Cass. com., 1 juillet 2020, n° 19-10.532
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Rapporteur :
Mme Bélaval
Avocats :
SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Rousseau et Tapie
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 8 novembre 2018), par un acte notarié du 12 juillet 1994, la Société centrale de banque, aux droits de laquelle se trouve la Société générale (la banque), a prêté à la société GSA la somme de 5 000 000 francs soit 762 245,09 euros destinée à financer l'acquisition des parts de la société ASA détenues par M. et Mme M.... Pour garantir le remboursement de ce prêt, M. et Mme O... se sont rendus cautions solidaires de la société GSA et ont consenti une hypothèque sur un bien immobilier leur appartenant. D'autres garanties ont été obtenues par la banque dont le nantissement des parts cédées et celui d'un contrat d'assurance-vie souscrit par M. M....
2. La société ASA a été mise en liquidation judiciaire le 28 mai 1997 puis la société GSA, à la suite d'un jugement d'extension du 20 août 1997. La Société générale a délivré à M. et Mme O..., le 29 juillet 2016, un commandement de payer valant saisie de biens et droits immobiliers leur appartenant.
Examen des moyens
Sur le premier et le deuxième moyens
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le troisième moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
4. M. et Mme O... font grief à l'arrêt de constater que la créance de la Société générale s'élève à la somme de 729 516,80 euros, les autoriser à procéder à la vente amiable pour un prix minimum de 500 000 euros des biens, et constater la suspension de la procédure de saisie immobilière, alors « que les juges du fond ne peuvent statuer par voie de simple affirmation ; qu'en affirmant que la lettre de mise en demeure délivrée par la Société générale le 11 juillet 2005 à une adresse qui n'était pas celle du domicile des époux O..., avait été acceptée par une personne qui l'avait reçue pour leur compte avec vérification d'usage faite par le fonctionnaire de la poste, sans préciser sur quelle pièce elle se fondait pour retenir l'existence de telles vérifications ni expliquer en quoi elles consistaient, la cour d'appel a privé sa décision de toute motivation propre en violation de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
5.Selon ce texte, tout jugement doit être motivé.
6. Pour écarter les conclusions de M. et Mme O... qui soutenaient que la banque avait modifié à leur insu les conditions du prêt en s'abstenant d'agir en priorité contre les autres garants et en renonçant au nantissement fourni par M. M..., l'arrêt relève que si la mise en demeure du 11 juillet 2005 a été délivrée aux époux O... à une adresse dont ils justifient qu'elle n'était pas alors celle de leur domicile, cette lettre a néanmoins été délivrée à ladite adresse par une personne qui a accepté de la recevoir pour leur compte avec vérification d'usage faite par le "fonctionnaire" de la poste.
7. En statuant ainsi, par la seule reproduction de l'affirmation figurant dans les conclusions de la banque sur la réalité de la délivrance aux cautions d'une lettre de mise en demeure, la cour d'appel, qui n'a donné sur ce point que l'apparence d'une motivation, a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la créance servant de fondement aux poursuites, et prononce la déchéance du droit aux intérêts de la Société générale, l'arrêt rendu le 8 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée.