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Décisions

CA Toulouse, 3e ch., 7 mars 2019, n° 18/03513

TOULOUSE

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Défendeur :

CE (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Beneix-Bacher

Conseillers :

M. Beauclair, M. Blanque-Jean

T. com. Montauban, du 11 juill. 2018, n°…

11 juillet 2018

FAITS ET PROCEDURE

La SAS CE située à Castelsarrasin, créée entre M. F., M. W. et le Groupe FRV le 7 janvier 2016, a pour principales activités :

- la gestion de projets industriels ;

- la gestion de projets d'efficacité de performances énergétiques et notamment la gestion des primes Certificats d'Economies d'Energie.

Les participations dans la société CE sont réparties comme suit :

- Monsieur Philippe F. : 205 actions soit 41 % ;

- M. W. : 245 actions soit 49 % ;

- Groupe FRV: 50 actions soit 10 % ;

Total : 500 actions

La société CE est présidée depuis sa création par Monsieur Philippe F. et Monsieur Guy W. exerce les fonctions de Directeur Général.

Les comptes annuels pour l'exercice clos au 31 décembre 2016 ont été établis par l'expert comptable le 20 avril 2017.

Le 18 mai 2017 M. W. sollicitait auprès de M. F. la clôture des comptes sociaux.

Par courriel du 27 septembre 2017 M. W. faisait connaître à M. F. qu'il ne s'estimait pas suffisamment informé par les documents produits et sollicitait la convocation de l'assemblée générale.

Pourtant les comptes ont été déposés au greffe du tribunal de commerce de Montauban sans qu'il ait été convoqué à une assemblée générale.

Par courrier du 22 janvier 2018 il sollicitait toute explication utile en application de l'article L. 225-231 du code de commerce.

Il était alors convoqué le 7 février 2018 à une assemblée générale prévue le 19 février suivant pour ratifier les décisions des assemblées générales des 30 juin et 3 octobre 2017. Il refusait alors de s'y rendre (LRAR du 15 février 2018).

Par acte en date du 29 juin 2018 M. W. a assigné la SAS CE et M. F. devant le président du tribunal de commerce de Montauban statuant en la forme des référés pour faire :

- constater qu'il existe à l'égard de différents actes de gestion des présomptions d'irrégularité et/ou une suspicion d'atteinte à l'intérêt social de la société CE ;

- constater que la Présidence de la société CE n'a pas répondu dans un délai d'un mois à la mise en demeure de Monsieur W. du 22 janvier 2018 ;

- désigner tel expert qu'il plaira au tribunal, spécialisé en exploitation de toutes données chiffrées, analyse de l'organisation et des systèmes comptables, ou en analyse de gestion ;

- déclarer que l'expert se verra confier la mission suivante :

*Se rendre en tout lieu utile, et notamment au siège de la société CE ;

*Recueillir et consigner les explications des parties, prendre connaissance des documents de la cause, se faire remettre par les parties ou par des tiers tous autres documents utiles ;

*entendre tout sachant, recueillir tous renseignements utiles, faire appel à tout autre technicien d'une spécialité ou se faire assister pour l'accomplissement de sa mission par toute personne de son choix, communiquer aux parties et au juge chargé du suivi de l'expertise une note de synthèse après chaque réunion d'expertise ;

*établir un rapport sur les opérations de gestion réalisées par Monsieur Philippe F. es-qualités de Président de la société CE portant :

- sur les conditions de convocation par la Présidence et de tenue des assemblées générales chargées d'approuver les comptes des exercices clos les 31 décembre 2016 et 2017 ;

- sur les conditions et les modalités dans lesquelles ont été prises les décisions afférentes à l'approbation des comptes de l'exercice clos le 31 décembre 2016 et à l'affectation des résultats dudit exercice ;

- sur les conditions de dépôt par la Présidence des comptes de l'exercice clos le 31décembre 2016 au greffe du Tribunal de Commerce de Montauban ;

- sur les conditions de détermination du chiffre d'affaires de la société CE, notamment sur le mode de facturation des prestations réalisées au profit des autres sociétés dans lesquelles Monsieur F. et la société Groupe FRV ont des intérêts ;

- sur les conditions d'utilisation au sein de la société CE et des sociétés dans lesquelles Monsieur F. et la société Groupe FRV ont des intérêts, du « potentiel commercial » développé par M. W. ;

*déterminer toutes irrégularités et fautes de Monsieur F. dans l'exécution de son mandat de Président de la société CE et donner tous les éléments de fait ou d'ordre technique permettant d'apprécier les responsabilités encourues ;

*déterminer si les opérations de gestion susvisées ont eu des conséquences contraires à l'intérêt social de la société CE ;

*donner tout élément de nature à établir le montant des préjudices de la société CE et de ses actionnaires ;

* faire toutes observations utiles à la manifestation de la vérité ;

*établir un pré-rapport, et le cas échéant, compléter ses investigations ;

*s'expliquer techniquement dans le cadre des chefs de mission ci-dessus énoncés sur les dires et observations des parties qu'il aura recueillies ;

- déclarer que les frais d'expertise seront mis à la charge de la société CE ;

- condamner la société CE et Monsieur Philippe F. à verser à Monsieur Guy W. la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Par ordonnance du 11 juillet 2018 le juge des référés du tribunal de commerce de Montauban a :

- débouté M. W. de sa demande de désignation d'un expert judiciaire ;

- déclaré n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- condamné Monsieur Guy W. aux entiers frais et dépens de l'instance.

Pour se déterminer ainsi le juge a considéré que M. W. ne justifiait pas de présomptions d'irrégularités affectant une ou plusieurs opérations de gestion déterminées de nature à compromettre gravement l'intérêt social en ce que la société était bénéficiaire, les opérations sollicitées relevaient de la compétence de l'assemblée générale des associés et ne constituaient pas des actes de gestion au sens de l'article L. 225-231 du Code de Commerce et que l'assemblée générale ayant été réunie dans le mois visé à ce texte, M. W. avait donc été régulièrement renseigné sur sa 'première interrogation'.

Par déclaration d'appel du 1er août 2018 M. W. a relevé appel de la décision.

L'appel tend à faire réformer par la cour d'appel la décision entreprise en ce qu'elle a :

- débouté M. W. de sa demande de désignation d'un expert judiciaire ;

- déclaré n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- condamné Monsieur Guy W. aux entiers frais et dépens de l'instance.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

M. W. dans ses dernières écritures en date du 13 septembre 2018 demande à la cour au visa des articles L. 225-231, L. 225-251 et L. 227-1 du Code de Commerce de :

- déclarer recevable et bien fondé l'appel formé à l'encontre l'ordonnance rendue par Monsieur le Président du Tribunal de Commerce de Montauban le 11 juillet 2018 ;

- réformer cette ordonnance dans toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau :

- constater qu'il existe à l'égard de différents actes de gestion des présomptions d'irrégularité et/ou une suspicion d'atteinte à l'intérêt social de la société CE ;

- constater que la Présidence de la société CE n'a pas répondu dans un délai d'un mois à la mise en demeure du 22 janvier 2018 ;

- désigner, tel expert qu'il plaira, spécialisé en Exploitation de toutes données chiffrées, Analyse de l'organisation et des systèmes comptables, ou en Analyse de gestion ;

- déclarer que l'expert se verra confier la mission suivante :

- se rendre en tout lieu utile, et notamment au siège de la société CE ;

- recueillir et consigner les explications des parties, prendre connaissance des documents de la cause, se faire remettre par les parties ou par des tiers tous autres documents utiles, entendre tous sachants, recueillir tous renseignements utiles, faire appel à tout autre technicien d'une spécialité ou se faire assister pour l'accomplissement de sa mission par toute personne de son choix, communiquer aux parties et au juge chargé du suivi de l'expertise une note de synthèse après chaque réunion d'expertise ;

- établir un rapport sur les opérations de gestion réalisées par Monsieur Philippe F. es qualités de Président de la société CE portant :

*sur les conditions de convocation par la Présidence et de tenue des assemblées générales chargées d'approuver les comptes des exercices clos les 31 décembre 2016 et 2017 ;

*sur les conditions et les modalités dans lesquelles ont été prises les décisions afférentes à l'approbation des comptes de l'exercice clos le 31 décembre 2016 et à l'affectation des résultats dudit exercice ;

*sur les conditions de dépôt par la Présidence des comptes de l'exercice clos le 31 décembre 2016 au greffe du Tribunal de Commerce de Montauban ;

*sur les conditions de détermination du chiffre d'affaires de la société CE, notamment sur le mode de facturation des prestations réalisées au profit des autres sociétés dans lesquelles Monsieur F. et la société Groupe FRV ont des intérêts ;

*sur les conditions d'utilisation au sein de la société CE et des sociétés dans lesquelles Monsieur F. et la société Groupe FRV ont des intérêts du « potentiel commercial » développé par M. W. ;

- déterminer toutes irrégularités et fautes de Monsieur F. dans l'exécution de son mandat de Président de la société CE et donner tous les éléments de fait ou d'ordre technique permettant d'apprécier les responsabilités encourues ;

- déterminer si les opérations de gestion susvisées ont eu des conséquences contraires à l'intérêt social de la société CE ;

- donner tout élément de nature à établir le montant des préjudices de la société CE et de ses actionnaires ;

- faire toutes observations utiles à la manifestation de la vérité ;

- établir un pré-rapport, et le cas échéant, compléter ses investigations ;

- s'expliquer techniquement dans le cadre des chefs de mission ci-dessus énoncés sur les dires et observations des parties qu'il aura recueillies ;

- déclarer que les frais d'expertise seront mis à la charge de la société CE ;

- condamner la société CE et Monsieur Philippe F. à verser à M. W. la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction est requise, pour ceux d'appel, au profit de Me P.M., membre de la SELARL Lexavoué Pau-Toulouse, en application des dispositions de l'article 699 du CPC.

Il expose que':

- les conditions de la demande d'expertise de gestion sont réunies': présomptions d'irrégularité et présomptions d'actes de nature à porter atteinte à l'intérêt social ;

- la présomption d'irrégularité n'exige pas la démonstration de la mise en péril de la société ni que des irrégularités soient avérées ;

- en l'espèce, la convocation à l'AG et le dépôt des comptes sociaux relèvent de la compétence du président seul'; or les comptes sociaux ont été déposés sans approbation de l' AG malgré les mentions lors du dépôt'; la convocation postérieure n'avait pour but que de régulariser cette infraction'; de sorte que l'expertise devra faire la lumière sur les conditions de l'approbation des comptes 2016 ;

- l'expertise permettra également de vérifier les éléments de facturation sachant que la SAS CE est apporteur d'affaires pour le compte du Groupe FRV.

M. F. et la SAS CE dans leurs dernières écritures en date du 10 octobre 2018 demandent à la cour au visa des articles L. 225-231, L. 227-1, al. 3 et R. 225-163 du Code de commerce et, 700 du code de procédure civile de :

- confirmer dans toutes ces dispositions, la décision déférée ;

- débouter M. W. de sa demande de désignation d'expert-judiciaire ;

- condamner M. W. au paiement de la somme de 10.000 euros pour frais irrépétibles conformément à l'article 700 du code procédure civile ;

- condamner M. W. aux entiers frais et dépens de l'instance.

Ils exposent que':

- l'expertise de gestion ne peut porter que sur les actes qui relèvent de la compétence du président et non pas de celle de l'assemblée générale et doivent porter sur des opérations ciblées ;

- or tout ce qui est demandé relève de la compétence de l'assemblée générale et, les missions sollicitées sont étrangères à la finalité de ce type d'expertise ;

- de sorte que la demande échappe au cadre légal ;

- par ailleurs tout est aujourd'hui régularisé.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 janvier 2019.

MOTIVATION

L'article L. 225-231 dispose que':

«'Une association répondant aux conditions fixées à l'article L. 225-120, ainsi que un ou plusieurs actionnaires représentant au moins 5 % du capital social, soit individuellement, soit en se groupant sous quelque forme que ce soit, peuvent poser par écrit au président du conseil d'administration ou au directoire des questions sur une ou plusieurs opérations de gestion de la société, ainsi que, le cas échéant, des sociétés qu'elle contrôle au sens de l'article L. 233-3. Dans ce dernier cas, la demande doit être appréciée au regard de l'intérêt du groupe. La réponse doit être communiquée aux commissaires aux comptes.

A défaut de réponse dans un délai d'un mois ou à défaut de communication d'éléments de réponse satisfaisants, ces actionnaires peuvent demander en référé la désignation d'un ou plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion (...) S'il est fait droit à la demande, la décision de justice détermine l'étendue de la mission et des pouvoirs des experts. Elle peut mettre les honoraires à la charge de la société'».

Ainsi, l'associé qui demande l'expertise de gestion doit justifier de présomptions d'irrégularités affectant une ou plusieurs opérations de gestion déterminées de nature à compromettre l'intérêt social.

En l'espèce, suivant courrier recommandé reçu le 24 janvier 2018 M. W. qui détient plus de 5'% du capital social, a sollicité du président de la SAS CE, M. F., sur le fondement de l'article L. 225-231':«'tous éclaircissements sur les opérations de gestion suivantes':

- Dans quelles circonstances, sur la base de quelles « procédures », le dépôt des comptes de la société CE a-t-il pu être effectué, alors que M. W. n'a été informé et n'a été convoqué à aucune assemblée générale aux fins d'approbation des comptes de l'exercice clos le 31 décembre 2016 '

- Quelle est la nature exacte des produits figurant dans les comptes de la société CE pour un montant de 26'852 €, d'où proviennent-ils, et s'il procède d'une activité exercée au sein d'une ou plusieurs sociétés contrôlées par M. F., quelle est la formule de calcul appliquée à leur détermination''

- Au regard de ces revenus et de la formule appliquée à leur détermination, notamment en fonction du potentiel commercial développé par M. W. au sein du groupe FRV, quelles sont les perspectives pour l'exercice clos au 31 décembre 2017 ''»

Pour toute réponse il a été envoyé par courrier du 7 février 2018, une convocation à une assemblée générale devant se tenir le 19 février suivant, à laquelle était joint':

- l'ordre du jour portant sur la ratification des décisions des assemblées générales du 30 juin 2017 et du 3 octobre 2017, l'approbation des comptes de l'exercice clos le 31 décembre 2016 et quitus au Président, l'affectation du résultat de l'exercice, la reprise des engagements souscrits pour le compte de la société avant son immatriculation au RCS, les questions diverses, lecture du rapport du Président, distribution de dividendes ;

- le texte des résolutions proposées à l'assemblée générale ;

- les comptes annuels de l'exercice clos au 31 décembre 2016 ;

- le rapport de gestion du président ;

- et le rapport spécial du président sur les conventions visées à l'article L. 227-10 du code de commerce.

Contrairement à ce qu'indiqué par le premier juge, le Président n'a donc pas répondu aux demandes. La présente action est donc parfaitement recevable.

Les présomptions d'irrégularités sont justifiées par le fait que les assemblées générales des 30 juin 2017 et 3 octobre 2017 auraient été convoquées pour l'approbation des comptes arrêtés au 31 décembre 2016 à l'insu d'un des trois associés et que ces comptes ont été déposés au greffe du tribunal de commerce avec la fausse mention d'une approbation à l'unanimité (30 juin 2017). Ces irrégularités qui ont pour effet de ne pas soumettre à l'ensemble des associés réunis en assemblée générale le contrôle des comptes de la société, l'affectation du résultat de l'exercice et de l'activité du président durant l'année écoulée est de nature à compromettre gravement l'intérêt social. Et M. W. justifie avoir sollicité le Président par courriel du 18 mai 2017 sur la clôture des comptes «'en tant qu'associés'», lequel lui a communiqué le bilan ainsi qu'en atteste son courriel du 27 septembre 2017'; toutefois, à cette date, l'assemblée générale du 3 juin 2017 avait déjà été réunie et les comptes et les rapports de gestion approuvés, sans qu'il soit justifié de la convocation de M. W. en sa qualité d'associé.

La convocation et la tenue d'une nouvelle assemblée générale qui a ratifié à la majorité les assemblées générales précédentes n'a pas pour effet de régulariser l'absence de réponse aux questions posées par l'associé minoritaire auxquelles il n'a pas été répondu par le Président dans le mois de la demande. Et sa présence à l'assemblée générale de ratification ne lui aurait pas permis d'obtenir la réponse à ses questions de sorte qu'il ne peut lui être reproché d'user de la faculté offerte par l'article L. 225-231 du code de commerce pour pallier sa carence dans l'administration de la preuve.

Dans ces conditions la décision sera réformée et il sera fait droit à la demande mais dans la stricte limite des conditions de l'article L. 225-231 qui excluent les mesures qui sont étrangères à la gestion de la société, celles qui ne sont pas de nature à nuire à l'intérêt social et celles dont le demandeur peut valablement se convaincre.

Ainsi, il ne sera pas confié à l'expert la mission de:

- vérifier les conditions des convocations des assemblées générales ni du dépôt des comptes sociaux au greffe du RCS, dont M. W. a pu se convaincre de l'irrégularité laquelle est par ailleurs reconnue puisque M. F. a procédé à de nouvelles convocations de 'ratification' ;

- déterminer ou vérifier les perspectives pour l'exercice clos au 31 décembre 2017.

En revanche, il lui sera demandé de fournir toute explication sur':

- la nature et l'origine exacte des produits figurant dans les comptes de la société CE pour un montant de 26'852 €, et la formule de calcul appliquée à leur détermination ;

- les modalités de facturation des prestations réalisées au profit des autres sociétés dans lesquelles les autres associés, M. F. et le Groupe FRV, ont des intérêts.

La décision intervenant dans l'intérêt de la société comme de ses associés, les dépens de l'instance en la forme des référés seront partagés par moitié entre les parties et les frais d'expertise seront in fine à la charge de la SAS CE conformément à l'article L. 225-231.

Il apparaît équitable que, la demande ayant prospéré en appel, les intimés soient condamnés à verser à M. W. la somme de 1500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

- Infirme l'ordonnance du juge des référés du tribunal de commerce de Toulouse en date du 11 juillet 2018 en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau':

- Ordonne une expertise de gestion dans le strict respect de l'article L. 225-231 du code de commerce.

- Désigne pour y procéder':

*M. C. Pascal[...]

et à défaut':

* M. G.[...]

avec pour mission de':

- Se rendre au siège de la SAS CE ;

- Recueillir et consigner les explications des parties, prendre connaissance des documents de la cause, se faire remettre par les parties ou par des tiers tous autres documents utiles, entendre tous sachants, recueillir tous renseignements utiles, faire appel à tout autre technicien d'une spécialité autre que la sienne ou se faire assister pour l'accomplissement de sa mission par toute personne de son choix, communiquer aux parties et au juge chargé du suivi de l'expertise une note de synthèse après chaque réunion d'expertise ;

- Etablir un rapport sur les opérations de gestion réalisées par Monsieur Philippe F. es qualités de Président de la société CE portant sur :

*la nature et l'origine exacte des produits figurant dans les comptes de la société CE pour un montant de 26'852 €, et la formule de calcul appliquée à leur détermination ;

*les conditions de détermination du chiffre d'affaires de la société CE, notamment le mode de facturation des prestations réalisées au profit des autres sociétés dans lesquelles M. F. et le Groupe FRV ont des intérêts ;

- Donner tous éléments permettant de déterminer si ces opérations de gestion susvisées sont conformes à l'intérêt social de la société CE ;

- Donner tout élément de nature à établir le montant éventuel des préjudices de la société CE et de ses actionnaires ;

- Etablir un pré-rapport, et le cas échéant, compléter ses investigations ;

- S'expliquer techniquement dans le cadre des chefs de mission ci-dessus énoncés sur les dires et observations des parties qu'il aura recueillies.

Dit que le rapport d'expertise sera déposé au greffe du tribunal de commerce de Montauban dans un délai de deux mois à compter du dépôt de la consignation et que le greffier en assurera la communication aux parties conformément à l'article L. 225-231 du code de commerce.

Dit que les frais d'expertise seront in fine mis à la charge de la SAS CE conformément à l'article L. 225-231.

Dit que M. W. qui a intérêt à la mesure devra faire l'avance des frais d'expertise, à titre provisionnel à valoir sur la rémunération de l'expert.

Fixe à la somme de 2000€ le montant de la provision ainsi mise à la charge de M. W. qu'il devra verser par chèque libellé à l'ordre du régisseur d'avances du tribunal de commerce de Montauban et ce avant le 08 avril 2019, ce chèque devant être adressé, avec les références du dossier (n° R.G.) au greffe du Tribunal de commerce de Montauban.

Dit que les dépens de première instance et d'appel hors frais d'expertise, seront à la charge de M. W. d'une part et de M. F. et la SARL CE d'autre part, pour moitié chacun.

Autorise, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, les avocats de la cause qui en ont fait la demande à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision.