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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 9, 6 janvier 2022, n° 20/14225

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Naxicap Partners (SA), Genoyer International (SAS), Crédit Agricole Corporate and Investment Bank (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mollat

Conseillers :

Mme Rohart, Mme Coricon

Avocats :

Me Kong Thong, Me de Saint Sernin, Me Boccon Gibod, Me Marembert, Me Bourgon-Farran, Me Perotto, Me Meunier, Me Hardouin, Me Coiffet

T. com. Paris, du 18 sept. 2020, n° 2018…

18 septembre 2020

La société Genoyer International, holding de tête d'un groupe spécialisé dans la production et le service de produits métallurgiques pour l'industrie pétrolière et nucléaire, a été créée en 2007 par un fonds d'investissement, Qualium, via une opération de financement par effet de levier moyennant un emprunt de 165 millions d'euros souscrit auprès d'un pool bancaire composé du Crédit Lyonnais, de Natixis et du Crédit agricole Corporate and Investment Bank (ci-après 'CA-CIB').Elle est détenue depuis une restructuration intervenue en 2015 à 100 % par la banque populaire développement, représentée par sa société de gestion Naxicap. Elle a transféré à cette occasion son action de préférence dite 'Golden Share' à la CA-CIB qui a, en contrepartie, accepté de renoncer à la moitié de sa dette.

Cette société par actions simplifiées dirigée par un président est dotée d'un directoire et d'un conseil de surveillance composé de 5 membres et d'un censeur, soit, pendant la période des faits en litige :

- la société Naxicap, représentée par X,

- X jusqu'au 4 novembre 2016, remplacé par Y,

- la société Gabrielle représentée par Z, jusqu'au 3 mai 2017, remplacée par Z,

- la société HDA Conseil représentée par W,

- la société Royal Advisory représentée par B,

- C, censeur.

A est recruté le 20 juillet 2016 comme président du directoire, moyennant une rémunération fixe annuelle de 350 000 euros, une rémunération variable annuelle de 250 000 euros maximum et une indemnité de rupture conventionnelle en cas de révocation ou non-renouvellement. Le 12 décembre 2017, le conseil de surveillance a prononcé sa révocation et lui a versé son solde de tout compte ainsi qu'une indemnité de révocation.

Le 13 avril 2018, A a assigné la société Genoyer International, la CA-CIB, la société Naxicap et X devant le tribunal de commerce de Paris, afin de voir déclarer sa révocation abusive, obtenir réparation de divers préjudices et revendiquer le bénéfice des dispositions de la loi du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, concernant la protection des lanceurs d'alerte.

Par jugement du 18 septembre 2020, le tribunal de commerce de Paris a débouté A de l'ensemble de ses demandes et l'a condamné à payer à la société Genoyer International la somme de 10 000 euros, à la société Naxicap et X la somme de 5 000 euros et à la CA-CIB la somme de 5 000 euros, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

A a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 8 octobre 2020.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 5 novembre 2021 par voie électronique, A demande à la cour de :

Le DECLARER recevable et bien fondé en son appel ;

INFIRMER le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

DIRE et JUGER que les Material Tests Certificates (MTC) établis en application de la norme européenne EN 10204 doivent impérativement mentionner le nom de l'usine ayant fabriqué les produits et non pas le nom d'une autre usine qui apparaîtrait en tant que marque ;

DIRE et JUGER que les certificats établis par la société MVS du groupe GENOYER en juin 2016 mentionnant le nom de l'usine européenne VILMAR au lieu de celui des usines ayant fabriqué les produits étaient de faux certificats caractérisant les infractions pénales de faux, usage de faux et escroquerie ;

DIRE et JUGER que c'est de façon fondée qu'il a qualifié ces certificats de « faux certificats » ;

CONSTATER qu'il a été révoqué de son mandat de Président du Directoire de la société GENOYER INTERNATIONAL le 12 décembre 2017, pour avoir dénoncé par un courriel du 18 juillet 2017, adressé à tous les membres du Conseil de Surveillance de GENOYER INTERNATIONAL, le fait que Y, membre du conseil de surveillance et ancien Président du Directoire, avait autorisé l'établissement de faux certificats sur la provenance du matériel ;

CONSTATER qu'il est bien fondé à revendiquer le statut de lanceur d'alerte en application des articles 6 et suivants de la loi du 9 décembre 2016 ;

DIRE et JUGER que la liberté d'expression étant un droit fondamental consacré par la déclaration des droits de l'Homme et du citoyen, il ne saurait être privé de la protection érigée au profit des lanceurs d'alerte au motif qu'il serait mandataire social et non pas salarié ;

CONSTATER qu'il s'est conformé aux dispositions de l'article 8-1 de la loi du 9 décembre 2016 en dénonçant les agissements frauduleux, dans un premier temps à son autorité de contrôle, le Conseil de Surveillance de la société GENOYER INTERNATIONAL puis, postérieurement à sa révocation, en saisissant le Tribunal de Commerce de Paris et en sollicitant l'intervention du Procureur de la République en application des dispositions de l'article 427 du code de procédure civile ;

DIRE et JUGER qu'il est indispensable que le Ministère Public puisse avoir connaissance du dossier pour mettre fin à la pratique des faux certificats sur la provenance ;

CONSTATER en effet que la société CACIB qui revendique cette pratique comme licite dispose désormais d'une confirmation judiciaire au moyen du jugement entrepris ;

CONSTATER par ailleurs que le Ministère Public doit avoir connaissance du dossier en raison des poursuites pénales exercées à l'heure actuelle contre des salariés exécutants alors qu'il est établi que ce sont les sociétés intimées qui s'entendent toutes à perpétuer les agissements de faux certificats dans un but de profitabilité ;

En conséquence,

CONSTATER qu'il y a lieu de communiquer l'affaire au Ministère Public en application des articles 427 et 428 du Code de Procédure Civile ;

AVERTIR le Ministère Public de la date de l'audience en application des dispositions de l'article 429 du Code de Procédure Civile ;

FAIRE DROIT à sa demande d'enquête dans le cadre de laquelle sera entendu, en application des dispositions de l'article 204 et suivant du Code de Procédure Civile, E demeurant <adresse>;

DIRE et JUGER que E devra préciser les raisons pour lesquelles il s'est démis en janvier 2016 de son mandat de Président du directoire de GENOYER INTERNATIONAL, et qu'il devra préciser les modalités de l'intéressement en cas de revente de la société qui avait été accordé contractuellement ;

PRONONCER en application des dispositions des articles 6 et suivants de la loi du 9 décembre 2016 instaurant la protection des lanceurs d'alerte, la nullité de sa révocation de son mandat de Président du Directoire de GENOYER INTERNATIONAL et prononcer sa réintégration.

CONDAMNER la société GENOYER INTERNATIONAL à lui payer les rémunérations échues entre le jour de l'expiration de son mandat social et le jour de sa réintégration.

Subsidiairement

DIRE ET JUGER qu'il a été révoqué en violation de sa liberté d'expression pour avoir accusé son prédecesseur d'avoir autorisé l'établissement de faux certificats

CONSTATER que le motif de sa révocation lui a été volontairement été caché lors de la réunion du Conseil de Surveillance appelé à statuer sur cette mesure, et qu'il n'a pu de ce fait se défendre.

En conséquence

DIRE ET JUGER que sa révocation est abusive.

CONDAMNER les sociétés intimées et X à lui payer solidairement in solidum ou l'un à défaut des autres une somme de 600 000 euros correspondant à une année de rémunération en réparation du préjudice résultant de la révocation abusive ;

En tout état de cause

DONNER INJONCTION aux parties intimées, sous telle astreinte qu'il plaira à la Cour fixer, de communiquer le pacte d'actionnaire du 7 octobre 2015

CONDAMNER les sociétés CACIB, NAXICAP, GENOYER INTERNATIONAL et X à lui payer solidairement in solidum ou l'un à défaut des autres les sommes suivantes :

1) Complément de rémunération variable 2017 : 231 250 euros

2) Réparation du préjudice résultant de la fausse promesse sur l'intéressement lors de la revente : 10,82 millions d'euros

3) Complément d'indemnité contractuelle de révocation : 12 565,32 euros

4) Réparation du préjudice moral : 50 000 euros

ASSORTIR les condamnations des intérêts au taux légal

ORDONNER la capitalisation des intérêts légaux en application des dispositions de l'article 1343-2 du Code civil ;

CONDAMNER les sociétés CACIB, NAXICAP, GENOYER INTERNATIONAL et X à lui régler solidairement in solidum ou l'un à défaut des autres la somme de 20 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens recouvrés dans les conditions de l'article 699 du CPC ;

DEBOUTER les sociétés CACIB, NAXICAP, GENOYER INTERNATIONAL et X des fins de leurs demandes reconventionnelles et de leur appel incident,

Les DEBOUTER également de leurs demandes formées sur le fondement de l'article 700 du CPC.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 2 novembre 2021, la société Genoyer International demande à la cour de :

A titre principal :

- Confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- Déclarer irrecevables les demandes tendant à voir juger que les certificats établis par la société MVS étaient de faux certificats caractérisant les infractions pénales de faux, usage de faux et escroquerie, et en toute hypothèse mal fondées,

- Déclarer mal fondées l'ensemble des demandes, fins et prétentions de A,

A titre subsidiaire, pour l'hypothèse où la Cour prononcerait la nullité de la révocation de A :

- Condamner A à lui restituer la somme de 484 308 euros versée à titre d'indemnité de rupture conventionnelle correspondant à sa rémunération brute fixe et variable reçue pour les douze mois ayant précédé sa révocation, outre les intérêts au taux légal à compter de la date de versement de ces sommes,

En tout état de cause

- Condamner A à lui payer la somme de 50 000 euros pour procédure abusive,

- Condamner A à lui payer la somme de 30 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamner A aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 2 novembre 2021, la société Crédit Agricole Corporate and Investment Bank demande à la cour de :

A titre liminaire :

Juger que les demandes formulées par A de :

- « Donner injonction aux parties intimées, sous telle astreinte qu'il plaira à la Cour fixer, de communiquer le pacte d'actionnaires du 7 octobre 2015 »

- « Dire et Juger que les Material Tests Certificates (MTC) établis en application de la norme européenne EN 10204 doivent impérativement mentionner le nom de l'usine ayant fabriqué les produits et non pas le nom d'une autre usine qui apparaitrait en tant que marque,

- Dire et Juger que les certificats établis par MVS du Groupe Genoyer en juin 2016 mentionnant le nom de l'usine européenne VILMAR au lieu de celui des usines ayant fabriqué les produits étaient de faux certificats caractérisant les infractions pénales de faux, usage de faux et escroquerie,

- Dire et Juger que c'est de façon fondée que A a qualifié ces certificats de « faux certificats », sont manifestement irrecevables en ce qu'elles ne relèvent pas de la compétence de la présente Cour ;

Juger que les demandes formulées par A de :

- « Dire et Juger que les Material Tests Certificates (MTC) établis en application de la norme européenne EN 10204 doivent impérativement mentionner le nom de l'usine ayant fabriqué les produits et non pas le nom d'une autre usine qui apparaitrait en tant que marque,

- Dire et Juger que les certificats établis par MVS du Groupe Genoyer en juin 2016 mentionnant le nom de l'usine européenne VILMAR au lieu de celui des usines ayant fabriqué les produits étaient de faux certificats caractérisant les infractions pénales de faux, usage de faux et escroquerie,

- Dire et Juger que c'est de façon fondée que A a qualifié ces certificats de « faux certificats », » sont manifestement irrecevables en ce qu'elles constituent de nouvelles prétentions formulées pour la première fois en cause d'appel ;

Subsidiairement,

Déclarer ces demandes mal-fondées ;

Sur le fond :

Confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a débouté A de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

Et,

Infirmer le jugement attaqué pour le surplus,

Et, statuant à nouveau :

Condamner A au versement de la somme de 50 000 euros au bénéfice de CA-CIB, à titre de dommages et intérêts pour abus du droit d'agir en justice ;

Condamner A à payer à CA-CIB la somme de 25 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance dont distraction pour Maître Patricia HARDOUIN - SELARL 2H AVOCATS et ce, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 12 octobre 2021, X et la société Naxicap Partners demandent à la cour de :

CONFIRMER le jugement du 18 septembre 2020 en ce qu'il a débouté A de l'intégralité de ses demandes et l'a condamné à verser aux concluants la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

DEBOUTER A de ses demandes formées en cause d'appel.

INFIRMER le jugement en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes reconventionnelles et, statuant à nouveau

CONDAMNER A à leur verser la somme de 50 000 euros chacun pour procédure abusive ;

CONDAMNER A à verser à X la somme de 60 000 euros au titre de son préjudice moral ;

CONDAMNER A à leur verser la somme complémentaire de 15 000 euros chacun au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

SUR CE,

Sur la recevabilité des demandes de A

La CA-CIB soutient que la demande de A tendant à ' Donner injonction aux parties intimées, sous telle astreinte qu'il plaira à la Cour fixer, de communiquer le pacte d'actionnaires du 7 octobre 2015 " adressée à son encontre est irrecevable puisqu'elle n'est pas et n'a jamais été actionnaire de la société Genoyer International, que ce pacte est inutile à sa résolution du litige puisque A qui demande l'indemnisation de divers préjudice, n'était pas associé lui non plus et qu'une telle demande relève du conseiller de la mise en état.

Elle soutient que les demandes de ' Dire et Juger que les Material Tests Certificates (MTC) établis en application de la norme européenne EN 10204 doivent impérativement mentionner le nom de l'usine ayant fabriqué les produits et non pas le nom d'une autre usine qui apparaîtrait en tant que marque ', ' Dire et Juger que les certificats établis par MVS du Groupe Genoyer en juin 2016 mentionnant le nom de l'usine européenne VILMAR au lieu de celui des usines ayant fabriqué les produits étaient de faux certificats caractérisant les infractions pénales de faux, usage de faux et escroquerie ', et ' Dire et Juger que c'est de façon fondée que A a qualifié ces certificats de « faux certificats » ' ne relèvent pas plus de la compétence de la cour de céans, s'agissant de demandes tendant à la reconnaissance d'infractions pénales. Elle souligne qu'elles sont en outre nouvelles en cause d'appel.

La société Genoyer International soutient également que ces demandes sont irrecevables car présentées pour la première fois en cause d'appel et hors de la compétence d'une juridiction commerciale.

Elle soutient également que ces demandes sont nouvelles en cause d'appel et, par suite, irrecevables sur le fondement des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile.

La cour relève en premier lieu qu'il ne ressort pas de sa compétence de qualifier les éléments constitutifs d'infractions pénales, ni de caractériser une quelconque infraction pénale. Par suite, c'est à juste titre que la CA-CIB et la société Genoyer International soulèvent l'irrecevabilité des demandes formées par A tendant à reconnaître la caractérisation de faux, usage de faux et escroquerie des certificats établis par la société MVS en juin 2016.

La cour constate en second lieu que la demande de production forcée, sous astreinte, du pacte d'actionnaires relève de la compétence exclusive du conseiller de la mise en état, et n'est plus recevable au stade du débat au fond.

Par suite, il convient de déclarer irrecevables les demandes formées par A tendant à :

- DIRE et JUGER que les Material Tests Certificates (MTC) établis en application de la norme européenne EN 10204 doivent impérativement mentionner le nom de l'usine ayant fabriqué les produits et non pas le nom d'une autre usine qui apparaîtrait en tant que marque ;

- DIRE et JUGER que les certificats établis par la société MVS du groupe GENOYER en juin 2016 mentionnant le nom de l'usine européenne VILMAR au lieu de celui des usines ayant fabriqué les produits étaient de faux certificats caractérisant les infractions pénales de faux, usage de faux et escroquerie ;

- DIRE et JUGER que c'est de façon fondée que A a qualifié ces certificats de « faux certificats »  ;

- DONNER INJONCTION aux parties intimées, sous telle astreinte qu'il plaira à la Cour, de fixer, de communiquer le pacte d'actionnaire du 7 octobre 2015.

Sur la révocation de A

A fait valoir que la perte de rentabilité alléguée n'est qu'un motif de façade qui cache la vraie raison de sa révocation, qui a sanctionné sa révélation d'une pratique illicite.

Il fait valoir qu'il a, par courriel du 18 juillet 2017, accusé son prédécesseur Y d'avoir donné des instructions pour établir de faux certificats sur la provenance des matériels et que la société Genoyer International reconnaît qu'elle l'a interprété comme une marque de défiance forte du président du directoire à l'égard de l'actionnaire.

Il explique qu'il a mis à jour une pratique de 'branding' consistant à vendre sous la marque de la société des produits fabriqués en Chine sans aviser les clients de l'origine de ces produits. Il précise que les produits métallurgiques destinés aux industries pétrolières et nucléaires sont régis par des normes européennes et américaines qu exigent l'établissement de certificats de traçabilité qui doivent préciser le nom de l'usine de fabrication, la composition chimique, la résistance mécanique, l'état du traitement thermique et le résultat des tests des produits. Il estime que la société Genoyer International a trompé ses clients sur la provenance, la composition chimique et les tests réalisés sur ses produits en achetant dans une usine 'low-cost' un produit métallurgique présenté comme issu d'usines européennes certifiées.

Il ajoute que le scandale créée par la société ARAMCO, cliente du groupe, en raison de cette pratique, n'est pas un fait isolé et que cette pratique était très importante et concernait toutes les entités du groupe, et qu'il verse aux débats plusieurs éléments l'établissant :

- un mail du 26 octobre 2015 de B…, directeur qualité de Genoyer, juste après la plainte de la société ARAMCO,

- un compte-rendu du comité d'audit et des risques de Genoyer International du 15 février 2016 relatif à la démission très rapide de E (embauche en novembre 2015, démission en janvier 2016), ancien président du directoire qui avait également découvert ces pratiques,

- la business review établie par Y le 2 mai 2016 à destination du conseil de surveillance,

- le mémo du directeur de la qualité du 15 mars 2016.

Il estime que les intimés ont chacun leur part de responsabilité :

- la CA-CIB en tant que dirigeante de fait de la société Genoyer International : ayant abandonné la moitié de sa dette en 2015, elle a pris le contrôle effectif du groupe via un montage juridique qui lui permet de désigner comme actionnaire un 'servicer' qu'elle se réservait de pouvoir remplacer et qu'elle dispose d'une 'Golden Share' lui permettant de contraindre à des cessions forcées d'actions et de révoquer ad nutum les membres du conseil de surveillance ; il explique qu'il a été recruté par la CA-CIB, qui voulait remplacer Y qu'elle jugeait incompétent, et qu'elle lui a demandé de lui rapporter directement ; que c'est la CA-CIB qui exige des comptes, prend les décisions et donne les instructions ; qu'elle n'a pas réagi à son courriel du 18 mai 2017 révélant les pratiques de branding, estimant même devant les premiers juges qu'elles étaient licites ;

- Naxicap et X en tant que complice de la gestion de fait de la CA-CIB : il explique ne pas avoir eu de contacts avec X et Naxicap pendant les 18 mois qu'ont duré son mandat ; qu'ils sont donc complices de la gestion de fait de la CA-CIB et des procédés de faux certificats dont ils reconnaissent l'existence et qu'ils engagent leur responsabilité sur le fondement de l'article L.225-257 du code de commerce relatifs aux fautes personnelles commises par les membres du conseil de surveillance qui auraient eu connaissance de délits dont ils n'ont pas révélé l'existence à l'Assemblée générale ;

- la société Genoyer International qui a exécuté de mauvaise foi le contrat de mandat lui promettant ' une part essentielle de l'enveloppe d'intéressement réservé au management '; qu'une enveloppe de 10 millions d'euros était évoquée lors de son embauche ; qu'il n'a jamais été en possession du pacte d'actionnaires l'évoquant ; qu'il a été convoqué brutalement à une réunion du conseil de surveillance du 12 décembre 2017 pour se prononcer sur sa révocation au motif de divergences sur la stratégie et de dégradations des résultats.

Il sollicite donc que soit prononcé la nullité de sa révocation, qui a été prononcé en raison de ses dénonciations et que soit reconnue sa qualité de lanceur d'alerte puisqu'il a révélé de manière désintéressée et de bonne foi un crime ou un délit. Subsidiairement il demande à ce que le caractère abusif de sa révocation soit reconnu.

La société Genoyer fait valoir que la position de A quant au motif de sa révocation a varié dans le temps, que le dispositif issu de la loi Sapin II relatif aux lanceurs d'alerte ne lui est pas applicable dès lors qu'il ne vise que les salariés ou fonctionnaires, et pas les mandataires sociaux, que l'alerte n'a été donné qu'à Y, ce qui ne vaut pas signalement au sens de la loi et qu'en tout état de cause, cette pratique de faux certificats avait déjà été identifiée avant le recrutement de A et des mesures avaient déjà été prises pour y mettre fin ; que A n'a donc rien révélé. Elle ajoute qu'aucun texte ne prévoit la nullité de la révocation pour ce motif, que cette annulation serait impossible puisque A est titulaire d'un mandat social dans une autre société aujourd'hui.

Elle demande subsidiairement, si la cour de céans devait annuler sa révocation, à ce que l'indemnité de rupture conventionnelle versée à A, à hauteur de 484 308 euros, lui soit restituée.

La CA-CIB réfute sa qualité de gérante de fait, indique que A a été nommé président par le conseil de surveillance statuant à la majorité simple, qu'il ne produit aucun élément au soutien de son allégation de recrutement par la CA-CIB, qui a simplement donné son avis sur le profil des candidats ; que la remontée d'informations financières à son égard ne caractérise aucun acte positif de gestion.

Elle ajoute qu'elle n'a, en tout état de cause, commis aucune faute, n'ayant rien à voir avec la politique commerciale de la société dont elle est la créancière ; qu'elle n'est donc pas impliquée dans d'éventuelles pratiques de 'branding' dénoncée dans l'une des filiales du groupe ; que les échanges produits entre A et E n'établissent rien, si ce n'est qu'il a démissionné pour des raisons personnelles ; qu'elle n'a pas décidé de la révocation de A puisqu'elle ne siège pas au conseil de surveillance. Elle estime que le statut de lanceur d'alerte n'est pas applicable à A qui n'était pas salarié de la société et qui n'a pas suivi la procédure d'alerte décrite par la loi Sapin II.

Elle conteste tout caractère abusif de la révocation de A, qui était révocable ad nutum en vertu de l'article 14 des statuts de la société ; qu'il a été informé des motifs de sa révocation et en meure de présenter sa défense ; qu'il était présent lors du conseil de surveillance ayant voté sa révocation, et qu'il a présenté un certain nombre d'arguments qui sont relatés dans le procès-verbal de la séance.

X et la société Naxicap font valoir que A était révocable ad nutum, qu'aucun abus n'entoure les circonstances du prononcé de cette révocation, A ayant été convoqué à la séance du conseil de surveillance statuant sur sa révocation, mis en mesure de s'expliquer et de faire valoir ses arguments ; que les motifs de sa révocation sont relatés dans le procès-verbal et que A n'établit pas qu'il existerait un autre motif caché, tenant à son courriel du mois de juillet précédent.

Ils ajoutent que la révocation est justifiée, une perte de confiance s'étant installée entre A, les associés et les membres du conseil de surveillance, en raison de ce courriel, du brusque licenciement de la directrice administrative et financière fin août 2017, sans information préalable, des divergences de stratégie de redressement de la société et de l'insuffisance du reporting et de l'imprécision des business plans présentés par M A.

Ils contestent l'application du statut de lanceur d'alerte à A qui n'était pas salarié de la société ; ils indiquent que la politique de contrôle de la certification des produits a été revu en 2015 suite à la découverte de falsifications de certificats des produits par une filiale ; que A a été recruté après cette découverte et la mise en place de mesures correctives ; qu'il n'a donc rien révélé et que sa réintégration ne peut être envisagée.

Ils indiquent ne pas comprendre sur quel fondement leur responsabilité serait susceptible d'être engagée, Naxicap n'étant pas actionnaire mais société de gestion ; que si A le met en cause en tant que dirigeant de droit, il semble que ce soit en sa qualité de membre du conseil de surveillance que A cherche à caractérise une faute. Ils nient être dirigeant de droit, et précisent que les membres du conseil de surveillance doivent commettre une faute personnelle dans l'exécution du mandat ou ne pas révéler en connaissance de cause un délit commis par un membre du directoire.

Tout d'abord, s'agissant des personnes dont la responsabilité est recherchée par A, il convient de souligner que la simple détention d'une 'Golden Share' ne suffit pas à caractériser une gérance de fait, d'autant plus qu'en l'espèce, les droits attachés à cette 'Golden Share' sont limitativement énumérées par l'annexe P des statuts de la société Genoyer International intitulée 'Termes et conditions des ADP P', et ne concernent que les droits de mettre en oeuvre un processus de liquidités, de provoquer une vente forcée, de révoquer ad nutum les membres du conseil de surveillance et de nommer en remplacement les personnes de son choix, de révoquer ad nutum le président et de nommer en remplacement la personne de son choix en cas de procédure collective, de nommer un DGD Golden Share et enfin octroie à son détenteur un droit de veto concernant la modification de trois articles des statuts (modalités de désignation du président, du directeur général et du conseil de surveillance) et l'annexe P. Cette 'Golden Share' ne permet donc pas la révocation du président en dehors de l'hypothèse d'une procédure collective. L'article 14 des statuts réserve ce pouvoir, dans son point 4, au conseil de surveillance, dont ne fait pas partie la CA-CIB. Cet article ne renvoie pas au pacte d'actionnaires, dont la production dans la présente instance n'est donc pas nécessaire.

Les pouvoirs attachés à la 'Golden Share' en litige concernent donc la cession des titres de la société, la composition du conseil de surveillance et un droit de veto sur la modification des modalités de nomination prévues par les statuts, à l'exclusion de tout pouvoir de gestion de la société dans l'exercice de son activité.

A soutient que la CA-CIB procède en outre aux recrutements, dont le sien, exige des comptes, prend les décisions et donne les instructions. Il ne produit cependant aucun élément venant étayer ces affirmations, notamment aucune pièce ni aucun échange suggérant que la CA-CIB aurait été impliquée dans son processus de recrutement, étant rappelé que la CA-CIB n'étant pas membre du conseil de surveillance, elle n'a pas participé à sa nomination. La transmission par le cabinet AXIS d'une note intitulée 'Dossier Genoyer', en mai 2016, qui ne fait pas mention de la CA-CIB dans son contenu et ne contient aucune élément permettant d'affirmer qu'elle a été transmise à A à la demande de la CA-CIB, n'apporte aucun élément dans le sens des affirmations de gérance de fait soutenues par A.

Il n'y a pas plus d'élément venant corroborer la promesse alléguée d'un intéressement dont la fourchette minimum serait de 10 millions d'euros. La circonstance que des réunions aient pu être organisées en janvier et mai 2017 au siège de la CA-CIB en présence de A, et que B (représentant la société Royal Advisory membre du conseil de surveillance) ait indiqué qu'il fallait 'vendre' à la CA-CIB un changement de direction de l'une des branches du groupe, ne suffisent pas plus à établir une immixtion de la CA-CIB dans la gestion quotidienne de la société Genoyer International.

Par suite, la gérance de fait de la société Genoyer International par la CA-CIB ne sera pas retenue, et aucune responsabilité en tant que dirigeante de la société Genoyer International ne peut donc être recherchée la concernant. Par voie de conséquence, la société Naxicap et A… ne peuvent être qualifiés de complices de cette gérance de fait et voir leur responsabilité engagée à ce titre.

Les concernant, A recherche également leur responsabilité en tant que membres du conseil de surveillance, sur le fondement des dispositions de l'article L. 225-257 du code de commerce, qui dispose que ' Les membres du conseil de surveillance sont responsables des fautes personnelles commises dans l'exécution de leur mandat. Ils n'encourent aucune responsabilité, en raison des actes de la gestion et de leur résultat. Ils peuvent être déclarés civilement responsables des délits commis par les membres du directoire si, en ayant eu connaissance, ils ne les ont pas révélés à l'assemblée générale '.

Or il apparaît qu'à la date de la révocation de A, comme à celle d'ailleurs, antérieure, du courriel contenant la révélation, selon A, des pratiques de branding au sein du groupe, X n'est plus, à titre personnel, membre du conseil de surveillance, ayant été remplacé en novembre 2016 par Y. Sa responsabilité ne peut donc être recherchée sur le fondement des dispositions précitées.

S'agissant de Naxicap, membre du conseil de surveillance ayant décidé de sa révocation, il appartient à A de démontrer sa faute personnelle dans l'exécution de son mandat ou sa non-révélation d'un délit commis par les membres du directoire. Aucune de ces hypothèses n'est démontrée en l'espèce par l'appelant, les pièces produites établissant des pratiques de branding découvertes dans l'usine de Vilmar et dénoncées par l'un des principaux clients de ce site, sans que ces pièces n'établissent que cette pratique aient été orchestrée par un membre du directoire, que Naxicap se serait abstenue de dénoncer. Par ailleurs, le vote en faveur de la révocation d'un mandataire social, révocable ad nutum, ne saurait caractériser une quelconque faute personnelle d'un membre du conseil de surveillance.

Reste ainsi la responsabilité de la société Genoyer International à examiner.

Il ressort de l'article 14 de ses statuts, déjà cité, que le président de la société est révocable 'à tout moment par le conseil de surveillance sans qu'un juste motif soit nécessaire '. Par suite, il ne peut lui être reproché d'avoir fait usage de cette disposition, dont A avait connaissance dès sa nomination. Il ne peut pas plus lui être reproché d'avoir exécuté le contrat de mandat de mauvaise foi, en alléguant des promesses qui n'auraient pas été tenues, dès lors que A ne rapporte pas la preuve de ce qu'un intéressement d'un montant minimum de 10 millions d'euros lui aurait été promis en cas de redressement de la société lors de son recrutement. Enfin, A n'établit pas que la société Genoyer International l'aurait volontairement laissé travailler sur des chiffres et des hypothèses fausses dont elle aurait eu connaissance et qu'elle lui aurait délibérément cachés.

A revendique ensuite le statut de lanceur d'alerte, prévu par l'article 6 de la loi du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique Cependant, les articles 10 et 11 de cette loi réservent le bénéfice de ce statut aux salariés ou aux fonctionnaires, ce que n'était pas A au sein de la société Genoyer International. En outre, l'alerte doit être donnée auprès du supérieur hiérarchique ou l'employeur et à défaut de diligence de celui-ci dans un délai raisonnable, à l'autorité judiciaire, à l'autorité administrative ou aux ordres professionnels, ce que n'a pas fait A, la présente instance introduite devant la juridiction commerciale ne visant qu'à voir prononcée la nullité de sa révocation.

Par suite, ce statut ne peut trouver à s'appliquer en l'espèce.

En tout état de cause, cette pratique de branding n'a pas été totalement découverte par A, mais a été détectée avant sa nomination, comme en atteste la note de synthèse portée à sa connaissance par courriel du 16 mars 2016, qui évoque les pratiques de branding au sein de la filiale MVS du groupe.

Enfin, il ressort des pièces produites que la révocation de A ne peut être qualifiée d'abusive ou de vexatoire, celui-ci ayant été convoqué à la séance du conseil de surveillance statuant sur sa révocation, mis en mesure de s'expliquer et de faire valoir ses arguments.

Par suite, il y a lieu de confirmer le jugement qui a débouté A de sa demande d'annulation de sa révocation.

Sur les préjudices dont il est demandé réparation

Au vu de ce qui a été précédemment exposé, il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes d'indemnisation présentée par A au titre d'une révocation illégale ou abusive. De même, les demandes d'audition de M. Nour, président du directoire de novembre 2015 à janvier 2016 pour qu'il relate ce qu'il a découvert et la communication de l'affaire au Procureur de la République en application de l'article 427 du code de procédure civile seront, au regard des développements précédents, écartées.

En revanche, A développe également des demandes d'indemnisation tirées de l'application de son contrat de mandataire social, qui ne concernent que la société Genoyer International, et qu'il convient d'examiner.

- Il demande en premier lieu le versement de la somme de 12 565, 32 euros, estimant que l'indemnité de départ contractuellement prévue ne lui a pas été intégralement versée.

La société Genoyer International estime que cette demande doit être rejetée faute pour A de justifier de la différence qu'il allègue entre la somme perçue à ce titre, 484 308, 68 euros, et la somme revendiquée, 496 874 euros. Elle explique que la somme versée correspond à 12 mois de rémunération brute fixe (29 167 euros x 12 et 312, 39 euros x 12 pour l'avantage en nature lié à son véhicule de fonction), auxquels s'est ajoutée 130 556 euros de rémunération brute variable perçue pendant la même période.

La proposition de poste de direction du groupe Genoyer fait état d'une indemnité contractuelle de rupture en cas de révocation des fonctions de président, égale, après plus d'un an de fonction, ce qui est le cas en l'espèce, à ' 12 mois de rémunération fixe et variable brute, déterminé sur la base de la rémunération effectivement perçue au cours des 12 mois précédant la fin des fonctions '.

Il ressort des bulletins de paie produits par A qu'il était rémunéré 29 167 euros brut, auquel s'ajoutait 312, 39 euros d'avantage en nature relatif au véhicule de fonction, et parfois d'autres avantages en nature, comme le montre le bulletin de paie du mois de décembre 2016. Le cumul annuel brut indiqué sur le bulletin de salaire s'arrêtant au 12 décembre 2017 fait état d'un total annuel pour 2017 de 477 832, 51 euros, auquel il faut ajouter le salaire perçu du 12 au 31 décembre 2016, soit, en proratisant le salaire brut de décembre 2016 sur 18 jours comme le suggère A, 19 042 euros.

Par suite, l'indemnité contractuellement due s'élève à la somme de 496 874 euros (477 832, 51 + 19 042). Il convient donc de condamner la société Genoyer International à lui verser la différence entre cette somme, due, et la somme effectivement versée, soit la somme de 12 565, 32 euros.

- A demande en second lieu le paiement de son bonus pour l'année 2017, expliquant avoir été spolié de la quasi-totalité, percevant 18 750 euros à la place de 250 000 euros, soit un reliquat dû de 231 250 euros.

La société Genoyer International soutient que A n'a pas atteint les objectifs fixés, que les résultats du 30 juin 2017 ne sont pas représentatifs, ayant été établis sous sa direction et avant l'audit, qu'il faut prendre en compte les résultats du 31 décembre 2017 établis par les experts-comptables et validés par les commissaires aux comptes ; que les conséquences de l'affaire 'ARAMCO ' sur le chiffre d'affaires du second semestre 2017 sont marginales, la baisse sur cette période se chiffrant à 802 000 euros pour MVS et 4 319 000 euros pour l'usine de Vilma, tandis que la baisse globale du chiffre d'affaires entre 2016 et 2017 est de 65 millions d'euros. Elle soutient également concernant l'EBITDA que sa baisse ne repose pas sur la perte du client ARAMCO, dont les conséquences se sont fait sentir en 2018, année où les commandes qui n'ont pas été effectuées fin 2017 auraient été facturées mais sur la baisse d'activité du pôle Phocéenne, dont l'activité est sans lien avec ARAMCO. Elle ajoute enfin que le délai moyen de paiement des fournisseurs est passé en 2017 à 84 jours, contre 54 jours en 2016, ce qui a artificiellement amélioré la trésorerie en 2017.

La proposition de poste de direction du groupe Genoyer fait état d'une rémunération variable ' d'un montant maximum de 250 000 euros dont le versement dépendra de l'atteinte d'objectifs de performances déterminés chaque année par le conseil de surveillance (parmi lesquels figureront notamment des objectifs d'atteinte en EBITDA et en position de cash) '. Pour l'année 2017, ces objectifs ont été fixés en mai 2017 par Z, membre du conseil de surveillance appartenant à Naxicap et se résument ainsi :

- atteindre le budget Groupe en EBITDA et le niveau de trésorerie (40%),

- redresser la branche 'Phocéenne' et mettre en place les axes stratégiques identifiés (30%),

- finaliser les restructurations du pôle 3 dans le timing annoncé au plan et dans les budgets, terminer la collaboration avec PSM et rester attentif aux potentiels options stratégiques sur SBS et sur RTI (15 %),

- accompagner le développement de Vilmar pour atteindre le plan annoncé, mise en place d'une gouvernance renouvelée du sous-groupe Vilmar et de Vilmar Usine (15 %).

Si A demande à ce que ces objectifs soient appréciés au 30 juin 2017, avant que les résultats du second semestre ne plongent, il ressort des termes de la proposition de poste que ces objectifs étaient entendus annuellement, de sorte que les résultats du second semestre ne peuvent être écartés de l'appréciation à porter sur la réalisation des objectifs.

A soutient que son action visant à redresser les pratiques de la filiale MVS a généré des coûts qui ont réduit le chiffre d'affaires, ce dont il ne peut être pénalisé sur ses objectifs. Cependant, il ressort des éléments financiers produit par la société Genoyer International que la baisse du chiffre d'affaires pour l'année 2017 s'explique essentiellement par la baisse du chiffre d'affaires et de l'EBITDA du pôle 'Phocéenne', pour lequel les pièces citées par A dans ses écritures ne permettent pas d'établir qu'il aurait été concerné par les pratiques de branding et de ferraillage subséquentes.

Par suite, il ne peut prétendre à la part du bonus de 30% dont l'attribution était conditionnée au redressement de la branche phocéenne, qui n'a pas eu lieu au cours de l'exercice 2017 ; de même, il ne peut prétendre à la part du bonus de 40% dès lors que cette absence de redressement a largement obéré l'EBITDA du groupe, ce qui n'a pas permis d'atteindre l'objectif fixé à ce titre et que le niveau de trésorerie est également inférieur à celui fixé.

Concernant la part de bonus relative au développement de Vilmar, A allègue sans en justifier une perte de plus de 11 millions d'euros sur le second semestre 2017 due au déférencement d'ARAMCO, et ne conteste pas ne pas avoir recruté de nouvelle gouvernance en 2017. Il n'y a donc pas lieu de remettre en cause l'absence d'attribution de la part de bonus relatif à cet objectif.

Enfin, la société Genoyer International a considéré que A avait partiellement atteint l'objectif relatif à la restructuration du pôle 3, ayant initié les restructurations demandées, mais pas en totalité et pas dans le 'timing' annoncé. A en réponse argue de ce que ces restructurations ont été effectuées avec une exceptionnelle diligence et réussite, et qu'il en a même été remercié lors du conseil de surveillance qui s'est tenu le 31 août 2017. Il ressort de ce procès-verbal que le conseil de surveillance a remercié les 'personnes impliquées' dans diverses opérations de ventes immobilières et de cession de titres, démontrant ainsi que des opérations avaient été effectivement réalisées. Cependant, A lui-même avait fait état, lors du conseil de surveillance du 3 février 2017, s'agissant des restructurations à mener, de la vente, de la fermeture ou du déménagement de 8 sites à réaliser. L'ensemble de ces opérations n'a pas été réalisée courant 2017. Par suite, la réduction à la moitié de l'enveloppe convenue, soit 18 750 euros (sur les 37 500 euros que représentent 15% du bonus) apparaît justifiée.

Il en résulte que la somme attribuée à A au titre de son bonus pour l'année 2017 apparaît justifiée.

Sur les demandes reconventionnelles pour procédure abusive

La CA-CIB soutient que A agit de manière malveillante et injustifiée à son encontre, sans fondement juridique. Elle réclame la somme de 50 000 euros pour abus du droit d'agir.

La société Genoyer International demande la condamnation de l'appelant à lui verser la somme de 50 000 euros sur ce fondement.

X et la société Naxicap demandent sur ce fondement la condamnation de A, dont l'action est dépourvue de tout fondement juridique, à leur verser la somme de 50 000 euros. X demande en outre la somme de 60 000 euros en réparation de son préjudice moral, A l'accusant à tort et tentant de nuire à sa réputation.

A conteste ces demandes, estimant avoir prouvé le caractère frauduleux des pratiques dénoncés.

Il apparaît que X a été assigné personnellement par A dans le cadre de la présente instance, alors qu'il n'était pas, à titre personnel, membre du conseil de surveillance pendant la période des faits en litige, ce que A n'ignore évidemment pas. Il ne produit en outre aucune pièce de nature à conforter les accusations qu'il profère à l'encontre de X. Par suite, l'action dirigée contre X à titre personnel apparaît comme abusive et sans fondement. A sera donc condamné au paiement d'une amende civile de ce chef à hauteur de 10 000 euros.

X n'établit pas la réalité d'un préjudice moral ou d'image qui serait résulté de cette action. Il n'y a donc pas lieu de lui accorder des dommages et intérêts, en plus de l'amende civile.

Les demandes des autres intimés présentées sur ce fondement seront rejetées, chacun, y compris A, pouvant se méprendre sur l'étendue de ses droits, sans que cela ne constitue un abus du droit d'agir en justice.

Sur les demandes formées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

A sollicite la condamnation des intimés à lui verser la somme de 20 000 euros sur ce fondement.

La CA-CIB sollicite la somme de 25 000 euros à ce titre.

La société Genoyer International demande la condamnation de A à la somme de 30 000 euros.

X et la société Naxicap demandent chacun la somme de 15 000 euros.

Il y a lieu de condamner A, qui succombe en toutes ses demandes à l'égard de la CA-CIB, de Naxicap et de X, à leur payer chacun la somme de 5 000 euros.

Il y a lieu de le condamner, sur ce même fondement, à payer à la société Genoyer International la somme de 3 000 euros.

PAR CES MOTIFS

Déclare irrecevables les demandes formées par A tendant à :

- DIRE et JUGER que les Material Tests Certificates (MTC) établis en application de la norme européenne EN 10204 doivent impérativement mentionner le nom de l'usine ayant fabriqué les produits et non pas le nom d'une autre usine qui apparaîtrait en tant que marque ' ;

- DIRE et JUGER que les certificats établis par la société MVS du groupe GENOYER en juin 2016 mentionnant le nom de l'usine européenne VILMAR au lieu de celui des usines ayant fabriqué les produits étaient de faux certificats caractérisant les infractions pénales de faux, usage de faux et escroquerie ' ;

- DIRE et JUGER que c'est de façon fondée que A a qualifié ces certificats de « faux certificats » ' ;

- DONNER INJONCTION aux parties intimées, sous telle astreinte qu'il plaira à la Cour, de fixer, de communiquer le pacte d'actionnaire du 7 octobre 2015 " ;

Confirme le jugement attaqué sauf en ce qui concerne la demande de A relative à son complément d'indemnité contractuelle de révocation,

Statuant à nouveau,

Condamne la société Genoyer International à verser à A la somme de 12 565, 32 euros au titre de son indemnité contractuelle de révocation,

Y ajoutant,

Condamne A à payer une amende civile de 10 000 euros pour procédure abusive menée à l'encontre de X,

Condamne A à payer les sommes de 5 000 euros au Crédit agricole Corporate and Investment Bank, 5 000 euros à Naxicap, 5 000 euros à X, et 3 000 euros à la société Genoyer International, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne A aux entiers dépens de l'instance d'appel.