CA Versailles, 13e ch., 6 mai 2010, n° 09/06263
VERSAILLES
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Euromaster France (SNC)
Défendeur :
Ebrex (Sté), BTSG (SCP) (ès qual.)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Besse
Conseillers :
Mme Boucly-Girerd, Mme Dabosville
Avoués :
SCP Debray-Chemin, SCP Jullien, Lecharny, Rol et Fertier
Avocats :
Me Besson-Mollard, Me Chemouny
Par jugement en date du 9 octobre 2008, le Tribunal de commerce de Nanterre a ouvert une procédure de sauvegarde à l'égard de la SAS Ebrex France.
La société Euromaster France a déclaré sa créance au passif de la procédure par lettre recommandée avec accusé de réception du 18 novembre 2008 pour une somme de 324.803,69€.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 15 décembre 2008, la SNC Euromaster France a saisi Maître B. es qualité d'administrateur dans les formes et délais, d'une demande préalable en revendication des biens expressément désignés dans l'inventaire.
Par courrier du 20 janvier 2009, Maître B. informait la SNC Euromaster France de ce que la revendication était accueillie favorablement et un règlement de la somme de 205.184,56€ TTC représentant la contre valeur était régularisé.
Par jugement en date du 26 février 2009, le Tribunal de commerce de Nanterre a arrêté un plan de sauvegarde en désignant Maître B. en qualité de commissaire à l'exécution du plan.
La société Ebrex France contestant néanmoins l'ensemble de la créance dans le cadre de la procédure de vérification, la société Euromaster France répondait dans le délai de 30 jours que sa créance restait due à hauteur de 119.619,13€ déduction faite du règlement de 205.184,56€.
La société Ebrex France ne se reconnaissait débitrice que de la somme de 84.744,63€ tandis qu'après ajustement la société Euromaster France maintenait sa demande à hauteur de 99.036,23€.
Par ordonnance en date du 2 juillet 2009, le juge commissaire à la sauvegarde de la société Ebrex France près le Tribunal de commerce de Nanterre a prononcé l'admission de la créance de la société Euromaster France pour la somme de 84.744,63€ à titre chirographaire, la rejetant pour le surplus soit la somme de 240.059,00€.
Par déclaration au greffe de la cour d'appel en date du 22 juillet 2009, la SNC Euromaster France a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses conclusions en date du 2 mars 2010, elle demande à la cour de réformer l'ordonnance entreprise, de fixer sa créance au passif de la procédure collective de la société Ebrex France à la somme de 99.036,23€ à titre chirographaire, de dire que les modalités de règlement devront être intégrées dans le plan de sauvegarde, de débouter la société Ebrex France de l'ensemble de ses demandes, de la condamner aux dépens et à lui payer la somme de 3.000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle expose :
-que la différence de 14.291,60€ s'explique par des factures qu'elle estime impayées pour 20.412,74€ dont il convient de déduire un avoir de 6.121,14€,
-qu'elle justifie des factures impayées, étant précisé que la société Ebrex France ne peut prétendre que ces pièces ne sont pas probantes (bons de livraison non signés et fiches d'intervention ne mentionnant pas le prix) alors que les deux sociétés étaient en relations d'affaires suivies et que précédemment les factures étaient acquittées spontanément sans que les bons de livraison ne soient signés, qu'en l'espèce les fiches d'intervention le sont presque toutes,
-que si effectivement 8 factures qui portent une date postérieure au jugement déclaratif du 9 octobre 2008, ont fait l'objet d'un règlement au cours de la période d'observation par l'administrateur, il n'en demeure pas moins que le fait générateur soit la prestation de service est antérieur à ce jugement, qu'il est donc logique que la société Euromaster France ait fait une déclaration pour ces factures.
Dans des conclusions du 8 mars 2010, la société Ebrex France demande à la cour de confirmer l'ordonnance du juge commissaire en toutes ses dispositions, de constater que la société Ebrex France a payé à la société Euromaster France la somme de 4.658,16€ TTC au cours de la période d'observation sur le fondement de l'article L 622-17 du code de commerce, de lui donner acte de ce règlement et subsidiairement de :
-dire et juger qu'en cas de réintégration de la somme de 4.658,16€ sur l'état du passif de la sauvegarde de la société Ebrex France, la société Euromaster France sera tenue de restituer cette somme à la société Ebrex France sous le contrôle du commissaire à l'exécution du plan,
-dire qu'à défaut de restitution, cette somme sera déduite de ses droits à dividendes à due concurrence des sommes lui revenant, en exécution du plan de sauvegarde homologué par le Tribunal de commerce de Nanterre,
-en tout état de cause, condamner la société Euromaster France aux dépens et à lui payer la somme de 3.000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient :
-que la société Euromaster France n'apporte pas la preuve de la créance complémentaire de 14.291,60€,
-que 8 factures pour un total de 4.658,16€ ont été réglées au cours de la période d'observation de sorte que cette somme doit soit être soustraite du montant de la créance, soit être restituée à la société Ebrex France,
-que pour les autres factures, la société Euromaster France ne démontre pas qu'elle est titulaire d'une créance incontestée puisque les dossiers sont incomplets, chaque intervention devant en effet faire l'objet d'une commande, d'un bon de livraison émargé par Ebrex France, d'une fiche d'intervention dûment émargée par un responsable identifié d'Ebrex France, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, l'antériorité des usages ne pouvant constituer un moyen de preuve.
Par conclusions du 22 janvier 2010, la SCP BTSG conclut à la confirmation de l'ordonnance en toutes ses dispositions, soulignant que la société Euromaster France ne verse aux débats que des factures et relevés établis par ses soins.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur les factures réglées au cours de la période d'observation pour 4.658,16€
Considérant que les parties s'accordent pour reconnaître que ces 8 factures correspondent à des prestations effectuées antérieurement à l'ouverture de la procédure collective de sorte qu'elles n'auraient pas dû être réglées pendant la période d'observation ; qu'en effet, un tel paiement constitue une infraction pénale conformément aux dispositions de l'article L. 654-8 du code de commerce ;
Qu'en conséquence, il y a lieu de faire droit à la déclaration de créance pour ce montant de 4.658,16€, la société Euromaster France étant par ailleurs condamnée à restituer à la société Ebrex France la somme de 4.658,16€ TTC ;
Sur les autres factures pour 9.633,44€
Considérant qu'en ce qui concerne les autres factures, elles sont contestées par la société Ebrex France au motif qu'elles seraient insuffisantes pour établir l'existence de l'obligation ;
Qu'elle soutient en effet que chaque intervention de la société Euromaster France devait faire l'objet d'une commande, d'un bon de livraison et d'une fiche d'intervention émargés, ce qui n'est pas le cas en l'espèce pour les factures réclamées ;
Mais considérant que la société Euromaster France justifie que les deux sociétés étaient en relations d'affaires depuis plusieurs années ; et que des factures avaient déjà été acquittées par la société Ebrex France en l'absence de certains émargements (pièces 305 à 311) ;
Qu'il n'est pas démontré :
-ni que la société Ebrex France ait mis fin à cette pratique avant l'émission des factures litigieuses,
-ni que la société Ebrex France ait contesté les prestations ou les livraisons, objet des factures litigieuses avant sa protestation dans le cadre de la déclaration de créance ;
Considérant que force est de constater que les factures, dont il a été question précédemment et qui ont pourtant été réglées par la société Ebrex France, ne présentent pas toutes l'intégralité du formalisme invoqué et exigé par cette dernière ;
Considérant qu'en conséquence, il convient d'inclure ces 35 factures accompagnées de leurs bons de commande, et de fiches d'intervention, signés pour certains, dans la déclaration de créance de la société Euromaster France, Ebrex France par contre ne rapportant pas la preuve de leur paiement ;
Considérant qu'en conséquence il convient d'infirmer l'ordonnance entreprise et d'admettre la créance de la société Euromaster France pour la somme de 99.036,23€ ;
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt CONTRADICTOIRE et en dernier ressort,
Infirme l'ordonnance rendue le 2 juillet 2009 par le juge commissaire désigné dans la procédure de sauvegarde de la société Ebrex France près le Tribunal de commerce de Nanterre,
Statuant à nouveau,
Fixe la créance de la SNC Euromaster France au passif de la procédure de sauvegarde ouverte à l'égard de la société Ebrex France à la somme de 99.036,23€ à titre chirographaire,
Dit que ses modalités de règlement devront être intégrées dans le plan de sauvegarde,
Condamne la SNC Euromaster France à restituer à la SAS Ebrex France la somme de 4.658,16€ TTC sous le contrôle du commissaire à l'exécution du plan,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que chaque partie conservera ses dépens d'appel.