CA Pau, 2e ch. sect. 1, 14 novembre 2019, n° 17/01914
PAU
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Eco Bati Bois (Sasu)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Salmeron
Conseillers :
M. Magnon, M. Darracq
Exposé des faits et procédure :
Xavier D. a développé à partir de 2002 une activité de construction de maison à ossature en bois. Il est titulaire de la marque Prefaland enregistrée à l'INPI et déposée pour diverses classes de produits et de services.
Il a créé un groupe de sociétés Aboxia holding dont la société Prefaland est en charge des charpentes à ossature bois.
Par acte sous seing privé du 1er octobre 2012, Xavier D. a concédé une licence à la société Prefaland pour une durée de trois ans.
Le contrat stipule que la société s'engage à verser au titulaire de la marque une redevance de 2 % du montant total du chiffre d'affaires réalisé sur le territoire, le montant minimal du chiffre d'affaires étant fixé à la somme de 3 000 000 euros.
Cette redevance doit être réglée dans les six mois suivant la clôture de l'exercice social de Prefaland.
Xavier D. reproche à la société Prefaland de ne pas s'être acquittée du montant de la redevance pour l'exercice clos au 31 décembre 2013.
Une saisie conservatoire a été pratiquée entre les mains de divers créanciers.
Par acte du 21 juillet 2014, Xavier D. a fait assigner la SASU Prefaland aux fins de la condamner au paiement de la somme de 67 044,29 euros et d'ordonner la résiliation judiciaire du contrat de licence.
Par jugement du 25 mars 2015, le tribunal de commerce de Dax a placé en redressement judiciaire la société Eco Bati bois (anciennement la société Préfaland).
Par actes des 24 avril 2015 et 21 octobre 2015, Xavier D. a fait assigner Maître François L. en qualité de mandataire judiciaire de la société Eco Bati bois et Maître V. en qualité d'administrateur judiciaire de la société Eco Bati bois.
Ces instances ont été jointes par ordonnances respectives des 7 mai 2015 et 6 novembre 2015.
Par jugement du 13 avril 2016, le tribunal de commerce de Dax a homologué un plan de continuation et désigné comme commissaire à l'exécution du plan Me V..
Par jugement du 12 avril 2017, le tribunal de grande instance de Dax a :
- fixé au passif du redressement judiciaire de la société Eco Bati Bois la somme de 139 044,29 euros à titre de créance au profit de Monsieur D. ;
- condamné la société Eco Bati Bois à payer à Monsieur D. la somme de 14.202,73 euros ;
- dit que la société Eco Bati Bois devra procéder à ses frais à la radiation de la licence portant sur la marque Prefaland au registre national des marques sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement et pour une durée de 3 mois ;
- réservé à la juridiction la liquidation de l'astreinte ;
- condamné la société Eco Bati Bois à payer à Monsieur D. la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile (cpc) ;
- débouté la société Eco Bati Bois de l'ensemble de ses demandes ;
- condamné la société Eco Bati Bois aux dépens avec application de l'article 699 du cpc
Par déclaration en date du 22 mai 2017, la SASU Eco Bati Bois a relevé appel du jugement.
La clôture est intervenue le 7 novembre 2018.
Prétentions et moyens des parties':
Vu les conclusions notifiées le 22 août 2017 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, de la SASU Eco Bati Bois demandant de :
- constater que Monsieur D. est le signataire des statuts constitutifs de la SAS Prefaland devenue Eco Bati Bois
- constater qu'aux termes des statuts de la SAS Prefaland devenue Eco Bati Bois, ses dirigeants ne pouvaient conclure le contrat de licence du 1er octobre 2012 sans I'accord préalable de la majorité absolue des associés.
- constater que le 1er octobre 2012 Monsieur D. était dirigeant de fait de la SAS Prefaland devenue Eco Bati Bois, et Monsieur H. son dirigeant de droit.
constater que le contrat de licence litigieux a été conclu en fraude des droits et de I'intérêt de la SAS Prefaland devenue Eco Bati Bois et qu'il est dépourvu de cause Iicite.
En conséquence,
A titre principal,
- infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions.
- déclarer nul le contrat de licence litigieux du 1er octobre 2012 en application des dispositions des articles 1108, 1131 anciens et 1833 du code civil, L. 227-5, L.'227-6, L. 242-6, L. 244-1 et L. 244-4 du code de commerce, et 22.2 des statuts de la SASU Prefaland devenue Eco Bati Bois, ensemble le principe selon lequel la fraude corrompt tout.
- débouter Monsieur D. de toutes ses demandes, fins et conclusions.
- condamner Monsieur D. à payer à la SAS Eco Bati Bois 10.000 euros de dommages et intérêts pour abus de saisie et procédure abusive sur le fondement des articles 1382 du code civil et L. 111-10 du code des procédures civiles d'exécution, outre 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du cpc et tous les dépens.
A titre subsidiaire
dans l'hypothèse où le contrat de licence ne serait pas annulé ou Monsieur D. déclaré non dirigeant de fait,
- limiter à 86.937,12 euros TTC I'admission au passif de Monsieur D. et à 1.174,39 euros TTC la condamnation en paiement de la SAS Eco Bati Bois.
débouter Monsieur D. de ses plus amples demandes.
Vu les conclusions notifiées le 23 avril 2018 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, de Xavier D. demandant de :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu
Y ajoutant,
- condamner la SASU Eco Bati Bois à verser à Monsieur D. une somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du cpc
- la condamner aux entiers dépens de l'instance d'appel.
La SELARL François L. en qualité de liquidateur judiciaire de la société Eco bati bois, à laquelle la déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées le 6 juillet 2017 et le 24 août 2017, n'a pas constitué avocat.
Motifs de la décision
:
- sur la recevabilité de l'appel :
L'action de Xavier D. en première instance porte sur la fixation de créance de Xavier D. au titre des redevances d'un contrat de licence avant l'ouverture du redressement judiciaire le 25 mars 2015 et en paiement de sommes dues après cette ouverture entre le 25 mars 2015 et le 4 juin 2015, date du refus de poursuivre le contrat de licence par le débiteur sur avis conforme du mandataire judiciaire (pièce 98 de la SAS Eco Bati bois).
En première instance, la SASU Eco Bati Bois, le mandataire judiciaire la selarl François L. et l'administrateur judiciaire Me V., désigné dès le 30 septembre 2015 soit 6 mois après l'ouverture du redressement judiciaire, étaient présents à l'instance en qualité de défendeurs et représentés par le même avocat.
En cause d'appel, et en cours de plan de continuation ordonné dès le 13 avril 2016 et désignant comme commissaire à l'exécution du plan Me V., la déclaration d'appel du 16 mai 2017 a été formée par la Sasu Eco Bati Bois, seule, qui n'a intimé que la selarl François L., mandataire judiciaire. Il n'est pas précisé expressément dans la déclaration d'appel qui était le représentant de la société Sasu Eco Bati Bois et Me V. es qualités n'est ni intimé ni intervenant volontaire. Mais ce dernier ne peut, en qualité de commissaire à l'exécution, représenter la SASU Eco Bati Bois.
S'agissant d'une action en fixation de créance dans le cadre d'un contrat en cours et d'une action en paiement postérieure à l'ouverture, si le commissaire à l'exécution du plan ne représente pas le débiteur qui est redevenu maître de ses biens, le débiteur ne peut défendre seul que ses droits propres concernant une action patrimoniale pour les créances antérieures à l'ouverture du redressement judiciaire.
Et s'agissant d'un contrat en cours, seul l'administrateur judiciaire, quand il est désigné, peut opter pour la continuation du contrat et, à défaut, le débiteur doit solliciter l'autorisation du mandataire judiciaire (cf article R631-38 et R627-1 alinéa2 du code de commerce).
Si le débiteur opte pour la non-continuation du contrat, ce dernier est résilié (Ch. com 11 juillet 2000 n°9813 366 ) à la date de l'option et en dépit du préavis contractuel (décision de CA Paris 27 sept 2007) avec les conséquences contractuelles prévues au contrat dans la mesure où ces clauses sont pleinement efficaces dans la mesure où elles ne sont pas spécialement stipulées pour cause de procédure collective (Ch. com. 13 juin 2006 n°05-14138).
Dès lors, l'appel de la Sasu Eco Bati Bois, seule, est recevable pour défendre des droits propres dès lors que le mandataire judiciaire est appelé dans la cause concernant la fixation de la créance à son passif.
Son appel est également recevable concernant l'action en paiement de redevances après l'ouverture de la procédure collective.
L'appel est donc recevable.
- sur le fond :
Pour solliciter la nullité du contrat de licence, la SASU Eco Bati Bois dénonce la signature du contrat de licence en fraude des droits et de l'intérêt de la SAS Prefaland et pour défaut de cause licite.
Elle dénonce la fraude par le non-respect des statuts et par la qualité réelle de Xavier D. comme gérant de fait de la société Prefaland. Elle fait valoir que s'agissant de conventions réglementées, et en application de l'article L227-10 du code commerce, le contrat entre une SAS et l'un de ses dirigeants en violation de leurs pouvoirs statutaires est nul pour défaut de consentement de la société.
- sur le non respect des statuts :
Les statuts signés le 2 février 2012 stipulent, en leur article 22-2 sur les pouvoirs du président, que dans les rapports avec les associés, le président ne peut sans l'accord de la majorité absolue des dits associés et sauf à engager sa responsabilité personnelle décider de conclure ou de rompre des conventions engageant la société sur une durée supérieure à 12 mois et dont le montant serait également supérieur à 30.000 euros.
Le contrat de licence de marque litigieux entre Xavier D. et la société Préfaland, représentée par son président, Frédéric H., date du 1er octobre 2012 et engage la société sur 3 années à raison de 2% de redevances sur 3.000 000 d'euros par an soit 60.000 euros annuels à verser à Xavier D. dans les 6 mois suivant la clôture de chaque exercice social.
Si Xavier D. était lui-même président de la société Aboxia, actionnaire unique de la société Préfaland, il n'était pas lui-même associé de la société Préfaland.
Il appartenait dès lors, à la société Eco Bati Bois de rechercher la responsabilité du président de la société Préfaland, Frédéric H., qui a signé la décision litigieuse et dont la responsabilité personnelle peut être mise en cause en application des statuts ; or, ce dernier n'a pas été appelé dans la cause et n'est donc pas partie à l'instance.
Le moyen tiré de la nullité du contrat pour non-respect des statuts ne peut donc aboutir alors que la sanction envisagée par les statuts est la responsabilité du président qui n'est pas dans la cause et en outre, le fût il, alors que rien n'établit que l'associé unique, Aboxia holding, n'aurait pas agréé le contrat de licence souscrit.
Concernant le moyen de la fraude, la SASU Eco Bati Bois dénonce la qualité réelle de Xavier D. qui, sans être associé de la SAS Préfaland, était le gérant de fait et a fait ainsi souscrire des engagements de la filiale du groupe dans son seul intérêt personnel et contrairement à l'intérêt social de la société Préfaland.
- Sur la qualité de dirigeant de fait de la Sasu Prefaland devenue la société Eco Bati Bois :
En première instance, le tribunal a considéré que la gérance de fait de la société Prefaland par Xavier D. n'était pas établie.
En cause d'appel, la SASU Eco Bati Bois réitère ce moyen en insistant sur le fait que Xavier D. est le fondateur de la société Préfaland, qu'il a fait désigner comme président de cette dernière un salarié qu'il présentait en novembre 2013 comme simple «'responsable de fabrication'» auprès du client pour un marché important souscrit par l'OPH de Dax et en le rémunérant faiblement, à concurrence de 6.065 euros par an, pour exercer ses fonctions de président, que par ailleurs, il disposait de la signature sur le compte bancaire de la société et a signé de nombreux virements au nom de la société et qu'il était enfin le seul interlocuteur de l'expert comptable, la société In Extenso, pour tenir la comptabilité de la société Préfaland.
Xavier D. conteste toute gérance de fait de la société Prefaland depuis 2012 alors qu'il avait créé un groupe de sociétés et qu'il était à la tête de la holding. Il conteste ainsi avoir signé les bordereaux de virements litigieux et expose que la holding intervenait uniquement dans le cadre de la convention de trésorerie souscrite avec sa filiale.
Par ailleurs, il produit des pièces tendant à établir la gérance effective de Frédéric H., gérant de droit de la filiale Prefaland. Enfin, il fait observer que lorsque la société Aboxia, groupe qui réalisait un chiffre d'affaires important de 7,8 millions d'euros en 2012 (Préfaland 3,3 millions d'euros) a été en redressement judiciaire le 7 août 2013, puis en liquidation judiciaire le 15 janvier 2014, la SAS Prefaland a continué à exercer son activité en toute indépendance avec à sa tête le président Frédéric H..
La chambre commerciale de la Cour de cassation définit le dirigeant de fait comme une personne ayant eu au sein de la société une activité positive de direction, exercée souverainement et en toute indépendance.
Les juges du fond apprécient souverainement la qualité de dirigeant de fait.
Cependant, la Cour de cassation contrôle les motifs par lesquels les juges du fond se sont déterminés.
Pour établir la gérance de fait, il faut relever des faits précis caractérisant une immixtion dans la gestion se traduisant par une activité positive et indépendante.
La position d'un associé unique est tout à fait particulière, puisqu'il dispose de la totalité des droits conférés par la qualité d'associé et notamment celui de désigner le dirigeant de droit. La question qui se pose pour lui est celle de savoir s'il laisse le dirigeant qu'il a nommé exercer ses prérogatives de direction de l'entreprise ou si ce dirigeant n'est qu'un simple exécutant .
En l'espèce, Xavier D. produit de nombreuses pièces qui établissent la gestion effective et autonome de Frédéric H. en qualité de président de la SAS Prefaland et notamment dans les relations avec la clientèle, à l'occasion de l'acceptation des devis signés par Frédéric H. et par les clients de la société, par le contenu des échanges de mails entre Frédéric H. et la société comptable assurant la comptabilité pour connaître les dates de paiement des factures sans que Xavier D. ni quiconque apparaissent en copie. Il justifie également de la signature d'effets de commerce et de plusieurs documents administratifs, fiscaux et sociaux par Frédéric H. lui-même et notamment des avenants aux contrats de travail des salariés qui avaient été transférés de la société Aboxia, par apport partiel d'actifs de la branche «'préfabrication atelier'», au moment de la création de la société Prefaland.
Il ressort de l'ensemble de ces pièces que Frédéric H. était le gérant de droit effectif de la société Préfaland et aucune autre pièce ne vient établir qu'il ne disposait d'aucune autonomie dans la gestion de la société, aucune attestation n'est produite pour l'établir, notamment de la part de collaborateurs ou de tiers.
Par ailleurs, s'agissant d'un groupe de sociétés, il n'est pas anormal que certaines tâches administratives ou comptables soient partagées entre les filiales et la holding pour garantir une cohérence dans le groupe et réaliser des synergies.
Certes, si la SASU Eco Bati Bois a pu s'interroger sur la signature de certains virements qui portent une signature très proche de celle de Xavier D. et sur les liens avec la société comptable In Extenso, d'une part, Xavier D. démontre que le président de droit gérait la société Préfaland et contrôlait le paiement des factures et des commandes réalisées et qu'il était lui-même en relation avec l'expert comptable. D'autre part, les pièces produites par la SASU Eco Bati Bois ne démontrent pas, à elles seules, des actes de gestion positive et indépendante de Xavier D.. Enfin, la seule mention dans un courrier avec un client important d'Aboxia présentant en novembre 2013 Frédéric H. comme «'responsable de fabrication'» n'établit pas que ce dernier ne gérait pas la SAS Préfaland qui fabriquait les charpentes en bois commandées pour le dit marché.
Dès lors à l'examen de l'ensemble des pièces soumises aux débats, rien ne permet d'établir l'immixtion de Xavier D. dans la gestion de la SAS Prefaland se traduisant par une activité positive et indépendante dans la gestion, qui était, par ailleurs, véritablement exercée par le président Frédéric H..
Il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que la gérance de fait de Xavier D. n'était pas établie.
- sur la nullité du contrat comme contraire à l'intérêt social :
Enfin, la Sasu Eco Bati Bois dénonce la nullité du contrat de licence comme étant contraire à l'intérêt social et comme étant dépourvue de cause.
Or, par des motifs précis et pertinents que la cour adopte, le tribunal a exposé que la licence de marque «'Prefaland'» a été enregistrée par Xavier D. en octobre 2011 alors qu'il exerçait l'activité de «'vente de maisons à ossature bois'» depuis 2002, puis qu'il a créé un atelier de fabrication à l'Herm en décembre 2006, avant de transférer son activité à la société Aboxia en 2010. Et le tribunal relève que le défaut d'utilité ou de valeur de la marque n'est étayé par aucun élément précis.
Dès lors, le tribunal en a déduit à bon droit que la marque Préfaland est une marque déposée de façon licite.
Le fait que Xavier D. ait créé ensuite, en février 2012, un groupe de sociétés avec une filiale qui exercera l'activité de fabrication de vente d'ossature en bois, en exploitant pour une durée de 3 ans renouvelable sa marque personnelle contre une redevance de 2% sur le chiffre d'affaire de fabrication de 3 millions d'euros annuels escomptés, n'est pas en soi contraire à l'intérêt social de la SAS Prefaland et n'est pas dépourvue de cause, la dite marque ayant été créée après plusieurs années d'exploitation attachée au développement de son activité et correspondant à la notoriété de Xavier D., exploitant de charpentes en bois.
La société Prefaland pouvait certes tirer grief du fait qu'au bout de 3 années, elle ne pouvait se voir interdite d'exploiter la marque qui correspond à sa raison sociale mais en définitive, la SASU Eco Bati Bois a déposé sa marque «'Eco Bati bois'» et a continué l'exploitation de la même activité avec cette nouvelle marque sans établir un quelconque préjudice né du fait de ne plus exploiter la marque Prefaland elle-même.
En définitive, les moyens de nullité allégués du contrat de licence ne peuvent qu'être rejetés.
- sur les demandes de Xavier D. :
Elles portent sur les créances antérieures à l'ouverture de la procédure collective et sur une créance postérieure.
Les demandes en paiement, pour les redevances à régler sur la période après l'ouverture de la procédure collective, sont recevables au regard des conditions d'exercice du droit d'option dès lors que, par lettre du 4 juin 2015 et sur avis conforme du mandataire judiciaire non contesté, la SASU Eco Bati Bois a décidé de ne pas poursuivre le contrat de licence de marque litigieux en application de l'article L622-13 du code de commerce.
En cause d'appel, les parties s'opposent sur les montants réclamés au regard de l'interprétation de la clause de fixation du montant des redevances dans le contrat de licence de marque du 1er octobre 2012.
La SASU Eco Bati Bois évoque des redevances calculées sur chaque année contractuelle et considère que la créance doit être fixée au passif à 86.937,12 euros ttc pour 2013 et 2014 et la condamnation à paiement pour 2015 ne doit pas dépasser 1.174,39 euros ttc.
De son coté, Xavier D. se fonde sur le chiffre d'affaire réalisé dans l'exercice clos selon les années en septembre ou en décembre et calcule des montants de redevances forfaitaires en se fondant sur le chiffre d'affaires minimum garanti tel que stipulé à l'article 2.2.1. Xavier D. a donc déclaré au passif la somme de 139.044,29 euros au titre des années 2013 et 2014, mais aucune déclaration n'a été déposée pour l'année 2015 pour la période antérieure à l'ouverture de la procédure collective le 25 mars 2015.
Après l'ouverture de la procédure collective et sur la période entre le 25 mars 2015 et le 4 juin 2015, Xavier D. demande la somme de 14.202,73 euros en application de l'article L622-17 du code de commerce, le contrat ayant été dénoncé par la société débitrice le 4 juin 2015 (pièce 98 de la SAS Eco Batibois).
Il ressort de l'article 2 du contrat, intitulé «'chiffre d'affaires'» que la société Préfaland a garanti le montant global qu'elle devait réaliser dans le territoire au titre de chaque année contractuelle au moins égale, en 2012, 2013 et et 2014 à 3.000.000 euros chacune (article 2.1). La sanction de cette obligation non respectée donnait uniquement à Xavier D. la faculté de résilier le contrat de manière anticipée moyennant un délai de 30 jours (article 2.2).
Concernant les redevances, objet de l'article 3, leur montant était calculé ainsi «'Prefaland versera à monsieur D. en contrepartie de la licence, des redevances calculées au taux de 2% calculées sur le montant total hors taxe du chiffre d'affaires réalisé dan le territoire'» (article 3.1 sur le montant) et elles devaient être payables au plus tard dans les 6 mois suivant la clôture de chaque exercice social (article 3.2).
La cour en déduit que les la garantie du montant du chiffre d'affaires n'intervient pas dans le calcul du montant des redevances et qu'aucun montant forfaitaire ne peut être accordé comme le souhaite Xavier D..
Le montant des redevances est égal à 2% du montant hors taxes du chiffre d'affaires réalisé.
Du 1er octobre 2012 au 31 décembre 2013, la SAS Eco Bati bois a réalisé un chiffre d'affaire de 2.758.948 euros HT, au 31 décembre 2014, le chiffre d'affaire était de 872.629 euros HT.
Les redevances dues sont donc de 55.178,96 euros HT soit 65.994,03 euros ttc pour 2012 et 2013 et 17.452,58 euros HT soit 20.943,09 euros ttc pour 2014. il convient donc d'infirmer le jugement sur le montant de la créance fixée au passif et de la limiter à 86.937,12 euros ttc (65.994,03+20.943,09)
Sur la demande pour la période du 25 mars au 4 juin 2015, le chiffre d'affaires réalisé a été de 48.933,25 euros ; le montant de la redevance est donc de 978,66 euros HT soit 1.174,39 euros ttc. Le jugement sera également infirmé de ce chef.
- sur la demande de radiation de la licence n°06080498 à la SASU Eco Bati Bois portant la maque verbale «'Préfaland'» enregistrée sous le numéro 3866363 à l'INPI au registre national des marques à ses frais sous astreinte :
Le tribunal a, à bon droit, accueilli la demande de Xavier D. dès lors que la Sasu Eco Bati bois a résilié le contrat conformément à l'article 9 du contrat de licence « à compter de la résiliation '..'Préfaland effectuera toute démarche à ses frais afin d'annuler toute inscription sur tous registres concernés de ses droits de licence ou de sa qualité de licencié découlant de la présente licence'». Le jugement sera confirmé de ce chef sauf à limiter le montant de l'astreinte à 50 euros par jour de retard sur 3 mois.
- sur les demandes de dommages-intérêts :
Concernant la demande de la Sasu Eco bati bois pour abus de saisie et pour procédure abusive :
La Sasu Eco Bati Bois, qui succombe pour l'essentiel de ses demandes, ne peut solliciter des dommages-intérêts pour procédure abusive, ni même pour saisie abusive dont elle n'établit pas le caractère fautif.
Concernant la demande de Xavier D., il ne saurait être reproché à la Sasu Eco Bati bois de ne pas s'être acquitté des redevances dues immédiatement et d'avoir engagé un recours contre sa condamnation en paiement et en fixation de créance, dès lors qu'elle a obtenu la réduction des montants sollicités et qu'elle alléguait de la nullité du contrat de redevance. Par ailleurs, la résistance a une action en justice constitue un droit et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à réparation que s'il constitue un acte de malice ou de mauvaise foi insuffisamment caractérisé en l'espèce.
La demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour résistance abusive présentée par Xavier D. doit être rejetée.
- sur les demandes accessoires :
La SASU Eco Bati Bois qui succombe pour l'essentiel supportera les dépens d'appel et versera 1.500 euros à Xavier D. en application de l'article 700 du cpc.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,
- déclare l'appel recevable
- infirme le jugement, mais seulement en ce qu'il a :
* fixé au passif du redressement judiciaire de la société Eco Bati Bois la somme de 139 044,29 euros à titre de créance au profit de Monsieur D. ;
* condamné la société Eco Bati Bois à payer à Monsieur D. la somme de 14.202,73 euros ;
* dit que la société Eco Bati Bois devra procéder à ses frais à la radiation de la licence portant sur la marque Prefaland au registre national des marques sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement et pour une durée de 3 mois ;
Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés, et y ajoutant,
- fixe au passif du redressement judiciaire de la société Eco Bati Bois la somme de 86.937,12 euros ttc à titre de créance au profit de Xavier D. ;
- condamne la société Eco Bati Bois à payer à Xavier D. la somme de 1.174,39 euros ttc euros ;
- dit que la société Eco Bati Bois devra procéder à ses frais à la radiation de la licence portant sur la marque Prefaland au registre national des marques sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt et pour une durée de 3 mois ;
- confirme le jugement pour le surplus
- déboute les parties de leurs autres demandes
- condamne la SASU Eco Bati Bois aux dépens d'appel
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
- condamne la SASU Eco Bati Bois à payer à Xavier D. la somme de 1.500 euros.