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Décisions

CA Paris, 4e ch. B, 23 mai 2008, n° 06/18874

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

MOSAIC (SARL)

Défendeur :

OPIUM (SARL), PRUNET

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Monsieur GIRARDET

Conseillers :

Madame REGNIEZ, Monsieur MARCUS

Avoués :

SCP BAUFUME - GALLAND - VIGNES, SCP TAZE-BERNARD - BELFAYOL BROQUET

Avocats :

Me RAMUS, Me MILCHIOR

MELUN, du 11 sept. 2006

11 septembre 2006

Il convient de rappeler que la société MOSAIC dont l'activité consiste en l'agencement de lieux de vente destinés aux métiers de bouche, spécialement des boulangeries-pâtisseries et boucheries-charcuteries, a, dans le cadre de son activité, participé au développement d'un concept d'agencement caractérisé par une disposition, des couleurs, un mobilier et une décoration particuliers. Le 5 juillet 2002, ces modèles d'agencement ont fait l'objet d'un dépôt auprès de l'INPI sous le n° 02.2301, par le gérant de la société MOSAIC, Monsieur Alain REUZEAU. Un deuxième dépôt a également été effectué auprès de l'OHMI en date du 3 décembre 2004.

Dans le courant du dernier trimestre 2003, la société MOSAIC a découvert que ses modèles auraient été imités, à l'occasion de la rénovation d'une boulangerie située à Issy-les-Moulineaux, par une société concurrente, la société OPIUM, ayant pour gérant et employé-dessinateur, Monsieur Stéphane PRUNET. Monsieur Stéphane PRUNET, auparavant salarié de la société PEP'S spécialisée dans l'agencement de magasins et amenée à travailler en relation avec la société WESCHO qui avait embauché Monsieur Alain REUZEAU en 1995, était ensuite devenu salarié, associé et gérant de la société MOSAIC jusqu'au 13 avril 2002, date à laquelle il a participé à la création de la société OPIUM.

La société MOSAIC, autorisée par ordonnances du Tribunal de commerce de Melun du 23 avril 2004 et du Tribunal de commerce de Nanterre du 26 avril 2004, a fait dresser des procès verbaux de constats réalisés respectivement les 8 juin 2004 et 1er juillet 2004. Par exploit en date des 28 et 29 juillet 2004, la société MOSAIC a assigné la société OPIUM et Monsieur Stéphane PRUNET devant le Tribunal de commerce de Melun.

C'est ainsi qu'est né le présent litige.

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Par jugement contradictoire en date du 11 septembre 2006, le Tribunal de commerce de Melun a :

- condamné la société à responsabilité limitée MOSAIC à payer à la société à responsabilité limitée OPIUM Architecture d'intérieur la somme de 20 000 euros T.T.C. à titre de dommages et intérêts,

- condamné la société à responsabilité limitée MOSAIC à payer à Monsieur Stéphane PRUNET la somme de 10 000 euros T.T.C. à titre de dommages et intérêts,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamné la société à responsabilité limitée MOSAIC à payer à la société à responsabilité limitée OPIUM Architecture d'intérieur la somme de 5 000 euros T.T.C. sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- condamné la société à responsabilité limitée MOSAIC à payer à Monsieur Stéphane PRUNET la somme de 5 000 euros T.T.C. sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- condamné la société à responsabilité limitée MOSAIC en tous les dépens,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

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Dans ses dernières conclusions signifiées en date du 13 mars 2008, la société à responsabilité limitée MOSAIC, appelante, demande à la Cour de :

- infirmer le jugement déféré,

- dire et juger réguliers les deux ordonnances du Tribunal de commerce de Melun du 23 avril 2004 et du Tribunal de commerce de Nanterre du 26 avril 2004 ainsi que les procès verbaux de constats ainsi autorisés, réalisés respectivement les 8 juin 2004 et 1er juillet 2004,

- constater que la société OPIUM a contrefait les agencements sur lesquels la société MOSAIC détient un droit de propriété intellectuelle,

- outre une mesure d'interdiction et de publication, condamner la société OPIUM à verser à la société MOSAIC la somme de 60 000 euros à titre de dommages intérêts,

- constater que la société OPIUM et Monsieur Stéphane PRUNET ont commis des actes de concurrence déloyale qui ont préjudicié à la société MOSAIC,

- condamner la société OPIUM et Monsieur Stéphane PRUNET in solidum à verser à la société MOSAIC la somme de 150 000 euros à titre de dommages intérêts,

- constater que la société MOSAIC n'a commis aucun acte de concurrence déloyale au détriment de la société OPIUM et de Monsieur Stéphane PRUNET.

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Dans leurs dernières conclusions signifiées en date du 4 mars 2008, la société à responsabilité limitée OPIUM et Monsieur Stéphane PRUNET, intimés, demandent à la Cour de :

- confirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a refusé de prononcer la nullité de l'ordonnance du Président du Tribunal de commerce de Nanterre du 26 avril 2004 et du constat du 13 juillet 2004,

- ordonner la nullité du dessin et modèle enregistré le 5 juillet 2002, sous le n° 02 23 01, déposé par la société MOSAIC, et dire que la décision à intervenir, une fois devenue définitive, sera transmise par les soins du Greffier à l'Institut National de la Propriété Industrielle pour inscription au Registre National des Dessins et Modèles,

- outre une mesure de publication, condamner la société MOSAIC, au titre de la concurrence déloyale, à payer à la société OPIUM la somme de 250 000 euros à titre de dommages et intérêts, et à Monsieur Stéphane PRUNET la somme de 50 000 euros au même titre,

- condamner la société MOSAIC à payer la somme de 15 000 euros à la société OPIUM et la somme de 15 000 euros à Monsieur Stéphane PRUNET pour procédure abusive.

SUR CE, LA COUR

Sur la validité des ordonnances en date des 23 et 26 avril 2004 ayant autorisé les opérations de constat

Considérant que les intimés poursuivent l'annulation de ces deux ordonnances au motif que la société Mosaic aurait trompé la religion des magistrats qui les ont rendues en leur produisant une attestation des époux Charpentier en date du 6 octobre 2003, qui exprimaient leur déception d'avoir constaté dans la boulangerie Ravalet les mêmes photos que celles décorant leur boulangerie dont l'agencement avait été réalisé par la société Mosaic ; qu'en effet dans une lettre en date du 10 juillet 2005, les époux Charpentier exposent qu'ils ont été abusés par le comportement et les discours de Monsieur Reuzeau qui les a persuadés de signer cette attestation dont il avait d'ailleurs rédigé le contenu ;

Considérant toutefois, que quelque puisse être la méprise des époux Charpentier et l'insistance condamnable, à la supposer établie, de Monsieur Reuzeau à obtenir l'attestation litigieuse, force est de relever que les deux ordonnances en cause ont été rendues au vu des droits de dessins et modèles et des droits d'auteur sur un style d'agencement de magasins dont la société Mosaic s'est déclarée investie, droits résultant notamment du dépôt réalisé à l'INPI sous le n° 02 2301 ; que l'attestation des époux Charpentier n'étant dès lors nullement déterminante dans la délivrance des ordonnances, le moyen sera rejeté ;

Considérant que les intimés font en outre valoir que l'ordonnance du président du tribunal de commerce de Melun en date du 23 avril 2004 doit être annulée aux motifs notamment, qu'elle ne mentionne pas le nom de son signataire ;

Que l'appelante lui oppose que cette lacune est corrigée par l'ordonnance rectificative en date du 6 mars 2008 qui vient préciser que le président Mathieu était le signataire de l'ordonnance en cause ;

Mais considérant qu'en application des articles 454 et 458 du CPC, les jugements qui ne mentionnent pas les noms des magistrats qui ont délibéré sont frappés de nullité ; que ces dispositions sont également applicables aux ordonnances sur requête ; que l'absence, comme en l'espèce, de la mention du nom du magistrat signataire, affecte la décision même ; que ce vice ne peut donc être réparé par la voie de la procédure en rectification d'erreur matérielle et commande l'annulation de l'ordonnance et du procès verbal de constat en date du 8 juin 2004;

Considérant que les intimés soutiennent par ailleurs que le procès verbal de constat dressé le 13 juillet 2004 en exécution de l'ordonnance du président du tribunal de commerce de Nanterre en date du 26 avril 2004 doit être annulé pour ne pas avoir été réalisé dans le mois de la saisine de l'huissier ;

Considérant cependant que, comme l'ont relevé les premiers juges, la saisine de l'huissier instrumentaire peut être fixée au 28 juin 2004, date d'un courrier adressé à celui-ci par la requérante, nonobstant l'indication en tête de cette correspondance de la phrase 'nous revenons vers vous', cette formule étant insuffisante à établir une saisine antérieure de l'huissier ; que la décision des premiers juges sera également confirmée sur ce point ;

Sur les pressions qui auraient été exercées sur des témoins

Considérant que la société Opium et Monsieur Prunet font valoir que les attestations de messieurs Garnier, Galloussi et Boileau seraient irrecevables dans la mesure où elle auraient été établies sous la pression ou l'insistance de la société Mosaic et plus particulièrement sous celles de Monsieur Reuzeau et de Monsieur Gérard ;

Considérant toutefois que la liberté avec laquelle ces personnes ont fait état, de façon contradictoire, de certains faits, n'est pas de nature à rendre irrecevable leurs attestations mais à en affecter la portée laquelle sera appréciée au cas par cas lorsque celles-ci seront prises en compte ;

Sur la validité du dessin et modèle n° 02 2301

Considérant que les intimés font valoir que le dessin et modèle déposé par la société Mosaic à l'INPI le 9 avril 2002 qui présente six photographies d'aménagements d'un commerce dit de bouche, avec une description lapidaire telle que 'vitrine -cintre .Concept magasin type boulangerie-pâtisserie-boucherie-charcuterie, vitrine réfrigérée avec animations et façade éclairée ....' ne concerne pas des produits et doit être annulé par application de l'article L 511-1du CPI qui exclut désormais du champ d'application des nouvelles dispositions du LivreV les ménagement intérieurs qui ne peuvent, comme en l'espèce, être réalisés sous la forme d'un produit exploitable industriellement ; que les photographies figurant au dépôt se limitent à la présentation de principes généraux (concept de façade ouvert sur l'extérieur, animations ...etc) sans indication concrète et précises qui en permettraient une exécution répétée ;

Considérant ceci exposé, que le dépôt incriminé intervenu le 9 avril 2002 est soumis aux dispositions nouvelles issues de l'ordonnance du 25 juillet 2001 ; que selon l'article L511-1 nouveau du CPI, peut-être protégée à titre de dessin et modèle << l'apparence du produit ou d'une partie du produit caractérisé en particulier par ses lignes, ses contours, ses couleurs, sa forme, sa texture ou ses matériaux .Ces caractéristiques peuvent-être celles du produit lui même ou de son ornementation >>;

Considérant que cette définition inclut dans une acception large toute forme apparente possible d'un objet à la condition qu'elle soit, notamment, perceptible, identifiable et identifiée ;

Qu'à cet égard les dispositions réglementaires nouvelles figurant à l'article R 512-3 introduites par le décret 2004-199 du 25 février 2004, qui modifient les conditions formelles du dépôt en prescrivant que chaque photographie porte sur un seul objet, ne représente que celui-ci et que les textes explicatifs, légendes ou toutes autres indications qui ne font pas partie intégrante du dessin ou modèle ne sont pas admises sur ou à côté des reproductions, constituent des exigences nouvelles qui n'ont pas vocation à s'appliquer au dépôt réalisé, comme en l'espèce, avant leur entrée en vigueur ;

Qu'il suit que les légendes figurant au dépôt et les 6 photographies qu'il comprend doivent être appréhendées ensemble pour en apprécier la validité et la portée ;

Considérant que les modèles d'agencement ainsi déposés recouvre dans l'apparence que révèle les photographies :

- 1/ une vitrine cintrée, avec tablette en marbre ou granit et une façade éclairée

- 2/ des façades de meubles opaline, ou polyester bois, accompagnées de montants en laiton ou aluminium,

- 5/ une zone dite 'mange debout'avec un arbre autour du tronc duquel vient s'accrocher ou prendre appui une table allongée ;

Considérant que les autres caractéristiques invoquées, (à savoir : 4/ un espace animation ; 3/ une façade de magasin ouverte et modulable et 6/ une signalisation des espaces en plafond ou par photo ...), sont trop imprécises pour être perceptibles et donc identifiables ;

Que la portée de ce dépôt est donc limitée à l'ensemble des points 1/ 2/ et 5, en d'autres termes à l'usage des matériaux et des éclairages précités pour la réalisation de la vitrine cintrée, des meubles tels que présentés et de la zone 'mange debout'organisée autour d'un arbre aux feuilles vertes ;

Considérant qu'outre l'imprécision et la généralité des éléments revendiqués, les intimés soutiennent que le dépôt en cause serait dépourvu de nouveauté et de caractère propre et produisent pour en justifier le catalogue Wescho de 1989 ;

Que cependant ce catalogue n'a pas date certaine puisqu'aucun élément ne permet d'attester de sa diffusion ; qu'en outre et subsidiairement, s'il présente des agencements approchants, aucun d'entre eux n'est d'ailleurs analysé précisément par les intimés et ne constitue en tout état de cause une antériorité propre à ruiner la nouveauté du dépôt critiqué ; que pas plus les intimés ne peuvent être suivis lorsqu'ils avancent sans aucune documentation permettant de vérifier l'exactitude de leurs assertions, qu'un meuble vitrine cintré comprenant une façade en polyester éclairée par l'arrière et rythmée par des poteaux en laiton aurait été présenté à un salon de la boulangerie en 1995 ;

Que pareillement les dossiers opposés par les intimés des magasins Baudet, Boileau, Damier Gourmand, Karly et La Grignotte présentent seulement certains éléments du dit ensemble, tels que la présence de l'arbre par exemple, et ne peuvent donc constituer une antériorité pertinente ; qu'au surplus, il ne peut être opposé à la société Mosaic des agencements qu'elle a elle même réalisés avec la société Wescho dans le cadre d'accord de partenariat auxquels les intimés sont étrangers ;

Considérant qu'il suit que l'ensemble des éléments retenus de cet agencement intérieur d'un magasin 'de bouche' est nouveau et présente en outre pour un observateur averti, un caractère propre qui résulte de l'impression d'ensemble différente de celle produite par les photographies d'agencements antérieurs versées aux débats et ci dessus énumérés ;

Sur la protection au titre du droit d'auteur

Considérant que les intimés prétendent que l'appelante ne peut revendiquer aucun droit d'auteur car l' agencement qu'elle dit avoir conçu ne serait que la reprise des agencements conçus par la société Wescho et enrichis par Monsieur Prunet, seule personne de la société Mosaic à avoir les compétences professionnelles pour le faire ;

Mais considérant que cet agencement a été divulgué par la société Mosaic, sous son nom ; qu'elle est donc présumée à l'égard des tiers poursuivis en contrefaçon titulaire des droits patrimoniaux ; qu'au surplus, comme indiqué ci-dessus, aucun document ne vient établir que la société Wescho aurait divulgué antérieurement un agencement approchant ; qu'enfin Monsieur Prunet qui soutient avoir été le seul 'concepteur' de l'équipe Mosaic ne prétend pas pour autant pouvoir revendiquer des droits d'auteur sur ces agencements qu'il déclare avoir seulement enrichis ;

Qu'ainsi, la société Mosaic a qualité à exciper de ses droits patrimoniaux sur cette création qui au regard des autres styles d'agencement produits, exprime une certaine singularité laquelle témoigne de l'empreinte de son auteur et, partant, de son originalité ;

Sur la contrefaçon

Sur le fondement du droit des dessins et modèles

Considérant que c'est au regard de la seule boulangerie Ravalet, objet du procès verbal de constat du 13 juillet 2004, qu'il convient d'apprécier si les aménagements réalisés par la société Opium portent atteinte au modèle déposé ;

Qu'en application de l'article L513-5 du CPI, la portée conférée par le dépôt s'étend à tous dessins et modèles qui ne produisent pas sur l'observateur averti une impression visuelle d'ensemble différente ;

Considérant que le constat précité ne relève pas la présence d'une vitrine cintrée, d'une façade en opaline ou en bois et ne décrit pas une zone de dégustation dite 'mange debout' si ce n'est en ces termes :'il existe un petit comptoir en mélanine marron dont la partie droite est fixée dans un pilier en maçonnerie . La partie gauche comporte un pied en mélanine également de couleur marron, dans lequel est implanté un petit arbre avec un feuillage touffu qui arrive à la hauteur du plafond de la boutique' ; que les photographies annexées au procès verbal donnent simplement à voir des montants en laiton sur une vitrine rectangulaire mais dans une configuration distincte de celle objet du dépôt ;

Que finalement la seule présence commune d'un petit arbre fiché dans un pied de table et entouré de tabourets est insuffisante au regard des différences de configuration des vitrines, des matières et des espaces pour pouvoir en déduire que l'aménagement réalisé ne produirait pas sur l'observateur averti une impression visuelle différente ; que les témoignages de Monsieur Charpentier, de Madame Avrilleau, de Monsieur Senechal et de Monsieur Pariset, ces deux derniers étant d'ailleurs en relation de travail avec la société Mosaic, font état de leur impressions personnelles fondées et ne sauraient être considérées comme l'appréciation incontestable d'un observateur distancé et averti ;

Que la société Mosaic sera déboutée de sa demande en contrefaçon ;

Sur l'atteinte aux droit d'auteur

Considérant que la création porte sur la combinaison des trois points sus évoqués ; que dans cette combinaison un seul élément apparaît avoir été repris, à savoir le principe de la présence d'un arbre sur le tronc duquel semble prendre appui une table ; que toutefois, la mise en forme de ce principe - lequel relève de l'idée - est seule protégeable et n'apparaît pas avoir été reprise si l'on en juge par les photographies du constat, car la présentation de l'arbre lui même comme son coffrage sont différents ;

Que la société Mosaic sera donc également déboutée de ses demandes fondées sur l'atteinte portées à ses droits d'auteur ;

Sur la concurrence déloyale incriminée par la société Mosaic

Considérant que la société Mosaic fait grief à la société Opium ainsi qu'à Monsieur Prunet son fondateur, d'avoir détourné sa clientèle alors même que la société Opium était en cours de formation et que Monsieur Prunet était associé et gérant de la société Mosaic ; qu'elle cite ainsi les devis établis pour l'agencement de la boulangerie Ravalet ;

Qu'elle incrimine en outre le démarchage pour le compte de la société en formation Opium de ses clients et de ses sous-traitants par Monsieur Prunet alors gérant de Mosaic qui proposa des plans d'aménagement ; les plans en cause ainsi établis sont ceux des boucheries Kermovant du 25 février 2002, Billebault du 6 avril 2002, Thomelin du 3 février 2002, Biseval du 23 février 2002 et Gosnet du 25 mars de la même année ;qu'elle incrimine en outre le démarchage de Madame Lopes, gérante d'une boulangerie à Rueil à qui Monsieur Prunet aurait proposé de lui transmettre les plans et devis que la société Mosaic avait réalisés et de faire la même chose pour moins cher, ainsi que les contacts pris par Monsieur Prunet au début de 2002 avec des sous- traitants auxquels il communiquait des plans (datés de février et mars 2002) à l'entête de la société Opium en cours de formation, avec l'indication du numéro de téléphone portable que la société Mosaic mettait à sa disposition ; qu'elle incrimine enfin l'attitude de Monsieur Prunet qui a dénigré ses associés dans la société Mosaic auprès de Monsieur Thomelin et de Monsieur Gérard ;

Considérant ceci étant exposé, qu'il convient de souligner ici qu'il n'est pas contesté que la société Opium qui est en concurrence directe avec la société Mosaic a été constituée le 3avril 2002 et que Monsieur Prunet qui assurait la gérance de la société Mosaic a démissionné de ses fonctions le 2 avril 2002 pour assurer les fonctions de gérant de la société Opium ;

Considérant que s'agissant du premier grief relatif à l'établissement de l'agencement de la boulangerie Ravalet, la correspondance en date du 15 décembre 2002 adressée aux époux Ravalet sous l'entête Opium reprend mot pour mot celle que la société Mosaic avait précédemment adressée pour présenter son projet d'agencement et son devis, avec les mêmes formules d'accroche commerciale ; qu'adressée aux mêmes destinataires elle n'a pu qu'être source de confusion et caractérise un acte de concurrence déloyale ;

Que s'agissant de la remise des plans à entête de la société Opium en cours de formation, c'est à dire à une date où Monsieur Prunet était toujours au sein de la société Mosaic, les intimés se bornent à dire que la preuve n'est pas rapportée que ces plans auraient été établis aux dates précitées ;

Mais considérant que ces plans sont accompagnés d'une correspondance datée et de la mention qu'ils ont été établis par la société Opium en cours de formation, soit à une date où Monsieur Prunet oeuvrait encore au sein de la société Mosaic ;

Qu'il était loisible aux intimés de fournir tout élément permettant d'établir, au vu des contacts pris et des éventuels contrats conclus avec les commerçants concernés, que ces plans auraient été établis postérieurement à la constitution de cette société, ou par une autre personne que Monsieur Prunet ; que cette preuve n'étant pas rapportée, il convient de retenir que les plans - à l'exception de ceux datés du 6 avril 2002 pour Monsieur Billebault - ont été établis par ce dernier pour le compte de la société Opium en formation et qu'ils caractérisent une violation de l'obligation de loyauté qui pesait alors sur Monsieur Prunet ;

Qu'en revanche, la proposition faite à madame Lopes est insuffisamment circonstanciée pour être prise en considération ; que n'est pas davantage établie la date de la réunion que Monsieur Prunet aurait organisée avec des sous-traitants au cours de laquelle divers plans leur auraient été remis ;

Que s'agissant du dénigrement allégué, il apparaît qu'à le supposer caractérisé au vu des seules attestations de Messieurs Thomelin et Gerard , les propos incriminés ne concernent qu'un associé nommément désigné et non pas la société Mosaic ;

Sur les actes de concurrence déloyale incriminés par la société Opium et M.Prunet

Considérant qu'il s'agit de propos dénigrants sur la société Opium, relatifs pour l'essentiel à l'annonce d'un prétendu prochain dépôt de bilan de cette société, de pressions qui auraient été exercées sur des sous traitants, du discrédit porté sur les compétences de Monsieur Prunet et de l'entretien d'une confusion par le maintien de l'annonce téléphonique sur la ligne du portable professionnel que Monsieur Prunet utilisait lorsqu'il oeuvrait pour la société Mosaic ;

Considérant qu'en ce qui concerne les propos dénigrants, il apparaît en effet des attestations concordantes de Messieurs Gosnet, Grelet et Leguellec que Monsieur Delpin, agissant pour le compte de la société Mosaic et non démenti par celle-ci, a fait état d'un prétendu prochain dépôt de bilan de la société Opium ainsi que de la présente instance en contrefaçon ; que ces propos répétés participent d'une entreprise de déstabilisation et constituent à l'évidence des actes de concurrence déloyale ;

Qu'au surplus, les pressions qui ont été exercées par des représentants de la société MOSAIC sur plusieurs sous-traitants ou fournisseurs pour les inviter à ne plus travailler avec Opium sont décrites dans les attestations de Messieurs Hissette et Roux ;

Que pour ce qui concerne, l'atteinte prétendument portée à la réputation de M.Prunet, elle n'est nullement établie par l'attestation d'Aurelie Chevrier qui ne rend compte que d'un propos indirecte et général que lui aurait rapporté un élève (non nommé) de l'école Boulle ;

Que par ailleurs, les intimés ne peuvent incriminer le maintien de la messagerie de l'ancien téléphone portable de M.Prunet, dans la mesure où la persistance du message d'accueil pouvait s'avérer nécessaire pour assurer le suivi des contacts et des affaires que M Prunet avait pu pour nouer pour le compte de la société Mosaic et dès lors qu'il n'est justifié d'aucun détournement effectif de clientèle par la persistance de l'usage de ce message ;

Sur les mesures réparatrices

Considérant que les actes de concurrence déloyale commis par la société Opium et par M.Prunet qui agissait pour le compte de celle-ci et alors qu'il oeuvrait encore au sein de la société Mosaic commandent leur condamnation in solidum à verser à la société Mosaic, au regard de la confusion qui a pu naître des actes retenus, la somme de 10 000 euros ;

Considérant que s'agissant des actes de concurrence déloyale commis par les représentants de la société Mosaic agissant pour son compte, il convient de condamner la société Moisaic à verser à la société Opium la somme de 3000 euros ;

Que l'accueil partiel des demandes des parties rend sans objet les demandes qu'elles forment sur le terrain de l'abus de procédure ; que pareillement la publication de la présente n'est aucunement justifiée au regard du contenu de la présente décision ;

Sur l'article 700 du CPC

Considérant que l'équité commande de condamner la société Opium et M. Prunet in solidum, à verser à la société Mosaic la somme de 6000 euros au titre de frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;

PAR CES MOTIFS

Infirme la décision entreprise en toutes ses dispositions sauf en ce qu'elle a prononcé la nullité du procès verbal de constat du 23 avril 2004, rejeté la demande d'annulation du procès verbal de constat du 26 avril 2004, et condamné la société Mosaic pour dénigrement,

Statuant de nouveau,

Dit que la société Mosaic est recevable à se prévaloir de droits de propriété industrielle sur le dessin et modèle n° 02 2301 et de droits d'auteur sur l'agencement d'un magasin dit 'de bouche', mais la dit mal fondée en son action en contrefaçon de ses droits d'auteur et de dessins et modèles, et l'en déboute,

Dit que M.Prunet et la société Opium ont commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Mosaic et les condamne in solidum à verser à cette dernière la somme de 10 000 euros,

Condamne la société Mosaic à verser à la société Opium la somme de 3000 euros en réparation d'actes de concurrence déloyale ,

Rejette toute autre demande,

Condamne in solidum la société Opium et M. Prunet à verser à la société Mosaic la somme de 6000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC et à supporter les entiers dépens qui seront recouvrés dan les formes de l'article 699 du même code, par la SCP Baufumé, Galland,Vignes, avoués.