CA Nancy, 2e ch. civ., 27 janvier 2022, n° 20/02667
NANCY
Arrêt
Infirmation partielle
EXPOSE DU LITIGE
Suivant offre préalable acceptée le 23 mai 2016, la SA BNP Paribas Personal Finance (PF) a consenti à M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. un contrat de prêt personnel de regroupement de crédits d'un montant de 38 500 euros remboursable en 72 mensualités au taux débiteur de 5,03% l'an, pour lequel M. Franck R. a adhéré à l'assurance facultative proposée par la SA CARDIF Assurances Risques Divers (ARD) pour la garantie ' décès, perte totale et irréversible d'autonomie, maladie-accident '.
Le 8 décembre 2016, M. Franck R. a été victime d'un accident de la circulation à l'origine d'un arrêt de travail, souffrant de hernies discales cervicales avec fonte des interosseux de la main droite.
M. Franck R. a déclaré son sinistre à la SA CARDIF ARD le 8 septembre 2017.
Par courrier du 16 octobre 2017, la SA CARDIF ARD a indiqué à M. Franck R. qu'elle ne pouvait pas prendre en charge son sinistre dans la mesure où les constatations médicales à l'origine de son arrêt de travail relevaient des clauses d'exclusion du contrat d'assurance. Suite à la contestation de cette décision le 31 octobre 2017, la SA CARDIF ARD a confirmé à M. Franck R. par courrier du 1er décembre 2017 qu'après examen de son dossier par le médecin-conseil, la pathologie à l'origine de son arrêt de travail relevait des risques contractuellement exclus.
Par courrier recommandé en date du 11 novembre 2017 avec avis de réception en date du 14 novembre 2017, la SA BNP Paribas PF a mis M. Franck R. en demeure de s'acquitter des mensualités impayées à hauteur de 3 320,96 euros dans un délai de dix jours à compter de sa réception, sous peine de déchéance du terme.
Par lettres recommandées en date du 21 décembre 2017, distribuées les 27 et 29 décembre 2017, la SA BNP Paribas PF a mis M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. en demeure de payer la somme totale exigible de 36 833,17 euros dans un délai de huit jours.
Par ordonnance d'injonction de payer en date du 24 juillet 2018 signifiée par dépôt à l'étude le 16 août 2018, le juge du tribunal d'instance d'Epinal a condamné M. Franck R. à payer à la SA BNP Paribas PF la somme de 30 760,88 euros en principal avec intérêts au taux légal de 0,88%, ainsi que la somme de 8,76 euros au titre des frais de mise en demeure.
Par déclaration reçue le 5 septembre 2018, M. Franck R. a formé opposition à l'ordonnance du 24 juillet 2018. Par courrier reçu au greffe le 10 septembre 2018, Mme Sandrine M. née R. a formé opposition à cette ordonnance.
Par acte d'huissier du 5 mars 2019, M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. ont assigné la SA CARDIF ARD en intervention forcée devant le tribunal d'instance d'Epinal afin de la voir condamnée à titre principal à payer à la SA BNP Paribas PF la somme de 33 688,17 euros correspondant au solde du crédit consenti.
La SA BNP Paribas PF a conclu au débouté des demandes et a sollicité la condamnation solidaire de M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. à lui payer à titre principal la somme de 36 833,17 euros augmentée des intérêts au taux conventionnel de 5,03% à compter de la notification de la mise en demeure, et subsidiairement à compter de la signification de l'ordonnance d'injonction de payer.
La SA CARDIF ARD a sollicité le rejet de la demande de prise en charge, et subsidiairement sa fixation à douze remboursements mensuels à régler au prêteur.
Par jugement en date du 30 juillet 2020, le tribunal judiciaire d'Epinal a :
- déclaré recevable l'opposition à injonction de payer formée par M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R.,
- mis à néant l'injonction de payer n°21/18-00785 rendue le 24 juillet 2018 par le juge du tribunal d'instance d'Epinal,
- condamné solidairement M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. à verser à la SA BNP Paribas PF la somme principale de 3 861,60 euros, au titre des échéances échues au 31 décembre 2017, avec intérêts au taux conventionnel de 5,03 % à compter du 29 décembre 2017,
- condamné la SA CARDIF ARD à relever et garantir M. M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. de cette condamnation,
- condamné la SA CARDIF ARD à verser aux époux R. la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté la SA BNP Paribas PF de sa demande de condamnation des époux R. sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté la SA CARDIF ARD de sa demande de condamnation des époux R. sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la SA CARDIF ARD au paiement des dépens,
- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement.
Le premier juge a indiqué que la SA BNP Paribas PF avait prononcé la déchéance du terme du contrat par courrier recommandé avec avis de réception en date du 21 décembre 2017, sans mise en demeure préalable de payer restée sans effet, de sorte qu'elle ne pouvait se prévaloir de l'exigibilité de la totalité des sommes dues, mais uniquement des échéances échues impayées au 31 décembre 2017.
Il a jugé que la clause d'exclusion de garantie par la SA CARDIF ARD (article 9 de la notice d'assurance facultative) en cas d'incapacité temporaire totale de travail résultant ' d'atteintes disco-vertébrales et leurs conséquences n'ayant pas nécessité d'intervention chirurgicale dans les trois mois suivant le premier jour d'arrêt de travail ', n'était pas valable en ce qu'elle ne se détachait pas de l'ensemble du texte et n'appparaissait pas en caractères très apparents au sens de l'article L. 112-4 du code des assurances. Il a conclu que selon l'article 8 de la notice limitant la garantie à douze remboursements mensuels et du délai de franchise de 90 jours à compter de l'accident, soit jusqu'au 22 mars 2017, la SA CARDIF ARD était tenue de prendre en charge les mensualités du crédit venant à échéance à compter du 4 avril 2017, représentant sur douze mois la somme de 7 446,96 euros.
Par courrier du 21 septembre 2020, la SA CARDIF ARD a informé M. Franck R. du paiement de douze mensualités correspondant à la limite de prise en charge de sa garantie à hauteur de 7 723,20 euros.
Par déclaration reçue au greffe le 28 décembre 2020, la SA BNP Paribas PF a interjeté appel du jugement du 30 juillet 2020 tendant à son infirmation en tous ses chefs critiqués, hormis en ce qu'il a déclaré l'opposition recevable et mis à néant l'ordonnance d'injonction de payer.
Dans ses dernières conclusions transmises le 14 juillet 2021, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la SA BNP Paribas PF, appelante, demande à la cour sur le fondement des articles 1134 et 1142 du code civil dans leur version en vigueur à la date du contrat, ainsi que des dispositions d'ordre public du code de la consommation, et subsidiairement des articles 1184 ancien et 1224 nouveau du code civil et des articles 1405 et suivants du code civil :
- d'infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Epinal en date du 30 juillet 2020 dont appel,
Et statuant à nouveau,
A titre principal,
- de dire et juger que la défaillance des coemprunteurs conjoints et solidaires R. est caractérisée dans leur obligation de paiement au titre du présent contrat de crédit personnel,
- de dire et juger que la déchéance du terme lui est acquise au 23 novembre 2017, date de notification de la mise en demeure préalable augmentée du délai imparti de huit jours mentionné pour régulariser l'impayé à peine de prononcé de la déchéance, d'abord, selon mise en demeure préalable à déchéance du terme demeurée sans effet et précisant le délai pour régulariser l'impayé et ainsi faire obstacle à la déchéance, puis selon mise en demeure notifiant la déchéance du terme ;
Subsidiairement, dans l'hypothèse où la cour ne retiendrait pas la déchéance conventionnelle du terme du présent contrat de crédit,
- de prononcer la résolution judiciaire du présent contrat de crédit dès lors que le défaut de paiement des co-emprunteurs conjoints et solidaires est suffisamment grave pour justifier l'acquisition de la condition résolutoire sous-entendue dans tout contrat synallagmatique,
En tout état de cause,
-de condamner solidairement M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. à lui payer :
* la somme totale de 29 109,97 euros en principal intérêts et accessoires, portant intérêts au taux légal à compter de la signification de l'ordonnance d'injonction de payer,
* la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
*les entiers dépens en application de l'article 699 du même code, en ce compris ceux relatifs à la procédure d'injonction de payer, à la procédure de première instance et à la procédure d'appel,
- de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a condamné la SA CARDIF ARD à relever et garantir M. Franck R. de cette condamnation, dans la limite contractuelle de 12 remboursements mensuels, telle que stipulée aux termes de l'article 8 de la notice d'assurance du présent contrat de crédit, ce qui représente un montant de 7.446,96 euros de prise en charge,
- de condamner la SA CARDIF ARD à relever et garantir M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. de cette condamnation dans la limite susmentionnée,
- de débouter les intimés de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions en sens contraire.
Au soutien de ses demandes, la SA BNP Paribas PF fait valoir en substance :
- que la déchéance du terme a été régulièrement prononcée suite à une mise en demeure préalable de payer en date du 11 novembre 2017, demeurée sans effet et précisant le délai pour régulariser l'impayé, notifiée à M. Franck R. le 14 novembre 2017 ; qu'en vertu de la solidarité contractuelle et du principe de représentation des codébiteurs solidaires, l'effet comminatoire de la mise en demeure adressé à l'un vaut à l'égard de l'autre, de même que la déchéance du terme prononcée à l'issue du délai imparti pour régulariser l'impayé ; que les courriers mentionnent expressément l'identité exacte de la créancière avec la précision que Neuilly Contentieux se voit transmettre le dossier pour le recouvrement des sommes dues au titre du prêt souscrit, précisément identifié ; que sa créance est exigible à l'égard des deux emprunteurs solidaires ;
- que subsidiairement, la résolution judiciaire du contrat de prêt sera prononcée pour manquement grave des emprunteurs à leur obligation de payer les échéances convenues.
Dans leurs dernières conclusions transmises le 15 septembre 2021, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R., intimés, demandent à la cour sur le fondement de l'article 546 du code de procédure civile :
A titre principal,
- de confirmer le jugement rendu le 30 juillet 2020 par le tribunal judiciaire d'Epinal,
Y ajoutant :
- de condamner solidairement la SA BNP Paribas PF et la SA CARDIF ARD à leur verser la somme de 2 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de cour d'appel,
- de condamner solidairement la SA BNP Paribas PF et la SA CARDIF ARD aux dépens de la procédure d'appel,
A titre subsidiaire, si le jugement rendu le 30 juillet 2020 par le tribunal judiciaire d'Epinal devait être infirmé,
Statuant à nouveau,
- de juger que la condamnation ne pourra porter intérêts au taux légal qu'à compter de l'arrêt à intervenir,
- de constater que M. Franck R. a régulièrement souscrit à l'assurance facultative proposée par la SA BNP Paribas PF exercant sous l'enseigne Cetelem,
- de condamner la SA CARDIF ARD à le relever et le garantir de la condamnation,
- de condamner solidairement la SA BNP Paribas PF et la SA CARDIF ARD à leur verser la somme de 2 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de cour d'appel,
- de condamner solidairement la SA BNP Paribas PF et la SA CARDIF ARD aux dépens de la procédure d'appel,
A titre infiniment subsidiaire, si la cour considérait que l'assurance souscrite auprès de la SA CARDIF ARD n'est pas applicable,
Statuant à nouveau,
- de juger que la condamnation ne pourra porter intérêts au taux légal qu'à compter de l'arrêt à intervenir,
- de dire et juger que les sommes dues par les époux R. ne seront exigibles que deux ans après la décision à intervenir,
- de condamner solidairement la SA BNP Paribas PF et la SA CARDIF ARD à leur verser la somme de 2 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de cour d'appel,
- de condamner solidairement la SA BNP Paribas PF et la SA CARDIF ARD aux dépens de la procédure d'appel.
Au soutien de leurs demandes, M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. font valoir en substance :
- que la déchéance du terme du contrat de prêt n'est pas acquise ; qu'aucune mise en demeure préalable à la déchéance du terme n'a été adressée à Mme Stéphanie R. et que les conditions de forme de la mise en demeure adressée à M. Franck R. ne sont pas respectées en ce qu'elle ne mentionne ni le prêt concerné ni les échéances impayées ; que les courriers notifiant la déchéance du terme aux époux R. ont été établis par la société Neuilly Contentieux avec laquelle ils n'ont aucun lien contractuel ;
- que la SA BNP Paribas PF se prévaut pour la première fois à hauteur de cour de la résolution judiciaire du contrat ; que par l'existence de la clause de déchéance du terme et la demande d'injonction de payer, la SA BNP Paribas PF a renoncé au bénéfice de la résolution judiciaire ; que l'inexécution des obligations n'est pas suffisamment grave pour justifier la résolution judiciaire du contrat ; que subsidiairement, les intérêts ne pourront courir qu'à compter de l'arrêt à intervenir ;
- que M. Franck R. bénéficie de la garantie de la SA CARDIF ARD au titre d'une incapacité temporaire de travail lui interdisant l'exercice d'une activité professionnelle et de la prise en charge des mensualités du crédit au terme de la période de franchise de 90 jours ; que l'article 9 des conditions générales du contrat prévoyant une exclusion de garantie concernant les ' atteintes disco-vertébrales et leurs conséquences n'ayant pas nécessité d'intervention chirurgicale dans les trois mois suivant le premier jour d'arrêt de travail ' n'est pas mentionnée en caractères très apparents et n'est pas valable au sens des dispositions de l'article L. 112-4 dernier alinéa du code des assurances ; que subsidiairement, l'atteinte de M. R. est d'ordre neurologique, et ne correspond pas à des troubles psychiques ou neuropsychiques exclus de la garantie ; que la clause de limitation de la prise en charge mentionnée à l'article 8 des conditions générales du contrat souscrit n'est pas valable ;
- que subsidiairement, un report de paiement à deux ans à compter de la décision à intervenir permettrait à M. R. de percevoir l'indemnisation qui lui est due après l'accident de la circulation qu'il a subi (une expertise médicale ayant été ordonnée en référé le 1er août 2018), précisant qu'il n'a pas pu reprendre son emploi, principale source de revenus du couple.
Dans ses dernières conclusions transmises le 13 septembre 2021, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la SA CARDIF ARD, intimée et appelante à titre incident, demande à la cour sur le fondement de l'ancien article 1134 devenu 1103 du code civil et de l'article L. 112-4 du code des assurances :
- d'infirmer le jugement du tribunal judicaire d'Epinal du 30 juillet 2020 en ce qu'il l'a :
* condamnée à relever et garantir M. Franck R. de sa condamnation à payer à la SA BNP Paribas PF la somme principale de 3 861,60 euros au titre des échéances échues au 31 décembre 2017 avec intérêts au taux conventionnel de 5,03% à compter du 29 décembre 2017,
* condamnée à verser aux époux R. la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
* déboutée de sa demande de condamnation des époux R. sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
* condamnée au paiement des dépens,
Et statuant à nouveau,
- A titre liminaire, de confirmer l'opposabilité à M. Franck R. des conditions générales d'assurance figurant dans la notice relative à l'assurance facultative n°118/021, dès lors que M. Franck R. a reconnu avoir reçu, pris connaissance de la notice relative au contrat d'assurance et en avoir conservé un exemplaire,
- A titre principal, sur le refus de prise en charge en raison de l'exclusion du sinistre et la validité de la clause d'exclusion :
* de déclarer valable la clause d'exclusion visée à l'article 9 de la notice relative au contrat d'assurance, au sens de l'article L.112-4 du code des assurances et applicable aux pathologies de M. Franck R.,
* de rejeter en conséquence toute demande de prise en charge à son encontre, M. Franck R. ne remplissant ni les conditions pour bénéficier d'une prise en charge au titre de la garantie « incapacité temporaire totale de travail », ni celles au titre des autres garanties prévues au contrat d'assurance,
* d'ordonner corrélativement la restitution de la somme de 7 723,20 euros qu'elle a payée au titre de la prise en charge du sinistre, au bénéfice du prêteur,
- A titre subsidiaire, de limiter conformément aux articles 6 et 8 de la notice relative au contrat d'assurance, la prise en charge du sinistre de M. Franck R. à 12 remboursements mensuels, lesquels ne peuvent être réglés qu'au prêteur,
- En tout état de cause,
* de condamner la ou les partie(s) qui succombe(nt) à lui payer la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au stade de l'appel, en sus de la somme de 1500 euros, en application du même article, en première instance,
* de condamner la ou les partie(s) qui succombe(nt) aux entiers dépens, au stade de l'appel, en sus des dépens de première instance.
Au soutien de ses demandes, la SA CARDIF ARD fait valoir en substance :
- que suite au jugement du 30 juillet 2020, elle a procédé au règlement de la somme de 7 723,20 euros au profit de la SA BNP Paribas PF, correspondant à douze échéances mensuelles ;
- que la signature de M. R. au bas de la mention précisant qu'il reconnaît rester en possession d'un exemplaire des conditions générales établit la remise effective de la notice comportant les conditions générales et leur opposabilité ;
- que M. R., souffrant d'un déficit moteur rapporté à des hernies discales, apparu dans les suites de l'accident la circulation automobile du 8 décembre 2016, ne justifie pas avoir subi d'intervention chirurgicale au cours des trois mois suivant le 1er jour de son arrêt de travail le 9 mars 2017, selon rapport d'expertise médicale du 12 février 2018, de sorte que le sinistre relève de la clause d'exclusion de garantie en cas d'atteintes disco-vertébrales ; que l'affection neurologique dont il se prévaut désormais est apparue en 2019, soit postérieurement à sa déclaration de sinistre du 16 novembre 2017, et que les troubles psychiques et neuropsychiques sont également exclus de garantie ; que la clause d'exclusion expressément dénommée ' article 9 - Exclusions ' figurant en caractères gras et dans un paragraphe distinct, qui n'utilise ni la même police ni la même mise en page que le reste des clauses, est parfaitement apparente tant par son positionnement dans le texte de la notice, que par les caractères utilisés ;
- que la prise en charge ne peut en tout état de cause excéder 12 remboursements mensuels, conformément à l'article 8 ' limitation des garanties ' de la notice pour la garantie incapacité temporaire totale de travail, et qu'aux termes de l'article 6 ' garantie incapacité temporaire totale de travail ', les règlements au titre d'une prise en charge sont directement effectués au bénéfice de l'organisme prêteur ; qu'elle s'est acquittée du règlement de cette prise en charge.
***
La clôture de l'instruction a été prononcée le 29 septembre 2021.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur l'acquisition de la clause résolutoire
* sur la mise en demeure préalable à la déchéance du terme
Il résulte des dispositions combinées des articles 1134, 1147 et 1184 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, que, si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme , celle-ci ne peut être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, et précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle. Toutefois, il peut être dérogé à l'exigence d'une mise en demeure par une disposition expresse et non équivoque du contrat, dès lors que le consommateur est ainsi informé des conséquences de la méconnaissance de ses obligations.
En l'espèce, conformément au contrat de prêt, Cetelem a adressé le 11 novembre 2017 à M. Franck R. une mise en demeure préalable stipulée comme suit : ' votre dossier présente à ce jour un retard de 3 320,96 euros qui n'a pas été régularisé malgré nos relances. Dans ces conditions, nous nous voyons dans l'obligation par la présente lettre de vous mettre en demeure d'avoir à nous régler la somme susvisée dans un délai de 10 jours à compter de la réception de la présente lettre. Sans règlement de cette somme, nous prononcerons la déchéance du terme, conformément aux dispositions contenues dans votre contrat de prêt. '
Aussi, il y a lieu de constater que cette mise en demeure indique expressément le montant des impayés à régulariser dans un délai précis, ainsi que la sanction encourue à défaut.
Au surplus, il est indiqué dans ce courrier qui reprend le numéro de dossier concerné et les identifiants de M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. que Cetelem est une marque de la SA BNP Paribas PF.
Dans ces conditions, M. Franck R. ne peut utilement se prévaloir de l'irrégularité de la mise en demeure préalable à la déchéance du terme.
Pour autant, il y a lieu de constater que la SA BNP Paribas PF ne justifie pas d'une mise en demeure préalable adressée à Mme Sandrine R., coemprunteuse, de sorte que le prêteur ne peut valablement opposer à Mme Sandrine R. l'acquisition de la clause résolutoire.
En effet, l'article 1305-5 du code civil dispose que la déchéance du terme encourue par un débiteur est inopposable à ses coobligés, même solidaires, et à ses cautions.
S'agissant d'une règle qui n'est pas d'ordre public, le contrat peut prévoir une clause contraire.
En l'espèce, il y a lieu de constater que le contrat ne prévoit pas de clause d'opposabilité aux coobligés solidaires de la mise en demeure adressée à l'un d'entre eux.
Aussi, la déchéance du terme du prêt par acquisition de la clause résolutoire ne saurait être opposable à Mme Sandrine R..
* sur la notification de la déchéance du terme
Il résulte des dispositions combinées des articles 1134 et 1184 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, que, lorsqu'une mise demeure, adressée par la banque à l'emprunteur et précisant qu'en l'absence de reprise du paiement des échéances dans un certain délai la déchéance du terme serait prononcée, est demeurée sans effet, la déchéance du terme est acquise à l'expiration de ce délai sans obligation pour la banque de procéder à sa notification.
Au surplus, en vertu des dispositions combinées des articles 1984 et 1998 du code civil, les irrégularités affectant la représentation conventionnelle d'une partie, qu'elles tiennent en une nullité du mandat, un dépassement ou une absence de pouvoir, sont sanctionnées par la nullité relative de l'acte accompli pour le compte de la partie représentée, qui seule peut la demander.
En l'espèce, il y a lieu de constater que les emprunteurs ne se sont pas acquittés des mensualités impayées dans le délai imparti à la lettre de mise en demeure préalable à la déchéance du terme.
En outre, le courrier adressé par Neuilly Contentieux le 21 décembre 2017 mentionne le numéro de dossier concerné ainsi que le prêteur (la SA BNP Paribas PF).
Aussi, la déchéance du terme est acquise à l'encontre de M. Franck R., sans qu'il puisse utilement se prévaloir de l'irrégularité de la lettre de notification adressée par Neuilly Contentieux.
Sur le prononcé de la résolution du contrat de prêt
L'article 564 du code de procédure civile prohibe les demandes nouvelles présentées à l'occasion d'une instance d'appel, sauf si elles tendent à opposer la compensation, à faire écarter les prétentions adverses ou à faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
Les articles 565 et 566 du même code amoindrissent la rigueur du principe en disposant, pour le premier de ces textes, que les demandes ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent et, pour le second, que les parties peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
En l'espèce, la SA BNP Paribas PF a saisi le juge de première instance afin de voir condamner M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. à lui payer les sommes exigibles par acquisition de la clause résolutoire au titre du contrat de prêt consenti le 23 mai 2016.
De même, la demande nouvelle tendant à voir prononcer la résiliation judiciaire du contrat de prêt vise à obtenir le remboursement des sommes impayées par M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. en vertu du contrat de prêt.
En effet, il y a lieu de préciser que lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l'exécution réciproque du contrat, la résolution est qualifiée de résiliation.
Dans ces conditions, ces demandes tendent aux mêmes fins, de sorte que la demande nouvelle en résiliation de la relation contractuelle doit être déclarée recevable.
Par ailleurs, la clause résolutoire figurant au contrat demeurant une faculté que se réserve le prêteur, sous certaines conditions, de prononcer l'exigibilité des sommes dues sans recours préalable au juge, elle ne saurait lui interdire d'avoir recours au juge afin de voir prononcer la résiliation judiciaire du contrat sur le fondement des dispositions de l'article 1184 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016.
En l'espèce, il y a lieu de constater que Mme Sandrine R. ne s'est pas acquittée des échéances du prêt consenti par la SA BNP Paribas PF depuis le mois de juin 2017, et que les remboursements prévus sur 72 mois n'ont été honorés que pendant onze mois.
Dans ces conditions, le défaut de remboursement de la somme prêtée à hauteur de 38 500 euros caractérise une inexécution d'une particulière gravité qui justifie que soit prononcée la résiliation du contrat à l'égard de Mme Sandrine R..
Sur le montant de la créance
L'article L. 312-39 du code de la consommation dispose qu'en ' cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu'à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l'emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l'application de l'article 1231-5 du code civil, est fixée suivant un barème déterminé par décret '.
En l'espèce, il ressort du contrat de prêt, de l'historique de compte ainsi que du décompte de créance et du courrier de mise en demeure de payer valant déchéance du terme, que M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. restent redevables au 31 décembre 2017 de la somme de 29 109,97 euros.
En outre, s'il résulte de l'article 1153, alinéa 3, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, que les intérêts au taux légal d'une somme dont le remboursement a été ordonné en conséquence de la résolution du contrat en application duquel elle avait été versée, ont pour point de départ le jour de la demande en justice, équivalant à la sommation de payer, en revanche, le caractère solidaire de la créance détermine un unique point de départ des intérêts à la date la plus favorable au créancier.
Ainsi, les sommes dues produiront des intérêts de retard au taux légal à compter du 16 août 2018, date de signification de l'ordonnance d'injonction de payer, conformément aux demandes du prêteur.
Dans ces conditions, le montant de l'indemnité de 8% n'apparaît pas manifestement excessif au regard du préjudice causé au prêteur par la défaillance des emprunteurs.
Dès lors, M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. sont solidairement redevables de la somme de 29 109,97 euros, qui sera augmentée des intérêts au taux légal à compter du 16 août 2018.
Par conséquent, il convient d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné solidairement M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. à verser à la SA BNP Paribas PF la somme principale de 3 861,60 euros, au titre des échéances échues au 31 décembre 2017, avec intérêts au taux conventionnel de 5,03 % à compter du 29 décembre 2017. »
Sur la garantie de l'assurance facultative
sur la clause d'exclusion (article 9 des conditions générales)
Au préalable, il y a lieu de constater que M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. ne soutiennent pas que la notice du contrat d'assurance comportant les conditions générales n'a pas été portée à leur connaissance.
En effet, M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. se prévalent des dispositions de l'article L. 112-4 du code des assurances pour soutenir que les clauses d'exclusion, et par suite de limitation de prise en charge, ne leur sont pas opposables.
L'article L. 112-4 dernier alinéa du code des assurances dispose que les clauses des polices édictant des nullités, des déchéances ou des exclusions ne sont valables que si elles sont mentionnées en caractères très apparents.
Aussi, la clause doit figurer en caractères très apparents de manière à attirer spécialement l'attention de l'assuré sur la nullité qu'elle édicte.
En l'espèce, il y a lieu de constater que la clause d'exclusion figure dans un paragraphe distinct (article 9), dont l'intitulé ' exclusions ' est placé entre deux sauts de ligne, permettant ainsi d'attirer l'attention de l'assuré.
En outre, cet article indique expressément que ' les conditions d'indemnisation s'appliquent (....)à l'exclusion des cas suivants et leurs suites, conséquences, rechutes et récidives : (...) En outre, pour la garantie ' Incapacité Temporaire Totale de Travail ' : des atteintes disco-vertébrales et leurs conséquences n'ayant pas nécessité d'intervention chirurgicale dans les trois mois suivant le premier jour d'arrêt de travail'.
Ainsi, il en résulte que la clause d'exclusion figurant en caractères très apparents est valable et opposable à M. Franck R..
Pour le surplus, il y a lieu de préciser que les dispositions de l'article L. 112-4 du code des assurances ne sont pas applicables à la clause de limitation des garanties contractuelles accordées.
Sur le fond, il ressort des certificats médicaux, et plus particulièrement du rapport d'expertise du 12 février 2018 versé aux débats, que les hernies discales sont apparues suite à l'accident automobile survenu le 8 décembre 2016, responsable d'un traumatisme cervical, et qu'il s'est installé progressivement un déficit moteur neurologique du membre supérieur droit, nécessitant un traitement antalgique et de la douleur neuropathique avec rééducation, qui n'a pas posé d'indication chirurgicale.
Aussi, il est établi que M. Franck R. a présenté des atteintes disco-cérébrales qui n'ont donné lieu à aucune intervention chirurgicale.
Par suite, il en résulte que la garantie du sinistre de la SA CARDIF ARD est exclue par application des dispositions de l'article 9 des conditions générales figurant à la notice d'assurance.
Au surplus, il y a lieu de constater que le déficit moteur neurologique qui s'est installé progressivement après la déclaration du sinistre est une conséquence des atteintes disco-vertébrales causées par l'accident, soumise à la même clause d'exclusion.
Dans ces conditions, le sinistre déclaré par M. Franck R. est exclu de la garantie souscrite auprès de la SA CARDIF ARD.
Dès lors, le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a condamné la SA CARDIF ARD à relever et garantir M. Franck R. de sa condamnation.
Pour le surplus, le remboursement par la SA BNP Paribas PF de la somme de 7 723,20 euros, versée par la SA CARDIF ARD en exécution du jugement déféré, ressort de son infirmation sans qu'il soit nécessaire et justifié de prononcer une condamnation à ce titre.
Sur les délais de paiement
Il ressort de l'article 1343-5 du code civil que le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.
En l'espèce, M. Franck R. fait état de ce qu'il n'a pas repris son travail depuis l'accident, son salaire étant la principale ressource du couple, et qu'il reste dans l'attente d'une indemnisation suite à l'expertise médicale ordonnée en référé le 1er août 2018.
Toutefois, il ne justifie pas de la situation financière actuelle du couple au soutien de sa demande, ni
des démarches entreprises depuis l'ordonnance du juge des référés du 1er août 2018 ayant ordonné une expertise médicale.
Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter la demande de délais de paiement présentée par M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R..
Sur les demandes accessoires
Le jugement critiqué sera infirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.
M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. qui succombent à hauteur de cour seront condamnés in solidum au paiement des dépens de première instance et d'appel, comprenant le coût de la procédure d'injonction de payer, et seront déboutés de leur demande au titre des frais irrépétibles exposés.
Eu égard à la situation respective de parties, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et à hauteur de cour.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
INFIRME partiellement le jugement déféré et, statuant à nouveau,
CONDAMNE solidairement M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. à payer à la SA BNP Paribas PF la somme de 29 109,97 euros, qui sera augmentée des intérêts au taux légal à compter du 16 août 2018,
DEBOUTE M. Franck R. de sa demande de garantie par la SA CARDIF ARD au titre de l'assurance souscrite,
DEBOUTE M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. de leur demande de délais de paiement,
DEBOUTE M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles engagés en première instance,
CONDAMNE M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. in solidum aux dépens de première instance,
CONFIRME le jugement déféré pour le surplus en ses dispositions relatives à la mise à néant de l'ordonnance d'injonction de payer rendue par le juge du tribunal d'instance d'Epinal le 24 juillet 2018 suite à la recevabilité de l'opposition,
Y ajoutant,
DEBOUTE M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles engagés à hauteur de cour,
CONDAMNE M. Franck R. et Mme Sandrine M. née R. in solidum aux dépens d'appel comprenant le coût de la procédure d'injonction de payer, et autorise Maître P., avocat, à faire application de l'article 699 du code de procédure civile.