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Décisions

CA Angers, ch. com. A, 18 janvier 2022, n° 20/01042

ANGERS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Gavarnie (SCI)

Défendeur :

BNP Paribas (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Corbel

Conseillers :

Mme Robveille, M. Benmimoune

CA Angers n° 20/01042

18 janvier 2022

FAITS ET PROCÉDURE

Courant 2011, M. Patrick H. a créé la société civile immobilière (SCI) Gavarnie dont le siège social est situé à La Rigaudière, commune de Sillé le Guillaume (72140), aux fins d'acquisition d'un bien immobilier situé à [...], destiné à la location de locaux pour y exercer une activité d'agent MMA.

Suivant acte reçu le 24 août 2011 par Maître Philippe S., notaire associé à Aigle (Orne), la SCI Gavarnie a souscrit auprès de la société BNP Paribas un prêt professionnel n°00229 00060372002 80, d'un montant de 248 000 euros, pour une durée de 147 mois, se décomposant en deux tranches, à savoir une tranche à concurrence de 222 000 euros destinée au financement de l'achat d'un bien immobilier situé [...], à usage de commerce et d'habitation et une tranche à concurrence de 26 000 euros destinée au financement de travaux dans le bien immobilier ainsi acquis.

Le 22 juillet 2014, un bail commercial a été régularisé entre la SCI Gavarnie et la société dénommée 'SCI du groupe MMA' portant sur les locaux situés [...] au Perche, pour une durée de neuf années à compter du premier janvier 2015, moyennant un loyer annuel hors charges de 14 400 euros payable par trimestre civil et d'avance par terme de 3 600 euros.

Par lettre du 30 mars 2018 reçue le premier avril 2018, la société BNP Paribas a prononcé la déchéance du terme du prêt consenti à la SCI Gavarnie le 24 août 2011 en mettant celle-ci en demeure de lui régler la somme globale de 154 678,20 euros.

Suivant procès-verbal du 15 janvier 2019, la société BNP Paribas, agissant en vertu de la copie exécutoire de l'acte de prêt reçu le 24 août 2011 par Me Philippe S., notaire associé à l'Aigle, a fait procéder à l'encontre de la SCI Gavarnie, à une saisie attribution entre les mains de la SCI Groupe des MMA, des loyers dus par celle-ci à la débitrice, pour obtenir le paiement de la somme globale de 154 678,43 euros.

Cette saisie-attribution a été dénoncée à la SCI Gavarnie par acte du 17 janvier 2019.

Par acte d'huissier du 15 février 2019, la SCI Gavarnie a fait assigner la société BNP Paribas devant le juge de l'exécution du Mans, aux fins, en contestation de la saisie attribution ainsi pratiquée.

Par jugement du 31 juillet 2020, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire du Mans a :

- déclaré recevable la contestation de la SCI Gavarnie et non caduque l'assignation délivrée le 15 février 2019, contre la saisie-attribution pratiquée à la demande de la société BNP Paribas le 15 janvier 2019, par la SCP B. T., huissier de justice associé, sur les loyers dus par la SCI du groupe MMA au titre de la location de l'immeuble appartenant à la SCI Gavarnie situé [...], dénoncée le 17 janvier 2019,

- débouté la SCI Gavarnie de sa demande d'annulation de la saisie-attribution pratiquée à la demande de la société BNP Paribas le 15 janvier 2019, par la SCP B. T., huissier de justice associé, sur les loyers dus par la SCI du groupe MMA au titre de la location de l'immeuble appartenant à la SCI Gavarnie situé [...], dénoncée le 17 janvier 2019,

- suspendu l'exécution des obligations de la SCI Gavarnie résultant du prêt souscrit par acte notarié du 24 août 2011 avec la société BNP Paribas, pendant une durée de 12 mois à compter de la signification de la décision,

- rappelé que les délais ainsi accordés entraînaient la suspension des mesures d'exécution prises pour le paiement des sommes dues en vertu du titre susvisé,

- dit qu'à l'issue de ces délais, la créance due au titre du prêt souscrit par acte notarié du 24 août 2011 avec la société BNP Paribas deviendra immédiatement exigible,

- débouté la SCI Gavarnie de sa demande de voir ordonner l'imputation des paiements en priorité sur le capital,

- débouté la SCI Gavarnie de sa demande de dommages-intérêts,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- débouté les parties de leurs demandes respectives sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les frais de recouvrement seront laissés à charge la SCI Gavarnie,

- condamné la SCI Gavarnie aux dépens,

- rappelé que les décisions du juge de l'exécution bénéficient de l'exécution provisoire de droit.

Par déclaration reçue au greffe le 6 août 2020, la SCI Gavarnie a fait appel partiel de cette décision, en ce qu'elle l'a déboutée de sa demande d'annulation de la saisie-attribution pratiquée à la demande de la société BNP Paribas le 15 janvier 2019, par la SCP B. T., huissier de justice associé, sur les loyers dus par la SCI du groupe MMA au titre de la location de l'immeuble appartenant à la SCI Gavarnie située [...] 61400 Mortagne-au-Perche, dénoncée le 17 janvier 2019, a suspendu l'exécution des obligations de la SCI Gavarnie résultant du prêt souscrit par acte notarié du 24 août 2011 avec la société BNP Paribas, pendant une durée de 12 mois à compter de la signification de la décision, a rappelé que les délais ainsi accordés entraînaient la suspension des mesures d'exécution prises pour le paiement des sommes dues en vertu du titre susvisé, a dit qu'à l'issue de ces délais, la créance due au titre du prêt souscrit par acte notarié du 24 août 2011 avec la société BNP Paribas deviendra immédiatement exigible, l'a déboutée de sa demande de voir ordonner l'imputation des paiements en priorité sur le capital, l'a déboutée de sa demande de dommages-intérêts, a débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires, a débouté les parties de leurs demandes respectives sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, a dit que les frais de recouvrement seront laissés à charge la SCI Gavarnie, et l'a condamnée aux dépens.

La société BNP Paribas a formé appel incident.

Les parties ont conclu.

Une ordonnance du 22 février 2021 a clôturé l'instruction de l'affaire.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du Code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement déposées au greffe,

- le 5 février 2021 pour la SCI Gavarnie,

- le 7 janvier 2021 pour la société BNP Paribas,

aux termes desquelles les parties forment les demandes suivantes :

La SCI Gavarnie demande à la cour de :

- la dire et juger recevable et bien fondée en son appel,

- débouter la société BNP Paribas de sa demande de caducité de l'appel,

- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire du Mans, en ce qu'il l'a déboutée de sa demande d'annulation de la saisie-attribution pratiquée à la demande de la société BNP Paribas le 15 janvier 2019, par la SCP B. T., huissier de justice associé, sur les loyers dus par la SCI du groupe MMA au titre de la location de l'immeuble appartenant à la SCI Gavarnie située [...], dénoncée le 17 janvier 2019, a suspendu l'exécution des obligations de la SCI Gavarnie résultant du prêt souscrit par acte notarié du 24 août 2011 avec la société BNP Paribas, pendant une durée de 12 mois à compter de la signification de la décision, a rappelé que les délais ainsi accordés entraînaient la suspension des mesures d'exécution prises pour le paiement des sommes dues en vertu du titre susvisé, a dit qu'à l'issue de ces délais, la créance due au titre du prêt souscrit par acte notarié du 24 août 2011 avec la société BNP Paribas deviendra immédiatement exigible, l'a déboutée de sa demande de voir ordonner l'imputation des paiements en priorité sur le capital, l'a déboutée de sa demande de dommages-intérêts, a débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires, a débouté les parties de leurs demandes respectives sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, a dit que les frais de recouvrement seront laissés à charge la SCI Gavarnie, et l'a condamnée aux dépens,

statuant à nouveau,

- à titre principal,

* accueillir sa contestation de la saisie-attribution du 15 janvier 2019 ,

* prononcer la nullité de la dénonciation à la SCI Gavarnie du procès-verbal saisie-attribution du 17 janvier 2019,

* dire que la procédure de saisie-attribution pratiquée le 15 janvier 2019 à la requête de la société BNP Paribas est nulle pour sa totalité,

- à titre subsidiaire,

* accorder les plus larges délais de grâce à la SCI Gavarnie et dire que les paiements effectués dans deux ans à compter du prononcé de la décision à intervenir s'imputeront d'abord sur le capital,

* en application de l'article R. 211-16 du code des procédures civiles d'exécution, désigner tel séquestre qu'il plaira à la cour pour encaisser les loyers échus jusqu'à l'issue du présent litige,

- en tout état de cause, condamner la société BNP Paribas, en application des articles L 111-7 et L 121-2 du code des procédures civiles d'exécution, à lui payer la somme de 1000 € à titre de dommages-intérêts,

- condamner la société BNP Paribas à lui payer une somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société BNP Paribas aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'aux frais frustratoires de la procédure d'exécution diligentée à tort.

La société BNP Paribas demande à la cour de :

- déclarer, à défaut de notification de la déclaration d'appel dans le délai de 10 jours de l'émission de l'avis de fixation, l'appel de la SCI Gavarnie caduque en application de l'article 905-1 du code de procédure civile,

- dire et juger la SCI Gavarnie mal fondée en son appel et en conséquence l'en débouter,

- confirmer le jugement rendu par le juge de l'exécution du Mans le 31 juillet 2020 en ce qu'il a débouté la SCI Gavarnie de sa demande d'annulation de la saisie-attribution pratiquée à la demande de la société BNP Paribas le 15 janvier 2019, par la SCP B. T., huissier de justice associé, sur les loyers dus par la SCI du groupe MMA au titre de la location de l'immeuble appartenant à la SCI Gavarnie situé [...], dénoncée le 17 janvier 2019,

- débouter la SCI Gavarnie de sa demande de voir ordonner l'imputation des paiements en priorité sur le capital,

- débouter la SCI Gavarnie de sa demande de dommages-intérêts,

- donner acte à la SCI Gavarnie de ce qu'elle ne reprend par ses contestations à l'encontre de la réalité du titre exécutoire détenu par la société BNP Paribas,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a suspendu l'exécution des obligations de la SCI Gavarnie résultant du prêt souscrit par acte notarié du 24 août 2011 avec la société BNP Paribas, pendant une durée de 12 mois à compter de la signification de la décision, rappelé que les délais ainsi accordés entraînent la suspension des mesures d'exécution prises pour le paiement des sommes dues en vertu du titre exécutoire,

- débouter la SCI Gavarnie de sa demande de délai de grâce,

- débouter la SCI Gavarnie de sa demande de désignation d'un séquestre,

- valider la procédure de saisie-attribution pratiquée le 15 janvier 2019 à sa requête, dénoncée à la SCI Gavarnie le 17 janvier 2019,

- condamner la SCI Gavarnie aux entiers dépens de première instance et d'appel ainsi qu'au paiement d'une somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande tendant à voir prononcer la caducité de la déclaration d'appel de la SCI Gavarnie

La société BNP Paribas fait valoir que le greffe a adressé à l'appelante le premier décembre 2020 l'avis de fixation de l'affaire à bref délai.

Elle soutient qu'alors que l'appelante disposait, en application de l'article 905-1 du code de procédure civile, d'un délai de 10 jours à compter de la réception de cet avis, pour lui signifier la déclaration d'appel, à peine de caducité de celle-ci, elle ne la lui a notifiée que le 21 décembre 2020, en même temps que l'avis de clôture et de fixation et que ses conclusions.

Elle conclut à la caducité de l'appel formé par la SCI Gavarnie.

La SCI Gavernie réplique en faisant valoir que suite à sa déclaration d'appel régularisée le 6 août 2020, les parties ont reçu le 28 août 2020 un avis d'orientation en application de l'article 905 du code civil, précisant qu'elles recevraient ultérieurement l'avis de fixation, que l'intimée a constitué avocat le 9 septembre 2020 et qu'elle lui a notifié des conclusions le 30 octobre 2020, soit avant de recevoir l'avis de fixation, auxquelles l'intimée a répliqué par conclusions notifiées le 27 novembre 2020.

Elle indique que l'avis de fixation a été adressé aux parties le premier décembre 2020 et précise avoir fait de nouveau notifier des conclusions le 21 décembre 2020 en même temps que sa déclaration d'appel et l'avis de fixation.

Au visa de l'avis de la cour de cassation du 12 juillet 2018, n°18-70.008, elle soutient que l'absence de notification par l'appelante, à l'avocat que l'intimée avait préalablement constitué, de la déclaration d'appel dans le délai de l'article 905-1 du code de procédure civile, n'est pas sanctionnée par la caducité de la déclaration d'appel.

Elle fait également valoir que l'intimée avait conclu avant la réception de l'avis de fixation et dans le délai d'un mois de ses conclusions et en déduit que le délai d'un mois à compter de la réception de l'avis de fixation de l'affaire à bref délai prévu par l'article 905-2 du code de procédure civile dans lequel l'appelant doit remettre ses conclusions au greffe et les notifier à l'avocat de l'intimé, a été respecté.

Elle ajoute qu'en concluant en suite des premières conclusions de l'appelante, dans le délai d'un mois, l'intimée a validé l'intégralité de la procédure et a expressément renoncé à se prévaloir ultérieurement d'une éventuelle caducité de la déclaration d'appel.

L' article 905 du code de procédure civile dispose que 'lorsque l'affaire semble présenter un caractère d'urgence ou être en état d'être jugée ou lorsque l'appel est relatif à une ordonnance de référé ou à un jugement rendu selon la procédure accélérée au fond ou à une ordonnance du juge de la mise en état énumérées aux 1° à 4° de l' article 795, le président de la chambre saisie, d'office ou à la demande d'une partie, fixe les jours et heures auxquels l'affaire sera appelée à bref délai'.

L'article 905-1, alinéa 1, du code de procédure civile dispose que «Lorsque l'affaire est fixée à bref délai par le président de la chambre, l'appelant signifie la déclaration d'appel dans les dix jours de la réception de l'avis de fixation qui lui est adressé par le greffe à peine de caducité de la déclaration d'appel relevée d'office par le président de la chambre ou le magistrat désigné par le premier président ; cependant, si, entre-temps, l'intimé a constitué avocat avant signification de la déclaration d'appel, il est procédé par voie de notification à son avocat.»

En l'espèce, l'intimée a constitué avocat le 9 septembre 2020.

Les parties se sont vues adresser le 10 septembre 2020 un avis d'orientation en circuit court ( 905 du code de procédure civile), précisant que l'avis de fixation leur serait adressé ultérieurement.

Les parties ont conclu le 30 octobre 2020 pour l'appelante et le 27 novembre 2020 pour l'intimée.

L'avis de fixation a été adressé par le greffe aux parties le premier décembre 2020.

Le 21 décembre 2020, soit plus de dix jours après réception de cet avis, l'appelante a notifié la déclaration d'appel, l'avis de fixation, en même temps que de nouvelles conclusions, par le réseau privé virtuel des avocats, à l'avocat de l'intimée.

Cependant, l'obligation prévue par l'article 905-1, alinéa 1 du code de procédure civile, faite à l'appelant de notifier la déclaration d'appel à l'avocat que l'intimé a préalablement constitué, dans le délai de dix jours de la réception de l'avis de fixation adressé par le greffe, n'est pas prescrite à peine de caducité de cette déclaration d'appel.

Dès lors, la demande de la société BNP Paribas tendant à voir prononcer la caducité de la déclaration d'appel pour défaut de notification de la déclaration d'appel à l'avocat de l'intimée dans le délai de 10 jours de la réception de l'avis de fixation sera rejetée.

Sur la demande de nullité de la signification de la dénonciation à la SCI Gavarnie de la saisie attribution et la nullité subséquente de la saisie attribution

La SCI Gavarnie soutient qu'en application de l'article 654 du code de procédure civile, la signification d'un acte à une personne morale doit être effectuée à personne, soit au lieu de son siège social ou de son établissement et à son représentant légal, à un fondé de pouvoir de ce dernier ou à une personne habilitée à cet effet.

Elle fait valoir qu'en l'espèce, la signification de la dénonciation du procès-verbal de saisie attribution pratiquée par la SA BNP Paribas le 15 janvier 2019 a été faite le 17 janvier 2019 au lieu de son siège social fixé au domicile de M. Patrick H., son gérant, mais à Mme Odette H., mère de M. Patrick H. qui ne disposait d'aucune habilitation de la SCI pour recevoir l'acte.

Elle relève que l'huissier de justice qui était tenu de vérifier l'habilitation de la personne à laquelle il remettait l'acte, en lui demandant sa qualité, n'a pas mentionné dans le procès-verbal de signification de la dénonciation à la SCI Gavarnie de la saisie attribution, que l'acte était remis à une personne habilitée à cette fin.

Elle conclut à la nullité de la signification de la dénonciation du procès-verbal de saisie attribution du 17 janvier 2019 et par voie de conséquence à la nullité de la saisie attribution pratiquée le 15 janvier 2019, à défaut de signification régulière au débiteur saisi et soutient qu'elle est fondée à en solliciter la mainlevée.

Elle soutient en outre, que la signification de l'acte de dénonciation de la saisie le 17 janvier 2019 n'est pas valable, en ce qu'elle a été faite par l'huissier de justice à une personne âgée de 89 ans qui ne disposait pas d'un discernement suffisant pour recevoir utilement l'acte, comme souffrant de difficultés mnésiques parfaitement repérables par un huissier de justice rompu à l'appréciation des capacités intellectuelles des personnes auxquelles il a affaire.

Elle ajoute qu'il n'y a pas lieu de donner du crédit à l'attestation communiquée par la BNP Paribas établie par l'huissier de justice qui a délivré l'acte à Mme H., en faisant valoir que celui-ci ne saurait se constituer une preuve à lui même de son absence de faute.

La SA BNP Paribas conclut à la régularité de la signification de l'acte de dénonciation de la saisie attribution à la SCI Gavarnie, en faisant valoir que l'acte a été signifié par la voie d'une remise à domicile, à une personne présente, Mme Odette H., qui a expressément accepté de recevoir l'acte.

Elle ajoute que la SCI Gavarnie ne démontre pas que Mme Odette H., personne présente le 17 janvier 2019 au lieu du siège social de la SCI Gavarnie et qui a accepté que l'acte lui soit remis, ne disposait pas d'un discernement suffisant pour recevoir l'acte comme souffrant de troubles cognitifs clairement visibles et identifiables par un interlocuteur qui ne la connaissait pas.

Elle souligne que l'huissier de justice instrumentaire a attesté avoir le souvenir d'une personne d'un certain âge mais qui ne manquait pas de discernement au moment de la remise de l'acte.

Elle soutient qu'en toute hypothèse, la SCI Gavarnie ne justifie d'aucun grief que lui aurait causé la prétendue irrégularité de signification, dès lors qu'elle a saisi le juge de l'exécution d'une contestation de la saisie attribution, dans le délai imparti.

L'article 654 du code de procédure civile dispose que 'la signification doit être faite à personne.

La signification à une personne morale est faite à personne lorsque l'acte est délivré à son représentant légal, à un fondé de pouvoir de ce dernier, ou à toute autre personne habilitée à cet effet.'

L'article 655 du code de procédure civile dispose que 'Si la signification à personne s'avère impossible, l'acte peut être délivré soit à domicile, soit, à défaut de domicile connu, à résidence. L'huissier de justice doit relater dans l'acte les diligences qu'il a accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire et les circonstances caractérisant l'impossibilité d'une telle signification.

La copie peut être remise à toute personne présente au domicile ou à la résidence du destinataire.

La copie ne peut être laissée qu'à condition que la personne présente l'accepte et déclare ses nom, prénoms et qualité.

L'huissier de justice doit laisser, dans tous ces cas, au domicile ou à la résidence du destinataire, un avis de passage daté l'avertissant de la remise de la copie et mentionnant la nature de l'acte, le nom du requérant ainsi que les indications relatives à la personne à laquelle la copie a été remise.'

L' article 690 du code de procédure civil précise que ' la notification destinée à une personne morale de droit privé ou à un établissement public à caractère industriel ou commercial, est faite au lieu de son établissement.

A défaut d'un tel lieu, elle l'est en la personne de l'un de ses membres habilités à le recevoir'.

En l'espèce, il ressort des mentions dans le procès-verbal du 17 janvier 2019 de signification de l'acte de dénonciation de la saisie attribution pratiquée le 15 janvier 2019, que l'huissier de justice instrumentaire s'est rendu au siège social de la SCI Gavarnie, dont il n'est pas contesté qu'il a été fixé au domicile de M. Patrick H., son gérant, et que la signification à personne au sens de l' article 654 du code de procédure civil s'étant avérée impossible, il a remis la copie de l'acte à Mme Odette H., mère du gérant, présente au lieu du siège social et qui a expressément accepté de la recevoir.

L'huissier de justice qui, selon les mentions dans le procès-verbal, n'a pas procédé à une signification de l'acte à personne, mais à domicile, soit au siège social de la SCI Gavarnie, n'avait pas à vérifier que Mme Odette H. qui y était présente était habilitée à recevoir l'acte pour le compte de la SCI Gavarnie, mais seulement, conformément à l' article 655 du code de procédure civile, à s'assurer qu'elle acceptait d'en recevoir la copie, en le mentionnant, à laisser un avis de passage, puis à adresser la lettre prévue par l' article 658 du code de procédure civil comprenant toutes les informations utiles, ainsi qu'une copie de l'acte ; ce qu'il a fait tel que cela résulte de la lettre du 18 janvier 2019 adressée à la SCI Gavarnie ( pièce n°3 de l'appelante).

S'agissant de la capacité de Mme Odette H. à recevoir le 17 janvier 2019 la copie de l'acte de dénonciation, pour valoir signification à domicile, c'est à juste titre que le juge de l'exécution a retenu que les éléments versés aux débats par la SCI Gavarnie, qui sont les mêmes que ceux soumis à l'examen de la cour, à savoir l'attestation de son époux établie dix mois après, affirmant qu'elle souffre d'un manque de discernement lié à son âge, ainsi que des factures relatives à l'emploi d'une aide ménagère et au recours à un service de portage des repas, ne suffisent pas à établir qu'elle ne disposait pas au moment du passage de l'huissier de justice du discernement nécessaire pour accepter valablement la remise par celui-ci de la copie de l'acte, à raison de troubles clairement visibles et identifiables par l'huissier de justice instrumentaire, lequel au surplus a écrit le 18 octobre 2019 au conseil de la banque, en indiquant 'avoir le souvenir d'une dame effectivement d'un certain âge, mais qui ne manquait pas de discernement, qui lui a confirmé que le siège social de la SCI se trouvait à son domicile et qui a accepté de recevoir l'acte en qualité de personne présente.'

L'irrégularité de la signification à domicile de l'acte de dénonciation de la saisie attribution n'est donc pas établie.

Au surplus, la nullité de l'acte de signification à raison de son irrégularité alléguée en raison des modalités de sa délivrance, à défaut de remise au représentant légal, ou à un fondé de pouvoir ou à une personne habilitée à recevoir l'acte, ne peut être prononcée qu'à charge pour celui qui l'invoque de prouver l'existence d'un grief.

En l'espèce, l'irrégularité invoquée de la signification de l'acte de dénonciation de la saisie n'a causé aucun grief à la SCI Gavarnie qui a eu connaissance de l'acte et a formé son recours devant le juge de l'exécution dans les délais légaux.

La SCI Gavarnie n'invoque en cause d'appel aucun autre moyen d'irrégularité de l'acte de dénonciation de la saisie attribution.

Le jugement critiqué sera en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de nullité de l'acte de signification de la dénonciation le 17 janvier 2019 à la SCI Gavarnie de la saisie attribution pratiquée le 15 janvier 2019 entre les mains de la SCI Groupe des MMA.

Par ailleurs, la SCI Gavarnie n'invoque plus en cause d'appel aucun moyen tenant à l'irrégularité du procès-verbal de saisie-attribution ou à la nullité de la saisie attribution pour défaut de titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible fondant celle-ci.

En définitive, le jugement critiqué sera confirmé en ce qu'il a débouté la SCI Gavarnie de sa demande d'annulation de la saisie-attribution pratiquée à la demande de la société BNP Paribas le 15 janvier 2019, par la SCP B. T., huissier de justice associé, sur les loyers dus par la SCI du groupe MMA au titre de la location de l'immeuble appartenant à la SCI Gavarnie situé [...], dénoncée le 17 janvier 2019.

Sur la demande de délais de paiement

La SCI Gavarnie soutient qu'elle est fondée à solliciter l'infirmation du jugement critiqué qui ne lui a accordé, alors qu'elle justifiait de sa qualité de débiteur de bonne foi et de réelles difficultés financières, qu'un délai de grâce d'un an et l'a déboutée de sa demande visant à ce que les paiements réalisés s'imputent prioritairement sur le capital et à solliciter l'octroi par la cour de délais de grâce visant au report dans deux ans à compter du caractère définitif de la décision à intervenir, des sommes dues à la société BNP Paribas, avec imputation des paiements effectués d'abord sur le capital, de nature à lui permettre de trouver des solutions pour le refinancement de la dette.

Elle soutient que sa situation financière et celle de son gérant M. H. doivent être prises en considération.

La société BNP Paribas s'oppose à la prétention nouvelle en cause d'appel de la SCI Gavarnie d'octroi d'un nouveau report pur et simple de la dette pendant deux ans avec, à l'expiration de ce délai, imputation des règlements d'abord sur le capital et sollicite l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a octroyé à la SCI Gavarnie une suspension durant douze mois de sa dette.

Elle fait valoir qu'il n'y a aucune raison d'accorder à la SCI Gavarnie un report pur et simple de sa dette, même de douze mois, en lui permettant de percevoir trimestriellement les loyers versés par la SCI Groupe des MMA, lesquels dans l'opération d'acquisition de l'immeuble financé par le prêt accordé à la SCI Gavarnie par la BNP Paribas avaient vocation à permettre de régler les échéances.

Elle ajoute que la SCI Gavarnie s'est d'ores et déjà vu accorder de très larges délais de paiement en ne procédant plus à aucun versement depuis septembre 2017.

Elle souligne que la SCI Gavarnie ne s'explique pas sur les solutions de refinancement de sa dette qu'elle entendrait mettre en oeuvre pour s'acquitter de celle-ci à l'issue du délai de grâce qui lui serait accordé.

En application de l'article R 121-1 du code des procédures civiles d'exécution, le juge de l'exécution ne peut ni modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, ni en suspendre l'exécution. Toutefois, après signification du commandement ou de l'acte de saisie ou à compter de l'audience prévue par l'article R. 3252-17 du code du travail, selon le cas, il a compétence pour accorder un délai de grâce.

En l'espèce, la mesure d'exécution forcée a été diligentée à la requête de la société BNP Parisbas à l'encontre de la société SCI Gavarnie en sa qualité de débiteur principal des sommes restant dues au titre du prêt consenti par la banque à son profit suivant acte notarié du 24 août 2011 et non à l'encontre de M. Patrick H., à titre personnel, en sa qualité de caution des engagements de la SCI Gavarnie à l'égard de la société BNP Paribas ou d'associé de la SCI Gavarnie.

C'est donc à juste titre que le premier juge a retenu que la situation personnelle et financière de M.Patrick H. ne pouvait motiver l'octroi d'un délai de grâce à la SCI Gavarnie.

Les locaux acquis le 24 août 2011 par la SCI Gavarnie comprennent des locaux à usage commercial, ainsi que des locaux à usage d'habitation.

M. Patrick H. explique lui-même avoir créé la SCI Gavarnie en vue d'acquérir des locaux pour pouvoir se les donner à bail afin d'y exercer son activité d'agent MMA, en précisant que le prêt lui avait été accordé par la société BNP Paribas sur la base d'une attestation de revenus locatifs.

Les revenus locatifs étaient ainsi destinés dès l'origine à couvrir partiellement les échéances du prêt souscrit pour acquérir l'immeuble.

Les locaux sont actuellement donnés à bail commercial à la SCI Groupe des MMA, suivant contrat du 22 juillet 2014, moyennant un loyer annuel de 14 400 euros.

Le premier juge, qui a accordé à la SCI Gavarnie un délai de grâce de douze mois à compter de la signification du jugement, a justement retenu au vu des pièces versées aux débats par la débitrice, l'existence de difficultés financières l'empêchant de tenir ses engagements à l'égard de la banque, liées au différentiel entre les revenus locatifs nets et les échéances du prêt, non compensé par une autre source de revenus ou par la trésorerie de la société, auquel s'ajoute le départ à la retraite de son gérant, ainsi que sa qualité de débitrice de bonne foi au regard des démarches entreprises suite à sa défaillance, pour réaménager amiablement sa dette en sollicitant auprès de la BNP Paribas l'allongement de la durée du prêt, ce qui lui a été refusé fin mars 2018, puis pour rechercher une autre banque en vue de financer le rachat du prêt et à compter de novembre 2018, pour vendre l'immeuble amiablement après l'avoir fait estimer.

Néanmoins, les démarches dont il a été fait état devant le premier juge, reprises au soutien de la demande de délais devant la cour, ou bien ont échoué (allongement de la durée du prêt), ou bien sont anciennes (rachat par une autre banque et mise en vente avec notification au locataire disposant d'un droit de préemption en novembre 2018), sans qu'il soit justifié qu'elles se poursuivent et qu'elles ont des chances d'aboutir prochainement.

S'agissant des perspectives de régularisation, la SCI Gavarnie, qui fait état 'd'une solution pour le refinancement de la dette BNP qui pourra être trouvée par des membres de la famille', ne verse aux débats aucun élément de nature à justifier de ses dires.

Il convient en outre de relever que tout en reprochant à la banque d'avoir diligenté une saisie attribution des loyers dus par la SCI Groupe des MMA pour recouvrer sa dette, le seul règlement dont elle fait état comme étant de nature à permettre d'apurer à ce jour de façon substantielle le montant de sa dette, correspond au montant des loyers bloqués depuis l'origine de la mesure par locataire, du fait de la contestation de la saisie.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a accordé à la SCI Gavarnie un délai de grâce de 12 mois à compter de sa signification, en rejetant la demande tendant à voir dire que les paiements réalisés s'imputeront prioritairement sur le capital et de rejeter la nouvelle demande de délai formée par la SCI Gavarnie avec imputation des règlements à venir prioritairement sur le capital.

Il convient de préciser s'agissant d'une saisie attribution de créance à exécution successive (loyers dus par la SCI du groupe MMA), que le délai de grâce qui a été accordé par le premier juge dont la décision est confirmée ne peut porter que sur le solde du montant des causes de la saisie à la date du prononcé de la décision.

Sur la demande de désignation d'un séquestre

La SCI Gavarnie fait valoir qu'en dépit de l'exécution provisoire attachée à la décision rendue le 31 juillet 2020 par le juge de l'exécution, la SCI Groupe MMA continue de refuser de verser les loyers entre ses mains et bloque ainsi purement et simplement le montant des loyers dus.

Elle prétend que la désignation, en application de l'article R. 211-16 du code des procédures civiles d'exécution, d'un séquestre pour encaisser les loyers dus par la SCI Groupe des MMA, permettra de s'assurer que les loyers sont payés par cette dernière durant la période de suspension des voies d'exécution ordonnée judiciairement.

Elle fait valoir en outre que cette mesure permettra lorsqu'une décision irrévocable aura été rendue, de débloquer les montants des loyers séquestrés pour qu'elle puisse apurer de façon substantielle le montant des mensualités impayées du prêt et reprendre ensuite le montant des règlements.

Aux termes de l'article R. 211-16 du code des procédures civiles d'exécution, applicable en matière de saisie attribution des créances à exécution successive , en cas de contestation, le tiers saisi s'acquitte des créances échues entre les mains d'un séquestre désigné, à défaut d'accord amiable, par le juge de l'exécution saisi sur requête.

En l'espèce, la contestation de la saisie attribution litigieuse tenant à sa prétendue nullité pour signification irrégulière de l'acte de dénonciation au débiteur saisi, ayant été rejetée, il n'y a pas lieu à désignation d'un séquestre dans les conditions de l’article sus cité.

En outre, la désignation d'un séquestre en application de ce texte n'a pas vocation à s'appliquer pour les créances échues pendant le cours d'un délai de grâce accordé par le juge.

La demande à ce titre sera en conséquence rejetée.

- Sur la demande de dommages intérêts

La SCI Gavarnie soutient qu'elle est fondée, en application des articles L. 111-17 et L. 121-2 du code des procédures civiles d'exécution, à solliciter l'allocation de dommages intérêts à raison du préjudice subi du fait de la faute commise par la société BNP Paribas qui a poursuivi une mesure d'exécution en dépit d'un acte nul.

Elle ajoute qu'en dépit de la notification faite de la décision de première instance, la mesure d'exécution n'a toujours pas été suspendue et en déduit l'existence d'une collusion entre le tiers saisi et le créancier.

Elle prétend subir un préjudice résultant des frais occasionnés par les agissements de la société BNP Paribas, l'atteinte à son image et à sa réputation et l'absence de perception des loyers échus chaque mois retenus par la SCI Groupe MMA, malgré suspension de la saisie attribution ordonnée judiciairement.

Aux termes de l’article L. 111-7 du même code, le créancier a le choix des mesures propres à assurer l'exécution ou la conservation de sa créance.

L'exécution de ces mesures ne peut excéder ce qui se révèle nécessaire pour obtenir le paiement de l'obligation.

Aux termes de l'article L. 121-2 du code des procédures civiles d'exécution, le juge de l'exécution a le pouvoir d'ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages intérêts en cas d'abus de saisie.

En l'espèce, l'acte de dénonciation de la saisie attribution au débiteur saisi n'ayant pas été annulé, à juste titre, par le premier juge, la faute de la banque alléguée au soutien de la demande de dommages intérêts de la SCI Gavarnie pour saisie abusive, n'est pas caractérisée.

En outre, aucune circonstance ne démontre que la saisie attribution litigieuse excéderait ce qui est nécessaire pour obtenir le paiement de la créance de la société BNP Paribas.

Il convient en conséquence de confirmer la décision critiquée en ce qu'elle a rejeté la demande de dommages intérêts de la SCI Gavarnie.

Sur les demandes accessoires

Le jugement critiqué sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles.

Partie perdante, la SCI Gavarnie sera en outre déboutée de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et sera condamnée aux dépens d'appel.

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la société BNP Paribas la charge de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement du juge de l'exécution du tribunal judiciaire du Mans du 31 juillet 2020 en toutes ses dispositions critiquées ;

y ajoutant,

REJETTE la demande de la SCI Gavarnie tendant à lui voir accorder les plus larges délai de grâce et de dire que les paiements effectués dans deux ans à compter du prononcé de la décision à intervenir s'imputeront d'abord sur le capital ;

REJETTE la demande de la SCI Gavarnie tendant à voir, en application de l'article R. 211-16 du code des procédures civiles d'exécution, désigner tel séquestre qu'il plaira à la cour pour encaisser les loyers échus jusqu'à l'issue du présent litige ;

CONDAMNE la SCI Gavarnie aux dépens d'appel

DEBOUTE les parties de leurs demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.