CA Versailles, 1re ch. sect. 1, 7 janvier 2016, n° 13/09456
VERSAILLES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
L'OFFICINE D'ECRIVAIN (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme BLUM
Conseillers :
Mme LELIEVRE, M PONSOT
Vule jugement du tribunal de grande instance de Nanterre du 7 novembre2013ayant, notamment :
- dit que la clause 6 insérée aux contrats d'édition signée entre Mme R. et la société l'Officine d'Ecrivain est nulle,
- dit que doit être substituée à cette clause une rémunération proportionnelle à hauteur de 15% TTC du produit net des ventes hors taxes réalisées, jusqu'au 500ème exemplaire,
- condamné la société l'Officine d'Ecrivain à payer à Mme R. la somme de 1.241,25 euros en réparation du préjudice causé, pour l'ensemble des ventes déjà réalisées telles qu'arrêtées ci-après:
-'Oiseaux des marais', 395 exemplaires,
-'La grenouille et l'oiseau', 222 exemplaires,
-'Une vie de chien... heureux', 124 exemplaires,
- condamné la société l'Officine d'Ecrivain à payer à Mme R. la somme de 1.000 euros en réparation du préjudice causé par la perte des dessins et clichés originaux, outre 2.000 euros en réparation du préjudice causé par les manquements de l'éditeur à ses obligations contractuelles,
- prononcé la résiliation des trois contrats d'édition signés entre les parties,
- fait interdiction à la société l'Officine d'Ecrivain de diffuser les ouvrages défectueux du livre 'Oiseaux des marais', sous astreinte de 1.000 euros par infraction constatée après signification du jugement,
- condamné la société l'Officine d'Ecrivain à payer à Mme R. la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté la demande d'exécution provisoire ;
Vu la déclaration du 24 décembre 2013 par laquelle la SARL l'Officine d'Ecrivain a formé à l'encontre de cette décision un appel de portée générale ;
Vu les dernières conclusions signifiées le 29 septembre 2015, aux termes desquelles la SARL l'Officine d'Ecrivain demande à la cour de :
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a estimé que la disposition afférente à la perception des droits d'auteur était entachée de nullité, alors :
- que le législateur n'a sanctionné que les conventions ayant pour effet de transférer le risque éditorial sur la personne de l'auteur, tandis qu'en l'espèce, c'est bien l'éditeur qui a assumé les aléas inhérents à l'édition,
- que c'est à tort que les premiers juges ont prononcé la résiliation des conventions intervenues entre les parties puisqu'ils n'ont pas pris en considération l'ensemble des mesures développées par l'appelante dans le cadre de sa mission d'éditeur, se cantonnant aux seuls scores réalisés, ce faisant ils ont transformé une obligation de moyen en obligation de résultat,
- que l'articulation des considérants laisse à penser que le délai subi pour retirer le premier des trois titres serait imputable à l'éditeur, alors que tout a été mis en œuvre pour assurer une continuité d'exploitation de l'ensemble des oeuvres publiées,
- rapporter la mesure d'astreinte ordonnée, dès lors qu'elle se trouve dépourvue de fondement et de cause, le tirage défectueux ayant fait l'objet d'un retour à l'imprimerie avec destruction ; en tout état de cause, ordonner la restitution par Mme R. des exemplaires qu'elle a indûment conservés,
- sur la réparation du préjudice causé par 'les manquements aux obligations contractuelles', si une telle qualification venait à être maintenue, ramener le quantum à un niveau proportionné à l'économie des opérations ayant lié les parties,
- statuer ce que de droit quant aux dépens ;
Vu les dernières conclusions signifiées le 8 octobre 2015, aux termes desquelles Mme Raynaldine R. demande à la cour de :
- confirmer que la clause 6 stipulée dans les contrats d'édition conclus entre elle et la société l'Officine d'Ecrivain (Publicecriprint) les :
12 septembre 2007 pour le livre 'Oiseaux des Marais',
10 octobre 2008 pour le livre 'La grenouille et l'oiseau',
11 janvier 2010 pour le livre 'Une vie de chien...heureux'
est contraire aux dispositions des articles L132-5, L131-4 et L331-1-3 du code la propriété intellectuelle,
- en conséquence, infirmer le jugement en ce qu'il a fait application du taux contractuel, et statuant à nouveau faire application d'office d'une redevance indemnitaire de 30% au titre de la clause de rémunération,
- condamner la société l'Officine d'Ecrivain (Publicecriprint) SARL à payer à Mme R. la somme de 1.185,00 euros à ce titre pour le livre 'Oiseaux des marais' quitte à parfaire,
- condamner la société l'Officine d'Ecrivain (Publicecriprint) SARL à payer à Mme R. la somme de 832,50 euros à ce titre pour le livre 'La grenouille et l'oiseau' quitte à parfaire,
- condamner la société l'Officine d'Ecrivain (Publicecriprint) SARL à payer à Mme R. la somme de 465,00 euros à ce titre pour le livre 'Une vie de chien...heureux' quitte à parfaire,
- dire que ce taux sera applicable jusqu'au 500ème exemplaire vendu et que les condamnations seront assorties des intérêts à compter du 22 décembre 2011 date de l'assignation,
- subsidiairement, condamner la société l'Officine d'Ecrivain (Publicecriprint) SARL à payer à Mme R. la somme de 2.500,00 euros à raison de la nullité de la clause n°6,
- dire et juger que la société l'Officine d'Ecrivain (Publicecriprint) SARL n'a pas restitué les originaux des dessins de Mme R.,
- en conséquence, condamner la société l'Officine d'Ecrivain (Publicecriprint) SARL à payer à Mme R. les sommes de :
- 3.200 euros pour les 16 dessins,
- 300 euros pour la perte des six photographies,
- 150 euros pour la perte du livret maquette du livre 'Une vie de chien ....heureux';
- 500 euros au titre du préjudice moral,
-dire et juger que la société l'Officine d'Ecrivain (Publicecriprint) SARL a manqué à ses obligations contractuelles et a exécuté de façon défectueuse et partielle les trois contrats d'édition du 12 septembre 2007 pour le livre 'Oiseaux de Marais', le contrat du 10 octobre 2008 pour le livre 'La grenouille et l'oiseau', le contrat du 11 janvier 2010 pour le livre 'Une vie de chien...heureux',
- dire que la société l'Officine d'Ecrivain (Publicecriprint) SARL a manqué à ses obligations contractuelles suivantes :
- manquement à son obligation de diffusion des livres (article 7 des trois conventions d'édition),
- manquement à l'obligation de reddition des comptes (article 11 des trois conventions d'édition),
- manquement à l'obligation d'impression (article 5 du contrat du 12 septembre 2007),
- dire que la créance de la société Editions de l'Officine pour un montant de 81,21 euros n'est pas due,
- ordonner la compensation de la créance de la société Editions de l'Officine à hauteur de 81,21 euros avec la créance à intervenir de Mme R.,
- en réparation du préjudice subi, condamner en conséquence la société l'Officine d'Ecrivain (Publicecriprint) SARL à verser à Mme R. la somme global de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l'exécution défectueuse du contrat,
- dire que le retirage du livre 'Oiseaux des Marais' est défectueux,
- ordonner l'interdiction de sa diffusion à la société l'Officine d'Ecrivain (Publicecriprint) SARL sous astreinte de 1000,00 euros par infraction à compter de la notification du jugement à intervenir,
- dire que les éditions des livres 'Oiseaux des Marais', 'La grenouille et l'oiseau' sont épuisées à compter du 29 juillet 2012 et au plus tard du 29 octobre 2012,
- prononcer la résiliation judiciaire de plein droit du contrat d'édition relatif au livre 'Oiseaux des Marais' et 'La grenouille et l'oiseau' à compter du 29 octobre 2012,
- subsidiairement et en tout état de cause, prononcer la résiliation judiciaire des trois contrats d'édition l'Officine d'Ecrivain (Publicecriprint) SARL aux torts de la société pour défaut d'exécution à compter de la date de l'assignation,
- condamner la société l'Officine d'Ecrivain (Publicecriprint) SARL à lui verser la somme de 10.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société l'Officine d'Ecrivain (Publicecriprint) SARL en tous les dépens, dont distraction ;
Considérant que Raynaldine R. est illustratrice de livre pour enfant ; qu'elle a signé avec la société l'Officine d'Ecrivain trois contrats les 12 septembre 2007, 15 octobre 2008 et 11 janvier 2010 afin d'assurer l'édition de trois de ses œuvres intitulées 'Oiseaux des Marais', 'La grenouille et l'Oiseau', 'Une vie de chien...heureux' ;
Qu'estimant, d'une part, que la clause 6 stipulée dans les contrats d'édition était contraire aux dispositions du code de la propriété intellectuelle applicables et, d'autre part, que l'éditeur avait manqué à ses obligations contractuelles, Raynaldine R. a fait assigner la société l'Officine d'Ecrivain, par acte du 23 décembre2011, sur le fondement des articles L132-5, L131-4 et L132-7 du code de la propriété intellectuelle et 1134, 1147 et 1183 du code civil, devant le tribunal de grande instance de Nanterre qui a annulé la clause litigieuse et partiellement fait droit à ses demandes indemnitaires ;
Sur la nullité de l'article 6 des contrats d'édition
Considérant que la société l'Officine d'Écrivain, appelante, reproche aux premiers juges d'avoir dénaturé les conventions passées entre elle et Raynaldine R. et soutient que les modalités de rémunération de l'auteur n'avaient pas été vidées de portée car aucune disposition légale ne fait interdiction par principe d'arrêter des modalités pratiques dès lors que le risque éditorial ne se trouve pas transféré sur la personne de l'auteur ;
Qu'elle reproche également au tribunal d'avoir méconnu des dispositions d'ordre général qui s'imposent à la condamnation prononcée, du fait de la nullité de clause, en retenant un prix TTC et non HT et sollicite que soit retenu un taux moyen admis dans la profession de 7,5% ;
Qu'en réponse, Raynaldine R. soutient que la clause litigieuse supprime purement et simplement le paiement des droits à l'auteur et que le principe même d'une franchise sur les droits d'auteurs est contraire aux dispositions d'ordre public prévues par le code de la propriété intellectuelle et du code civil notamment l'article L135-5 et L131-4 du code de la propriété intellectuelle ; que cette clause, qui prévoit la cession à titre gratuit des droits d'auteurs pour les 500 premiers livres est nulle et non avenue ;
Qu'elle sollicite reconventionnellement l'application d'une redevance indemnitaire à hauteur de 30% du prix de vente public TTC en application de l'article L331-1-3 du code de la propriété intellectuelle, et, à défaut, la condamnation de l'éditeur à lui payer la somme de 2.500 euros à titre de dommages et intérêts en raison de la faute contractuelle commise ;
Considérant que l'article 6 des trois contrats en cause, libellé dans les mêmes termes, est ainsi rédigé :
En contrepartie du coût initial de réalisation de l'ouvrage assumé par l'éditeur, le produit de la diffusion de 500 premiers exemplaires dudit ouvrage reviendra intégralement à l'éditeur, étant précisé que le prix de diffusion public a été fixé d'un commun accord entre les parties à 12,50 euros ;
Considérant, selon l'article L. 132-5 du code de la propriété intellectuelle que le contrat d'édition peut prévoir soit une rémunération proportionnelle aux produits d'exploitation, soit, dans les cas prévus aux articles L. 131-4 et L. 132-6 une rémunération forfaitaire ;
Considérant que le mécanisme institué par la clause litigieuse a pour effet que les 500 premiers exemplaires vendus n'ouvrent droit à aucune rémunération, et qu'une rémunération proportionnelle n'est prévue qu'à compter de la vente du 501ème exemplaire ;
Qu'ainsi que les premiers juges l'ont à juste titre relevé, il ne peut être soutenu que l'auteur serait animé d'une intention libérale et qu'il aurait entendu céder ses droits à titre gratuit ;
Que c'est également de manière pertinente qu'ils retiennent qu'en choisissant de soumettre le contrat au régime propre du contrat d'édition et non pas à un autre régime susceptible d'être adopté comme le contrat à compte d'auteur ou le contrat de compte à demi, l'éditeur ne peut déroger aux prescriptions légales d'ordre public relatives à la rémunération de l'auteur, et qu'en ne prévoyant aucune rémunération pour les 500 premiers exemplaires de chaque ouvrage, la société l'Officine d'Écrivain a méconnu les dispositions légales précédemment rappelées, justifiant ainsi l'annulation de la clause litigieuse ;
Que c'est également à juste titre que les premiers juges, retenant le mode de rémunération prévu aux contrats au-delà du 500ème exemplaire, ont fixé à 15 % TTC du prix net des ventes hors taxes réalisées le montant de la rémunération devant revenir à Raynaldine R. ;
Que le jugement sera confirmé ;
Sur les manquements contractuels
Sur l'obligation de promotion et de distribution.
Considérant que la société l'Officine d'Écrivain soutient que l'obligation de moyens renforcée n'existe qu'en matière de sécurité et de prévention et non pas en matière commerciale dès lors que les objectifs quantitatifs contractuels ne sont pas expressément définis au contrat ; qu'elle fait également valoir que l'insuccès des ouvrages de Raynaldine R. ne lui est pas imputable et que ce n'est pas un manque d'action commerciale, au travers des référencements et des visites auprès des librairies, qui est à l'origine de l'échec des ouvrages ;
Qu'en réponse, Raynaldine R. soutient que l'obligation de promotion et de distribution de l'éditeur résulte de l'article 7 des conventions d'édition et qu'en l'espèce c'est l'auteur qui a réalisé quasiment l'intégralité des ventes ; qu'elle considère que la société Officine d'Ecrivain a manqué à son obligation contractuelle qui est une obligation de moyens renforcée ; que, selon elle, l'éditeur n'a pas mis en place les moyens suffisants pour promouvoir ses œuvres et que c'est en réalité elle-même qui a exclusivement effectué cette promotion ;
Considérant, selon l'article L. 132-12 du code de la propriété intellectuelle, que l'éditeur est tenu d'assurer à l'œuvre une exploitation permanente et suivie et une diffusion commerciale, conformément aux usages de la profession ; qu'il appartient ainsi à l'éditeur de démontrer les efforts accomplis pour assurer la promotion et la diffusion de l'œuvre, en particulier la publicité faite afin de donner à l'œuvre toute chance de succès auprès du public ;
Que s'il n'est pas contesté que la société l'Officine d'Écrivain a permis la participation de Raynaldine R. à plusieurs salons entre 2008 et 2010, cet éditeur ne démontre pas la réalité des efforts mis en œuvre pour assurer une publicité régulière et adaptée des ouvrages, et pour en favoriser la commercialisation, les pièces produits aux débats, et notamment les courriers échangés par Mme R. tant avec son éditeur qu'avec des organisateurs de salons démontrant surtout les efforts de cette dernière pour assurer la promotion de ses ouvrages ; qu'il est au surplus constant que l'essentiel des ventes réalisées l'ont été par Mme R. elle-même ;
Que s'il ne peut être imputé à l'éditeur l'insuccès d'une œuvre auprès du public lorsqu'il assure une exploitation et une diffusion conformes à ses obligations, il en va autrement lorsque, comme en l'espèce, il ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, des efforts accomplis à cet effet ; que le jugement sera confirmé en ce qu'il a constaté un manquement à l'encontre de l'éditeur ;
Sur les défauts d'impression et d'exploitation de l'oeuvre 'Oiseaux des marais'.
Considérant que la société l'Officine d'Ecrivain soutient que Raynaldine R. ne s'est jamais trouvée dans l'impossibilité de servir une commande émanant d'un professionnel du livre et que le délai pour le retirage du livre 'Oiseaux des marais' est imputable à l'auteur ; qu'elle en déduit qu'aucun manquement professionnel ne peut lui être imputé et que, dès lors, la résiliation des conventions n'a pas lieu d'être ; qu'elle soutient par ailleurs que la totalité du stock en sa possession a été détruite et que l'astreinte est dépourvue de cause ; qu'elle fait également valoir que Raynaldine R. détient encore des exemplaires dont il conviendrait d'ordonner la restitution si l'astreinte était maintenue ;
Qu'en réponse, Raynaldine R. soutient que le livre 'Oiseaux des marais' présente plusieurs défauts d'impression et de reliure et que, compte tenu de ce mauvais tirage, le livre est indisponible ce qui est préjudiciable à l'auteur qui doit décliner les invitations à des salons faute de pouvoir présenter son livre ;
Considérant, en premier lieu, qu'ainsi que les premiers juges l'ont à juste titre retenu, la première impression du livre 'Oiseaux des marais' réalisée en 2007 par un imprimeur situé au Liban est cousue et reliée, ce dont l'examen de l'exemplaire produit aux débats, qui porte la mention 'Achevé d'imprimer en novembre 2007 sur les presses de Professional printing Group s.a.r.l. Beyrouth LIBAN', permet de se convaincre ; que c'est en vain que Mme R. soutient que les exemplaires agrafés défectueux qu'elle produit seraient des tirages définitifs de mauvaise qualité destinés à la vente, et non de simples épreuves provisoires ; que le seul fait, pour Mme R., d'être en possession de quelques exemplaires défectueux ne suffit à démontrer que le livre aurait été diffusé sous cette forme ;
Qu'en second lieu, il est constant que la deuxième impression à laquelle il a été procédé en France en mai 2012 comportait des erreurs de saisie imputables à l'imprimeur, lequel a procédé à une réimpression à ses frais ; que c'est à juste tire que les premiers juges ont considéré que cette situation, certes liée à un changement d'imprimeur, n'exonérait pas l'éditeur de sa responsabilité, et qu'elle avait obligé Mme R. à renoncer à sa participation à plusieurs manifestations dédiées aux livres de jeunesse en 2012, faute pour elle d'être en possession d'exemplaires de ce livre ;
Que tout comme en première instance, la société l'Officine d'Écrivain, qui se borne à affirmer que les exemplaires défectueux ont été retournés à l'imprimeur et mis au pilon, ne rapporte pas la preuve, ce qu'il lui était loisible de faire en interrogeant l'imprimeur, de la destruction de ces exemplaires défectueux ; que le jugement sera confirmé en ce qu'il a fait interdiction sous astreinte à cette société de les diffuser ;
Qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande reconventionnelle que forme la société l'Officine d'Écrivain, tendant à interdire, symétriquement, à Mme R. de diffuser les quelques exemplaires défectueux qu'elle détient, l'intéressée ayant tout à perdre, au regard de son image et de sa crédibilité, à la dissémination d'ouvrages défectueux si elle s'avisait d'y procéder ;
Sur la non restitution des documents confiés pour l'ouvrage 'une vie de chien...heureux'.
Considérant que la société l'Officine d'Écrivain, qui ne conteste pas ne pas avoir restitué des dessins et clichés originaux du livre 'Une vie de chien... heureux' fait valoir qu'elle n'a jamais détenu les négatifs des photographies non restitués et qu'il est possible de retirer les clichés, de sorte que le préjudice se limite à la valeur du tirage papier, et que concernant les dessins non restitués, les motifs sont aisément reproductibles et que le préjudice n'est donc pas matériel ; qu'elle sollicite, par conséquence que le quantum alloué soit réduit à 500 euros ;
Que Raynaldine R. soutient que la valeur des originaux est nécessairement plus élevée que celle des reproductions et qu'il appartenait à l'éditeur de restituer les originaux en application de l'article L132-9 du code de la propriété intellectuelle et de l'article III du code des usages en matière d'illustration par dessin ; qu'elle soutient également avoir subi un préjudice financier du fait de cette non restitution qu'elle chiffre à la somme de 3.200 euros pour les dessins, à la somme de 300 euros pour les photographies et à la somme de 150 euros pour le livret magnétique ;
Considérant que c'est par des motifs pertinents que les premiers juges ont retenu que les éléments avancés par Mme R. pour évaluer son préjudice, indiquant son attachement aux dessins et aux photographies et l'utilité de ces documents pour lui permettre d'assurer la promotion de ses œuvres ne sont pas suffisants pour justifier l'octroi de dommages-intérêts à hauteur de prétentions qu'elle forme ; que c'est à juste titre qu'ils ont fixé à 1.000 euros le montant des dommages-intérêts devant lui être alloués de ce chef ;
Sur le défaut de reddition de comptes annuelle.
Considérant que la société l'Officine d'Ecrivain soutient que les dispositions contractuelles sont non équivoques sur ce point et qu'elles prévoient, d'une part, que l'auteur pourra avoir à tout moment, communication de l'état de commercialisation et de diffusion de son ouvrage et, d'autre part, que l'éditeur procédera chaque année à l'apurement des comptes entre les parties une fois le seuil contractuel franchi ; que cette dernière condition résulte de la clause 6 annulée par les premiers juges, et qu'en conséquence, il ne peut lui être fait grief de ne pas avoir procédé à un apurement de compte si la nullité de la clause était maintenue ;
Qu'en réponse, Raynaldine R. soutient que l'éditeur a une obligation annuelle de reddition des comptes en application des dispositions contractuelles et de l'article L132-13 du code de la propriété intellectuelle qui est d'ordre public ; qu'en l'espèce, la reddition a été opérée de manière tardive et imprécise ; que l'éditeur a donc manqué à son obligation contractuelle et engage ainsi sa responsabilité ;
Considérant que l'article 11 des conventions stipule que 'l'auteur pourra avoir à tout moment, sur sa demande, communication de l'état de commercialisation et de diffusion de son ouvrage, étant observé que seuls les ouvrages effectivement réglés seront comptabilisés. L'éditeur procédera chaque année à l'apurement des comptes entre les parties' ;
Considérant que ces dispositions n'ayant pas dérogé à l'obligation de reddition de comptes prévue à l'article L. 132-13 du code de la propriété intellectuelle, l'éditeur est tenu d'une obligation annuelle de reddition de comptes dont il lui appartient de démontrer qu'il s'en est acquitté ;
Qu'ainsi que les premiers juges l'ont à juste titre relevé, la société l'Officine de l'Écrivain ne peut prétendre avoir exécuté son obligation à ce titre, dès lors qu'elle s'est contentée de répondre à la demande formulée par sa cocontractante en 2010, sans justifier avoir informé celle-ci de l'état des ventes, des stocks et le cas échéant des droits d'auteur, l'absence de franchissement du seuil de 500 exemplaires vendus ne pouvant l'exonérer de cette obligation ;
Sur le montant des réparations et la résiliation judiciaire.
Considérant que Raynaldine R. demande la résiliation judiciaire des contrats d'éditions concernant les oeuvres 'Oiseaux des marais' et 'La grenouille et l'oiseau' en application de l'article L132-17 du code de la propriété intellectuelle et qu'en tout état de cause les trois contrats d'édition doivent être résiliés en raison des manquements contractuels caractérisés ;
Qu'elle soutient que ses préjudices sont actuels et certains, et qu'elle est fondée à solliciter l'indemnisation de son préjudice consécutif à l'exécution défectueuse du contrat, laquelle est de nature à causer un préjudice économique prévisible et sollicite la condamnation de l'éditeur à lui verser la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts ;
Que la société l'Officine d'Écrivain, qui soutient n'avoir commis aucune faute, considère dès lors que la demande de résiliation des conventions est vidée de tout fondement ; qu'elle fait également valoir que le préjudice ne donne lieu à réparation que s'il est actuel et certain ce qui, selon elle, n'est pas le cas en l'espèce ; qu'elle fait grief au jugement de ne pas avoir tenu compte du nombre de tirages réalisés dans la fixation du quantum ;
Considérant que c'est à juste titre que les premiers juges ont retenu que, sans qu'il soit besoin d'examiner la demande de résiliation sur le fondement de l'article L 132-17 du code de la propriété intellectuelle qui ne concerne en toute hypothèse que 2 des contrats, l'importance des manquements relevés à l'encontre de la société d'édition justifiait la résiliation de trois contrats signés avec Mme R. ;
Que c'est par une juste appréciation des faits et circonstances de la cause qu'ils ont évalué à 2.000 euros le préjudice subi par Mme R., en sus des réparations allouées du fait de la non restitution des photographies et dessins originaux ;
Qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande présentée par Mme R. dans le dispositif de ses conclusions tendant à ce qu'il soit dit que la créance de la société l'Officine de l'Ecrivain pour un montant de 81,21 euros n'est pas due, faute pour l'intéressée de consacrer à ce chef de demande le moindre développement dans le corps de ses écritures ;
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Considérant que la société l'Officine de l'Écrivain succombant principalement dans ses prétentions, sera condamnée aux dépens de la procédure d'appel ;
Que l'équité commande d'accorder à Mme R. une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Statuant publiquement, par arrêt CONTRADICTOIRE et en dernier ressort,
CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;
CONDAMNE la société l'Officine d' Écrivain à verser à Mme Raynaldine R. la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE toute autre demande des parties ;
CONDAMNE la société l'Officine d'Écrivain aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévuesau deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Odile BLUM, Président et par Madame RENOULT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.