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Décisions

Cass. 3e civ., 2 octobre 1996, n° 94-20.467

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. BEAUVOIS

Rouen, du 2 fév. 1994

2 février 1994

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 2 février 1994), que les époux X... ont donné à bail une maison à usage de commerce et d'habitation à Mme A...; que, désirant prendre sa retraite, Mme A... a cessé son activité et s'est fait radier du registre du commerce le 30 avril 1991, mais a continué à régler régulièrement le loyer; qu'elle a adressé à ses bailleurs, en juin 1991, une demande de déspécialisation en précisant qu'elle avait l'intention de céder le bail commercial; que les époux X..., après avoir fait constater par huissier de justice l'état d'abandon du commerce et avoir fait sommation à leur locataire de reprendre l'exploitation du fonds, l'ont assignée aux fins de faire constater l'acquisition de la clause résolutoire;

Attendu que Mme A... fait grief à l'arrêt de constater la résiliation du bail, alors, selon le moyen, "1°/ qu'une clause résolutoire ne peut être mise en oeuvre que suite à une sommation visant un manquement à une stipulation expresse du bail; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt que le bail consenti à Mme A... lui faisait obligation de tenir les lieux loués "constamment garnis de meubles, objets mobiliers, matériels et marchandises", et qu'il lui a été fait sommation, le 19 juillet 1991, "d'avoir à reprendre une "activité commerciale, dans les lieux loués", cette sommation visant expressément la clause résolutoire sanctionnant l'inexécution des obligations prévues au présent bail; qu'en constatant la résiliation de plein droit du bail litigieux suite à une sommation qui ne visait pas une stipulation expresse du bail, la cour d'appel a violé l'article 25, alinéa 1, modifié du décret du 30 septembre 1953 et l'article 1134 du Code civil; 2°/ que Mme A... faisait valoir dans ses conclusions d'appel que c'est pour bénéficier de ses droits à la retraite du régime social auquel elle était affiliée qu'elle avait fait procéder à sa radiation du registre du commerce et avait dû cesser toute activité; que l'article 34-3-1 du décret du 30 septembre 1953, autorisant le locataire ayant demandé à bénéficier de ses droits à la retraite, à céder son fonds avec déspécialisation, ne se comprend que s'il autorise le locataire à cesser toute activité pour accéder, parallèlement, à ses droits à la retraite, qu'en en décidant autrement, la cour d'appel a violé l'article 34-3-1 du décret du 30 septembre 1953";

Mais attendu, d'une part, que Mme A... n'ayant pas soutenu devant la cour d'appel que la sommation ne visait pas un manquement à une stipulation expresse du bail, le moyen est, de ce chef, nouveau, mélangé de fait et de droit;

Attendu, d'autre part, que l'article 34-3-1 du décret du 30 septembre 1953 permettant au locataire de céder son droit au bail hors les cas fixés par le contrat mais ne le dispensant pas de respecter les autres clauses du bail, notamment quant à l'obligation de tenir constamment les lieux loués garnis de meubles, objets, mobiliers, matériels et marchandises, la cour d'appel qui, par motifs propres et adoptés, a retenu que Mme A... avait reconnu qu'elle n'exerçait plus aucune activité commerciale et que non seulement elle n'avait pas répondu favorablement à la sommation de reprendre cette activité, mais encore ne pouvait le faire puisqu'elle s'était fait radier du registre du commerce, et en a justement déduit qu'elle n'avait pas rempli ses obligations, a fait une exacte application du décret;

D'où il suit que, pour partie irrecevable, le moyen n'est pas fondé pour le surplus;

Sur le second moyen :

Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt de constater la résiliation du bail et de rejeter la demande tendant à voir reporter dans la limite de deux ans ses obligations, alors, selon le moyen, "que l'article 25, alinéa 2, du décret du 30 septembre 1953, tel que modifié par la loi du 31 décembre 1989, ayant étendu la faculté laissée au juge d'accorder des délais au locataire, à la demande de ce dernier, à l'ensemble des infractions susceptibles d'être sanctionnées par la clause résolutoire, est d'application immédiate aux baux et aux instances en cours; qu'en affirmant que ne s'agissant pas, en l'espèce, d'une résiliation pour un défaut de paiement de loyers, les effets de la clause résolutoire ne peuvent être reportés, la cour d'appel a violé l'article 25, alinéa 2, modifié du décret du 30 septembre 1953";

Mais attendu qu'abstraction faite d'un motif erroné, mais surabondant, la cour d'appel n'a fait qu'user du pouvoir discrétionnaire d'appréciation dont elle dispose pour refuser de suspendre les effets de la clause résolutoire en application de l'article 25 du décret du 30 septembre 1953;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.