du 17 mai 2018, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Saint-Denis a rejeté les demandes de M. D. et l'a condamné à verser à M. B. la somme de 1500 euros au titre des frais irrépétibles, outre les dépens.

Pour se déterminer ainsi, le premier juge a relevé que l'irrégularité formelle des actes de dénonciation des nantissements provisoires ne faisaient pas grief M. D. dès lors qu'il avait connaissance des décisions constituant le fondement des nantissements, lesquelles étaient mentionnées sur les actes de dénonciation avec précision des montants des condamnations prononcées, de sorte qu'aucune confusion avec d'autres décisions de condamnation prononcées le même jour à son encontre n'était possible.

Par déclaration du 23 mai 2018 au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, M. D. a formé appel du jugement.

Par ordonnance en date du 29 Mai 2018 le Président de Chambre a fixé l'audience à laquelle l'affaire sera appelée au 18 Septembre 2018.

Il demande à la cour de:

-réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions

Statuant à nouveau,

-ordonner la mainlevée des nantissements de parts sociales opérés par M. B. le 5 avril 2017 sur les sociétés EURL Villanova Novamonde, EURL Via Augusta, SCI Shabina XV, SARL Valstone, SCI Compagnie 1931 et SCI Sully;

-Ordonner la radiation des inscriptions provisoires prises par M. B. sur ces six sociétés;

-Débouter M. B. de toutes ses demandes, fins et prétentions,

-Condamner M. B. à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et le condamner aux entiers dépens.

Il fait valoir qu'en application de l'article R.532-3 du code des procédures civiles d'exécution, le nantissement des parts sociales de SCI doit être constaté soit par acte authentique, soit par acte sous seing privé lui ayant été signifié et donnant lieu à publicité et qu'en l'espèce M. B. ne justifie pas de ces formalités.

Par ailleurs, il soutient que le créancier doit démontrer s'être conformé au formalisme de l'article R. 532-5 du même code, lequel prévoit que la dénonciation du nantissement contient copie du titre en vertu duquel la sûreté a été prise. Il relève qu'en l'espèce, aucun des actes de dénonciation ne comporte copie des titres en vertu desquels l'inscription a été prise. Il souligne que M. B. a fait procéder le 5 avril 2017 à deux séries de six nantissements sur les parts sociales des mêmes sociétés au visa de décisions de justice rendues aux mêmes dates, sans référence à un numéro de RG, mais qu'une moitié seulement de ces décisions ont été rendues au bénéfice de M. B., les autres l'ayant été au bénéfice d'une société Freedom. Il affirme ainsi que l'absence d'annexion des décisions pertinentes aux douze actes de dénonciation reçus le 6 avril 2017 a entretenu un doute dans son esprit et lui a causé un grief à raison des difficultés substantielles rencontrées dans l'organisation de sa défense.

M. B. demande à la cour de :

-confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel;

Y ajoutant,

-condamner M. D. à lui payer 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

-condamner M. D. aux dépens.

Il ne conteste pas l'absence de jonction du titre exécutoire aux dénonciations mais prétend qu'il appartient à M. D. de démontrer l'existence d'un grief né de cette erreur. Il conteste tout risque de confusion pour M. D. entre les nantissements pris pour l'exécution des décisions rendues au bénéfice de la société Freedom le condamnant à verser à cette dernière la somme de 1.087.800 euros et ceux pris en exécution des décisions rendues à son bénéfice condamnant M. D. à lui verser la somme de 252.000 euros. Il souligne à ce titre que les décisions rendues l'ont été de manière contradictoire, qu'elles ont été signifiées et que les actes de poursuites en litige mentionnent le montant de 252.000 euros de condamnation en principal de sorte qu'il s'en déduit qu'ils se rattachent aux condamnations prononcées à son encontre.

MOTIFS DE LA DECISION

Vu les conclusions de M. D. du 19 novembre 2018 et celles de M. B. du 27 juillet 2018 auxquelles la cour se réfère expressément pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties;

Vu la clôture des débats prononcée le 19 février 2019;

Sur la demande de mainlevée des nantissements

Sur la signification des actes de nantissement aux SCI et sur leur publication

L'article R. 532-3 du code des procédures civiles d'exécution prévoit que lorsque le nantissement porte sur les parts sociales d'une société civile immatriculée, l'acte est publié au registre du commerce et des sociétés.

Ces dispositions relatives à la publicité de l'acte de nantissement sont sans effet sur la validité du nantissement qui s'opère dès la signification à la société.

Il s'ensuit qu'est inopérant au soutien de la nullité du nantissement le moyen tiré de l'absence de publication au RCS des nantissements pris sur les SCI Shabina XV, SCI Compagnie 1931 et SCI Sully.

De même, l'invocation par l'appelant des dispositions de l'article 1866 du code civil, relatives au nantissement conventionnel, est en l'espèce sans portée quant à la validité des nantissements en litige opérés en exécution de décisions de justice.

Sur la nullité des actes de dénonciation des nantissements et celle subséquente des actes de nantissement.

L'article R.532-5 du code des procédures civiles d'exécution prévoit qu'à peine de caducité, le débiteur est informé dans les huit jours de la signification du nantissement par acte d'huissier qui doit notamment contenir, à peine de nullité, une copie du titre en vertu duquel la sûreté a été prise.

Conformément aux dispositions de l'article 114 du code de procédure civile, la nullité n'est toutefois encourue qu'en cas de démonstration par celui qui l'invoque d'un grief causé par l'irrégularité.

En l'espèce, les nantissements en litige ont été pris pour l'exécution de trois décisions du juge des référés du tribunal de grande instance de Saint-Denis du 4 avril 2013, du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Saint Denis du 25 août 2016 et de la cour d'appel de Saint-Denis en date du 17 janvier 2017 ayant chacune respectivement condamné M. D. à payer à M. B. les sommes de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles, 2.000 euros au titre des frais irrépétibles, 252.000 euros en liquidation d'astreinte et 2000 euros au titre des frais irrépétibles outre les dépens.

Il est constant que ces décisions n'étaient pas jointes aux actes de dénonciation des nantissements datés du 6 avril 2017.

Néanmoins, en premier lieu, il résulte des dénonces en litige (pièces 8-2 à 13-2 D.) qu'y étaient annexés pour chacune copies des actes de nantissement correspondant (pièces 8-1 D.), lesquels portent mention d'une part des décisions de justice pour l'exécution desquelles ils interviennent et d'autre part, un décompte détaillé des sommes mises à la charge de M. D. par ces décisions.

En deuxième lieu, il est établi que les décisions exécutées, rendues contradictoirement par les juges de première instance, ont été portées à la connaissance de M. D. qui les a contestées dans leur principe ou leur exécution (pièces 3 et 4 B.); l'arrêt de la cour de céans du 17 janvier 2017 lui a en outre été signifié le 3 avril 2017 (pièce 5 B.).

En troisième lieu, le décompte mentionné aux actes de nantissement précise que ce dernier vient en sûreté des sommes de :

« Liquidation d'astreinte au 30/10/ 2016 252.000,00

Article 700 CA 17/12/2017 2.000,00

Article 700 JEX du 25/08/2016 2.000,00

Article 700 ordonnance de référé du 15/05/2014 1.500,00

[...] ».

Par conséquent, eu égard à ces informations portées à la connaissance de M. D., celui-ci était à même d'identifier les décisions auxquelles se rattachaient les actes de dénonciation de nantissement.

Le fait que le même jour lui aient été dénoncés six autres actes de nantissement des parts des mêmes sociétés en exécution de décisions des mêmes juridictions rendues les mêmes jours n'est pas de nature à avoir conduit M. D. à se méprendre sur les titres en vertu desquels les nantissements en litige étaient pris dès lors que, le montant de la liquidation d'astreinte prononcée dans le cadre de cette seconde série de décision est nettement différent, pour s'élever, ainsi que le mentionnent les décomptes des actes de nantissement annexés aux dénonces, à 1.087.800 euros (pièce 1.1 à 6.1. D.).

En conséquence de l'ensemble de ce qui précède, le grief invoqué par M. D. tiré de difficultés substantielles dans l'organisation de sa défense à raison de l'absence de délivrance d'une copie des décisions en vertu desquelles étaient pris les nantissements en litige n'est pas démontré.

C'est ainsi par une juste appréciation des faits de l'espèce que le premier juge a retenu que, faute de grief, la nullité des actes de dénonciation n'était pas encourue.

La demande tendant à constater la caducité subséquente des nantissements ne peut davantage prospérer.

Le jugement entrepris ayant rejeté la demande de mainlevée des nantissements et la radiation des inscriptions provisoires prises sur les parts sociales des sociétés URL Villanova Novamonde, EURL Via Augusta, SCI Shabina XV, SARL Valstone, SCI Compagnie 1931 et SCI Sully doit être confirmé.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

L'équité commande de condamner M. D., qui succombe, à verser à M. B. la somme de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles ; les demandes exposées par l'appelant au même titre sont rejetées.

M. D., qui succombe, supportera la charge des dépens.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement et contradictoirement en dernier ressort,

Confirme le jugement entrepris

Y ajoutant,

Condamne M. D. à verser à M. B. la somme de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles ;

Rejette le surplus des demandes exposées par les parties ;

Condamne M. D. aux dépens.