CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 5 juillet 2023, n° 23/03472
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Appydro (SARL), DB Industries (SA)
Défendeur :
Hiab France (SAS), Hiab Italia SRL (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Dallery
Conseillers :
Mme Depelley, M. Richaud
Avocats :
Me Kong Thong, Me Guerre, Me Villard
FAITS ET PROCÉDURES
Par acte en date du 1er octobre 2010, la société de droit italien Effer, désormais dénommée Hiab Italia, a accordé à la société DB Industries SA le droit exclusif de vendre, sur tout le territoire français, ses produits de la gamme Effer de grues hydrauliques pour camions, pièces de rechange et accessoires pour une durée d'un an renouvelable.
La SARL Appydro vient aux droits de la société DB Industries au titre de ce contrat de distribution.
Par courrier RAR du 17 janvier 2020, la société Effer a notifié à "DB Industries APPYDRO" la rupture de leurs relations commerciales en accordant un préavis de 12 mois, soit jusqu'au 17 janvier 2021.
Par acte du 29 octobre 2021, considérant que la rupture du contrat de distribution litigieux portant sur la gamme de produits Effer avait un caractère brutal et engageait la responsabilité de Effer et de Hiab France, et que cette dernière aurait en outre commis des actes de concurrence déloyale à l'encontre de ses clientes en débauchant de façon illicite un salarié de Appydro et en ayant annoncé aux clients de DB Industries et Appydro, avant la fin du préavis, que ces dernières n'auraient dorénavant plus accès aux pièces détachées de Effer, les sociétés DB Industries et Appydro ont saisi le tribunal de commerce de Paris pour obtenir réparation de leurs préjudices.
Par jugement du 14 février 2023, le tribunal de commerce de Paris a statué en ces termes :
- Dit recevable et bien fondée l'exception d'incompétence territoriale soulevée par la Société Hiab France SAS et la société de droit italien Hiab Italia Srl anciennement dénommée société de droit étranger Effer,
- Se déclare incompétent pour connaître du litige concernant les faits allégués de rupture brutale des relations commerciales litigieuses au profit du Tribunal de Bologne en Italie,
- Se déclare incompétent pour connaître du litige concernant les actes allégués de concurrence déloyale commis par la Société Hiab France Sas, au profit du tribunal de commerce de Versailles,
- Prononce la disjonction de l'instance actuellement pendante devant le tribunal de commerce de Paris enrôlée sous le n° de RG n°2021061282 entre:
* d'une part les demandes fondées sur les faits allégués de rupture brutale des relations commerciales établies entre la Société de droit italien Hiab Italia Srl anciennement dénommée Société de droit étranger Effer et la Société D.B. et/ou la société Appydro,
* d'autre part les demandes fondées sur les actes allégués de concurrence déloyale qu'aurait commis la Société Hiab France Sas à l'égard de la société Appydro,
- Dit que le greffe procèdera à la notification de la présente décision par lettre recommandée avec accusé de réception adressée exclusivement aux parties,
- Dit qu'en application de l'article 84 du code de procédure civile, la voie de l'appel est ouverte contre la présente décision dans le délai de quinze jours à compter de ladite notification,
- Condamne la société Appydro et la Société DB. à verser à la Société Hiab France Sas et la Société de droit italien Hiab Italia Srl anciennement dénommée Société de droit étranger Effer la somme de 2 000 € chacune au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
- Déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires, Condamne la société Appydro et la Société Db. Industries Sa aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 170,30€ dont 28,17€ de TVA.
Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 24 février 2023, la société Appydro et la société D.B. Industries ont interjeté appel de ce jugement.
Par ordonnance du 7 mars 2023, la société Appydro et la société D.B. Industries ont été autorisé à assigner à jour fixe les sociétés Hiab France et Hiab Italia SRL à l'audience du 7 juin 2023.
Aux termes de leurs dernières conclusions, déposées et notifiées le 6 juin 2023 la société Appydro et la société D.B. Industries demandent à la Cour de :
Vu les articles 83 et suivants du CPC,
Dire les sociétés Appydro et DB recevables et bien fondées en leur appel ; les déclarer bien fondées ; y faisant droit.
Infirmer le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Paris le 14 février 2023 en ses dispositions faisant grief aux sociétés Appydro et DB et notamment en ce qu'il a :
- Dit recevable et bien fondée l'exception d'incompétence territoriale soulevée par la Société Hiab France Sas et la Société de droit italien Hiab Italia Srl anciennement dénommée Société de droit étranger EFFER,
- S'est déclaré incompétent pour connaître du litige concernant les faits allégués de rupture brutale des relations commerciales litigieuses au profit du Tribunal de Bologne en Italie,
- S'est déclaré incompétent pour connaître du litige concernant les actes allégués de concurrence déloyale commis par la Société Hiab France Sas, au profit du tribunal de commerce de Versailles,
- Prononcé la disjonction de l'instance actuellement pendante devant le tribunal de commerce de Paris enrôlée sous le n° de RG n°2021061282 entre :
- d'une part les demandes fondées sur les faits allégués de rupture brutale des relations commerciales établies entre la Société de droit italien Hiab Italia Srl anciennement dénommée Société de droit étranger Effer et la Société D.B. Industries Sa et/ou la Sarl Appydro,
- d'autre part les demandes fondées sur les actes allégués de concurrence déloyale qu'aurait commis la Société Hiab France Sas à l'égard de la Sarl Appydro,
- Condamné la Sarl Appydro et la Société Db. Industries Sa à verser à la Société Hiab France Sas et la Société de droit italien Hiab Italia Srl anciennement dénommée Société de droit étranger Effer la somme de 2 000 euros chacune au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
- Débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,
- Condamné la Sarl Appydro et la Société Db. Industries Sa aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 170,30 euros dont 28,17euros de TVA.
Statuant à nouveau,
- Débouter les sociétés Hiab France et Hiab Italia de leur exception d'incompétence
- Dire que le tribunal de commerce est compétent pour statuer sur les demandes des appelantes
- Dire n'y avoir lieu à disjonction.
Et usant de son pouvoir d'évocation,
Vu les articles 1240 (ex-1382) du Code civil,
Vu l'article L. 442-6-I-5° du Code de commerce
Vu la jurisprudence,
Vu les pièces,
Vu ce qui précède,
- Déclarer les sociétés Appydro et DB Industries recevables et bien fondées en leurs demandes, Y Faire Droit
- Retenir que la responsabilité des sociétés Hiab France et Eiffer est engagée sur les fondements des articles L 442-6-I-5° du Code de commerce et 1240 (nouveau) du Code civil pour avoir brutalement rompu la relation commerciale bien établie les liant aux sociétés DB Industries et Appydro
- Retenir que la société Hiab France s'est livrée à des actes de concurrence déloyale au détriment des sociétés demanderesses Appydro et DB Industries, en tentant de débaucher leur personnel et en les évinçant prématurément de leur rôle de distributeurs exclusifs des produits Effer en France
- Retenir que les sociétés Hiab France et Eiffer doivent réparer tous les préjudices subis par les sociétés Appydro et DB Industries découlant de leur comportement fautif
- Condamner solidairement les sociétés Hiab France et Eiffer à payer aux sociétés demanderesses Appydro et DB Industries la somme de 1 000 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture brutale de la relation commerciale.
- Condamner solidairement les sociétés Hiab France et Eiffer à payer à la société Appydro la somme de 5 000 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice économique et financier subi en termes de perte de marge sur ventes et Sav
- Condamner solidairement les sociétés Hiab France et Eiffer à payer aux sociétés Appydro et DB Industries la somme de 800 000 euros en réparation du préjudice financier causé par le démarrage imposé d'une nouvelle activité et la recherche de nouveaux partenaires.
- Condamner solidairement les sociétés Hiab France et Eiffer à payer aux sociétés Appydro et DB Industries la somme de 200 000 euros en réparation du préjudice économique et financier causé par leurs manoeuvres déloyales
- Condamner solidairement les sociétés Hiab France et Eiffer à payer à la société Appydro et à la société DB Industries la somme de 600 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral et d'image subi.
- Condamner solidairement les sociétés Hiab France et Eiffer à payer à la société Appydro et à la société DB Industries la somme de 8 500 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC
- Condamner solidairement les sociétés Hiab France et Eiffer aux entiers dépens qui seront recouvrés par Maître Sylvie Kong Thong en application de l'article 699 du CPC.
Aux termes de leurs dernières conclusions, déposées et notifiées 23 mai 2023, les sociétés Hiab Italia et Hiab France demandent à la Cour de :
Vu l'article 1103 du Code civil,
Vu les articles L.442-1, L.442-4-III, D.442-3 du Code de Commerce ;
Vu les articles 42, 48, 16, 85, 88, 568, 925, 700 et 699 du Code de procédure civile ;
Vu les articles 7, 8 et 25 du Règlement UE 12//15/2012 du 12 décembre 2012
Il est demandé à la Cour d'appel de Paris de déclarer les sociétés Hiab Italia Srl et Hiab France Sas recevables et bien fondées en l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions et de :
1) Sur l'exception d'incompétence et la demande de disjonction
- Confirmer le Jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Paris le 14 février 2023 en toutes ses dispositions
En conséquence,
- Débouter Appydro et DB industries de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.
2) Sur la demande d'évocation
A titre principal
- Juger que les conditions de l'évocation ne sont pas remplies en l'espèce
En conséquence,
- Débouter Appydro et DB Industries de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions à ce sujet.
A titre subsidiaire,
- Ordonner la réouverture des débats pour permettre aux parties de s'expliquer sur le fond du litige;
Renvoyer l'affaire devant le conseiller de la mise en état pour mettre les parties en mesure de conclure sur les points que la Cour se propose d'évoquer ;
3) En tout état de cause,
- Condamner les sociétés Appydro et DB Industries verser à Hiab France et Effer la somme de 8.000 € chacune au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile outre les entiers dépens de la présente instance
- Débouter Appydro et DB Industries de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.
MOTIVATION
Sur l'exception d'incompétence
S'agissant de la rupture brutale des relations commerciales établies
Les sociétés appelantes soutiennent que le tribunal de commerce de Paris est compétent pour connaître du litige relativement à la rupture brutale des relations commerciales établies nonobstant la clause attributive de compétence figurant au contrat de distribution conclu le 1er octobre 2010 entre les sociétés Effer et DB Industries.
A cet égard, elles font valoir qu'une clause attributive de juridiction ne peut faire échec à l'application des articles L. 442- 6 et D. 442-3 du Code de commerce qui, d'ordre public, institue des juges spécialisés et que lorsqu'un acteur étranger intervient sur le marché français il se soumet à cette règle d'ordre public sauf à induire une inégalité d'obligations entre entreprises françaises et étrangères. Elles en déduisent qu'en intervenant sur le marché français, Effer a accepté l'application de l'ordre public français.
Elles estiment ainsi que la compétence spécialisée du tribunal de commerce de Paris en vertu des dispositions d'ordre public combinées des articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce prime sur la clause attributive de juridiction.
Elles invoquent en tout état de cause, la nullité de la clause, faute pour celle-ci de d'être très apparente, comme c'est le cas de la clause résolutoire, en se distinguant des autres clauses du contrat et ainsi de respecter les exigences de l'article 48 du Code de procédure civile.
A titre subsidiaire, elles soutiennent que le juge français est compétent en application des règles européennes, le fait dommageable, la faute délictuelle de la partie adverse s'étant produit sur le territoire français (article 7.2 du Règlement UE 1215/2012 du 12 décembre 2012), la clause attributive de compétence étant nulle et le dirigeant des sociétés DB Industries étant juge consulaire à Melun, ce qui justifie la compétence du tribunal de commerce de Paris limitrophe.
Elles se prévalent encore de la prorogation de compétence par application de l'article 8.1 dudit règlement, permettant à une personne domiciliée sur le territoire d'un Etat membre d'être attraite, s'il y a plusieurs défendeurs, devant la juridiction du domicile de l'un d'eux, faisant valoir que la juridiction compétente en matière de brusque rupture contractuelle est le tribunal de commerce de Paris devant lequel l'entier dossier doit être jugé, Hiab France étant la société mère de Hiab Italia (Effer).
Les sociétés Hiab Italia et Hiab France rétorquent que les relations commerciales litigieuses :
- ne concernent que Hiab Italia (Effer) et non Hiab France, laquelle n'a jamais entretenu la moindre relation commerciale avec DB Industries et/ou Appydro au titre de la distribution de ses produits et n'a donc jamais eu l'occasion de pouvoir y mettre un terme, que ce soit de façon prétendument brutale ou non,
- sont régies par les dispositions du contrat de distribution dont l'article 21 prévoit une clause attributive de compétence au profit du tribunal de Bologne, clause insérée dans un contrat international et visant tout litige découlant de ce contrat, qui doit recevoir application, et ce même si l'article L.442-6 devait recevoir la qualification de loi de police,
- la clause est valable comme clairement énoncée à l'article 21.1 portant le titre " Tribunal compétent " et figurant dans un contrat conclu entre deux parties, comprenant seulement 12 pages (hors annexes) toutes paraphées par les deux parties,
- que la prorogation de compétence par application de l'article 8.1 du Règlement UE 1215/2012 ne peut être retenue, les demandes formées au titre de la rupture brutale et de la concurrence déloyale n'étant ni connexes ni indivisibles.
Réponse de la Cour
L'article 21.1 du contrat de distribution conclu le 1er octobre 2010 entre les sociétés Eiffer désormais dénommée Hiab Italia et DB Industries aux droits de laquelle se trouve la société Appydro dispose que :
"Tous les litiges venant de ce contrat, y compris ceux qui concernent sa validité, son interprétation, son exécution et sa résolution, seront portés devant le Tribunal de Bologne".
Cette clause d'élection de for qui fait la loi des parties, est applicable, peu important la compétence des tribunaux de commerce spécialisés pour connaître en France des litiges relatifs à la rupture brutale des relations commerciales établies de l'article L 442-6 du code de commerce.
En effet, cette règle d'organisation pour les litiges de l'article L 442-6 du code précité, n'a vocation à s'appliquer que dans l'ordre interne, peu important son caractère d'ordre public, et ne fait pas obstacle à la désignation d'une juridiction étrangère pour en connaître dans un contrat international.
Ladite clause est rédigée de façon suffisamment large en ce qu'elle vise "Tous les litiges venant de ce contrat'" pour s'appliquer à un litige portant sur la rupture brutale des relations commerciales établies à la suite du courrier adressé le 17 janvier 2020 par la société italienne.
Par ailleurs, cette clause qui figure sous l'intitulé "Tribunal compétent" en caractère gras, est écrite avec une police de caractères de taille très lisible ; elle satisfait ainsi à la condition d'être spécifiée de façon très apparente dans l'engagement de la partie à qui elle est opposée posée par l'article 48 du code de procédure civile.
La demande de nullité de cette clause est donc rejetée.
L'article 7.2 du Règlement UE 1215/2012 du 12 décembre 2012, donnant compétence à la juridiction du lieu où le fait dommageable s'est produit ou risque de se produire, n'est pas applicable lorsque les parties comme en l'espèce, ont convenu d'une clause attributive de compétence, conformément à l'article 25.1 dudit règlement
S'agissant du choix de la juridiction en fonction du domicile des intimées sur le fondement de l'article 8.1du Règlement UE 1215/2012 précité, si en cas de pluralités de défendeurs une personne domiciliée sur le territoire d'un Etat membre peut être attraite devant la juridiction du domicile de l'un d'eux, c'est à la condition que les demandes soient liées entre elles par un rapport si étroit qu'il y ait intérêt à les instruire et à les juger en même temps, afin d'éviter des décisions qui pourraient être inconciliables si les causes étaient jugées séparément.
Or, si la responsabilité de la société Hiab France est recherchée avec celle de la société Hiab Italia (Effer), force est de constater que " le contrat de concession de vente et d'assistance en exclusivité " a été signé entre Effer et DG Industries et que le courrier du 17 janvier 2020 mettant fin aux relations entre les parties émane de la seule société Effer, la société Hiab France en étant bénéficiaire, comme reprenant la distribution Effer.
De même les faits de concurrence déloyale allégués sont imputés à la seule société Hiab France.
En l'absence de démonstration d'une connexité ou d'une indivisibilité de cette demande avec celle formée au titre de la rupture brutale, les actes de concurrence déloyale reprochés ne peuvent justifier une prorogation de compétence sur le fondement de l'article 8.1du Règlement UE 1215/2012.
Par conséquent, le tribunal a justement retenu qu'en vertu de la clause attributive de compétence figurant au contrat de distribution, il n'était pas compétent pour statuer sur le litige portant sur la rupture brutale des relations commerciales en cause.
En revanche, en cas de compétence d'une juridiction étrangère, la juridiction française ne peut que se déclarer incompétent et renvoyer les parties à mieux se pourvoir. Le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a désigné le tribunal de Bologne (Italie) comme juridiction compétente.
S'agissant des faits de concurrence déloyale allégués et la demande de disjonction
Les sociétés appelantes soutiennent que les faits de rupture brutale des relations commerciales et de concurrence déloyale qui se sont déroulés de façon concomitante sont liés, que les agissements des sociétés Hiab sont indissociables, que Hiab France est poursuivie sur les deux fondements et qu'il appartiendra au tribunal de commerce de Paris de statuer, ajoutant qu'il résulte de la pièce 7 que c'est le président de Hiab France qui est à l'origine de toute décision.
Elles ajoutent que les conditions de la disjonction de l'article 367 alinéa 2 du code de procédure civile ne sont pas réunies, qu'il y a une connexité totale entre la demande au titre de la rupture brutale et celle fondée sur la concurrence déloyale et que des considérations de bonne administration de la justice justifient de les juger ensemble, conformément aux dispositions de l'article 367 alinéa 1er du code précité.
Les sociétés Hiab Italia et Hiab France soutiennent que les faits de concurrence déloyale invoqués ne concernent que Hiab France, qu'en vertu de l'article 42 alinéa 1 du code de procédure civile, la juridiction territorialement compétente pour statuer sur un tel litige est celle du lieu du siège social du défendeur, lequel est situé à [Localité 8] dans le 78.
Elles rappellent que le tribunal de commerce de Paris ne bénéficie d'une compétence élargie spéciale en vertu des dispositions des articles L.442-4-III4 et D.442-35 du Code de commerce que s'agissant des demandes formées au titre de la rupture brutale des relations commerciales établies à l'encontre d'un défendeur ayant, comme c'est le cas en l'espèce, son siège social dans le ressort de la cour d'appel de Versailles.
S'agissant de la disjonction d'instance, elles soutiennent qu'il est de l'intérêt d'une bonne administration de la justice de prononcer la disjonction entre les demandes formées par Appydro et DB Industries :
- au titre de la rupture prétendument brutale des relations commerciales établies, lesquelles ne concernent en réalité que Effer et Appydro et non Hiab France et qui relèvent de la compétence des tribunaux de [Localité 7] en Italie ;
- au titre des prétendument actes de concurrence déloyale lesquelles ne concernent en réalité que Hiab France et non Effer et qui relèvent de la compétence du tribunal de commerce de Versailles,
ce, en l'absence de lien de connexité et/ou de litispendance entre ces deux affaires lesquelles impliquent donc chacune un co-défendeur différent et relèvent chacune de la compétence d'une juridiction différente, ajoutant que ces deux litiges n'ont ni le même fondement, ni la même cause et peuvent donc parfaitement être tranchés de façon séparée dans le cadre de deux instances différentes.
Réponse de la Cour,
Les sociétés Appydro et DB Industries reprochent à la société Hiab France d'avoir débauché des salariés de la première et d'avoir œuvré de façon déloyale pour les évincer à son profit de leur rôle de distributeur exclusif des produits de la gamme Effer.
Par conséquent, les faits de concurrence déloyale invoqués concernent la seule société Hiab France.
Il s'ensuit qu'en vertu de l'article 42 alinéa 1er, le tribunal compétent pour en connaître est celui du domicile du défendeur, soit le tribunal de commerce de Versailles dans le ressort duquel la société Hiab Franc a son siège social.
Le jugement est confirmé de ce chef.
Par ailleurs, la disjonction de l'instance sur le fondement de l'article 367 alinéa 2 du code de procédure civile est justifiée, s'agissant de deux litiges distincts l'un portant sur la rupture brutale des relations commerciales établies et l'autre portant sur des faits de concurrence déloyale, en l'absence de lien de connexité établi tel que les deux instances ne puissent être jugées séparément.
Le tribunal doit être approuvé d'avoir fait droit à la demande de disjonction présentée.
En conséquence, la demande d'évocation des sociétés appelantes ne peut qu'être rejetée, étant observé que la cour d'appel de Paris n'est la juridiction d'appel d'aucun de ces deux litiges.
Sur les dépens et la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Les sociétés Appydro et DB Industries qui succombent, sont condamnées in solidum aux dépens d'appel et à payer à chacune des sociétés Hiab Italia et Hiab France, la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de celle allouée à ce titre par le tribunal. Elles sont en revanche déboutées de leur demande présentée sur ce fondement.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement en ses dispositions qui lui sont soumises, sauf en ce que le tribunal s'est déclaré incompétent pour connaître du litige concernant les faits allégués de rupture brutale des relations commerciales litigieuses au profit du tribunal de Bologne en Italie,
Statuant à nouveau du chef infirmé,
Dit le tribunal de commerce de Paris incompétent pour connaître du litige concernant les faits allégués de rupture brutale des relations commerciales établies ;
Renvoie les parties à mieux de se pourvoir ;
Y ajoutant,
Condamne les sociétés Appydro et DB Industries aux dépens d'appel et à payer à chacune des sociétés Hiab Italia et Hiab France, la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette toute autre demande.