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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 8, 19 octobre 2021, n° 19/14402

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Enthalpia Sud Ouest (SAS), Axinvest (SAS), Menway Holding (SAS), Hominis (SAS), Schloss Butzow Investitions (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Hébert-Pageot

Conseillers :

Mme Texier, Mme Dubois-Stevant

T. com. Paris, du 31 mai 2019, n° 201802…

31 mai 2019

FAITS ET PROCÉDURE :

La SAS Hominis, présidée par M. P. et ayant pour actionnaires M. B. et les sociétés Axinvest et Ernz Blanche, détenait directement ou indirectement 15 filiales spécialisées dans les ressources humaines et le travail temporaire, parmi lesquelles la SAS Enthalpia Sud Ouest, dont M. B. était le président et actionnaire minoritaire.

Le 11 décembre 2006, MM. P. et B. et les sociétés Axinvest et Ernz Blanche ont conclu avec le fonds d'investissement MBO Capital II, représentée par sa société de gestion MBO Partenaires, un « protocole d'acquisition du groupe Hominis »

prévoyant notamment que la participation de la société Hominis dans le capital de ses filiales soit portée à au moins 95 %.

C'est dans ce contexte que, le 8 décembre 2006, M. B., de première part, MM. B. et P., de deuxième part, et la société Hominis, de troisième part, ont signé un « protocole d'accord Enthalpia Sud Ouest » stipulant la cession par M. B. à la société Hominis de 230 actions d'Enthalpia Sud Ouest sur les 305 qu'il détenait moyennant le prix de 256 371 euros ainsi que la signature d'un pacte d'actionnaires.

Le transfert de propriété des 230 actions est intervenu et un « pacte minoritaire Enthalpia Sud Ouest » a été signé le 19 janvier 2007.

Parallèlement, en exécution du « protocole d'acquisition du groupe Hominis », la société nouvellement créée People Business Développement, détenue par le fonds MBO Capital II, M. B. et la société Axinvest, est devenue l'unique actionnaire de la société Hominis.

L'assemblée générale des actionnaires de la société Enthalpia Sud Ouest des 25 février 2010 et 14 décembre 2012 a décidé, respectivement, la révocation du mandat de président de M. B. et, en application de l'article 15 des statuts, son exclusion en tant qu'actionnaire.

Diverses procédures ont été engagées par M. B. à l'encontre d'actionnaires ou de sociétés du groupe Hominis et par ces derniers à l'encontre de M. B. et/ou des sociétés Phenix Invest et Realis RH, détenues, directement ou indirectement, par M. B..

A la suite de transmissions universelles de patrimoine et de la cession des actions de la société Phenix Invest par M. B. à la société Schloss Bützow Investitions AG le 16 décembre 2014, cette dernière est venue aux droits des sociétés Phenix Invest, Realis RH et Realis RH Aquitaine.

Les 10 janvier, 1er février et 9 mars 2017, un « protocole transactionnel et de cession d'actions » a été signé entre, de première part, les sociétés Hominis, Enthalpia Sud Ouest, People Business Développement, Axinvest et Compagnie financière de l'Ernz Blanche et M. P. (ces trois derniers détenant désormais la totalité du capital de People Business Développement), de deuxième part, M. B., de troisième part, la société Schloss Bützow Investitions AG et, de quatrième part, la société MBO Partenaires (pour le compte de MBO Capital II).

Cette transaction prévoyait notamment des désistements d'instance et d'action et la cession à la société Hominis, par M. B., de 75 actions de la société Enthalpia Sud-Ouest pour un prix de 148 964,06 euros.

En 2017, les sociétés People Business Développement et Hominis ont fusionné, par voie d'absorption de la seconde, et la première a changé de dénomination pour devenir la société Menway Holding.

Les 30 janvier, 8 février, 9 février et 16 février 2018, M. B. a assigné MBO capital II, les sociétés Schloss Bützow Investitions AG, Compagnie financière de l'Ernz Blanche, Hominis, Enthalpia Sud Ouest, Axinvest et Menway Holding, anciennement People Business Développement, ainsi que M. P. en nullité de la transaction pour erreur de droit, absence de contrepartie et défaut d'exécution.

M. P. et les sociétés Enthalpia Sud Ouest, Compagnie financière de l'Ernz Blanche et Menway Holding ont formé des demandes reconventionnelles en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Par jugement du 31 mai 2019, le tribunal de commerce de Paris a débouté M. B. de toutes ses demandes, l'a condamné à payer à M. P. et aux sociétés Enthalpia Sud Ouest, Compagnie financière de l'Ernz Blanche et Menway Holding la somme de 5 000 euros (chacun) en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens et a débouté les parties de leurs autres demandes.

M. B. a relevé appel de ce jugement, selon déclaration du 12 juillet 2019.

Par conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 12 avril 2021, M. B. demande à la cour d'infirmer le jugement, statuant à nouveau, d'annuler le protocole transactionnel pour erreur de droit, absence de contrepartie et non-exécution et de condamner solidairement les « défendeurs » au paiement de la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Dans ses conclusions n° 2 déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 7 mai 2021, la société MBO Capital II demande à la cour de confirmer le jugement et de condamner M. B. à lui payer les sommes de 15 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et de 20 000 euros de dommages et intérêts pour appel abusif ainsi qu'aux dépens, dont distraction au profit de Me Bertrand M., avocat.

Suivant conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 22 novembre 2019, M. P. et les sociétés Menway Holding (anciennement People Business Développement), Enthalpia Sud Ouest, Compagnie financière de l'Ernz Blanche et Axinvest demandent à la cour de'confirmer le jugement, de débouter M. B. de l'intégralité de ses prétentions, de condamner ce dernier à verser à M. P. et aux sociétés Enthalpia Sud Ouest, Menway Holding et Compagnie financière de l'Ernz Blanche, chacun, d'une part, 10 000 euros de dommages et intérêts et, d'autre part, 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

La SAS Hominis, à laquelle la déclaration d'appel a été signifiée le 8 novembre 2019 par remise de l'acte à étude d'huissier, n'a pas constitué avocat.

La société de droit autrichien Schloss Bützow Investitions AG, à laquelle la déclaration d'appel a été notifiée le 7 novembre 2019 selon les modalités prévues par le règlement (CE) n° 1393/2007 du Parlement et du Conseil du 13 novembre 2007, n'a pas constitué avocat.

Les parties ont été invitées à s'expliquer par note en délibéré sur la conséquence tirée par M. B. de l'inexécution alléguée du protocole transactionnel, à savoir la nullité, et non la résolution, de ce contrat et à produire la délibération de l'assemblée des actionnaires de la société Enthalpia Sud Ouest ayant décidé l'exclusion de M. B. en tant qu'actionnaire.

Par envoi du 26 mai 2021, M. P. et les sociétés Menway Holding, Enthalpia Sud Ouest, Compagnie financière de l'Ernz Blanche et Axinvest ont transmis à la cour le procès-verbal de l'assemblée générale du 25 février 2010 ayant décidé la révocation de son mandat de président de la société Enthalpia Sud Ouest.

SUR CE

,

Sur la nullité de la transaction

M. B. conclut à la nullité de la transaction pour « triple » erreur de droit, déséquilibre de celle-ci et inexécution.

- La nullité pour « triple » erreur de droit

L'article 1132 du code civil dispose que « l'erreur de droit ou de fait, à moins qu'elle ne soit inexcusable, est une cause de nullité du contrat lorsqu'elle porte sur les qualités essentielles de la prestation due ou celles du cocontractant ».

Les trois erreurs de droit invoquées par M. B. seront examinées successivement ci-après.

L'absence de plainte pénale et la prescription

La transaction mentionne :

- dans son exposé introductif, que « la société Enthalpia Sud Ouest et la société Hominis ont déposé plainte à l'encontre de M. B., procédure dans laquelle M. B. a été entendu et qui a fait l'objet d'un classement sans suite par le parquet » ;

- en son article 3, qu'« elles [les sociétés du groupe Hominis] renoncent en tout état de cause au bénéfice de la plainte pénale ci-dessus visée et renoncent à toutes actions de quelque nature que ce soit trouvant sa cause ou son origine dans tous faits ou actes de M. B., directement ou indirectement, tant en son nom propre qu'en tant que dirigeant de fait ou de droit de la société Enthalpia Sud Ouest ou de toute autre société, antérieur aux présentes ».

Ces stipulations se réfèrent à la plainte adressée le 9 novembre 2010 par la société Enthalpia Sud Ouest au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Toulouse dénonçant des faits constitutifs d'abus de bien sociaux commis par M. B. tenant au remboursement de dépenses à caractère personnel exposées en 2008 et 2009 (pièce 6 Menway Holding et autres).

Cette plainte a été classée sans suite le 18 mars 2014 au motif que l'infraction n'était pas suffisamment caractérisée, classement dont la société Enthalpia Sud Ouest a été informée par avis du 4 juin 2015 (pièce 8 Menway Holding et autres).

M. B. soutient avoir cru que l'action pénale pouvait encore prospérer alors, selon lui, qu'après le classement de la plainte par le parquet, celle-ci était inexistante et prescrite, faute pour les sociétés Enthalpia Sud Ouest et Hominis d'avoir initié une quelconque action.

Le 21 décembre 2016, la société Enthalpia Sud Ouest a déposé une plainte avec constitution de partie civile auprès du doyen des juges d'instruction du tribunal de grande instance de Metz du chef d'abus de biens sociaux à raison des faits mentionnés ci-avant (pièce 8 Menway Holding et autres).

Par ordonnances des 9 janvier et 6 mars 2017, le doyen des juges d'instruction a, respectivement, fixé à 2 000 euros la consignation en impartissant à la société Enthalpia Sud Ouest un délai expirant le 9 février 2017 pour verser cette somme et, après avoir constaté l'absence de consignation, déclaré irrecevable la plainte avec constitution de partie civile (pièces 9 et 11 Menway Holding et autres).

Ainsi, une plainte avec constitution de partie civile avait bien été déposée, et n'avait pas encore été déclarée irrecevable, aux dates auxquelles M. B. et la société Schloss Bützow Investitions AG ont signé la transaction, à savoir, respectivement, les 10 janvier et 1er février 2017.

Ensuite, aucun élément du dossier ne permet d'infirmer l'allégation de la société Enthalpia Sud Ouest selon laquelle c'est en considération de la signature de la transaction par M. B. et la société Schloss Bützow Investitions AG que le choix a été fait de ne pas verser la consignation, étant observé que les signatures restant à obtenir au jour de l'expiration du délai de consignation étaient celles des sociétés ou actionnaires, actuels ou anciens, du groupe Hominis, dont les intérêts étaient convergents.

Enfin, M. B. ne présente aucune argumentation au soutien de son affirmation selon laquelle les faits objets de la plainte étaient prescrits.

L'erreur invoquée n'est donc pas caractérisée.

La qualité d'actionnaire de M. B.

L'article 15 du protocole transactionnel prévoit que M. B. cède à la société Hominis les 75 actions de la société Enthalpia Sud Ouest qu'il détient pour un prix de 148 964,06 euros.

M. B. soutient qu'il a signé la transation en pensant être encore actionnaire minoritaire, détenant 5 % du capital de la société Enthalpia Sud Ouest, alors qu'à la suite de son exclusion, il n'était plus actionnaire mais seulement titulaire d'une créance que la société Enthalpia Sud Ouest ne pouvait refuser de lui payer, le litige ne portant plus que sur le montant de celle-ci.

L'article L. 227-16 du code de commerce, applicable aux sociétés par actions simplifiées, énonce :

« Dans les conditions qu'ils déterminent, les statuts peuvent prévoir qu'un associé peut être tenu de céder ses actions. / Ils peuvent également prévoir la suspension des droits non pécuniaires de cet associé tant que celui-ci n'a pas procédé à cette cession. »

Il se déduit de ces dispositions que la décision d'exclusion n'opère pas transfert de propriété des actions de l'actionnaire concerné.

Au demeurant, il résulte également de l'article 15 des statuts de la société Enthalpia Sud Ouest, qui prévoit que « l'actionnaire exclu doit céder la totalité de ses actions dans le délai de 60 jours à compter de l'exclusion aux autres actionnaires au prorata de leur participation au capital » à un prix fixé d'un commun accord entre les parties et, à défaut, dans les conditions prévues à l'article 1843-4 du code civil, que la décision d'exclusion n'emporte pas perte de la qualité d'actionnaire.

C'est donc à juste titre que les intimés arguent qu'à la date de signature de la transaction, la valeur de ses droits sociaux ne lui ayant pas été remboursée, M. B. était encore actionnaire de la société Enthalpia Sud Ouest.

L'erreur de droit alléguée n'est donc pas établie.

L'impossibilité de disposer des actions

Invoquant les dispositions de l'article 2045 du code civil, M. B. fait valoir qu'ayant la qualité de créancier de la société Enthalpia Sud Ouest, et non plus celle de propriétaire de 75 actions de cette dernière, il ne pouvait disposer de ces actions.

Comme il a été dit, M. B. était toujours propriétaire des 75 actions dont la cession était prévue par le protocole. C'est donc vainement qu'il prétend qu'en prévoyant la cession de ces actions, le protocole transactionnel méconnaît l'article 2045, alinéa 1, du code civil, aux termes duquel « pour transiger, il faut avoir la capacité de disposer des objets compris dans la transaction ».

Dès lors, l'erreur de droit invoquée n'est pas caractérisée.

Il résulte des développements qui précèdent qu'il n'y a pas lieu à annulation de la transaction pour erreur de droit.

- La nullité à raison du caractère déséquilibré de la transaction

M. B. soutient que la valeur des 75 actions fixée dans le protocole transactionnel (148 964,06 euros) est « inférieure à la valeur minimale possible desdites actions » ou encore qu'ayant été exclu, « il avait droit de toute façon à une contre-valeur des actions qui était, en tout état de cause, supérieure au montant de la prétendue cession », ce dont il déduit une absence de concession de la part des « sociétés Enthalpia Sud Ouest et autres ».

La partie « discussion » des conclusions de M. B. ne comporte aucun développement tendant à étayer l'affirmation selon laquelle le prix de 148 964,06 euros est sous-évalué.

Dans la partie « faits » des mêmes écritures, M. B. évoque une valorisation de sa participation à 3 280 000 euros (soit 10 754 euros par action) correspondant à 41 % du chiffre d'affaires de la société Enthalpia Sud Ouest, pourcentage correspondant selon lui à celui retenu pour valoriser les actions de la société Hominis au moment de leur apport à la société People Business Développement, début 2007. Toutefois, une telle méthode n'est pas pertinente pour valoriser les actions de la société Enthalpia Sud Ouest, tant à l'époque (les deux sociétés n'étant pas comparables, l'une étant la holding du groupe et l'autre une filiale, la valeur de la société Hominis ayant été déterminée en considération du chiffre d'affaires mais aussi du rendement et l'apport s'inscrivant dans le cadre d'une prise de participation finale à 100 %) qu'à la date de la transaction, intervenue dix ans plus tard.

Dès lors, ainsi que le font valoir les intimés, M. B. échoue à démontrer que le prix convenu dans la transaction est sous-évalué.

De surcroît, la fixation du prix des actions ne constitue que l'un des éléments objets de la transaction.

Il s'ensuit que l'absence de concession de la part des autres parties à la transaction n'est pas établi.

- La « nullité » pour inexécution de la transaction

Au soutien de sa demande d'annulation de la transaction, M. B. invoque plusieurs inexécutions de celle-ci ainsi que les dispositions de l'article 1217 du code civil aux termes desquelles «'la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut [...] / - provoquer la résolution du contrat'».

L'inexécution constitue une cause de résolution, et non d'annulation d'un contrat.

Compte tenu du fondement textuel invoqué par M. B. et conformément au devoir de requalification incombant au juge en application de l'article 12, alinéa 2, du code de procédure civile, il conviendra, le cas échéant, de prononcer la résolution, et non pas la nullité, de la transaction.

M. B. argue que M. P. et « l'ensemble des sociétés du groupe Hominis » ne se sont pas désistés de la procédure pendante devant le tribunal de commerce de Paris, en violation de l'article 3 de la transaction, que la société Schloss Bützow Investitions, contrevenant à l'article 4, a engagé des actions à son encontre et que la société Enthalpia Sud Ouest a manqué à l'obligation de coopération stipulée à l'article 7 en refusant, dans le cadre de l'instance pendante devant le tribunal administratif de Toulouse, de « certifier et d'attester » que les dépenses objets du redressement fiscal avaient été engagées par lui dans l'intérêt de la société Enthalpia Sud Ouest.

Aux termes de l'article 7 de la transaction, intitulé « coopération », « Les sociétés du groupe Hominis, et notamment la société Enthalpia Sud Ouest s'engagent à fournir tout document qui serait nécessaire à la défense de M. B. dans le cadre de la procédure fiscale pendante devant le tribunal administratif de Toulouse à l'encontre du redressement fiscal personnel que lui a été notifié l'administration fiscale » (sic).

Outre que, comme le soulignent les intimés, M. B. ne justifie pas s'être heurté à un refus de transmission de documents de la part des sociétés du groupe Hominis postérieurement à la transaction, la coopération prévue par les stipulations précitées ne peut être comprise comme obligeant ces sociétés à formuler, dans l'intérêt de la défense de M. B., une appréciation sur la nature - professionnelle ou personnelle - des dépenses en cause, de surcroît dans un sens contraire à celle portée dans la plainte pour abus de biens sociaux déposée par la société Enthalpia Sud Ouest.

L'inexécution alléguée n'est donc pas établie.

L'article 4 de la transaction, intitulé « Désistement de la société Schloss Bützow Investitions », est ainsi libellé : « La société Schloss Bützow Investitions s'engage irrévocablement à se désister de l'intégralité de ses demandes et procédures à l'encontre de M. Jean-Louis P., des signataires des présentes et de l'ensemble des sociétés du groupe Hominis à l'encontre desquelles elle renonce définitivement à invoquer tous droits, toutes réclamations supplémentaires concernant leurs relations passées. »

Le mot « desquelles » renvoyant aux sociétés du groupe Hominis, il résulte de ces stipulations que si la Schloss Bützow Investitions s'est engagée à se désister de ses demandes et procédures à l'encontre de M. B., signataire de la transaction, sa renonciation à invoquer tous droits et réclamations supplémentaires concernant les relations passées ne vaut qu'à l'égard des sociétés du groupe Hominis.

Dès lors, il n'est pas établi que la société Schloss Bützow a contrevenu aux stipulations de la transaction en délivrant à M. B., après la signature de celle-ci, d'une part, une assignation en intervention forcée devant la cour d'appel de Bordeaux (signifiée le 13 avril 2017) tendant à faire supporter par ce dernier, en tant qu'ancien président de la société Realis RH Aquitaine et sur le fondement de l'article L. 223-22 du code de commerce, la somme réclamée par la Banque Courtois en remboursement d'un prêt consenti à cette société et, d'autre part, une assignation devant le tribunal de commerce de Paris (signifiée le 18 avril 2017) en annulation ou, à défaut, résolution de la cession des actions de la société Phenix Invest.

Ainsi, l'inexécution invoquée n'est pas caractérisée.

L'article 3 de la transaction, intitulé « désistement de M. Jean-Louis P., de la société Enthalpia Sud Ouest, de la société Axinvest, de la compagnie financière de l'Ernst blanche et de la société People Business Développement » prévoit, en son premier paragraphe :

« M. Jean-Louis P. et l'ensemble des sociétés du groupe Hominis s'engagent irrévocablement à se désister de l'intégralité de leurs demandes et procédures à l'encontre de M. Marcel B. et de la société Schloss Bützow Investitions à l'encontre desquels ils renonceront à invoquer tous droits, toutes réclamations supplémentaires concernant leurs relations passées. »

M. B. justifie que les sociétés Menway Holding (anciennement Hominis) et Enthalpia Sud Ouest ont, par conclusions adressées le 8 mars 2021, demandé la réinscription au rôle du tribunal de commerce de Paris de l'action en dommages et intérêts pour concurrence déloyale et fautes de gestion engagée contre lui le 13 mai 2013 (RG 2015/001275) puis contre la société Schloss Bützow Investitions, assignée en intervention forcée le 15 juin 2016 (RG 2016/044249), les deux instances ayant été jointes pour être poursuivies sous le numéro 2019/000152.

L'instance RG 2015/001275 est mentionnée dans l'exposé introductif de la transaction et les intimés ne contestent d'ailleurs pas qu'elle est couverte par les stipulations précitées de l'article 3, de sorte que l'inexécution des obligations prévues par cet article est établie.

Les intimés arguent du défaut de justification, par M. B., du désistement du pourvoi formé contre l'arrêt de la cour d'appel de Metz du 15 octobre 2015 et de l'absence de signature, par ce dernier, des ordres de mouvement relatifs aux actions cédées, opposant ainsi, sans expressément la qualifier comme telle, une exception d'inexécution.

L'article 1119 du code civil dispose qu'« une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave ».

Il convient de déterminer si les conditions prévues par ce texte sont remplies en l'espèce.

L'arrêt confirmatif de la cour d'appel de Metz du 15 octobre 2015, statuant sur l'appel formé par M. B. contre un jugement du 19 mars 2013 l'ayant débouté de toutes ses demandes formées contre la société Hominis et MM. B. et P., en particulier de celles tendant à voir annuler le « protocole d'accord Enthalpia Sud Ouest » et le pacte d'actionnaires, est mentionné dans l'exposé introductif de la transaction.

L'action engagée par M. B. entrait dès lors, à l'évidence, dans les prévisions de l'article 2 de la transaction aux termes duquel M. Marcel B. s'était « engag[é] irrévocablement à se désister de ses demandes et procédures à l'encontre des signataires des présentes, de M. Malik B. et de la société MBO Capital II et de toutes les sociétés du groupe Hominis à l'encontre desquels il renonce définitivement à invoquer tous droits, toutes réclamations supplémentaires concernant leurs relations passées en ses qualités d'associé, mandataire et cocontractant ».

Le pourvoi formé par M. B. contre l'arrêt du 15 octobre 2015 aurait donc dû, soit ne pas être engagé, soit, s'il avait déjà été introduit, faire l'objet d'un désistement en exécution de l'article 2 précité.

Or, les 5 courriers adressés entre le 5 juillet 2017 et le 9 janvier 2018 au conseil de M. B. sollicitant la justification du désistement du pourvoi n'ont pas été suivis d'effet et il s'infère de l'arrêt de rejet de la Cour de cassation du 13 juin 2018 (n° 16-10.730) que M. B. ne s'est pas désisté.

Par ailleurs, il résulte des affirmations, non contredites par M. B. et corroborées par les 5 courriers évoqués ci-avant réclamant la signature des ordres de mouvement, que ces documents n'ont pas été signés ou, plus précisément, selon ces courriers, « correctement signés », alors que M. B. s'est engagé à l'article 1 de la transaction, intitulé « Cession d'actions », à « régularise[r] le bordereau de mouvement de titres » correspondant aux 75 actions cédées « concomitamment » à la signature de la transaction et que la somme de 200 000 euros, incluant le prix de ces actions, due en exécution de l'article 1, avait été versée.

Les intimés sont donc fondés à soutenir que M. B. ne s'est pas conformé aux obligations qui lui incombaient en application des articles 1 et 2 de la transaction. Ces inexécutions, qui concernent les deux obligations mises à la charge de M. B. par l'accord - le désistement d'instance et la cession des 75 actions de la société Enthalpia Sud Ouest - sont suffisamment graves pour justifier le refus des sociétés Menway Holding (anciennement Hominis) et Enthalpia Sud Ouest de se désister de l'instance pendante devant le tribunal de commerce de Paris.

Il résulte des éléments qui précèdent qu'il n'y a pas lieu à résolution - et encore moins à annulation - de la transaction.

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. B. de sa demande principale.

Sur les demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive

En se bornant à indiquer qu'il « est difficile de comprendre les motivations de M. Marcel B. à l'occasion de cette procédure à l'évidence vouée à l'échec » et à faire état du « caractère manifestement abusif » de cette procédure, M. B., M. P. et les sociétés Menway Holding, Enthalpia Sud-Ouest et Compagnie financière de l'Ernz Blanche n'établissent pas en quoi l'exercice par M. B. de son droit d'agir en justice et de relever appel a dégénéré en abus.

Au soutien de sa demande de dommages et intérêts pour appel abusif, le fonds MBO Capital II fait valoir qu'il est étranger au litige, alors qu'étant partie à la transaction, M. B. ne pouvait, dans le cadre de son action en annulation et/ou résolution de cette transaction, se dispenser de l'assigner puis de l'intimer.

L'abus invoqué par les intimés n'est donc pas caractérisé.

Il s'ensuit que les demandes de dommages et intérêts doivent être rejetées.

Sur les dépens et frais irrépétibles

M. B., qui succombe, sera tenu aux dépens de première instance, le jugement étant confirmé de ce chef, et d'appel.

Il y a également lieu à confirmation des dispositions ayant condamné M. B. à payer à M. P. et aux sociétés Enthalpia Sud Ouest, Ernz Blanche et Menway Holding la somme de 5 000 euros chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile. M. B. sera en outre condamné, sur le fondement du même texte, à payer aux mêmes la somme de 2 000 euros chacun et au fonds MBO Capital II celle de 5 000 euros.

PAR CES MOTIFS

Statuant dans les limites de l'appel,

Confirme le jugement,

Rejette les demandes de dommages et intérêts formées par M. Jean-Louis P., la SA Compagnie Financière de l'Ernz Blanche, la SAS Enthalpia Sud Ouest, la SAS Menway Holding et le fonds MBO Capital II, représenté par la société de gestion MBO et Co (anciennement MBO Partenaires),

Condamne M. Marcel B. à payer, en application de l'article 700 du code de procédure civile, à M. Jean-Louis P., à la SA Compagnie Financière de l'Ernz Blanche, à la SAS Enthalpia Sud Ouest et à la SAS Menway Holding la somme de 2 000 euros chacun, soit un total de 8 000 euros, et au fonds MBO Capital II, représenté par la société de gestion MBO et Co (anciennement MBO Partenaires), celle de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par ces derniers à hauteur d'appel,

Condamne M. Marcel B. aux dépens d'appel, qui pourront, pour ceux qui le concernent, être recouvrés par Me Bertrand M. conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.