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Décisions

CJUE, 9e ch., 13 juillet 2023, n° C-757/21 P

COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Nichicon Corporation

Défendeur :

Commission européenne

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président de chambre :

Mme Rossi (rapporteure)

Juges :

M. Bonichot, M. Rodin

Avocat général :

M. Rantos

Avocats :

Me Ablasser-Neuhuber, Me Fussenegger, Me Kühnert, Me Neumayr

CJUE n° C-757/21 P

12 juillet 2023

1 Par son pourvoi, Nichicon Corporation demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 29 septembre 2021, Nichicon Corporation/Commission (T 342/18, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2021:635), par lequel celui-ci a rejeté le recours de Nichicon Corporation tendant, à titre principal, à l’annulation de la décision C(2018) 1768 final de la Commission, du 21 mars 2018, relative à une procédure d’application de l’article 101 [TFUE] et de l’article 53 de l’accord sur l’Espace économique européen (affaire AT.40136 – Condensateurs), publiée sous forme de résumé au Journal officiel de l’Union européenne du 11 décembre 2018 (JO 2018, C 446, p. 10, ci-après la « décision litigieuse »), en ce qu’elle concerne Nichicon Corporation, et, à titre subsidiaire, à la réduction du montant de l’amende qui lui a été infligée.

Le cadre juridique

2 L’article 24 du règlement de procédure du Tribunal, intitulé « Quorum des chambres siégeant avec trois juges ou avec cinq juges », dispose, à son paragraphe 1 :

« Les délibérations des chambres siégeant avec trois juges ou avec cinq juges ne sont valables que si trois juges sont présents. »

3 L’article 35 du règlement de procédure du Tribunal, intitulé « Attributions du greffier », dispose, à son paragraphe 1 :

« Sous l’autorité du président du Tribunal, le greffier est chargé de la réception, de la transmission et de la conservation de tous documents, ainsi que des significations que comporte l’application du présent règlement. »

4 L’article 118 du règlement de procédure du Tribunal, intitulé « Prononcé et signification de l’arrêt », prévoit, à son paragraphe 2 :

« La minute de l’arrêt, signée par le président, les juges ayant pris part aux délibérations et le greffier, est scellée et déposée au greffe. Une copie en est signifiée à chacune des parties. »

5 Le règlement (CE) no 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [101 et 102 TFUE] (JO 2003, L 1, p. 1), prévoit, à son article 18, intitulé « Demandes de renseignements » :

« 1. Pour l’accomplissement des tâches qui lui sont assignées par le présent règlement, la Commission [européenne] peut, par simple demande ou par voie de décision, demander aux entreprises et associations d’entreprises de fournir tous les renseignements nécessaires.

2. Lorsqu’elle envoie une simple demande de renseignements à une entreprise ou à une association d’entreprises, la Commission indique la base juridique et le but de la demande, précise les renseignements demandés et fixe le délai dans lequel ils doivent être fournis. Elle indique aussi les sanctions prévues à l’article 23 au cas où un renseignement inexact ou dénaturé serait fourni.

3. Lorsque la Commission demande par décision aux entreprises et associations d’entreprises de fournir des renseignements, elle indique la base juridique et le but de la demande, précise les renseignements demandés et fixe le délai dans lequel ils doivent être fournis. Elle indique également les sanctions prévues à l’article 23 et indique ou inflige les sanctions prévues à l’article 24. Elle indique encore le droit de recours ouvert devant la Cour de justice contre la décision.

4. Sont tenus de fournir les renseignements demandés, au nom de l’entreprise ou de l’association d’entreprises concernées, les propriétaires des entreprises ou leurs représentants et, dans le cas de personnes morales, de sociétés ou d’associations n’ayant pas la personnalité juridique, les personnes chargées de les représenter selon la loi ou les statuts. Les avocats dûment mandatés peuvent fournir les renseignements demandés au nom de leurs mandants. Ces derniers restent pleinement responsables du caractère complet, exact et non dénaturé des renseignements fournis.

5. La Commission transmet sans délai une copie de la simple demande ou de la décision à l’autorité de concurrence de l’État membre sur le territoire duquel est situé le siège de l’entreprise ou de l’association d’entreprises et à l’autorité de concurrence de l’État membre dont le territoire est concerné.

6. À la demande de la Commission, les gouvernements et les autorités de concurrence des États membres fournissent à la Commission tous les renseignements nécessaires à l’accomplissement des tâches qui lui sont assignées par le présent règlement. »

6 L’article 23 de ce règlement, intitulé « Amendes », prévoit, à ses paragraphes 2 et 3 :

« 2. La Commission peut, par voie de décision, infliger des amendes aux entreprises et associations d’entreprises lorsque, de propos délibéré ou par négligence :

a) elles commettent une infraction aux dispositions de l’article [101 ou 102 TFUE] [...]

[...]

Pour chaque entreprise et association d’entreprises participant à l’infraction, l’amende n’excède pas 10 % de son chiffre d’affaires total réalisé au cours de l’exercice social précédent.

[...]

3. Pour déterminer le montant de l’amende, il y a lieu de prendre en considération, outre la gravité de l’infraction, la durée de celle-ci. »

7 L’article 31 dudit règlement, intitulé « Contrôle de la Cour de justice », dispose :

« La Cour de justice statue avec compétence de pleine juridiction sur les recours formés contre les décisions par lesquelles la Commission a fixé une amende ou une astreinte. Elle peut supprimer, réduire ou majorer l'amende ou l'astreinte infligée. »

8 Les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement no 1/2003 (JO 2006, C 210, p. 2, ci-après les « lignes directrices de 2006 ») sont rédigées comme suit :

« 13 En vue de déterminer le montant de base de l’amende à infliger, la Commission utilisera la valeur des ventes de biens ou services, réalisées par l’entreprise, en relation directe ou indirecte [...] avec l’infraction, dans le secteur géographique concerné à l’intérieur du territoire de l’[Espace économique européen (EEE)]. La Commission utilisera normalement les ventes de l’entreprise durant la dernière année complète de sa participation à l’infraction (ci-après “la valeur des ventes”).

[...]

21 En règle générale, la proportion de la valeur des ventes prise en compte sera fixée à un niveau pouvant aller jusqu’à 30 %.

[...]

25 En outre, indépendamment de la durée de la participation d'une entreprise à l'infraction, la Commission inclura dans le montant de base une somme comprise entre 15 % et 25 % de la valeur des ventes telle que définie à la section A ci-dessus, afin de dissuader les entreprises de même participer à des accords horizontaux de fixation de prix, de répartition de marché et de limitation de production. La Commission peut également appliquer un tel montant additionnel dans le cas d'autres infractions. En vue de décider la proportion de la valeur des ventes à prendre en compte dans un cas donné, la Commission tiendra compte d'un certain nombre de facteurs, en particulier ceux identifiés au point 22.

[...]

29 Le montant de base de l’amende peut être réduit lorsque la Commission constate l’existence de circonstances atténuantes, telles que :

– lorsque l’entreprise concernée apporte la preuve qu’elle a mis fin à l’infraction dès les premières interventions de la Commission. Ceci ne s’appliquera pas aux accords ou pratiques de nature secrète (en particulier les cartels) ;

– lorsque l’entreprise concernée apporte la preuve que l’infraction a été commise par négligence ;

– lorsque l’entreprise concernée apporte la preuve que sa participation à l’infraction est substantiellement réduite et démontre par conséquent que, pendant la période au cours de laquelle elle a adhéré aux accords infractionnels, elle s’est effectivement soustraite à leur application en adoptant un comportement concurrentiel sur le marché ; le seul fait qu’une entreprise a participé à une infraction pour une durée plus courte que les autres ne sera pas considéré comme une circonstance atténuante, puisque cette circonstance est déjà reflétée dans le montant de base ;

– lorsque l’entreprise concernée coopère effectivement avec la Commission, en dehors du champ d’application de la communication sur la clémence et au-delà de ses obligations juridiques de coopérer ;

– lorsque le comportement anti-concurrentiel a été autorisé ou encouragé par les autorités publiques ou la réglementation. [...]

[...]

37 Bien que les présentes Lignes directrices exposent la méthodologie générale pour la fixation d’amendes, les particularités d’une affaire donnée ou la nécessité d’atteindre un niveau dissuasif dans une affaire particulière peuvent justifier que la Commission s’écarte de cette méthodologie ou des limites fixées au point 21. »

9 Les points 14 et 15 de la communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 2006, C 298, p. 17) sont rédigés comme suit :

« (14) Toute entreprise souhaitant solliciter l’immunité d’amende doit prendre contact avec la direction générale de la concurrence de la Commission. Elle peut soit demander dans un premier temps l’octroi d’un marqueur, soit présenter immédiatement une demande formelle d’immunité d’amende à la Commission, de manière à remplir les conditions fixées au point (8) a) ou b), selon le cas. La Commission peut s’abstenir de prendre en considération une demande d’immunité d’amende pour le motif qu’elle lui a été présentée après l’envoi de la communication des griefs.

(15) Les services de la Commission peuvent accorder un marqueur protégeant la place d’une entreprise dans l’ordre d’arrivée des demandes pendant un délai qui sera déterminé au cas par cas afin de leur permettre de rassembler les renseignements et éléments de preuve nécessaires. Pour pouvoir obtenir un marqueur, l’entreprise doit communiquer à la Commission des informations concernant son nom et son adresse, les participants à l’entente présumée, le ou les produits en cause, le ou les territoires affectés, une estimation de la durée de l’entente présumée et la nature de l’entente présumée. Elle doit également informer la Commission de toute demande de clémence déjà présentée ou qui serait présentée à d’autres autorités au sujet de l’entente présumée et justifier sa demande d’un marqueur. Lorsqu’ils accordent un marqueur, les services de la Commission fixent le délai dans lequel l’entreprise doit compléter sa demande en fournissant les renseignements et éléments de preuve nécessaires pour atteindre le niveau de preuve requis pour l’immunité. Les entreprises qui ont obtenu un marqueur ne peuvent satisfaire à cette condition par la présentation d’une demande formelle en termes hypothétiques. Si l’entreprise s’exécute dans les délais impartis par les services de la Commission, les renseignements et éléments de preuve seront considérés comme ayant été communiqués à la date d’octroi du marqueur. »

Les antécédents du litige et la décision litigieuse

10 Les antécédents du litige figurent aux points 1 à 28 de l’arrêt attaqué et peuvent être résumés de la manière suivante pour les besoins de la présente procédure.

11 Nichicon Corporation est une société établie au Japon, qui fabrique et vend des condensateurs électrolytiques à l’aluminium et, jusqu’au 6 février 2013, au tantale.

12 L’infraction en cause concerne les condensateurs électrolytiques à l’aluminium et au tantale.

13 Le prix de ces condensateurs électrolytiques est un paramètre concurrentiel important.

14 Le 4 octobre 2013, Panasonic et ses filiales ont déposé une demande de marqueur auprès de la Commission, au titre des points 14 et 15 de la communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes, en fournissant des informations sur l’existence d’une infraction présumée dans le secteur des condensateurs électrolytiques.

15 Le 21 mars 2018, la Commission a adopté la décision litigieuse, par laquelle elle a constaté l’existence d’une infraction unique et continue à l’article 101 TFUE et à l’article 53 de l’accord sur l’Espace économique européen, du 2 mai 1992 (JO 1994, L 1, p. 3, ci-après l’ « accord EEE »), dans le secteur des condensateurs électrolytiques, à laquelle neuf entreprises ou groupes d’entreprises (ci-après les « participants à l’entente »), à savoir Elna, Hitachi AIC, Holy Stone, Matsuo, NEC Tokin, Nippon Chemi-Con Corporation (ci–après « NCC »), Rubycon, Sanyo (désignant Sanyo et Panasonic ensemble) et Nichicon Corporation, ont participé.

16 La Commission a relevé, en substance, que l’infraction en cause s’était déroulée entre le 26 juin 1998 et le 23 avril 2012, sur l’ensemble du territoire de l’EEE, et avait consisté en des accords et/ou pratiques concertées qui avaient pour objet la coordination des politiques de prix en ce qui concerne la fourniture de condensateurs électrolytiques à l’aluminium et au tantale.

17 L’entente était essentiellement organisée au moyen de réunions multilatérales, qui se tenaient généralement au Japon, tous les mois ou un mois sur deux, au niveau des cadres supérieurs de vente, et, tous les six mois, au niveau des dirigeants, y compris des présidents.

18 Les réunions multilatérales ont été, tout d’abord, organisées, entre l’année 1998 et l’année 2003, sous le nom de « cercle du/des condensateurs électrolytiques » ou de « conférence des condensateurs électrolytiques ». Elles ont été, ensuite, organisées, entre l’année 2003 et l’année2005, sous le nom de « conférence aluminium-tantale » ou « groupe des condensateurs à l’aluminium ou au tantale » (ci-après les « réunions ATC »). Elles ont été, enfin, organisées, entre l’année 2005 et l’année 2012, sous le nom de « groupe d’étude de marché » ou « groupe de marketing » (ci–après les « réunions MK »). Parallèlement aux réunions MK, et en complément de celles-ci, des réunions « augmentation des coûts » ou « augmentation des condensateurs » (ci-après les « réunions CUP ») ont été organisées, entre l’année 2006 et l’année 2008.

19 Outre ces réunions multilatérales, les participants à l’entente avaient également, selon les besoins, des contacts bilatéraux et trilatéraux ad hoc (ci-après, pris ensemble, les « échanges anticoncurrentiels »). Dans le cadre de ces échanges anticoncurrentiels, les participants à l’entente échangeaient des informations sur les prix et les futurs prix pratiqués, sur les futures réductions de prix et les fourchettes de ces réductions, sur l’offre et la demande, y compris sur l’offre et la demande futures, et, dans certains cas, concluaient, appliquaient et suivaient des accords sur les prix.

20 La Commission a considéré que le comportement des participants à l’entente constituait une forme d’accord et/ou de pratique concertée visant un objectif commun, à savoir éviter la concurrence par les prix et coordonner leur futur comportement concernant la vente de condensateurs électrolytiques, en réduisant ainsi l’incertitude sur le marché.

21 La Commission a conclu que ce comportement avait un objet anticoncurrentiel unique.

22 Elle a retenu la responsabilité de Nichicon Corporation en raison de sa participation directe et continue à l’entente du 26 juin 1998 au 31 mai 2010, sans que sa responsabilité s’étende toutefois aux réunions MK, et, à ce titre, elle lui a infligé une amende d’un montant de 72 901 000 euros.

23 Aux fins du calcul du montant de cette amende, la Commission a appliqué la méthodologie exposée dans les lignes directrices de 2006.

24 En premier lieu, pour déterminer le montant de base de l’amende, elle a pris en compte la valeur des ventes de Nichicon Corporation durant la dernière année complète de participation à l’infraction, conformément au point 13 de ces lignes directrices.

25 La Commission a calculé la valeur des ventes sur la base des ventes de condensateurs électrolytiques à l’aluminium et au tantale facturées à des clients établis dans l’EEE.

26 En outre, elle a calculé la valeur pertinente des ventes séparément pour les deux catégories de produits, à savoir les condensateurs électrolytiques à l’aluminium et les condensateurs électrolytiques au tantale, et leur a appliqué des coefficients multiplicateurs différents en fonction de la durée.

27 En ce qui concerne Nichicon Corporation, la Commission a retenu un coefficient multiplicateur de 11,93 (correspondant à la période comprise entre le 26 juin 1998 et le 31 mai 2010) pour les condensateurs électrolytiques à l’aluminium, et de 10,36 (correspondant à la période comprise entre le 29 octobre 1999 et le 9 mars 2010) pour les condensateurs électrolytiques au tantale.

28 La Commission a fixé à 16 % la proportion de la valeur des ventes à retenir au titre de la gravité de l’infraction. À cet égard, elle a estimé que des arrangements horizontaux de coordination des prix comptaient, par leur nature même, parmi les infractions les plus graves à l’article 101 TFUE et à l’article 53 de l’accord EEE et que l’entente s’étendait à l’ensemble du territoire de l’EEE.

29 Elle a appliqué un montant additionnel de 16 %, au titre du point 25 des lignes directrices de 2006, afin de s’assurer du caractère suffisamment dissuasif de l’amende infligée.

30 La Commission a, dès lors, fixé à 75 156 000 euros le montant de base de l’amende.

31 En second lieu, au titre des circonstances atténuantes, la Commission a accordé une réduction de 3 % de ce montant de base, étant donné que la participation de Nichicon Corporation aux réunions MK n’était pas établie et que rien ne prouvait qu’elle en avait eu connaissance.

32 La décision litigieuse dispose ce qui suit :

« Article premier

Les entreprises suivantes ont enfreint l’article 101 TFUE et l’article 53 de l’accord EEE en participant, au cours des périodes indiquées, à une infraction unique et continue dans le secteur des condensateurs électrolytiques couvrant l’ensemble du territoire de l’EEE, consistant en des accords et/ou pratiques concertées qui avaient pour objet la coordination des politiques de prix :

[...]

f) Nichicon Corporation du 26 juin 1998 au 31 mai 2010, sans que sa responsabilité s’étende aux réunions MK ;

[...]

Article 2

Les amendes suivantes sont infligées pour l’infraction visée à l’article 1er :

[...]

i) Nichicon Corporation : 72 901 000 [euros] ;

[...] »

La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

33 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 30 mai 2018, Nichicon Corporation a introduit un recours tendant, à titre principal, à l’annulation de la décision litigieuse en ce qu’elle la concerne et, à titre subsidiaire, à la réduction du montant de l’amende qui lui a été infligée.

34 À l’appui de son recours, Nichicon Corporation a invoqué cinq moyens.

35 Par ses premier à troisième moyens, elle a contesté la conclusion de la Commission tenant à l’existence d’une infraction unique et continue à l’article 101 TFUE et à l’article 53 de l’accord EEE dans le secteur des condensateurs électrolytiques, sur l’ensemble du territoire de l’EEE, pendant une durée de presque quatorze ans. Le premier moyen était tiré d’erreurs matérielles de fait, en ce qui concerne la portée géographique des échanges anticoncurrentiels. Le deuxième moyen était tiré d’erreurs de droit, en ce qui concerne, d’une part, la qualification d’infraction unique et continue et, d’autre part, la participation de Nichicon Corporation à cette infraction. Le troisième moyen était tiré de l’incompétence de la Commission pour appliquer l’article 101 TFUE et l’article 53 de l’accord EEE. Par le quatrième moyen, Nichicon Corporation a contesté l’amende qui lui avait été infligée, en raison d’erreurs manifestes d’appréciation dans le calcul du montant de l’amende. Par le cinquième moyen, tiré de la violation du droit d’être entendue, Nichicon Corporation a contesté la légalité de la procédure de constatation de l’infraction.

36 Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté ce recours dans son intégralité.

Les conclusions des parties

37 Par son pourvoi, Nichicon Corporation demande à la Cour :

– d’annuler l’arrêt attaqué et d’annuler la décision litigieuse en ce qu’elle concerne Nichicon Corporation ;

– à titre subsidiaire, d’annuler l’arrêt attaqué dans la mesure où le Tribunal a rejeté :

– le premier moyen concernant des erreurs matérielles de fait relatives aux réunions tenues le « 18 décembre 1998 », en « avril/mai 2005 », en « février 2009 », en « juillet 2009 », le « 9 mars 2010 » et le « 31 mai 2010 » en vue d’établir la participation de Nichicon Corporation à une infraction au droit de la concurrence de l’Union ;

– la deuxième branche du deuxième moyen relative à l’absence de responsabilité de Nichicon Corporation concernant les contacts bilatéraux et trilatéraux ayant eu lieu entre les autres participants à l’entente ;

– la troisième branche du deuxième moyen relative à l’absence de participation à une infraction unique et continue avant le 7 novembre 2003 ;

– le quatrième moyen, tiré d’erreurs manifestes d’appréciation dans la détermination de l’amende ;

et, par conséquent, d’annuler partiellement la décision litigieuse et de réduire à un montant proportionné l’amende de 72 901 000 euros infligée à Nichicon Corporation ;

– à titre subsidiaire, de renvoyer l’affaire devant le Tribunal, et

– de condamner la Commission aux dépens.

38 La Commission demande à la Cour de rejeter le pourvoi et de condamner Nichicon Corporation à supporter l’intégralité des dépens exposés dans le cadre de la présente procédure.

Sur le pourvoi

39 Au soutien de son pourvoi, Nichicon Corporation soulève quatre moyens.

Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 118, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal

Argumentation des parties

40 Nichicon Corporation soutient que l’arrêt attaqué lui a été notifié sans que les juges aient apposé leur signature manuscrite. Par lettre remise le 30 septembre 2021, le Tribunal lui aurait indiqué que, « en raison de circonstances exceptionnelles liées à la crise sanitaire, il n’a pas été possible d’obtenir les signatures manuscrites des juges ».

41 Or, tout d’abord, selon Nichicon Corporation, la règle prévue à l’article 118, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, selon laquelle la minute de l’arrêt doit être signée par les juges ayant pris part au délibéré, ne prévoit pas une telle exception.

42 Ensuite, la jurisprudence de la Cour concernant les actes de la Commission issue de l’arrêt du 6 avril 2000, Commission/ICI (C 286/95 P, EU:C:2000:188, points 40, 42 et 46), serait applicable aux arrêts du Tribunal. Selon cette jurisprudence, l’authentification des actes aurait pour but d’assurer la sécurité juridique en figeant, dans les langues faisant foi, le texte adopté, de sorte que le contrôle du respect de la formalité de l’authentification et, ainsi, du caractère certain de l’acte serait un préalable à tout autre contrôle. La violation d’une forme substantielle serait constituée par le seul défaut d’authentification, sans qu’il soit nécessaire d’établir, en outre, que l’acte est affecté d’un autre vice ou que l’absence d’authentification a causé un préjudice à celui qui l’invoque.

43 Enfin, cette authentification serait une condition formelle nécessaire pour établir si le quorum prévu à l’article 24, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal est atteint ainsi que pour assurer la sécurité juridique. Il découlerait de l’arrêt du 15 juin 1994, Commission/BASF e.a. (C 137/92 P, EU:C:1994:247, point 75), que, en cas de contestation ou de pourvoi, les principes de la sécurité juridique et de l’État de droit exigent que la correspondance parfaite des textes notifiés ou publiés avec le texte adopté puisse être vérifiée.

44 Par ailleurs, en l’espèce le Tribunal n’aurait pas authentifié l’arrêt attaqué par un moyen autre que la signature manuscrite, tel qu’une signature électronique.

45 La Commission conteste cette argumentation.

Appréciation de la Cour

46 Le premier moyen est tiré d’une violation de l’article 118, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal que le Tribunal aurait commise en notifiant à Nichicon Corporation une copie de l’arrêt attaqué non signée par les juges ayant participé aux délibérations.

47 Afin de statuer sur ce moyen, il convient de relever, en premier lieu, qu’il ne résulte pas de cette disposition que la copie de l’arrêt signifiée à chacune des parties doit porter la signature du président du Tribunal, des juges ayant pris part aux délibérations et du greffier de celui-ci [voir, par analogie, ordonnance du vice-président de la Cour du 13 décembre 2021, Portugal/Commission, C 547/21 P(R), non publiée, EU:C:2021:1007, point 116].

48 En deuxième lieu, dès lors que Nichicon Corporation se prévaut de la lettre du greffier du Tribunal accompagnant la copie de l’arrêt attaqué qui lui a été signifiée pour établir que la minute de cet arrêt n’a pas été signée par les juges ayant pris part aux délibérations, il y a lieu de souligner que, s’il ressort certes de cette lettre que des mesures d’organisation spécifiques avaient été mises en place au sein de ladite juridiction, en ce qui concerne les modalités d’approbation des arrêts, en vue d’assurer la continuité de son fonctionnement malgré la crise sanitaire, il ne découle pas de ladite lettre que des signatures manuscrites ne sont pas, postérieurement à la signification de la copie dudit arrêt, apposées sur la minute de celui-ci, conformément à l’article 118, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal [voir, par analogie, ordonnance du vice-président de la Cour du 13 décembre 2021, Portugal/Commission, C 547/21 P(R), non publiée, EU:C:2021:1007, point 117].

49 En troisième lieu, c’est dans l’exercice des fonctions qui lui sont attribuées par l’article 35, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, selon lequel le greffier est chargé de la réception, de la transmission et de la conservation de tous documents, ainsi que des significations que comporte l’application dudit règlement, que le greffier du Tribunal a indiqué dans sa lettre d’accompagnement de l’arrêt attaqué qu’il a pris acte de l’accord des juges ayant pris part aux délibérations au moyen de la procédure écrite, ainsi que du fait que cet arrêt a été rendu en bonne et due forme le 29 septembre 2021.

50 Dans ces conditions, il ne fait aucun doute que, lors de l’adoption de l’arrêt attaqué, les exigences tenant au quorum étaient respectées et qu’une copie exacte de cet arrêt a été notifiée aux parties.

51 Par ailleurs, la jurisprudence sur laquelle le pourvoi se fonde est dénuée de pertinence en l’espèce, dans la mesure où non seulement elle ne concerne pas le règlement de procédure du Tribunal, mais elle se réfère à des situations dans lesquelles l’acte en question n’avait pas pu être authentifié autrement qu’avec la signature de l’autorité l’ayant adopté.

52 Il s’ensuit que le premier moyen est non fondé.

Sur le deuxième moyen, tiré de distorsions de la preuve, d’erreurs de droit et d’une motivation insuffisante dans l’analyse des échanges anticoncurrentiels

53 Le deuxième moyen se compose de cinq branches.

Sur la première branche du deuxième moyen, concernant la notion d’infraction par objet

– Argumentation des parties

54 Nichicon Corporation soutient que le Tribunal a, au point 147 de l’arrêt attaqué, indiqué que les contacts lors de la réunion du 18 décembre 1998 étaient de nature anticoncurrentielle et a dès lors considéré, en substance, qu’il s’agissait d’une infraction par objet. Ainsi qu’il résulterait des points 141 à 146 de l’arrêt attaqué, cette conclusion du Tribunal se fonde sur la déclaration suivante de la société concurrente M. : « Europe – une baisse visible est engagée. Nous commencerons à assurer les règlements en euros à partir d’avril de l’année prochaine ».

55 Or, les constatations du Tribunal ne permettraient pas de retenir la qualification d’infraction par objet. En effet, la notion de restriction « par objet », au sens de l’article 101 TFUE, devrait être interprétée de manière restrictive. Il ne suffirait donc pas que l’échange d’informations puisse influer directement sur la stratégie commerciale et atténuer le degré d’incertitude. Il faudrait, en outre, que ce comportement présente, en soi, un degré suffisant de nocivité à l’égard de la concurrence. Le Tribunal n’aurait fourni aucune raison pour laquelle, en soi ou en raison de son contexte économique ou juridique, un échange d’informations concernant l’état des commandes et l’acceptation de l’euro devrait être considéré, par sa nature même, comme nuisible au bon fonctionnement du jeu normal de la concurrence. En l’absence de qualification d’infraction par objet, il aurait donc fallu démontrer les effets anticoncurrentiels des comportements censurés.

56 La Commission conteste cette argumentation.

– Appréciation de la Cour

57 Afin de statuer sur la première branche du deuxième moyen, il convient de constater, d’une part, que Nichicon Corporation soutient, certes, que le Tribunal a commis une erreur de droit lors de la qualification de son comportement comme étant de nature anticoncurrentielle. Toutefois, elle ne conteste ni la jurisprudence mentionnée aux points 105 à 111 de l’arrêt attaqué ni la conclusion que le Tribunal en tire au point 112 de cet arrêt, selon laquelle la fourniture d’informations commerciales sensibles, telles que l’échange d’informations sur les prix, y compris sur les prix futurs, sur l’offre et la demande, y compris sur l’offre et la demande futures (notamment sur le volume de production ou l’augmentation ou la diminution des expéditions), permet de réduire l’incertitude quant au comportement des concurrents sur le marché, d’aboutir à des conditions de concurrence ne correspondant pas aux conditions normales du marché et donc donne lieu à une pratique concertée ayant pour objet de restreindre la concurrence au sens de l’article 101, paragraphe 1, TFUE.

58 D’autre part, Nichicon Corporation ne conteste pas la conclusion à laquelle le Tribunal est parvenu au point 146 de l’arrêt attaqué, selon laquelle les participants à la réunion du 18 décembre 1998 ont échangé, lors de celle-ci, des informations individualisées et sensibles de nature à influer directement sur leur comportement sur le marché en cause.

59 Dans ces conditions, Nichicon Corporation ne saurait être fondée à considérer que le Tribunal aurait encore dû vérifier si le comportement reproché en l’espèce présentait, en lui-même, un degré suffisant de nocivité à l’égard de la concurrence et en examiner les effets sur la concurrence.

60 Par conséquent, la première branche du deuxième moyen est non fondée.

Sur la deuxième branche du deuxième moyen, concernant la fiabilité d’une déclaration d’entreprise

– Argumentation des parties

61 Nichicon Corporation fait valoir que, aux points 195 et 227 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a admis que les contacts bilatéraux avec NEC Tokin qui avaient eu lieu, d’une part, au cours de la période comprise entre le mois d’avril et le mois de mai 2005 (ci-après le « contact avec NEC Tokin de 2005 »), et d’autre part, au cours des mois de février et de juillet 2009, avaient été établis par la Commission sur la seule base de la déclaration de NEC Tokin du 30 octobre 2014 (ID 930). Cependant, il aurait à tort rejeté, aux points 199 et 227 de l’arrêt attaqué, les arguments de Nichicon Corporation selon lesquels la Commission n’avait pas établi à suffisance de droit ces contacts. En effet, le Tribunal, d’une part, aurait conclu que cette déclaration présentait « un niveau certain de fiabilité » et que la Commission était donc en droit de se fonder exclusivement sur ce document. D’autre part, le Tribunal aurait, au point 197 de l’arrêt attaqué, considéré la circonstance que Nichicon Corporation n’avait pas contesté l’existence du contact avec NEC Tokin de 2005 dans la procédure administrative comme une preuve supplémentaire. Ces deux constatations seraient entachées d’erreurs de droit.

62 En premier lieu, la conclusion du Tribunal, tirée au point 199 de l’arrêt attaqué, selon laquelle la déclaration de NEC Tokin du 30 octobre 2014 (ID 930) présentait « un certain niveau de fiabilité », serait fondée sur l’appréciation, au point 196 de l’arrêt attaqué, qu’« elle ne revêt pas un caractère vague », « provient d’un témoin direct » et « va à l’encontre des intérêts de NEC Tokin ».

63 Or, d’une part, en effectuant ces appréciations, le Tribunal serait allé au–delà du contrôle de la légalité de la décision litigieuse et aurait substitué sa propre appréciation à celle de la Commission. En effet, la conclusion du Tribunal selon laquelle cette déclaration est particulièrement fiable ne trouverait aucun fondement dans la décision litigieuse. La Commission n’aurait pas analysé si ladite déclaration remplissait spécifiquement les conditions permettant de se fonder exclusivement sur elle. La question de savoir si ces conditions sont remplies ne pourrait pas être traitée pour la première fois devant le Tribunal.

64 D’autre part, en estimant que la Commission pouvait se fonder exclusivement sur la déclaration de NEC Tokin du 30 octobre 2014 (ID 930) pour établir les contacts en question, le Tribunal aurait violé les droits de la défense de Nichicon Corporation tels qu’énoncés à l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 et aux articles 47 et 48 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. En effet, en ce qui concerne l’utilisation de témoignages de complices dans le cadre de procédures pénales, la Cour européenne des droits de l’homme aurait considéré que l’utilisation de déclarations faites par des témoins en échange d’une immunité ou d’autres avantages peut compromettre l’équité de la procédure menée contre l’accusé et soulever des questions délicates dans la mesure où, par leur nature même, de telles déclarations se prêtent à la manipulation et peuvent être faites uniquement en vue d’obtenir les avantages offerts en échange ou à titre de vengeance personnelle. Par conséquent, ces déclarations devraient faire l’objet d’un examen particulièrement minutieux. Un tel degré d’examen serait également requis pour les déclarations de clémence d’entreprises qui, telles que NEC Tokin, ne sont pas les premières à se présenter et qui sont donc dans une course pour fournir à la Commission une valeur ajoutée significative.

65 Le standard de preuve appliqué par le Tribunal, qui aurait considéré qu’il suffit que la déclaration de NEC Tokin du 30 octobre 2014 (ID 930) présente « un certain niveau de fiabilité », ne répondrait donc pas au critère d’examen minutieux requis par l’article 48 de la charte des droits fondamentaux. En outre, l’analyse de cette déclaration par le Tribunal, qui se limite au seul point 196 de l’arrêt attaqué et qui, de surcroît, ne prend pas en compte l’ensemble du contenu de ladite déclaration, ne répondrait pas non plus aux exigences de la jurisprudence de la Cour, en particulier de l’arrêt du 19 décembre 2013, Siemens e.a./Commission (C 239/11 P, C 489/11 P et C 498/1 P, non publié, EU:C:2013:866, points 164 et 165).

66 En deuxième lieu, le Tribunal aurait, aux points 197 et 227 de l’arrêt attaqué, estimé que l’absence de contestation de l’existence des contacts en question par Nichicon Corporation dans le cadre de la procédure administrative est de nature à constituer une preuve supplémentaire. Cette conclusion serait fondée sur une dénaturation manifeste des éléments de preuve. En effet, elle serait clairement contredite par la réponse de Nichicon Corporation à la communication des griefs, dans laquelle l’existence de ces contacts aurait bel et bien été contestée en raison d’un manque de corroboration.

67 En troisième lieu, Nichicon Corporation ajoute que les conclusions du Tribunal concernant la portée géographique des contacts bilatéraux avec NEC Tokin dénaturent également les éléments de preuve. En effet, le Tribunal aurait, aux points 205 et 233 de l’arrêt attaqué, rejeté les arguments de Nichicon Corporation selon lesquels ces contacts étaient limités à l’Asie. À cet égard, le Tribunal aurait, au point 201 de l’arrêt attaqué, considéré que la déclaration de NEC Tokin du 3 mars 2015 (ID 1369), selon laquelle lesdits contacts concernaient « majoritairement ou entièrement » l’Asie, n’était pas pertinente, parce qu’elle ne concernait que « les ventes de certains produits de condensateurs à des clients spécifiques ». Par conséquent, le Tribunal aurait considéré que l’extrapolation selon laquelle ces mêmes contacts bilatéraux concernaient l’Asie était injustifiée.

68 Cette affirmation serait fondée sur une dénaturation manifeste des éléments de preuve invoqués par Nichicon Corporation. Il ressortirait des termes clairs de cette déclaration (« concernant les contacts bilatéraux identifiés dans les déclarations d’entreprise de NEC Tokin, ceux-ci concernaient des ventes de certains produits de condensateurs à des clients spécifiques, en grande majorité ou entièrement destinés à être livrés en Asie ») que celle-ci concerne tous les contacts bilatéraux. Si tous ces contacts ne concernaient que certains produits et certains clients spécifiques, ladite déclaration selon laquelle ils étaient « en grande majorité ou entièrement destinés à être livrés en Asie » s’appliquerait à chacun de ces contacts bilatéraux.

69 De même, l’interprétation a contrario de la déclaration de NEC Tokin du 3 mars 2015 (ID 1369), au point 202 de l’arrêt attaqué, dénaturerait manifestement les éléments de preuve. Le Tribunal aurait déduit de cette déclaration, selon laquelle « dans “seulement quelques” cas, des livraisons avaient été effectuées à des usines de fabrication qui ne figuraient pas sur les listes incomplètes jointes à cette déclaration » que, « dans les autres cas, les informations relatives à ces contacts concernaient en fait des livraisons effectuées à des usines figurant sur la liste », dont notamment les usines de fabrication de Canon en Allemagne et en France. Toutefois, cette déduction a contrario serait explicitement contredite par la phrase précédente de ladite déclaration, aux termes de laquelle « la liste ci-dessous [...] ne doit pas être comprise en tant que telle comme indiquant que les discussions [...] concernaient des livraisons à ces usines de fabrication de l’EEE ».

70 La Commission conteste cette argumentation.

– Appréciation de la Cour

71 Par la deuxième branche du deuxième moyen, Nichicon Corporation fait valoir que le Tribunal a, aux points 195 et 227 de l’arrêt attaqué, admis que les contacts bilatéraux avec NEC Tokin visés au point 61 du présent arrêt avaient été établis par la Commission sur la seule base de la déclaration de NEC Tokin du 30 octobre 2014 (ID 930).

72 Toutefois, d’une part, Nichicon Corporation ne conteste pas la jurisprudence, rappelée aux points 99 à 102 de l’arrêt attaqué, à laquelle renvoie le point 195 de cet arrêt, selon laquelle la Commission est en droit de se fonder sur une telle déclaration unique dès lors que celle-ci est particulièrement fiable.

73 Or, tout d’abord, comme le met en exergue la Commission, c’est pour répondre à un argument de Nichicon Corporation que le Tribunal a vérifié si la déclaration de NEC Tokin du 30 octobre 2014 (ID 930) était suffisamment crédible, de sorte qu’il ne saurait lui être reproché d’avoir substitué son appréciation à celle de la Commission. Par ailleurs, Nichicon Corporation ne soutient pas avoir contesté en première instance que la Commission a omis d’effectuer une telle vérification.

74 Ensuite, le Tribunal a, au point 196 de l’arrêt attaqué, examiné le degré de fiabilité de cette déclaration. Or, tout en soutenant que cet examen était insuffisant, Nichicon Corporation n’invoque aucune erreur d’appréciation ou de droit commise par le Tribunal à ce point 196.

75 Enfin, l’appréciation, au point 197 de l’arrêt attaqué, selon laquelle Nichicon Corporation n’a pas contesté l’existence du contact avec NEC Tokin de 2005 dans le cadre de la procédure administrative, présente un caractère manifestement subsidiaire, ainsi qu’en atteste l’emploi de l’expression « au demeurant ». L’argumentation de Nichicon Corporation dirigée contre ce point 197 est, dès lors, inopérante.

76 D’autre part, quant à la portée géographique des contacts bilatéraux avec NEC Tokin, le rejet par le Tribunal de l’argument de Nichicon Corporation selon lequel les informations échangées ne concernaient que l’Asie était fondé sur les quatre motifs contenus aux points 201 à 204 de l’arrêt attaqué.

77 Or, Nichicon Corporation ne conteste que les motifs figurant aux points 201 et 202 de cet arrêt, sans remettre en cause les points 203 et 204 dudit arrêt, dans lesquels le Tribunal a considéré, d’une part, que la déclaration de NEC Tokin du 30 octobre 2014 (ID 930) ne démontrait pas que tout contact concernant Canon ne se rapportait pas à l’Europe et, d’autre part, que l’argument selon lequel Nichicon Corporation n’aurait réalisé aucune vente à Canon dans l’EEE au cours de la période pertinente devait être écarté.

78 Par conséquent, l’argumentation de Nichicon Corporation à cet égard est inopérante.

79 Compte tenu des considérations qui précèdent, la deuxième branche du deuxième moyen doit être rejetée.

Sur la troisième branche du deuxième moyen, concernant la portée géographique d’un contact bilatéral

– Argumentation des parties

80 Nichicon Corporation soutient que le Tribunal a, au point 266 de l’arrêt attaqué, rejeté son argument selon lequel les informations échangées lors du contact bilatéral du mois de juillet 2009 avec NCC ne concernaient pas l’Europe. Cet argument aurait été fondé sur le fait que le passage du courrier électronique interne de NCC du 31 juillet 2009 invoqué par la Commission, selon lequel A de NCC « confirmera, à l’avenir, avec [Nichicon Corporation] le prix mondial », indiquerait que la demande de propositions d’Alpine discutée chez NCC au mois de juillet 2009 concernait les ventes intérieures japonaises, et non le « prix mondial ». Au point 263 de l’arrêt attaqué, le Tribunal aurait considéré que cette phrase « ne saurait constituer, en [elle]-même, un indice que les négociations mentionnées avant cette phrase concernaient le marché japonais ».

81 Toutefois, Nichicon Corporation ne se serait pas fondée uniquement sur ladite phrase, mais elle aurait aussi fait valoir devant le Tribunal que, premièrement, les employés en question de Nichicon Corporation et de NCC travaillaient pour des bureaux de vente locaux japonais ; deuxièmement, le bureau de vente de Nichicon Corporation en question n’était pas impliqué dans les ventes dans l’EEE ; et, troisièmement, NCC a également considéré que le contact en question ne concernait pas l’Europe.

82 Ce ne serait qu’en l’absence d’une autre explication plausible que le passage invoqué par la Commission aurait pu constituer la preuve d’une infraction aux règles de concurrence de l’Union.

83 Or, le Tribunal n’aurait pas abordé ces arguments de sorte que l’arrêt attaqué serait entaché d’un défaut de motivation.

84 La Commission conteste cette argumentation.

– Appréciation de la Cour

85 Afin de statuer sur la troisième branche du deuxième moyen, il convient de constater que le point 259 de l’arrêt attaqué fournit les raisons pour lesquelles le Tribunal a considéré que les informations échangées lors du contact entre Nichicon Corporation et NCC au mois de juillet 2009 présentaient un lien avec l’EEE. À ce point, le Tribunal a en effet exposé quatre éléments à cet égard, sur la base desquels il a estimé, au point 260 de cet arrêt, que la Commission avait pu considérer, à bon droit, que les informations échangées, lors de ce contact, présentaient un lien avec l’EEE.

86 Or, dans le cadre de son pourvoi, Nichicon Corporation ne conteste pas ces éléments, mais invoque un défaut de motivation du point 263 de l’arrêt attaqué, par lequel le Tribunal a rejeté l’argument de Nichicon Corporation en première instance, selon lequel il pouvait être déduit du courrier électronique de A du 31 juillet 2009 que les informations échangées portaient sur les ventes japonaises.

87 Ce faisant, Nichicon Corporation demande, en réalité, à la Cour d’apprécier un élément de preuve déjà examiné par le Tribunal, sans invoquer une erreur d’appréciation commise par celui-ci, ce qui échappe à la compétence de la Cour dans le cadre d’un pourvoi.

88 Par conséquent, la troisième branche du deuxième moyen est irrecevable.

Sur la quatrième branche du deuxième moyen, concernant la portée géographique d’un contact trilatéral

– Argumentation des parties

89 Nichicon Corporation soutient que le Tribunal a, au point 276 de l’arrêt attaqué, rejeté son affirmation selon laquelle les informations échangées lors du contact trilatéral du 9 mars 2010 avec NEC Tokin et Sanyo étaient limitées à Taïwan.

90 Si, au point 273 de l’arrêt attaqué, le Tribunal avait admis que les informations avaient été échangées à Taïwan entre des responsables locaux et qu’il avait été fait mention du nouvel an chinois et de ses répercussions commerciales à Taïwan, le Tribunal aurait néanmoins estimé que ces éléments « n’excluent aucunement que les échanges aient pu porter sur d’autres marchés que le marché taïwanais ».

91 En premier lieu, le Tribunal aurait à tort considéré, aux points 270 et 271 de l’arrêt attaqué, qu’il n’y avait pas lieu d’examiner les arguments de Nichicon Corporation concernant la portée géographique de ce contact. Cette appréciation serait entachée d’un défaut de motivation. D’une part, le Tribunal n’expliquerait pas les raisons pour lesquelles, bien que ledit contact n’ait pas concerné l’EEE, une infraction continue aux règles de concurrence de l’Union devait être retenue. D’autre part, le Tribunal aurait, en tout état de cause, été tenu de se prononcer sur l’argument de Nichicon Corporation, compte tenu de la pertinence de celui-ci pour l’appréciation de la gravité de l’infraction.

92 En second lieu, si une infraction peut être inférée d’un certain nombre de coïncidences et d’indices et si ces éléments de preuve invoqués par la Commission peuvent alors obliger l’autre partie à fournir une explication ou une justification, les exigences relatives à la réfutation d’une telle présomption factuelle ne devraient pas, selon Nichicon Corporation, être excessives ou irréalistes, afin d’éviter de porter atteinte à la présomption d’innocence. La Cour aurait jugé que le critère de réfutation d’une présomption de fait est de savoir si les arguments invoqués par l’entreprise concernée « donnent un éclairage différent aux faits établis par la Commission et [...] permettent de substituer une autre explication des faits à celle retenue par cette institution » (arrêt du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C 204/00 P, C 205/00 P, C 211/00 P, C 213/00 P, C 217/00 P et C 219/00 P, EU:C:2004:6, point 87). En exigeant de Nichicon Corporation qu’elle fournisse des preuves qui excluent la possibilité que ce même contact soit lié à l’EEE, le Tribunal se serait écarté de ce critère et aurait imposé une charge excessive.

93 La Commission conteste cette argumentation.

– Appréciation de la Cour

94 Nichicon Corporation soutient que c’est à tort que le Tribunal a, au point 276 de l’arrêt attaqué, rejeté son affirmation selon laquelle les informations échangées lors du contact trilatéral du 9 mars 2010 avec NEC Tokin et Sanyo étaient limitées à Taïwan.

95 Il convient de relever, à cet égard, que ce rejet repose sur les motifs exposés aux points 270 à 275 de l’arrêt attaqué.

96 Certes, au point 271 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a expliqué les raisons pour lesquelles il n’était pas nécessaire que la Commission prouve que chaque contact couvre l’EEE. En particulier, en considérant, sur la base de la jurisprudence citée aux points 81 à 85 de l’arrêt attaqué, qu’il n’est pas nécessaire que chaque élément de preuve produit par la Commission satisfasse aux critères de précision et de cohérence pour chaque aspect de l’infraction, le Tribunal a estimé que, contrairement aux allégations de Nichicon Corporation, il n’était pas nécessaire que les éléments de preuve concernant chaque contact démontrent explicitement que les informations échangées dans le cadre de ce contact concernaient spécifiquement l’EEE.

97 Toutefois, aux points 273 à 275 de cet arrêt, le Tribunal a examiné le contenu et le contexte dans lequel se plaçait le courrier électronique de D de Sanyo du 10 mars 2010 afin de conclure que lesdites informations n’étaient pas limitées à Taïwan et que rien n’excluait qu’elles concernent l’EEE. En particulier, le Tribunal a estimé, tout d’abord, au point 273 de l’arrêt attaqué, qu’il ressortait de ce courrier électronique que le gestionnaire principal du département de la promotion des ventes de NEC Tokin au niveau mondial, E, était présent lors du contact trilatéral du 9 mars 2010, ce que Nichicon Corporation n’avait pas contesté. Ensuite, au point 274 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré que ledit courrier électronique était adressé notamment à I et à F de Sanyo, lesquels exerçaient, comme E, des responsabilités commerciales au niveau mondial, ou, à tout le moins, qui ne se limitaient pas à Taïwan. Enfin, le Tribunal a, au point 275 de l’arrêt attaqué, estimé que les déclarations orales de Panasonic et de NEC Tokin ne confirmaient pas l’interprétation selon laquelle les informations échangées lors de ce contact se limitaient à Taïwan. En effet, d’une part, la déclaration de Panasonic confirmait seulement que ledit contact avait eu lieu à Taïwan. D’autre part, l’information, tirée du point 23 de la déclaration de NEC Tokin, selon laquelle, en substance, NEC Tokin Taïwan n’était pas impliquée dans les ventes dans l’EEE, était sans pertinence en l’espèce, puisque les informations figurant dans ce même courrier électronique provenaient d’une discussion avec E, qui était le gestionnaire principal du département de la promotion des ventes pour NEC Tokin et non pour NEC Tokin Taïwan. En revanche, il ressortait du point 24 de cette déclaration que NEC Tokin était parfois chargée des ventes dans l’EEE.

98 Or, Nichicon Corporation ne conteste pas l’appréciation contenue aux points 272 à 275 de l’arrêt attaqué, dont il ressort qu’il ne pouvait pas être exclu que les informations en question présentaient un lien avec l’EEE.

99 En outre, dans ces conditions, il ne saurait être considéré que le Tribunal a imposé une charge de la preuve excessive à Nichicon Corporation.

100 Par conséquent, la quatrième branche du deuxième moyen est, en partie, inopérante et, en partie, non fondée.

Sur la cinquième branche du deuxième moyen, concernant la participation de Nichicon Corporation à un contact trilatéral

– Argumentation des parties

101 Nichicon Corporation soutient que le Tribunal a, aux points 284 à 294 de l’arrêt attaqué, confirmé la conclusion de la Commission selon laquelle elle avait participé à des discussions sur les prix lors du contact trilatéral du 31 mai 2010 avec NCC et Rubycon. Devant le Tribunal, Nichicon Corporation aurait fait valoir qu’aucune discussion sur les prix n’avait eu lieu lors de cette réunion en présence de son représentant, M. Shiozaki. Cet argument aurait été fondé sur le fait que les documents sur lesquels la Commission s’était appuyée ne contenaient aucune indication d’une quelconque participation de M. Shiozaki, et que la réponse de Nichicon (ID 740), selon laquelle M. Shiozaki n’avait pas participé aux discussions sur les prix lors de cette réunion, ne pouvait pas être considérée comme ayant une faible valeur probante.

102 Le Tribunal aurait, au point 290 de l’arrêt attaqué, rejeté cet argument, au motif que la réponse de Nichicon Corporation (ID 740), « qui vise seulement à atténuer la responsabilité de [Nichicon Corporation] », ne saurait diminuer la valeur probante des documents invoqués par la Commission.

103 Cette conclusion dénaturerait manifestement les éléments de preuve. En effet, la Commission s’étant appuyée sur plusieurs déclarations à charge contenues dans ce document, celui-ci ne saurait être considéré comme simplement destiné à atténuer la responsabilité de Nichicon Corporation.

104 Si le Tribunal avait correctement identifié la réponse de Nichicon Corporation (ID 740) comme étant une pièce à la fois à charge et à décharge, il n’aurait pas pu rejeter sa valeur probante et il aurait donc dû apprécier cette valeur dans le contexte de l’ensemble des preuves et des faits.

105 La Commission conteste cette argumentation.

– Appréciation de la Cour

106 Le Tribunal a, au point 284 de l’arrêt attaqué, conclu que c’est à bon droit que la Commission a pu considérer que la participation de Nichicon Corporation aux discussions sur les prix lors du contact trilatéral du 31 mai 2010 avec NCC et Rubycon avait était établie. Dès lors, afin de remettre en cause cette appréciation, Nichicon Corporation aurait dû contester les motifs appuyant cette appréciation et exposés aux points 280 à 283 de cet arrêt. Or Nichicon Corporation ne conteste pas ces points.

107 En outre, quand bien même certains passages de la déclaration de Nichicon (ID 740) auraient contenu des éléments à charge, une telle circonstance n’exclurait pas que d’autres passages de ce même document, notamment ceux relatifs aux discussions sur les prix, visaient à atténuer la responsabilité de Nichicon Corporation. Le Tribunal pouvait donc à bon droit considérer que ces passages ne sauraient diminuer la valeur probante des éléments mentionnés au point 281 de l’arrêt attaqué.

108 La cinquième et dernière branche du deuxième moyen est dès lors non fondée.

109 Compte tenu de ce qui précède, le deuxième moyen doit être écarté.

Sur le troisième moyen, tiré d’erreurs de droit dans l’examen des constatations de la Commission relatives à la participation de Nichicon Corporation à une infraction unique et continue ainsi qu’à sa responsabilité

110 Le troisième moyen se compose de deux branches.

Sur la première branche du troisième moyen, concernant la participation de Nichicon Corporation aux échanges anticoncurrentiels

– Argumentation des parties

111 Nichicon Corporation fait valoir que le Tribunal a, au point 360 de l’arrêt attaqué, rejeté ses arguments selon lesquels la Commission n’avait pas établi à suffisance de droit la responsabilité de Nichicon Corporation pour les réunions bilatérales et trilatérales entre les autres participants à l’entente. Le raisonnement du Tribunal ne permettrait pas à Nichicon Corporation de connaître les raisons pour lesquelles le Tribunal a rejeté ses arguments.

112 En premier lieu, il ne serait pas clair si le Tribunal a confirmé la conclusion de la Commission selon laquelle Nichicon Corporation avait connaissance des réunions bilatérales et trilatérales entre les autres participants à l’entente, ou aurait dû les prévoir, sur la seule base de sa participation à certaines réunions bilatérales et trilatérales, ou également sur la base de sa participation à certaines réunions multilatérales.

113 En effet, il semblerait découler des points 352, 357 et 359 de l’arrêt attaqué que le Tribunal a établi la responsabilité de Nichicon Corporation uniquement sur la base de la participation de celle-ci aux réunions bilatérales et trilatérales, sans répondre aux moyens de Nichicon Corporation concernant l’absence de rôle de pôle de rencontre joué par les réunions CUP.

114 Cependant, au point 355 de l’arrêt attaqué, le Tribunal aurait confirmé la responsabilité de Nichicon Corporation sur la base d’un faisceau d’indices « dont font certes partie les réunions multilatérales ». Les motifs retenus par le Tribunal pour confirmer la responsabilité de Nichicon Corporation seraient donc contradictoires et peu clairs.

115 En outre, si le Tribunal avait effectivement considéré que les réunions multilatérales étaient pertinentes, il aurait dû répondre aux arguments de Nichicon Corporation selon lesquels la Commission ne lui avait pas donné la possibilité de se prononcer sur le prétendu rôle de pôle de rencontre qu’auraient joué les réunions CUP, et selon lesquels la décision litigieuse n’identifie aucune réunion bilatérale ou trilatérale à laquelle Nichicon Corporation aurait participé à l’occasion des réunions CUP.

116 En second lieu, le Tribunal n’expliquerait pas les raisons pour lesquelles la participation de Nichicon Corporation à certains contacts bilatéraux et trilatéraux permet de conclure que celle-ci savait, ou aurait dû prévoir, que l’infraction comportait également d’autres contacts bilatéraux et trilatéraux. Le Tribunal aurait considéré que, « apparemment », les contacts bilatéraux et trilatéraux dont Nichicon Corporation a été tenue directement responsable présentaient certaines caractéristiques qui permettaient de conclure qu’elle savait ou aurait dû savoir que des réunions bilatérales et trilatérales avaient lieu entre les autres participants à l’entente, et que cette connaissance ou cette prévisibilité s’est poursuivie pendant plusieurs années alors même que Nichicon Corporation n’avait participé à aucune réunion multilatérale ayant joué un rôle de pôle de rencontre. La motivation de l’arrêt attaqué à cet égard serait insuffisante.

117 En tout état de cause, en rejetant ce moyen, le Tribunal aurait commis des erreurs de droit. En effet, il incomberait à la Commission de prouver qu’une entreprise avait connaissance de l’ensemble des comportements infractionnels envisagés ou mis en œuvre par les autres participants à l’entente ou qu’elle pouvait raisonnablement les prévoir et était prête à en accepter le risque. Si, comme il ressortirait du point 355 de l’arrêt attaqué, la connaissance par Nichicon Corporation du comportement des autres participants à l’entente, ou sa prévisibilité, pouvait être établie sur la base d’un faisceau d’indices précis et concordants, la présomption d’innocence exigerait que, en cas de doute, celui-ci bénéficie à cette entreprise.

118 En affirmant, au point 352 de l’arrêt attaqué, que, « en effet, en ayant elle-même participé à de tels contacts [bilatéraux et trilatéraux], elle n’ignorait pas que la portée de l’entente s’étendait au-delà des réunions multilatérales et incluait également des contacts bilatéraux et trilatéraux », le Tribunal aurait présumé que la participation directe à une catégorie de comportements, à savoir les contacts bilatéraux et trilatéraux, crée la connaissance, ou la prévisibilité, et l’intention de contribuer à tous les comportements qui relèvent de cette catégorie, même ceux auxquels Nichicon Corporation n’aurait pas directement pris part.

119 Une telle présomption n’aurait aucun fondement juridique et porterait atteinte au principe de la responsabilité personnelle et à la présomption d’innocence. Si l’absence de preuve directe de la participation d’une entreprise à une infraction au cours d’une période déterminée ne faisait pas obstacle à ce que cette participation soit établie, une telle constatation ne pourrait être simplement présumée, mais devrait être fondée sur des indices objectifs et concordants. En outre, la connaissance ou la prévisibilité de contacts bilatéraux ayant eu lieu entre d’autres participants à l’entente ne pourrait être déduite du fait que la Commission a qualifié ces comportements comme relevant de la même catégorie que les contacts bilatéraux auxquels Nichicon Corporation a participé directement. Au contraire, la Commission devrait apporter la preuve que les contacts ayant eu lieu entre ces autres participants à l’entente étaient connus par Nichicon Corporation ou raisonnablement prévisibles pour elle.

120 La Commission conteste cette argumentation.

– Appréciation de la Cour

121 Nichicon Corporation fait valoir que le Tribunal a, au point 360 de l’arrêt attaqué, rejeté, sans motivation suffisante, ses arguments selon lesquels la Commission n’avait pas établi à suffisance de droit sa responsabilité pour les réunions bilatérales et trilatérales entre les autres participants à l’entente.

122 Il convient de relever d’emblée que l’argumentation de Nichicon Corporation procède d’une lecture erronée de l’arrêt attaqué.

123 En effet, le Tribunal s’est limité à appliquer la jurisprudence mentionnée aux points 347 à 349 de cet arrêt, que Nichicon Corporation ne conteste pas.

124 En particulier, selon cette jurisprudence, une entreprise ayant participé à une infraction unique et continue par des comportements qui lui étaient propres peut être également responsable des comportements mis en œuvre par d’autres entreprises dans le cadre de la même infraction pour toute la période de sa participation à ladite infraction. Tel est le cas lorsqu’il est établi que ladite entreprise entendait contribuer par son propre comportement aux objectifs communs poursuivis par l’ensemble des participants et qu’elle avait eu connaissance des comportements infractionnels envisagés ou mis en œuvre par d’autres entreprises dans la poursuite des mêmes objectifs ou qu’elle pouvait raisonnablement les prévoir et qu’elle était prête à en accepter le risque (arrêts du 8 juillet 1999, Commission/Anic Partecipazioni, C 49/92 P, EU:C:1999:356, point 83 ; du 24 juin 2015, Fresh Del Monte Produce/Commission et Commission/Fresh Del Monte Produce, C 293/13 P et C 294/13 P, EU:C:2015:416, point 157, ainsi que du 26 janvier 2017, Duravit e.a./Commission, C 609/13 P, EU:C:2017:46, point 118).

125 Or, il découle des points 345 et 350 de l’arrêt attaqué, non contestés par Nichicon Corporation, que, d’une part, le Tribunal a relevé que celle-ci avait participé, entre le 26 juin 1998 et le 31 mai 2010, à 52 réunions multilatérales et à six contacts bilatéraux ou trilatéraux et que la Commission avait considéré que les éléments de preuve montraient que Nichicon Corporation avait directement participé à des réunions multilatérales ainsi qu’à des contacts bilatéraux et trilatéraux. Le Tribunal en a conclu que la Commission avait considéré que, en ce qui concerne les contacts bilatéraux et trilatéraux ayant eu lieu entre les autres participants à l’entente après la réunion ATC du 16 février 2005 et après la réunion CUP du 10 novembre 2008, Nichicon Corporation avait connaissance du comportement incriminé envisagé ou mis en œuvre par ces autres participants à l’entente dans la poursuite des mêmes objectifs ou aurait pu raisonnablement le prévoir et qu’elle était prête à en accepter le risque.

126 D’autre part, le Tribunal a, au point 350 de l’arrêt attaqué, relevé que, dans la décision litigieuse, « la Commission a procédé aux constats suivants. Premièrement, les réunions multilatérales et les contacts bilatéraux ou trilatéraux s’inscrivaient dans un plan global visant un objectif anticoncurrentiel unique. Deuxièmement, les réunions multilatérales constituaient une plate-forme pour les parties à l’entente tout au long de la durée de cette dernière. Troisièmement, les contacts bilatéraux ou trilatéraux venaient compléter les réunions multilatérales. Quatrièmement, les participants aux contacts bilatéraux ou trilatéraux étaient les mêmes que lors des réunions multilatérales. Cinquièmement, en raison de leur participation aux réunions multilatérales, les parties à l’entente savaient quels étaient les autres participants à l’entente et, partant, qui elles pouvaient contacter si, par exemple, elles souhaitaient aborder des questions ayant trait à un client spécifique. Sixièmement, toutes les parties à l’entente avaient participé à des contacts bilatéraux ou trilatéraux ».

127 Ainsi, le Tribunal est parti de la prémisse selon laquelle Nichicon Corporation avait participé à des réunions multilatérales, les participants aux contacts bilatéraux ou trilatéraux étaient les mêmes que lors des réunions multilatérales et tous les participants à l’entente avaient participé à des contacts bilatéraux ou trilatéraux.

128 Dans ces circonstances, tout d’abord, le Tribunal était en droit de considérer que, du fait même d’avoir eu des contacts bilatéraux ou trilatéraux avec d’autres participants à des réunions multilatérales, Nichicon Corporation ne pouvait pas ignorer ou, du moins, ne pas prévoir que d’autres participants à ces réunions avaient également eu des contacts bilatéraux ou trilatéraux entre eux.

129 Contrairement aux allégations de Nichicon Corporation, il ressort des points 350 à 359 de l’arrêt attaqué que le Tribunal n’a pas établi la responsabilité de cette entreprise sur le seul fondement de sa participation à des contacts bilatéraux et trilatéraux mais a également pris en considération sa participation aux réunions multilatérales.

130 Étant donné que Nichicon Corporation elle-même a directement participé à des contacts bilatéraux et trilatéraux, le Tribunal a considéré, aux points 352 et 359 de l’arrêt attaqué, qu’elle savait ou pouvait prévoir que la portée de l’entente allait au-delà des réunions multilatérales et comprenait des contacts bilatéraux et trilatéraux.

131 Ensuite, contrairement aux allégations de Nichicon Corporation, le Tribunal a, aux points 356 à 359 de l’arrêt attaqué, répondu aux arguments de Nichicon Corporation concernant « l’absence de rôle de pôle de rencontre joué par les réunions CUP ».

132 Enfin, l’arrêt attaqué indique aussi clairement les raisons pour lesquelles la participation de Nichicon Corporation à des contacts bilatéraux et trilatéraux – associée aux autres circonstances mentionnées aux points 350 à 352 de cet arrêt – justifie la conclusion selon laquelle Nichicon Corporation savait ou aurait à tout le moins pu prévoir que l’infraction comportait également des contacts bilatéraux et trilatéraux entre d’autres participants.

133 Premièrement, contrairement aux allégations de Nichicon Corporation, le Tribunal n’a pas considéré que les contacts bilatéraux et trilatéraux dont Nichicon Corporation avait été tenue directement responsable présentaient certaines caractéristiques permettant d’établir que Nichicon Corporation savait ou aurait dû savoir que des réunions bilatérales ou trilatérales avaient eu lieu entre d’autres participants à l’entente. En effet, il ressort du point 350 de cet arrêt que les appréciations relatives à la connaissance de ces dernières réunions ne dépendaient pas de caractéristiques spécifiques des contacts bilatéraux et trilatéraux autres que le fait qu’ils avaient eu lieu entre les autres participants à l’entente, qu’ils étaient de nature semblable à ceux auxquels Nichicon Corporation avait participé et qu’ils s’inscrivaient, à l’instar des réunions multilatérales, dans un plan commun ayant un objectif anticoncurrentiel unique.

134 Deuxièmement, indépendamment de la nature de pôle de rencontre de certaines réunions multilatérales, le Tribunal a considéré pertinente la participation de Nichicon Corporation à ces réunions multilatérales dans la mesure où elle avait permis à celle-ci de savoir quelles autres entreprises participaient à l’entente et, donc, quelles entreprises elles pouvaient contacter si elles souhaitaient aborder des questions ayant trait à un client spécifique.

135 Troisièmement, s’agissant de l’allégation de Nichicon Corporation selon laquelle le Tribunal a violé le principe de la responsabilité personnelle et la présomption d’innocence, il convient de relever que, d’une part, contrairement aux allégations de Nichicon Corporation, il ressort des éléments exposés aux points 133 et 134 du présent arrêt que le Tribunal n’a pas présumé que la participation directe à une catégorie de comportements, à savoir les contacts bilatéraux et trilatéraux, « crée la connaissance (ou la prévisibilité) » de contacts entre d’autres participants à l’entente.

136 D’autre part, le point 352 de l’arrêt attaqué, loin de violer le principe de la responsabilité personnelle ou la présomption d’innocence, se limite à mettre en œuvre la jurisprudence constante rappelée au point 124 du présent arrêt.

137 Il s’ensuit que la première branche du troisième moyen est non fondée.

Sur la seconde branche du troisième moyen, concernant le caractère continu de l’infraction

– Argumentation des parties

138 Nichicon Corporation soutient que le Tribunal a, aux points 371 et 372 de l’arrêt attaqué, rejeté ses arguments selon lesquels la Commission n’avait pas établi que l’infraction dans son ensemble et la participation de Nichicon Corporation à celle-ci présentaient un caractère continu pour la période antérieure au 7 novembre 2003. À cet égard, il aurait commis une erreur en ne considérant pas le décalage de dix mois entre les réunions comme constitutif d’une interruption de l’infraction.

139 D’une part, le Tribunal n’aurait pas répondu à l’argument de Nichicon Corporation selon lequel la question de savoir si une infraction s’est poursuivie sans interruption devrait être évaluée en fonction de la fréquence des réunions et du besoin de coordination. Le raisonnement du Tribunal ne permettrait pas à Nichicon Corporation de connaître les raisons pour lesquelles il a écarté ses arguments à cet égard, et serait donc entaché d’un défaut de motivation.

140 D’autre part, dans son appréciation de la pertinence d’une interruption sur la base de la durée totale de l’infraction, le Tribunal aurait commis une erreur de droit en prenant en compte des éléments de preuve manifestement non pertinents. Au cours des périodes 1998/1999 et 2000/2001, aucun des participants à l’entente n’aurait pu avoir connaissance de la durée du comportement futur que la Commission leur a imputé, jusqu’en 2010 pour Nichicon Corporation, et jusqu’en 2012 pour les participants aux réunions MK. La durée totale du comportement ne serait donc pas pertinente pour le contexte et le fonctionnement de l’infraction.

141 La Commission conteste cette argumentation.

– Appréciation de la Cour

142 Afin de statuer sur la seconde branche du troisième moyen, il y a lieu de relever que le Tribunal est parvenu à la conclusion contenue auxdits points 371 et 372 sur la base d’une série d’éléments, mentionnés aux points 367 à 370 de l’arrêt attaqué.

143 Ainsi, le Tribunal a, au point 367 de l’arrêt attaqué, constaté que la Commission avait indiqué que les participants à l’entente avaient coordonné leur comportement durant près de quatorze ans et Nichicon Corporation durant près de douze ans.

144 À cet égard, le Tribunal a, au point 368 de l’arrêt attaqué, noté que la Commission avait relevé que Nichicon Corporation avait participé à plus de 21 réunions multilatérales entre le 26 juin 1998 et le 7 novembre 2003. Ce faisant, le Tribunal a, contrairement aux allégations de Nichicon Corporation, pris en considération la fréquence des réunions auxquelles Nichicon Corporation a participé.

145 En outre, il a, aux points 369 et 370 de l’arrêt attaqué, relevé, d’une part, que les réunions et contacts anticoncurrentiels s’inscrivaient dans un plan d’ensemble avec un objectif économique unique et, d’autre part, qu’aucun élément du dossier n’indiquait que, durant la période en cause, Nichicon Corporation se fût distanciée de l’entente ou qu’elle se fût retirée de celle-ci ou eût interrompu sa participation.

146 Ce faisant, le Tribunal a, conformément à la jurisprudence rappelée au point 366 de l’arrêt attaqué, considéré le contexte du fonctionnement de l’entente.

147 L’argument selon lequel, dans un tel contexte, la durée totale de l’entente ne devrait pas être prise en considération doit être écarté.

148 En effet, afin de savoir si le temps écoulé entre deux réunions est suffisamment long pour constituer une interruption de la participation à l’entente, la durée de celle-ci constitue un élément pertinent.

149 Est en revanche non pertinente, à cet égard, la circonstance que les participants à l’entente ne peuvent pas savoir quelle sera la durée de l’entente retenue par la Commission. En effet, la durée d’une infraction est un élément objectif de celle-ci qui ne dépend que du comportement des participants à cette infraction et non pas de la Commission.

150 La seconde branche du troisième moyen est dès lors non fondée.

151 Compte tenu de ce qui précède, le troisième moyen doit être écarté.

Sur le quatrième moyen, tiré d’erreurs de droit commises dans le calcul du montant de l’amende

152 Le quatrième moyen se compose de deux branches.

Sur la première branche du quatrième moyen, concernant le calcul du montant de base de l’amende

– Argumentation des parties

153 Nichicon Corporation allègue des erreurs commises par le Tribunal, d’une part, dans le calcul de la valeur des ventes et, d’autre part, dans la détermination du coefficient multiplicateur de gravité.

154 S’agissant, en premier lieu, du calcul de la valeur des ventes, Nichicon Corporation relève que, au point 483 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté son argument selon lequel la Commission avait appliqué de manière erronée ses lignes directrices de 2006 en prenant pour base la valeur des ventes facturées dans l’EEE plutôt que la valeur des ventes expédiées vers l’EEE.

155 Selon la jurisprudence de l’Union, le lieu de livraison aurait une réelle incidence sur le niveau des ventes réalisées par les entreprises [arrêt du 9 mars 2017, Samsung SDI et Samsung SDI (Malaysia)/Commission, C 615/15 P, non publié, EU:C:2017:190, point 53]. De la même façon, selon le point 197 de la communication juridictionnelle codifiée de la Commission concernant le règlement (CE) no 139/2004 du Conseil relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises (JO 2008, C 95, p. 1), le lieu de livraison devrait être considéré comme le lieu « où s’exerce la concurrence » dans le cas de la vente de biens, même si, par exemple, les commandes individuelles sont passées par une centrale d’achat.

156 En application de ce principe, ce serait non pas la valeur des ventes de Nichicon Corporation facturées dans l’EEE, mais celle des ventes expédiées vers l’EEE qui aurait dû être prise en compte comme point de départ pour déterminer l’importance économique de l’infraction et la contribution de Nichicon Corporation à celle-ci.

157 Le simple fait que les ventes de la filiale américaine de Nichicon Corporation aux usines mexicaines de ses clients américains sont facturées aux filiales européennes de ces clients américains ne signifierait pas que le lieu de facturation est le critère le plus à même de déterminer les effets sur la concurrence dans l’EEE. En refusant de prendre en considération les preuves de Nichicon Corporation concernant l’effet sur le marché de l’EEE sans expliquer les raisons pour lesquelles il a considéré ces preuves comme non pertinentes, le Tribunal n’aurait pas fourni une motivation suffisante.

158 En outre, le Tribunal aurait, au point 484 de l’arrêt attaqué, indiqué que les lignes directrices de 2006 font référence aux « ventes » et ne précisent pas si les « ventes livrées » ou seulement les « ventes facturées » sont pertinentes. Étant donné qu’il incomberait à la Commission de prouver que les ventes prises en compte sont aptes à déterminer les effets sur le marché de l’EEE, ce ne serait pas à Nichicon Corporation de prouver que les ventes facturées ne sont pas aptes, mais à la Commission de démontrer que les ventes facturées dans l’EEE reflètent mieux la réalité du marché. Ce serait donc également à tort que le Tribunal a attribué la charge de la preuve à Nichicon Corporation, lorsqu’il a rejeté son moyen au motif que celui-ci n’a pas suffisamment motivé en quoi les ventes prises en compte ne refléteraient pas l’impact de l’infraction sur la concurrence dans l’EEE.

159 En second lieu, en ce qui concerne la fixation du coefficient multiplicateur de gravité, Nichicon Corporation fait valoir que le Tribunal a rejeté son argument selon lequel le coefficient de 16 % retenu par la Commission ne reflétait pas de manière adéquate la participation limitée de Nichicon Corporation à l’infraction. Le Tribunal aurait ainsi violé le principe de proportionnalité et n’aurait pas motivé suffisamment son arrêt.

160 Selon Nichicon Corporation, la gravité de l’infraction devrait faire l’objet d’une appréciation individuelle. Or, le Tribunal n’aurait pas tenu compte des circonstances individuelles de l’affaire que Nichicon Corporation aurait portées devant lui de manière explicite, également en ce qui concerne le coefficient multiplicateur de gravité.

161 Le Tribunal aurait, au point 503 de l’arrêt attaqué, affirmé à tort que « [Nichicon Corporation] ne précise pas les spécificités dont la Commission aurait dû tenir compte aux fins de cette détermination ». De la même façon, il aurait, au point 584 de l’arrêt attaqué, rejeté à tort sa compétence de pleine juridiction pour rectifier le montant de l’amende.

162 Le coefficient multiplicateur de gravité appliqué ne tiendrait pas compte du fait que les filiales européennes de Nichicon Corporation avaient essentiellement négocié les prix et les conditions dans l’EEE de manière autonome, avaient agi de manière indépendante et avaient des portefeuilles de produits différents de ceux que Nichicon Corporation vendait au Japon. Par conséquent, la majorité des ventes des filiales de Nichicon Corporation n’aurait pas été affectée par l’infraction constatée et se serait donc trouvée en dehors de la portée de l’infraction.

163 Pour corroborer cette allégation, Nichicon Corporation aurait présenté des preuves qu’il n’y avait qu’un chevauchement limité entre les portefeuilles de produits vendus, respectivement, par Nichicon Corporation et par ses filiales européennes. En outre, Nichicon Corporation aurait fourni une ventilation totale détaillée des ventes de Nichicon Japan et de Nichicon UK/Austria dans l’EEE, qui aurait révélé que seuls 147,71 millions d’euros de ventes de produits expédiés dans l’EEE concernaient des produits vendus à la fois par Nichicon UK/Austria et Nichicon Japan. En d’autres termes, seul un tiers environ du montant de 433,29 millions d’euros de ventes de Nichicon Corporation dans l’EEE, sur lequel la Commission a fondé son amende et que le Tribunal a confirmé, aurait pu théoriquement être affecté par l’infraction. En tout état de cause, le Tribunal n’aurait pas tenu compte de la circonstance que seule une minorité des ventes dans l’EEE aurait été susceptible d’être affectée par l’infraction et aurait donc, pour cette raison, violé le principe de proportionnalité.

164 La Commission conteste cette argumentation.

– Appréciation de la Cour

165 En premier lieu, dans la mesure où, par cette branche du quatrième moyen, Nichicon Corporation soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en admettant que la Commission pouvait calculer le montant de base de l’amende non pas sur la base des ventes expédiées vers l’EEE, mais sur celle des ventes facturées dans l’EEE, il convient de relever, tout d’abord, que la présente affaire se distingue de celle ayant donné lieu à l’arrêt du 9 mars 2017, Samsung SDI et Samsung SDI (Malaysia)/Commission (C 615/15 P, non publié, EU:C:2017:190). En effet, dans cette dernière affaire, la Commission avait décidé de déterminer la valeur des ventes visée au point 13 des lignes directrices de 2006 sur la base des biens effectivement livrés dans l’EEE alors que la négociation des ventes et leur paiement se faisaient en dehors de l’EEE. Cette approche a été confirmée par la Cour au regard des circonstances visées aux points 53 et 54 de cet arrêt. La Cour a ajouté, au point 55 dudit arrêt, que la seule circonstance que le lieu de négociation des ventes se situe en dehors de l’EEE ne permet pas d’en exclure la valeur aux fins de la détermination du montant des ventes réalisées au sein de l’EEE. En revanche, dans la présente affaire, la Commission a tenu compte des ventes facturées au sein de l’EEE.

166 Ensuite, la communication juridictionnelle codifiée de la Commission concernant le règlement (CE) no 139/2004 du Conseil relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises n’est pas pertinente en l’espèce, l’appréciation des conséquences d’une concentration sur le marché n’étant pas comparable à la détermination du montant d’une amende infligée pour une infraction à l’article 101 TFUE.

167 En outre, rien dans les lignes directrices de 2006 n’empêche la Commission de prendre en considération non seulement les ventes expédiées vers l’EEE mais également les ventes facturées dans l’EEE. Ainsi que l’a relevé le Tribunal au point 484 de l’arrêt attaqué, le paragraphe 13 des lignes directrices de 2006 se réfère non pas aux « ventes livrées » ou aux « ventes facturées », mais vise uniquement les « ventes réalisées » dans l’EEE. Quant à l’arrêt du 9 mars 2017, Samsung SDI et Samsung SDI (Malaysia)/Commission (C 615/15 P, non publié, EU:C:2017:190), il ne s’oppose pas à la prise en compte des ventes facturées dans l’EEE lors de la détermination du niveau des ventes réalisées.

168 Dans ces conditions, c’est également à tort que Nichicon Corporation soutient que le Tribunal a renversé la charge de la preuve. En effet, dans la mesure où la Commission a pris en considération des ventes réalisées dans l’EEE, qu’elles aient ou pas été expédiées vers l’EEE, cela suffit pour établir que la valeur de ces ventes relève du champ d’application de l’entente.

169 C’est donc à juste titre que le Tribunal a considéré qu’il appartenait à Nichicon Corporation d’expliquer en quoi le fait, pour la Commission, de prendre en compte, pour le calcul du montant de l’amende, certaines ventes facturées à des clients situés dans l’EEE, mais ultérieurement livrées à des sites en dehors de cette zone géographique, ne permettrait pas de refléter l’incidence de l’infraction sur la concurrence dans l’EEE.

170 Par ailleurs, Nichicon Corporation soutient que le Tribunal a constaté, à tort, qu’elle n’avait pas expliqué les motifs pour lesquels certaines ventes facturées à des clients situés dans l’EEE devaient être exclues du niveau des ventes réalisées dans l’EEE. Cependant, Nichicon Corporation se borne à affirmer qu’elle a fourni au Tribunal des preuves pertinentes, mais omet de désigner ces preuves. Par conséquent, son argument doit être écarté.

171 En second lieu, s’agissant du coefficient de gravité, Nichicon Corporation soutient que c’est à tort que le Tribunal a, au point 503 de l’arrêt attaqué, affirmé que Nichicon Corporation n’avait pas précisé les spécificités dont la Commission aurait dû tenir compte aux fins de la détermination du coefficient multiplicateur.

172 À cet égard, il ressort effectivement de la requête en première instance que Nichicon Corporation a soutenu devant le Tribunal que la Commission aurait dû tenir compte de certaines spécificités à l’occasion de la détermination du coefficient multiplicateur.

173 Il y a lieu de rappeler toutefois que, si les motifs d’une décision du Tribunal révèlent une violation du droit de l’Union mais que le dispositif de celle-ci apparaît fondé pour d’autres motifs de droit, une telle violation n’est pas de nature à entraîner l’annulation de cette décision et il y a lieu de procéder à une substitution de motifs (arrêt du 25 mars 2021, Xellia Pharmaceuticals et Alpharma/Commission, C 611/16 P, EU:C:2021:245, point 149). En l’occurrence, tel est le cas.

174 En effet, les spécificités auxquelles fait référence Nichicon Corporation tiennent, ainsi que cela a été mentionné au point 162 du présent arrêt, au fait que les filiales européennes de Nichicon Corporation avaient essentiellement négocié les prix et les conditions dans l’EEE de manière autonome, avaient agi de manière indépendante et avaient des portefeuilles de produits différents de ceux que Nichicon Corporation vendait au Japon.

175 Or, il y a lieu de constater à cet égard que le Tribunal a, aux points 476 à 482 de l’arrêt attaqué, apprécié ces spécificités et a, au point 482 de cet arrêt, conclu, en substance, que, celles-ci concernant la structure des ventes de Nichicon Corporation et relevant de la seule stratégie commerciale de celle-ci, elles ne constituaient pas, en soi, des particularités justifiant l’application d’une méthode de calcul différente du montant de base de l’amende. Nichicon Corporation n’a pas valablement contesté ces points de l’arrêt attaqué.

176 Ces motifs s’appliquent mutatis mutandis au calcul du coefficient multiplicateur. Dans ces conditions, c’est sans commettre d’erreur que le Tribunal a pu conclure que la Commission n’était pas tenue de prendre en considération ces spécificités dans le calcul du coefficient multiplicateur.

177 Pour les mêmes raisons, le Tribunal n’a commis aucune erreur de droit lorsqu’il a, au point 584 de l’arrêt attaqué, refusé de réduire le coefficient multiplicateur dans le cadre de l’exercice de sa compétence de pleine juridiction.

178 Par ailleurs, Nichicon Corporation n’a pas contesté les considérations, énoncées au point 502 de l’arrêt attaqué, sur la base desquelles le Tribunal a estimé que la Commission s’était conformé aux lignes directrices de 2006.

179 Il s’ensuit que la première branche du quatrième moyen est non fondée.

Sur la seconde branche du quatrième moyen, concernant l’appréciation des circonstances atténuantes

– Argumentation des parties

180 Nichicon Corporation, afin de contester l’appréciation des circonstances atténuantes menée par le Tribunal, soutient, en premier lieu, que celui–ci n’a pas correctement pris en compte l’absence de Nichicon Corporation aux réunions MK.

181 Premièrement, le Tribunal aurait, au point 17 de l’arrêt attaqué, confirmé que la responsabilité de Nichicon Corporation ne s’étendrait pas aux réunions MK. Cependant, il aurait rejeté l’argument de Nichicon Corporation selon lequel sa participation était limitée, contredisant son propre arrêt et dénaturant les éléments de preuve lorsqu’il aurait déclaré, au point 531 de l’arrêt attaqué, que, « nonobstant sa non–participation aux réunions MK, [Nichicon Corporation] n’est pas fondée à soutenir que sa participation à l’entente était limitée ».

182 Deuxièmement, cette erreur de droit aurait entraîné une autre erreur commise par le Tribunal lorsque celui-ci aurait, au point 586 de l’arrêt attaqué, affirmé que Nichicon Corporation n’était pas fondée à soutenir que sa participation à l’entente était limitée et « qu’elle présentait un degré de nocivité moindre justifiant » une réduction du montant de l’amende.

183 Or, il ressortirait de la jurisprudence de la Cour qu’il y a lieu de prendre en considération le fait qu’une entreprise n’a pas participé à tous les éléments constitutifs d’une entente ou qu’elle a joué un rôle mineur lors de l’appréciation de la gravité de l’infraction et, le cas échéant, de la détermination de l’amende (arrêt du 6 décembre 2012, Commission/Verhuizingen Coppens, C 441/11 P, EU:C:2012:778, points 45 et 74).

184 Troisièmement, sur la base de ces deux erreurs, le Tribunal aurait validé la réduction excessivement limitée de 3 % au titre des circonstances atténuantes qu’avait accordées la Commission.

185 Quatrièmement, en violation du principe de proportionnalité, le Tribunal n’aurait pas, au point 529 de l’arrêt attaqué, reconnu la réelle importance des réunions MK, lesquelles, selon Nichicon Corporation, ne constituaient pas seulement une partie supplémentaire de l’infraction, mais revêtaient, par elles-mêmes, une importance substantielle.

186 Cinquièmement, le Tribunal aurait enfreint le principe d’égalité de traitement en accordant aux entreprises qui n’ont pas participé aux réunions CUP la même réduction qu’à Nichicon Corporation, qui n’a pas participé aux réunions MK. En particulier, l’arrêt attaqué n’aborderait pas la question de savoir si les réunions MK et les réunions CUP étaient comparables. Or, ces réunions diffèreraient non seulement par leur fréquence et par leur durée, mais aussi par leur contenu. En tout état de cause, le nombre de réunions de MK et de réunions CUP serait un facteur pertinent pour apprécier la gravité de l’infraction. Nichicon Corporation aurait pris part à beaucoup moins de contacts anticoncurrentiels que les autres participants à l’entente.

187 En deuxième lieu, aux points 549 à 554 de l’arrêt attaqué, le Tribunal aurait rejeté les arguments de Nichicon Corporation selon lesquels, lors de la détermination de l’amende fondée sur des circonstances atténuantes, la Commission aurait dû tenir compte du fait que le président de Nichicon Corporation avait tenté de prévenir les violations du droit de la concurrence, que la politique de son président était connue des participants aux réunions MK et que ces derniers avaient donc invité M. Shiozaki à assister aux réunions ultérieures à titre personnel.

188 Le Tribunal, au point 553 de l’arrêt attaqué, se serait fondé sur la jurisprudence selon laquelle la responsabilité d’une entreprise pour les infractions au droit de la concurrence est engagée par toute personne autorisée à agir pour le compte d’une entreprise, indépendamment de l’action ou même de la connaissance de ses gérants principaux (arrêt du 16 février 2017, Tudapetrol Mineralölerzeugnisse Nils Hansen/Commission, C 94/15 P, non publié, EU:C:2017:124, point 28). Cependant, cette jurisprudence concernerait l’établissement de la responsabilité. Le Tribunal ne motiverait pas les raisons pour lesquelles il a considéré que les arguments et les preuves avancés n’étaient pas pertinents pour apprécier la négligence de Nichicon Corporation.

189 En troisième lieu, Nichicon Corporation soutient que le Tribunal n’a pas correctement pris en compte son comportement concurrentiel, tenant, notamment, à sa politique de prix agressive et à sa participation limitée à l’infraction. En particulier, le Tribunal aurait rejeté l’existence d’une circonstance atténuante tenant au comportement concurrentiel de Nichicon Corporation en affirmant, au point 563 de l’arrêt attaqué, que celle-ci, notamment, « n’avait pas démontré s’être clairement et publiquement distanciée de l’entente » et qu’elle ne s’est pas  « clairement et fermement opposée à la mise en œuvre de l’entente, au point d’en avoir perturbé son fonctionnement ».

190 Ainsi, selon le critère appliqué par le Tribunal, le comportement concurrentiel ne pourrait constituer une circonstance atténuante que si l’entreprise en question cesse de participer à l’infraction concernée et ne peut plus en être tenue responsable. Cependant, dans un tel cas, il ne serait plus nécessaire de reconnaître l’existence de circonstances atténuantes, car aucune amende ne pourrait de toute façon être imposée. Ainsi, le Tribunal aurait supprimé totalement le comportement concurrentiel comme motif justifiant l’existence d’une circonstance atténuante.

191 La Commission conteste cette argumentation.

– Appréciation de la Cour

192 Afin de statuer sur la seconde branche du quatrième moyen, il y a lieu de relever, premièrement, que la circonstance que Nichicon Corporation a participé à tous les éléments constitutifs de l’entente à l’exception des réunions MK ne saurait, en soi, suffire pour considérer que sa participation à l’entente était limitée. En effet, le Tribunal a, au point 529 de l’arrêt attaqué, considéré que ces réunions ne revêtaient pas une importance particulière dans le contexte plus large de l’entente, ce qui, comme le met en exergue la Commission, constitue une appréciation factuelle.

193 Deuxièmement, c’est à tort que Nichicon Corporation soutient que le Tribunal ne s’est pas assuré que la Commission a pris en compte la circonstance que Nichicon Corporation n’avait pas participé auxdites réunions. En effet, il ressort du point 525 de l’arrêt attaqué que c’est précisément au vu de cette circonstance que la Commission a réduit, dans l’exercice de sa large marge d’appréciation à cet égard, le montant de l’amende de 3 %.

194 Troisièmement, au point 531 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a conclu que, ce faisant, la Commission n’avait pas violé le principe de proportionnalité. Si Nichicon Corporation semble critiquer cette conclusion, elle a toutefois omis d’en contester les justifications exposées aux points 526 à 530 de l’arrêt attaqué.

195 Quatrièmement, s’agissant de la prise en compte du comportement concurrentiel de Nichicon Corporation, le Tribunal, aux points 561 à 563 de l’arrêt attaqué, n’a pas considéré qu’il pouvait justifier une réduction de l’amende. Le Tribunal a relevé que Nichicon Corporation avait présenté une argumentation incohérente, n’avait pas démontré s’être clairement et publiquement distanciée de l’entente, ne s’était clairement et fermement opposée à la mise en œuvre de cette entente et que le comportement concurrentiel allégué par Nichicon Corporation n’était pas corroboré par l’analyse, réalisée par un cabinet indépendant, de ses prix dans l’EEE. Par conséquent, l’argument de Nichicon Corporation selon lequel le Tribunal n’aurait pas pris en compte son comportement concurrentiel afin de réduire le montant de l’amende repose sur une lecture erronée de l’arrêt attaqué.

196 Cinquièmement, il convient de relever, d’une part, que la Cour a déjà jugé que, pour bénéficier de la circonstance atténuante relative à l’adoption d’un comportement concurrentiel ou à l’absence de mise en œuvre de l’entente, une entreprise doit démontrer non seulement qu’elle a adopté un comportement concurrentiel, mais aussi qu’elle n’a pas adhéré à l’entente en apparence et, de ce fait, incité d’autres entreprises à la mettre en œuvre (voir, en ce sens, arrêt du 8 décembre 2011, KME Germany e.a./Commission, C 389/10 P, EU:C:2011:816, points 93 à 96).

197 Or, le Tribunal a, aux points 561 à 564 de l’arrêt attaqué, estimé, sans être contredit par le pourvoi, que Nichicon Corporation ne remplissait aucune de ces conditions.

198 D’autre part, contrairement à ce que prétend Nichicon Corporation, le Tribunal n’a pas rejeté l’allégation concernant son comportement concurrentiel uniquement parce qu’elle ne s’est pas distanciée publiquement du comportement collusoire. Au point 563 de l’arrêt attaqué, il a également constaté que Nichicon Corporation n’avait pas démontré son opposition claire et ferme à la mise en œuvre de l’entente au point d’en avoir perturbé son fonctionnement et que cette allégation de Nichicon Corporation n’était pas corroborée par l’analyse du prix de ses condensateurs dans l’EEE au cours de la période infractionnelle.

199 Il s’ensuit que la seconde branche du quatrième moyen est non fondée.

200 Compte tenu de ce qui précède, le quatrième moyen doit être écarté.

Sur la demande d’exercice par la Cour de sa compétence de pleine juridiction

Argumentation des parties

201 Nichicon Corporation soutient que le refus par le Tribunal de réduire l’amende aboutit à l’imposition d’une amende excessive et donc disproportionnée. Par conséquent, le Tribunal aurait commis une erreur de droit en refusant d’exercer sa pleine juridiction. Elle demande donc à la Cour d’exercer sa compétence de pleine juridiction prévue à l’article 261 TFUE ainsi qu’à l’article 31 du règlement no 1/2003 et de substituer sa propre appréciation afin de réduire le montant de l’amende infligée en tenant compte de toutes les circonstances de fait.

202 La Commission soutient que cette demande est irrecevable.

Appréciation de la Cour

203 Dans la mesure où la demande de Nichicon Corporation devait être comprise comme visant à reprocher au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit en décidant de ne pas réduire le montant de l’amende qui lui a été infligée, il convient de relever que, après avoir rejeté tous les arguments et moyens du recours en première instance, le Tribunal a, aux points 579 à 590 de l’arrêt attaqué, examiné chacune des circonstances invoquées par Nichicon Corporation et a conclu qu’elles ne justifiaient pas une réduction de l’amende. Dans le cadre de son pourvoi, Nichicon Corporation n’a établi aucune erreur spécifique du Tribunal à cet égard.

204 En ce que cette demande vise à solliciter l’exercice, par la Cour, de sa compétence de pleine juridiction, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, il n’appartient pas à la Cour, lorsqu’elle se prononce sur des questions de droit dans le cadre d’un pourvoi, de substituer, pour des motifs d’équité, son appréciation à celle du Tribunal statuant, dans l’exercice de son pouvoir de pleine juridiction, sur le montant des amendes infligées à des entreprises en raison de la violation, par celles-ci, du droit de l’Union (arrêt du 11 juillet 2013, Team Relocations e.a./Commission, C 444/11 P, non publié, EU:C:2013:464, point 97).

205 Il s’ensuit que la demande de Nichicon Corporation ne saurait être accueillie.

206 Compte tenu de toutes les considérations qui précèdent, le pourvoi doit être rejeté comme étant partiellement irrecevable et partiellement non fondé.

Sur les dépens

207 En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens.

208 Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

209 En l’espèce, Nichicon Corporation ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission, conformément aux conclusions de cette dernière.

Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) déclare et arrête :

1) Le pourvoi est rejeté.

2) Nichicon Corporation est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission européenne.