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Décisions

CA Poitiers, 2e ch., 4 avril 2023, n° 22/01345

POITIERS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Gas (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Pascot

Conseillers :

M. Vetu, M. Lecler

Avocats :

Me Clerc, Me Corniec, Me Burgaud

T. com. La Roche Sur Yon, du 1 mars 2022

1 mars 2022

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé en date du 29 janvier 2015, Monsieur [F] [S] a cédé à la SARL GAS son fonds de commerce d'édition et de distribution de logiciels ERP dans le secteur du bâtiment, dont le nom commercial était « BATPRO ».

Parallèlement, le même jour, les parties ont également conclu un contrat de travail.

Le prix de vente du fonds de commerce a été fixé à la somme de 150.000 €, dont 100.000 € ont fait l'objet d'un paiement comptant et 50.000 € ont fait l'objet d'un paiement à terme suivant un crédit vendeur de vingt-quatre mois dont la première échéance devait intervenir six mois après les actes de cessions au taux de 2,30 % l'an.

Il a en outre été stipulé au contrat de cession, une clause de variation du prix de vente adossée à l'évolution du chiffre d'affaires relatif à l'activité cédée qui serait réalisé au cours de l'année 2015 par comparaison à l'année 2013.

Dans ce cadre, il a été convenu qu'aucune variation ne devait intervenir si le chiffre d'affaires réalisé par l'acquéreur au titre de l'année 2015 était supérieur ou égal à 117.221,40 € hors-taxes (soit 90 % du chiffre d'affaires réalisé par le vendeur au titre de l'année 2013 qui s'était élevé à la somme de 130.246 €). En dessous de ce chiffre d'affaire, il a été prévu une variation à la baisse selon une méthode de calcul insérée à l'acte.

La somme de 100.000 € a été versée sur le compte séquestre de Me Stéphanie LEMIERE, avocate au barreau de La Roche-Sur-Yon.

La société GAS a commencé à s'acquitter du crédit-vendeur à compter du 29 juillet 2015.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception datée du 1er décembre 2015 adressée à la Société GAS, M. [S] a sollicité le paiement de l'échéance du mois de novembre 2015.

Le 15 mai 2018, M. [S] a mis en demeure la société GAS de lui payer la somme de 43.344,41 € sous quinzaine, correspondant au solde des sommes dues au titre du crédit-vendeur.

Par exploit en date du 27 mai 2020, Monsieur [F] [S] a assigné la société GAS devant le tribunal de commerce de La Roche-Sur-Yon aux fins, notamment, d'obtenir sa condamnation à lui régler la somme de 41.666,67 € en exécution de l'acte de cession du fonds de commerce ainsi que la condamnation de cette société à lui payer 15.000 € de dommages et intérêts pour exécution déloyale de l'acte de cession du fonds de commerce.

Par jugement en date du 1er mars 2022, le tribunal de commerce de La Roche-Sur-Yon a statué ainsi :

- Prend acte de ce que la Société GAS a communiqué son bilan au 31 décembre 2015,

- Prend acte de ce que la Société GAS a jusitifié avoir poursuivi la commercialisation du logiciel 'BATPRO' au cours de l'année 2015,

- Déboute Monsieur [F] [S] de sa demande de versement de la somme de 41.666,67€ au titre du solde du crédit vendeur sur la vente du fonds de commerce intervenue le 29 janvier 2015,

- Déboute Monsieur [F] [S] de sa demande de dommages et intérêts,

- Dit et juge que le prix définitif de vente du fonds de commerce de Monsieur [F] [S], après application de la clause de variation de prix s'établit à 88.500 €,

- Condamne Monsieur [F] [S] à payer à la Société GAS la somme de 15.767,82 € en application de la clause de variation de prix contenue dans l'acte de cession du fonds de commerce du 29 janvier 2015,

- Déboute la Société GAS de sa demande indemnitaire pour abus du droit d'ester en justice ainsi que de sa demande d'amende civile à l'encontre de Monsieur [F] [S],

- Ordonne l'exécution provisoire de la présente décision,

- Condamne Monsieur [F] [S] à payer à la société GAS la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamne Monsieur [F] [S] aux entiers dépens de l'instance, dans lesquels seront compris les frais et taxes y afférents, et notamment les frais de Greffe liquidés à la somme de 63.37 €.

Par déclaration en date du 25 mai 2022, Monsieur [F] [S] a fait appel de cette décision en visant ses chefs expressément critiqués.

Monsieur [F] [S], par dernières conclusions transmises par voie électronique en date du 02 août 2022, demande à la cour de :

Vu l'article 1134 ancien du Code civil,

Vu l'acte de cession du fonds de commerce du 29 janvier 2015,

- Déclarer Monsieur [S] recevable et bien fondé en son appel,

Y faisant droit,

- Infirmer le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de la ROCHE SUR YON le 1er mars 2022,

Et statuant à nouveau :

- Fixer le prix définitif de vente du fonds de commerce de Monsieur [F] [S] à 150.000€, à titre principal, et à 143.636 € à titre subsidiaire,

- En conséquence, condamner la SARL GAS à payer la somme de 41.666,67 € à Monsieur [F] [S] en paiement du prix définitif de vente du fonds de commerce, augmenté des intérêts de 2,30 % par an, depuis l'extinction de la période de différé de six mois après la vente, soit depuis le 29 juillet 2015,

- Condamner la SARL GAS à payer à Monsieur [S] 15.000 € de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi par l'exécution déloyale du contrat de vente du fonds de commerce,

- Débouter la SARL GAS de toutes ses demandes,

- Infirmer le jugement rendu en ce qu'il a condamné Monsieur [F] [S] à payer à la SARL GAS la somme de 15.767,82 € en application de la clause de variation de prix,

- Dire que Monsieur [F] [S] n'est débiteur d'aucune somme envers la SARL GAS,

- Confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a débouté la SARL GAS de sa demande pour procédure abusive et d'amende civile,

- Débouter la SARL GAS de toutes ses demandes,

- Condamner la SARL GAS à payer à Monsieur [F] [S] la somme de 5.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamner la SARL GAS aux entiers dépens, de première instance et d'appel, y compris ceux afférents à l'exécution forcée de la décision à intervenir,

La S.A.R.L. GAS, par dernières conclusions RPVA du 18 octobre 2022, sollicite de la cour de:

Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de LA ROCHE SUR YON le 1er mars 2022, en ce qu'il a :

- Débouté Monsieur [F] [S] de sa demande de versement de la somme de 41.666,67€ au titre du solde du crédit vendeur sur la vente du fonds de commerce intervenue le 29 janvier 2015 ;

- Débouté Monsieur [F] [S] de sa demande de dommages et intérêts ;

- Jugé que le prix définitif de vente du fonds de commerce de Monsieur [F] [S], après application de la clause de variation de prix s'établit à 88.500 € ;

- Condamné Monsieur [F] [S] à payer à la société GAS la somme de 15.767,82 € en application de la clause de variation de prix contenue dans l'acte de cession du fonds de commerce du 29 janvier 2015 ;

- Condamné Monsieur [F] [S] à payer à la société GAS la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamné Monsieur [F] [S] aux entiers dépens de l'instance ;

Y ajoutant,

Débouter Monsieur [S] de sa demande de fixation du prix définitif de vente du fonds de commerce à 150.000 € à titre principal et 143.636 € à titre subsidiaire,

Débouter plus largement Monsieur [S] de toutes ses demandes fins et conclusions,

Condamner [F] [S] à verser à la SARL GAS 45.000 € de dommages et intérêts pour abus du droit d'ester en justice,

Condamner Monsieur [F] [S] à verser sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile une amende civile dont le montant est laissé à l'appréciation de la Cour,

Condamner Monsieur [F] [S] à verser à la SARL GAS une indemnité complémentaire en appel de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile

Condamner Monsieur [F] [S] aux entiers dépens d'appel.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

La clôture de l'instruction a été prononcée par la cour à l'audience du 30 janvier 2023 où l'affaire a été plaidée puis mise en délibéré à ce jour.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande en paiement du solde du crédit-vendeur

Sur l'application de la clause de variation aux regard de l'acte de cession

1. L'article 1134 du Code civil dans sa version applicable au contrat de cession du fonds de commerce, désormais codifié aux articles 1103 et 1104, dispose que :

'Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.

Elles doivent être exécutées de bonne foi'.

Selon l'article 1135 qui suit, les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l'équité, l'usage ou la loi donnent à l'obligation d'après sa nature.

2. Aux termes de l'article 1603 du Code civil, le vendeur a deux obligations principales, celle de délivrer et de garantir la chose qu'il vend.

Il résulte des dispositions de l'article 1650 de ce code que la principale obligation de l'acheteur est de payer le prix au jour et au lieu réglé par la vente.

3. L'appelant fait valoir que l'acte de cession du fonds de commerce faisait obligation à la SARL GAS de lui communiquer son chiffre d'affaires, au plus tard, le 31 janvier 2016 et si elle entendait se prévaloir de la clause de variation du prix à la baisse.

Or, cette société aurait manqué à cette obligation dès lors qu'elle ne lui a communiqué son chiffre d'affaires de l'année 2015 que cinq années et cinq mois après l'échéance fixée contractuellement, après sommation de communiquer, dans un cadre contentieux, par ses conclusions devant le tribunal de commerce de la Roche sur Yon, 18 mai 2021.

4. Selon M. [S], la mauvaise foi de son créancier, neutraliserait la clause de variation à la baisse du prix de vente, celui-ci devant être fixé, comme à l'origine, à la somme de 150.000 €.

5. La SARL GAS réplique que M. [S] est infondé à se prévaloir d'une prétendue mauvaise foi de sa part lorsque le rappel des faits traduit de sa part une fraude aux droits de l'Etat par le non-paiement de la TVA et une fraude aux droits des caisses de retraite, par le non-paiement des cotisations.

En outre, rappelle l'intimée, dans l'acte de vente du fonds de commerce, il n'y aurait aucune clause sanctionnant la non transmission du bilan au 31 janvier 2016 de sorte que l'appelant serait dans l'impossibilité de se prévaloir d'une sanction là où les parties n'ont pas entendu qu'elle existe.

6. Enfin, indique la SARL GAS, M. [S] savait dès l'opposition du trésor public au paiement du prix de vente du fonds de commerce le 18 février 2015, que le montant de l'opposition de 150.846 € dépassait le prix de vente du fonds de commerce, et que dans ces conditions, il ne pouvait plus prétendre récupérer ni sur le séquestre, ni sur le crédit vendeur, dès lors que, finalement, le prix définitif s'établissait à 150.000 €.

7. La cour rappelle que l'acte de cession, en ses pages 8 à 10, relatives au 'PRIX', la 'Variation éventuelle du prix' et les 'modalités de détermination du chiffre d'affaires réalisé et délai de règlement' stipule notamment que le prix provisoire de 150.000 € était payable à concurrence de 100.000 € le jour de signature de l'acte et à concurrence de 50.000 € par règlement mensuel échelonné et qu'en outre :

Le VENDEUR garantit un niveau d'activité sur l'année 2015 identique à celui réalisé en 2013.

Il est ainsi convenu entre les parties une clause de variation de prix fondée sur l'évolution du chiffre d'affaires relatif à l'activité cédée qui sera réalisé au titre de l'année 2015 par comparaison à l'année 2013.

Aucune variation ne sera effectuée si le chiffre d'affaires réalisé par l'ACQUÉREUR au titre de l'année 2015 est supérieur ou égal à 117.221,40 € HT (soit 90% du Chiffre d'affaires réalisé par le VENDEUR au titre de l'année 2013 qui s'était élevé à la somme de 130.246 €).

Une variation à la baisse du prix sera opérée si le chiffre d'affaires réalisé par l'ACQUÉREUR au titre de l'année 2015 est inférieur à 117 221,40 € HT.

[...]

L'ACQUÉREUR s'engage à adresser au VENDEUR le chiffre d'affaires réalisé au cours de l'année 2015, au plus tard, le 31 janvier 2016.

L'éventuelle réduction du prix devra être déterminée et imputée sur le solde du crédit-vendeur au plus tard le 28 février 2016.

8. La cour relève qu'il n'est pas contesté que la transmission du chiffre d'affaires de l'année 2015 n'a pas été réalisée dans les temps prévus par la convention et qu'il en est de même de l'imputation sur le solde du crédit-vendeur de l'éventuelle réduction du prix.

9. Mais la cour constate dans le même temps que M. [S] n'était plus l'interlocuteur de la SARL GAS, sauf dans le cadre de multiples procédures judiciaires :

- En premier lieu, du fait de son licenciement pour faute grave, intervenu dès le 11 mars 2015, dont le principe a été entériné par le conseil des prud'hommes de Bordeaux par jugement daté du 28 juin 2016 et confirmé par la Cour d'appel de Bordeaux, par arrêt daté du 27 juillet 2016 ;

- En second lieu, du fait d'un avis à tiers détenteur daté du 17 juin 2015 pour la somme de 50.847,47 €, transmis à cette dernière par la DGFIP de Toulouse (pièce n°12 de l'intimée), pour versement direct entre les mains de l'administration fiscale des échéances du crédit-vendeur;

10. La cour constate d'ailleurs que l'ensemble de ces procédures sont elles-mêmes consécutives aux manquements graves de M. [S], en sa qualité de vendeur, à ses obligations contractuelles et générales de commerçant.

11. Ainsi, en page 6 de l'acte de cession, il est indiqué que LE VENDEUR déclare qu'il est à jour de toutes les obligations qui lui incombaient vis-à-vis des salariés [demeurant dans l'entreprise et cités à l'acte] et d'éventuels salariés qu'il aurait embauché au préalable et dont il se serait séparé [...]. Pourtant, relève la cour, les affaires prud'hommales pour lesquelles M. [S] a été condamné, en partie causées pour son manque de loyauté vis-à-vis de son employeur (résultant de son insubordination), résultent également du non-paiement des cotisations et salaires des deux anciens employés demeurés en fonction à la suite de la cession.

12. Par ailleurs, M. [S] a certifié en page 4 de l'acte que le fonds présentement vendu a toujours été exploité de façon normale [...] selon les règles afférentes au bénéfices non commerciaux (formulaire 2035) alors que les procédures fiscales directement à l'origine de l'appréhension entre les mains du séquestre d'une partie du prix à hauteur de 100.000 € puis des sommes dues au titre du crédit vendeur sont respectivement dues à une dette de taxe sur la valeur ajoutée courant depuis 1997 et des cotisations retraites salariales impayées depuis 2009.

13. Au regard de la particulière mauvaise foi de M. [S] dans la formation et l'exécution de la convention, mais encore de l'obligation pour la SARL GAS d'en référer exclusivement à l'administration fiscale en ce qui concerne le paiement du prix de la cession, la cour indique que M. [S] ne peut se prévaloir des manquements contractuels de l'acquéreur pour faire échec à la mise en oeuvre de la clause de variation, étant rappelé, au surplus, ainsi que le soutient à raison l'intimée, qu'aucune sanction prévue au contrat n'assortissait l'obligation de transmettre le bilan de l'année 2016.

14. M. [S] sera débouté de la demande formée à ce titre.

Sur le prix du fonds de commerce au vu de la clause de variation

15. En vertu de l'article 9 du Code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver, conformément à la loi, les faits nécessaires au succès de sa prétention.

16. Le chapitre relatif à la 'Variation éventuelle du prix' précité stipule dans sa dernière partie que :

La réduction du prix sera déterminée comme suit :

Taux de variation = Chiffre d'affaires 2015/ 130 246 €, le taux sera arrondi en retenant les deux chiffres après la virgule.

Le prix définitif sera égal au prix provisoire duquel sera déduit le montant obtenu par application du taux de variation au prix provisoire, soit :

Prix définitif = 150.000 € x taux de variation.

17. Celui relatif aux 'modalités de détermination du chiffre d'affaires réalisé et délai de règlement' énonce dans son premier alinéa que :

'Le chiffre d'affaires s'entend de l'ensemble des activités suivantes : ventes de logiciels, formation, contrats d'assistance, BATPRO sauvegarde, développements spécifiques, ventes de licences 4js.'

18. Enfin, le chapitre relatif aux obligations du vendeur, singulièrement dans son 'd) Contrats' énonce que :

'Seuls les contrats d'assistance conclus avec les clients sont transmis avec le fonds. Une liste établie contradictoirement figure en annexe des présentes.

Il est ici convenu que les sommes facturées par avance par le vendeur au titre des prestations non encore achevées seront versées à l'ACQUEREUR en fonction du degré d'avancement à cette date et au fur et à mesure des encaissements par le VENDEUR. Le décompte figure en annexe aux présentes.'

19. M. [S] fait valoir que d'après le bilan comptable communiqué par la société GAS en cours de procédure, son chiffre d'affaires net pour la seule période du 1er février 2015 au 31 décembre 2015 était de 81.363 €, la différence étant de 5 145,04 € par rapport à celui de 76.217,96€ retenu par le tribunal de commerce.

En outre, explique-t-il, ce chiffre d'affaires ne correspond pas à l'année complète, la cession ayant été effectuée en date du 29 janvier 2015. Selon lui, à ce chiffre d'affaires, il faut donc ajouter le chiffre d'affaires du mois de janvier 2015 afin de calculer le chiffre d'affaires sur une année complète. A cet égard, il explique avoir réalisé un chiffre d'affaires au mois de janvier 2015, d'un montant de 29.753 € qui, ajouté, à celui de 81.363 € représente a minima un chiffre d'affaires pour l'année 2015 de 111.116 €.

20. Selon l'appelant, à cette somme doivent encore s'ajouter le prix de marchés hors taxe conclus avant et après la cession pour 17.800 € (logiciel BATPRO vendu à la SAS PERRIN), 14.720 € (bon de commandes du 04 mars 2015 signé avec le Groupe EBTT).

21. La SARL GAS objecte que :

- M. [S] ne peut pas réintégrer dans la base du chiffre d'affaires, le chiffre d'affaires qu'il a réalisé en janvier 2015, avant la vente au regard de la page 9 de l'acte de vente du fonds de commerce aux termes duquel, 'Il est prévu entre les parties une clause de variation de prix fondée sur l'évolution du chiffre d'affaires relatif à l'activité cédée qui sera réalisé au titre de l'année 2015 par comparaison à l'année 2013" et qu'il ne peut donc s'agir que d'un chiffre d'affaires postérieurs à la cession ;

- la somme de 29.753 €, censée représenter le chiffre d'affaires réalisé en janvier 2015 n'est étayée par aucun élément, si ce n'est une déclaration 2035 remplie de manière manuscrite, dont l'année 2014 a été rayée pour la remplacer par l'année 2015 et qu'au regard des précédents de M. [S] dans sa gestion fiscale et sociale, ce document rédigé par lui, absolument pas certifié par un expert-comptable et étayée par aucune pièce de comptabilité ne peut être retenu comme élément de preuve ;

- que les autres marchés énumérés par M. [S] n'ont jamais généré de facturation ou, pire, ne font par partie de ses clients ;

22. Il s'ensuit, selon la SARL GAS que le tribunal a fait une parfaite analyse de la situation et du chiffre d'affaires qui devait être pris en compte dans la détermination du chiffre d'affaires définitif réalisé sur l'année 2015 depuis la vente.

23. A titre liminaire, la cour indique qu'il ressort de ces clauses que M. [S] n'est pas fondé à se prévaloir de la réintégration dans le chiffre d'affaires 2015 réalisé par la SARL GAS celui qu'il aurait réalisé avant la cession et, notamment, celui du mois de janvier 2015 sauf à démontrer que la facturation de ces prestations entrerait dans le cadre du décompte figurant en annexe du contrat de cession (cumulativement non achevées et facturées par avance par lui et, comme telles devant revenir au vendeur).

24. La cour observe qu'aucune des parties ne verse aux débats les annexes citées en page 15 de l'acte de cession de sorte que le vendeur, qui se prévaut de la réintégration au chiffre d'affaires 2015 de ces sommes, n'apporte pas les éléments de preuve qui lui incombent de la mise en oeuvre de la clause de variation sur ce point précis.

25. Par ailleurs, indique la cour, aucune stipulation contractuelle de l'acte de cession contraint les parties à limiter à 50.000 € (montant du crédit-vendeur) la diminution du prix de vente du fonds de commerce ainsi que le soutient l'intimée.

26. Tenant compte des observations qui précèdent et des éléments produits aux débats, c'est donc par des motifs pertinents, non remis en cause par les débats à hauteur d'appel et que la cour adopte que le premier juge a déterminé que le prix définitif de vente du fonds de commerce de M. [S], après application de la clause de variation de prix s'établissait à la à 88.500 € et a consécutivement condamné le vendeur à verser à la société GAS la somme de 15.767,82 € en application de cette même clause.

27. La décision entreprise sera confirmée sur ces points.

Sur les demandes de dommages et intérêts

Emanant de M. [S]

28. Selon l'article 1147 du Code civil applicable à la cause que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

29. En vertu du dernier alinéa de l'article 1153 du Code civil, le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance.

30. M. [S] fait valoir que non seulement, dès novembre 2015, la SARL GAS a cessé sans aucune information ou explication, le versement des mensualités du crédit-vendeur, mais qu'en outre, sans réaliser dans les délais ses obligations lui permettant de bénéficier de la clause de variation du prix de cession.

Par ailleurs, rappelle-t-il, il avait été expressément convenu lors de l'opération de vente que la SARL GAS l'embaucherait en contrat à durée indéterminée à temps plein mais que, contre toute attente, cette société l'avait licencié dans des conditions très contestables, immédiatement après la vente du fonds de commerce, en le convoquant à un entretien préalable au licenciement le 24 février 2015 et en le licenciant le 11 mars 2015.

31. La SARL GAS objecte que M. [S] ne peut pas prétendre justifier sa demande de dommages et intérêts pour avoir été abusivement licencié, alors que justement les juridictions sociales ont retenu sa faute grave et l'ont débouté de toutes ses demandes.

32. La cour rappelle que par son comportement, M. [S] a remis en cause l'équilibre contractuel initial de sorte qu'il a été débouté de l'ensemble de ses demandes en paiement du prix de cession provisoirement prévu à l'acte. A ce titre, il ne peut fonder de demande indemnitaire qui reposerait sur la mauvaise exécution par la SARL GAS des clauses de ce contrat.

33. En ce qui concerne le licenciement de M. [S], la cour observe qu'il est acquis, au vu des décisions de justice dont l'aboutissement est la décision de la Cour de cassation en date du 04 novembre 2020 rejetant son pourvoi, que c'est bien lui qui a failli à ses obligations de salatiés après qu'un contrat de travail a été signé avec la SARL GAS.

34. Ainsi, aucune faute ne peut être mise à la charge de cette dernière et il y a lieu de confirmer la décision de ce chef.

Réclamées par la SARL GAS pour abus du droit d'ester en justice outre le prononcé d'une amende civile

35. L'article 1240 du Code civil dispose que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

36. L'article 32-1 du code de procédure civile dispose que « celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés' et l'article 559 qu'en 'cas d'appel principal dilatoire ou abusif, l'appelant peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10.000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui lui seraient réclamés »

L'article 559 du Code de procédure civile énonce qu'en cas d'appel principal dilatoire ou abusif, l'appelant peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10.000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui lui seraient réclamés.

37. L'exercice d'une action en justice et d'une voie de recours, même mal fondées, ne peut constituer un abus de droit que dans des circonstance particulières le rendant fautif.

38. La SARL GAS fait valoir qu'elle a parfaitement assumé ses responsabilités et sa parole donnée, notamment, vis-à-vis des salariés et qu'après avoir dû se défendre devant toutes les juridictions du conseil des prud'hommes à la Cour de cassation, Monsieur [S], qui ne semble pas avoir compris la teneur de la décision de la Cour d'Appel de Bordeaux, a lancé une procédure devant le tribunal de commerce plus de cinq ans après la vente en faisant valoir des arguments totalement fallacieux, ce qui l'a contrainte à saisir un huissier de justice pour faire exécuter une décision pourtant revêtue de l'exécution provisoire.

Cette société indique que la posture de l'appelant se prétendant victime est intenable au regard de son comportement, dès lors qu'il est acquis aux débats qu'il a pendant sept années précompté les cotisations retraite sur les bulletins de salaire de ses deux salariés sans reverser aux caisses de retraite les cotisations et qu'il s'est exonéré du paiement de près de 100.000 € de TVA en principal ce qui représente plusieurs années de chiffre d'affaires.

39. La SARL GAS conclut que ce comportement frauduleux caractérise une escroquerie aux droits de l'Etat et des caisses sociales, justifiant une condamnation sévère de M. [S] à de lourds dommages et intérêts car la société GAS serait victime de sa frénésie judiciaire.

40. M. [S] réplique qu'il justifiait d'un intérêt personnel et légitime à saisir le tribunal de commerce de La Roche-Sur-Yon puisque la société GAS avait brutalement cessé le paiement du crédit-vendeur dès novembre 2015 sans explication ni information et qu'en outre, le bilan comptable de l'année 2015 ne lui a été communiqué qu'en cours de procédure judiciaire, au contentieux, après sommation officielle de communiquer du 4 janvier 2021, ceci, au mépris des clauses de l'acte de cession.

Par ailleurs, la SARL GAS ne justifie d'aucun préjudice.

41. La cour observe qu'en ce domaine, aucun dommage particulier et préjudice en lien avec les procédures entreprises par M. [S] ne sont démontrés par la SARL GAS qui, pourtant, a la charge de cette preuve en vertu de l'article 9 du Code de procédure civile. Par ailleurs, aucun abus dans l'utilisation des voies de droit n'est démontré.

42. La décision entreprise sera là encore confirmée de ce chef.

Sur les frais de procès

43. Il apparaît équitable de condamner M. [S] à payer une indemnité de 3.000 € à la SARL GAS en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et de rejeter la demande formée au même titre par l'appelant.

44. M. [S] qui échoue en ses prétentions supportera la charge des dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme en toutes ses dispositions contestées le jugement du tribunal de commerce de La Roche-Sur-Yon en date du 1er mars 2022,

Y ajoutant,

Condamne Monsieur [F] [S] à payer à la SARL GAS une indemnité de 3.000 € par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

Rejette les autres demandes,

Condamne Monsieur [F] [S] aux dépens d'appel.