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Décisions

Cass. 2e civ., 9 janvier 2003, n° 00-13.887

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ancel

Rapporteur :

Mme Foulon

Avocat général :

M. Joinet

Avocats :

SCP Waquet, Farge et Hazan, Me Pradon

Montpellier, du 7 févr. 2000

7 février 2000

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 7 février 2000), que l'Union bancaire du Nord (UBN) a fait pratiquer une saisie-attribution au préjudice de M. X..., entre les mains de la caisse autonome de règlements des avocats de Montpellier (la caisse) ; que les époux X... ont alors demandé au juge de l'exécution de dire que la saisie était nulle pour n'avoir pas été signifiée à l'avocat ;

Sur la recevabilité du pourvoi contestée par la défense :

Attendu que Mme X..., qui a versé des sommes destinées à apurer les dettes de son mari, a intérêt à contester la validité de la saisie ;

Que le pourvoi est donc recevable ;

Sur le premier moyen :

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa contestation, alors, selon le moyen :

1 ) que le débiteur doit, à peine de nullité, signifier au tiers saisi un acte d'huissier contenant les indications de l'article 56 du décret du 31 juillet 1992 ; qu'en validant une saisie-attribution signifiée à la CARPA, mais qui n'avait pas été signifiée à l'avocat au nom duquel était ouvert le compte idividuel CARPA objet de la saisie, et qui, en sa seule qualité de dépositaire des fonds qui lui ont été confiés et qu'il a consignés sur ce compte, avait lui aussi la qualité de tiers saisi, la cour d'appel a violé les articles 53-9 de la loi du 31 décembre 1971, 56 du décret du 31 juillet 1992 et 240-1 du décret du 27 novembre 1991 ;

2 ) que les écritures afférentes à l'activité de chaque avocat sont retracées par la CARPA dans un compte individuel ouvert au nom de l'avocat, qui peut faire fonctionner ce compte sous sa signature ; qu'à la supposer régulière, la saisie-attribution pratiquée entre les mains de la seule CARPA devait donc en tout état de cause être au moins dénoncée à l'avocat qui a la qualité de titulaire du sous-compte objet de cette saisie ;

qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 55, 77 du décret du 31 juillet 1992, 240-1 du décret du 27 novembre 1991, 1er et 2 de l'arrêté du 5 juillet 1996 ;

Mais attendu qu'il résulte des articles 237 et suivants du décret du 27 novembre 1991, 8 et 11 de l'arrêté du 5 juillet 1996 que la caisse des règlements pécuniaires des avocats (CARPA) est titulaire d'un compte, ouvert auprès d'une banque, sur lequel les avocats ont l'obligation légale de déposer les fonds remis par leurs clients ; que si chaque avocat est titulaire, auprès de la CARPA, d'un compte individuel et de sous-comptes-affaires, il ne dispose de la signature sur son compte individuel qu'en qualité de mandataire du président de la CARPA ; qu'en cas de signification d'une saisie portant sur les fonds déposés par un avocat au nom de son client, la CARPA a seule la qualité de tiers saisi pour l'application des articles 44 de la loi du 9 juillet 1991 et 59 du décret du 31 juillet 1992 ; que la nécessité d'interroger l'avocat titulaire du compte individuel peut constituer un motif légitime au sens de l'article 60 du même décret ;

Et attendu que l'arrêt retient à bon droit que seule la caisse avait la qualité de tiers saisi et que la saisie n'avait pas à être dénoncée à l'avocat ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué alors, selon le moyen :

1 ) qu'il résulte du courrier de la caisse du 20 avril 1998, du courrier de Mme X... du 14 avril 1998, du bordereau de mouvements de la caisse, ainsi que des propres conclusions d'appel de l'UBN, que le chèque litigieux avait été émis par Mme X... à l'ordre de la SCP Nguyen Phung et qu'il a été déposé non pas sur un sous-compte ouvert au nom de son mari, mais sur le compte CARPA ouvert au nom de la SCP Nguyen Phung dans le cadre de l'affaire nouvelle "X.../UBN", à titre de "consignation pour règlement créances fiscales" ; qu'ainsi l'arrêt attaqué a dénaturé le cadre du litige, en violation de l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;

2 ) que les comptes CARPA sont subdivisés en comptes individuels ouverts au nom de l'avocat, et chaque compte individuel est lui-même subdivisé en autant de sous-comptes qu'il y a d'affaires traitées par l'avocat ; que les avocats demeurent donc titulaires de ces sous-comptes, qui ne sont pas ouverts au nom de leur client mais sous la référence de l'affaire concernant ledit client ; que la remise par l'avocat d'un chèque émis à son ordre sur son compte individuel CARPA ne peut par conséquent être de nature à transférer la propriété de la provision à un tiers non titulaire de ces comptes et, partant, à caractériser une donation en sa faveur ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil, 240-1 du décret du 27 novembre 1991 et 55 du décret du 31 juillet 1992 ;

3 ) que la saisie-attribution ne peut porter que sur les sommes dues par le tiers saisi au débiteur ; qu'il n'était pas contesté que les sommes versées au compte CARPA avaient été consignées par la société d'avocats dans le cadre du mandat que lui avait confié Mme X... de régler les dettes fiscales de son mari, et de lui restituer son versement en cas de redressement judiciaire de ce dernier ; que les sommes consignées ne l'avaient donc nullement été pour être données à M. X..., mais pour l'exécution d'un tout autre mandat par l'avocat ; que, dès lors, ni la caisse ni la société d'avocats n'avaient d'obligation de somme d'argent à l'égard de M. X..., débiteur saisi ; qu'en validant néanmoins la saisie pratiquée par l'UBN sur les sommes consignées pour le compte de Mme X... à la caisse, la cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil et 55 du décret du 31 juillet 1992 ;

Mais attendu qu'en retenant que M. X... avait acquis immédiatement la propriété de la provision dès la remise du chèque, la cour d'appel, qui n'a fait que constater que les sommes déposées, et non consignées, sur un sous-compte ouvert au nom d'une partie, appartenaient à celle-ci pour le règlement des actes judiciaires accomplis dans son intérêt, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.