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Décisions

Cass. com., 13 avril 1964, n° 59-12.542

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Rapporteur :

M. Lhez

Avocat général :

M. Côme

Avocats :

Me Mayer, Me George

Colmar, du 3 mars 1959

3 mars 1959

Sur la requête présentée par la Société des Etablissements J.J. KAUFFMANN, commerce de vins, société à responsabilité limitée dont le siège social est à AMMERSCHWIHR (Haut-Rhin), représentée par son gérant en exercice domicilié audit siège, en cassation d'un arrêt rendu le 3 mars 1959 par la Cour d'Appel de Colmar au profit de la en date du 15 septembre 1959.

Société EDEL Frères, société à responsabilité limitée dont le siège social est aux Domaines de BOUXHOF à MITTELWIHR (Haut-Rhin) représentée par son gérant en exercice domicilié audit siège, défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque à l'appui de son pourvoi le moyen unique de cassation suivant:

"Violation des articles 1134 et 1657 du Code Civil, fausse application de l'article 1184 du même Code, violation de l'article 7 de la loi du 20 avril 1810, dénaturation des conventions, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré un marché de vins résilié aux torts exclusifs de la venderesse, au motif que, faute d'avoir stipulé un terme pour le retirement, celle-ci ne serait pas justifiée à résilier le contrat de plein droit et sans sommation, et que les délais consentis à l'acquéreur ne constituaient "qu'un élément secondaire et (non?) nécessaire du contrat", alors, d'une part, que de tels motifs relatifs à l'existence d'un délai de retirement, apparaissent contradictoires, en ce qu'ils commencent par dénier la stipulation d'un tel délai, pour en admettre, ensuite, l'existence, quitte à en minimiser la portée, et alors, d'autre part, et en tout état de cause, qu'il résulte d'une lettre, visée par l'arrêt lui-même, lequel n'a pu que la dénaturer, que le délai initial de livraison de une semaine a été portée à trois semaines sur la demande de l'acquéreur".

Sur quoi, LA COUR, en l'audience publique de ce jour.

Sur le moyen unique pris en ses deux branches:

Attendu qu'il résulte de l'arrêt confirmatif attaqué (Cour d'Appel de Colmar, 3 mars 1959) qu'ayant vendu à la Société Edel Frères 500 hectolitres de vin, dont la livraison était d'abord prévue "dans la semaine", les Etablissements Kauffmann ont, deux jours plus tard et à la demande de l'acquéreur, donné leur accord pour que la livraison soit reportée à "trois semaines environ", qu'un nouveau délai ayant été sollicité, les vendeurs ont entendu se prévaloir de la résiliation du marché, conformément à l'article 1657 du Code Civil pour défaut de retirement dans le délai de la marchandise vendue; que la Cour a refusé de faire droit à cette exigence;

Attendu qu'il est reproché à la Cour d'Appel d'avoir ainsi statué au motif que, faute d'avoir stipulé un terme pour le retirement, la société venderesse n'était pas justifiée à résilier le contrat de plein droit, et sans sommation, les délais consentis à l'acquéreur ne constituant "qu'une élément secondaire" alors d'une part, qu'un tel motif apparait contradictoire en ce qu'il commence par dénier la stipulation d'un tel délai pour en admettre, ensuite, l'existence, quitte à en minimiser la portée, alors, d'autre part, et en tout état de cause, qu'il résulte d'une lettre visée par l'arrêt qui n'a pu que la dénaturer, que le délai initial d'une semaine a été porté à trois semaines sur la demande de l'acquéreur;

Mais attendu, d'une part, que les juges du fond énoncent à juste titre que la résolution de plein droit et sans sommation, au profit du vendeur, d'un marché à terme portant sur des livraisons de vin, ne peut intervenir que si la date de livraison a été une des conditions essentielles et déterminantes de la vente; qu'elle constate qu'il n'en a pas été ainsi en l'espèce puisqu'il ressort de la correspondance et de la commune intention des parties que les délais consentis à la société Edel Frères, ne constituaient qu'un élément secondaire du contrat;

Attendu, d'autre part, que la Cour d'Appel constate que les parties étant convenues après un entretien téléphonique, de reporter à trois semaines environ la livraison, les Etablissements Kauffmann ont, le jour même et par écrit, confirmé l'accord verbal, en ajoutant "Veuillez nous informer, dès qu'il vous faudra une livraison de ces vins

Attendu que par ces appréciations et constatations qui rentrent dans son pouvoir souverain d'interpréter le contrat, la Cour d'Appel a, sans se contredire et sans dénaturer la convention, justifié sa décision et fait une juste application des textes visés ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches.

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 3 mars 1959 par la Cour d'Appel de Colmar.