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Décisions

CA Bourges, ch. civ., 28 novembre 2019, n° 19/00117

BOURGES

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Sarrazin

Conseillers :

M. Perinetti, Mme Ciabrini

TGI Bourges, du 14 janv. 2019

14 janvier 2019

Par jugement du 8 septembre 2017, le Tribunal de Grande Instance de Créteil a notamment :

- condamné Monsieur Alain A. à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [...], représenté par Maître Franck M., désigné en qualité d'administrateur provisoire, les sommes de :

- 18'033,81 € avec intérêts au taux légal à compter du 29 février 2016 au titre des charges impayées au 1er janvier 2016,

- 1500 € à titre de dommages et intérêts,

- 1000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code de procédure civile,

- ordonné l’exécution provisoire,

- condamné Monsieur Alain A. aux dépens.

Ce jugement a été signifié le 6 octobre 2017 à avocat et par acte du huissier de justice du 27 octobre 2017 à Monsieur A., par délivrance de l'acte à domicile.

Agissant sur le fondement de ce jugement, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [...], représenté par Maître Franck M., désigné en qualité d'administrateur provisoire, a fait pratiquer, par acte d'huissier de justice du 10 juillet 2018, à une saisie attribution entre les mains de la Caisse d'épargne d'Amboise à l'encontre de Monsieur Alain A. pour obtenir paiement de la somme de 22'520,99 €, correspondant aux sommes dues en exécution dudit jugement, outre intérêts et frais. Cette mesure d’exécution , dénoncée le 16 juillet 2018 à Monsieur A., a permis l'appréhension d'une somme de 17'310 €, solde bancaire insaisissable non déduit.

Par acte en date du 8 août 2018, Monsieur Alain A. a assigné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [...] devant le juge de l’exécution du Tribunal de Grande Instance de Bourges.

Par jugement en date du 14 janvier 2019, le Juge de l’Exécution du Tribunal de Grande Instance de Bourges a :

- rejeté la demande de sursis à statuer présentée par Monsieur Alain A.,

- rejeté la demande de Monsieur Alain A. tendant à l'annulation de la saisie attribution pratiquée le 10 juillet 2018 à la requête du syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [...], représenté par Maître Franck M., désigné en qualité d'administrateur provisoire, sur ses comptes bancaires détenus auprès de la Caisse d'épargne d'Amboise,

- ordonné la mainlevée de cette saisie attribution, mais seulement ce qu'elle porte sur le compte de dépôt n° [...],

- ordonné le cantonnement à la somme de 21'797,70 € de la saisie attribution pratiquée le 10 juillet 2018 à la requête du syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [...] (94), représenté par Maître Franck M., désigné en qualité d'administrateur provisoire, sur les comptes bancaires détenus par Monsieur Alain A. auprès de la Caisse d'épargne d'Amboise,

- exonéré en totalité Monsieur Alain A. de la majoration prévue par l'article L. 313-3 du code monétaire et financier, à compter de la date du jugement,

- condamné Monsieur Alain A. à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [...], représenté par Maître Franck M., désigné en qualité d'administrateur provisoire, la somme de 800 € au titre des frais exposés et non compris dans les dépens,

- rejeté toutes les demandes plus amples ou contraires des parties.

Monsieur Alain A. a interjeté appel du jugement le 29 janvier 2019.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 7 février 2019, il demande à la cour :

- d'annuler ou à tout le moins d'infirmer le jugement entrepris,

- de surseoir à statuer dans l'attente d'une décision définitive statuant sur la demande de l'appelant aux fins de rétractation des ordonnances sur requête du Président du tribunal de Grande Instance de Créteil des 30 juin 2000 et 3 octobre 2007,

- de dire et juger que Maître Franck M. n'a pas la capacité ou à tout le moins la qualité pour agir pour représenter le syndicat des copropriétaires,

- de dire et juger nulle ou à tout le moins irrégulière la signification à l'appelant du jugement du Tribunal de Grande Instance de Créteil du 8 septembre 2017,

- de dire et juger que la saisie attribution pratiquée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [...] est nulle ou à tout le moins irrégulière,

- d'ordonner la mainlevée de ladite saisie attribution,

- de dire et juger à tout le moins que la saisie ne peut porter sur les dépens et les provisions sur frais du huissier,

- de dire et juger n'y avoir lieu à majoration des intérêts que ce soit pour le passé ou pour l'avenir,

- d'octroyer à titre subsidiaire les plus larges délais de paiement débiteur,

- de débouter le syndicat des copropriétaires et le cas échéant Maître Franck M. de l'ensemble de leurs demandes,

- de condamner le syndicat des copropriétaires à lui payer la somme de 2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

À l'appui de ses conclusions, Monsieur Alain A. fait valoir que les ordonnances des 30 juin 2000 et 3 octobre 2007 ne lui ont jamais été notifiées dans les conditions de l'article 62-5 du code des procédures civiles d' exécution alors en vigueur, qu'il est justifié avoir assigné le syndicat des copropriétaires en rétractation de ces ordonnances, que si ces ordonnances sont annulées ou rétractées, l'effet rétroactif de cette décision aura de facto une répercussion sur la validité de la signification préalable du jugement fondant les poursuites mais également sur la validité des actes d' exécution eux-mêmes, que même si les ordonnances sont valables, le président du Tribunal de Grande Instance de Créteil n'a pas fixé le terme de la mission d'administrateur et ce en contradiction avec les dispositions de l'article 29-1 de la loi du 10 juillet 1965, que la signification préalable du titre exécutoire est nulle, qu'en effet elle fait état de la qualité d'administrateur de Maître Franck M. en vertu de l'ordonnance du 30 juin 2000 et ce alors que ladite ordonnance ne désigne pas Maître Franck M. mais la société P. V..

Bien que la déclaration d'appel et les conclusions lui aient été signifiées à personne le 12 février 2019, le syndicat des copropriétaires du [...] n'a pas constitué avocat.

SUR QUOI

Sur la demande de sursis à statuer

Attendu qu'il ressort des dispositions combinées des articles 3, 377 et 378 du code de procédure civile que le juge peut surseoir à statuer, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, toutes les fois où l'affaire en cours est susceptible d'être affectée par un événement qui lui est extérieur ;

Attendu qu'en l'espèce Monsieur A. justifie avoir assigné en référé le syndicat des copropriétaires afin d'obtenir la rétractation ou à tout le moins l'annulation des ordonnances du président du Tribunal de Grande Instance de Créteil des 30 juin 2000 et 3 octobre 2007 ;

Attendu qu'il fait valoir que même si la rétractation de ces ordonnances n'entraînera pas la disparition du jugement de condamnation en paiement, elles auront néanmoins une répercussion sur la validité tant de la signification préalable du jugement que des actes d’exécution eux-mêmes ;

Attendu cependant que l'appelant n'établit pas qu'il existe un risque important de rétractation des ordonnances présidentielles des 30 juin 2000 et 3 octobre 2007, qu'au surplus le jugement par lequel Monsieur A. a été condamné en paiement de la somme de 18'033,81 euros en principal conserve sa force exécutoire ;

Attendu en conséquence que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de sursis à statuer ;

Sur la capacité à agir de l'administrateur provisoire

Attendu que Monsieur A. fait valoir que les ordonnances du Président du Tribunal de Grande Instance de Créteil des 30 juin 2000 et 3 octobre 2007 ne lui ont jamais été notifiées et qu'aux termes des dispositions de l'article 28 du décret du 17 mars 1967, les fonctions de l'administrateur provisoire ne peuvent excéder trois ans ;

Attendu cependant qu'il est de jurisprudence constante que l'absence de notification à un copropriétaire de l'ordonnance de désignation de l'administrateur n'est pas sanctionnée par l'inopposabilité des actes accomplis par celui-ci et ce à l'égard du copropriétaire ;

Attendu par ailleurs que la limitation des pouvoirs à trois ans prévue par l'article 28 du décret du 17 mars 1967 concerne le syndic désigné par l'assemblée générale de la copropriété, qu'il s'ensuit que l'absence de fixation de la durée de la mission de l'administrateur provisoire n'emporte pas automatiquement l'application des dispositions de l'article 28 du décret du 17 mars 1967 ;

Attendu dès lors que le jugement déféré a considéré à juste titre que l'exception tirée du défaut de capacité à agir du représentant du syndicat des copropriétaires devait être rejetée ;

Sur la signification préalable du titre exécutoire

Attendu que Monsieur A. fait valoir que l'administrateur ne justifie pas aux débats de la signification à avocat préalable à la signification à partie, que l'acte d'huissier est erroné dès lors qu'il fait état de la qualité d'administrateur de Maître Franck M. en vertu de l'ordonnance du 30 juin 2000, alors que cette ordonnance ne désigne pas Maître Franck M. mais la société P. V. qui a été radiée en 2005, et que l'adresse de l'appelant figurant sur l'acte d'huissier est erronée ;

Attendu cependant qu'il ressort du jugement déféré que le syndicat des copropriétaires a produit aux débats le justificatif de la signification à avocat du jugement du 8 septembre 2017, intervenue par voie électronique le 6 octobre 2017 ;

Attendu que si Maître Franck M. n'a été désigné qu'en remplacement par l'ordonnance du 3 octobre 2007, il avait bien la qualité d'administrateur judiciaire du syndicat des copropriétaires lors de la signification du jugement du 8 septembre 2017 intervenue le 27 octobre 2017, que Monsieur A. ne peut donc invoquer aucun grief sur le fondement de l'erreur quant à la date de l'ordonnance de désignation ;

Attendu que l'acte de signification en date du 27 octobre 2017 précise que l'huissier de justice a rencontré au domicile de Monsieur Alain A. Monsieur Jean-Louis A. 'en sa qualité de frère ainsi déclarée, personne présente, qui a accepté de recevoir copie de l'acte et a certifié le domicile du destinataire' ;

Attendu que si Monsieur Alain A. verse aux débats une attestation de son frère Jean-Louis A., aux termes de laquelle ce dernier déclare qu'il ne s'est trouvé à aucun moment au domicile de son frère le 27 octobre 2017, la production de cette pièce ne saurait faire échec aux dispositions de l'article 1371 du Code civil qui dispose que l'acte authentique fait foi jusqu'à inscription de faux de ce que l'officier public dit avoir personnellement accompli ou constaté ;

Attendu qu'en l'espèce Monsieur A. n'établit pas l'existence d'une inscription de faux de sa part, que les mentions de l'acte d'huissier en date du 27 octobre 2017 font donc foi ;

Attendu qu'il ressort de ces éléments que le moyen tiré du défaut de signification préalable du titre exécutoire n'est pas fondé ;

Sur les comptes saisis

Attendu qu'il ressort du procès-verbal de saisie attribution que la mesure a porté sur les comptes bancaires suivants :

- compte de dépôt n° [...] créditeur de 1448,38 €,

- PEL n° [...] créditeur de 11'800,93 €,

- LEP n° [...] créditeur de 1759,98 €,

- CEL n° [...] créditeur de 673,38 €,

- LDD n° [...] créditeur de 1259,37 €,

- Livret A n° [...] créditeur de 368,06 €,

Attendu que le jugement déféré a estimé que de la combinaison des articles L. 211-1 et L. 212-1 du code des procédures civiles d' exécution , ensemble les articles L. 3252-1 à L. 3252-3 du code du travail il résulte que ne sont pas saisissables par voie de saisie attribution les sommes reçues par le débiteur saisi au titre des rémunérations du travail, qu'il s'ensuit que la saisie des pensions de vieillesse du régime général de la Sécurité Sociale ne peut être effectuée que par la procédure de saisie des rémunérations, et que l'examen des relevés de compte produit aux débats par Monsieur A. démontre que le compte de dépôt n'est alimenté que par les pensions de retraite servies à celui-ci, qu'il a ordonné en conséquence mainlevée de la mesure en ce qu'elle porte sur ce compte ;

Attendu que Monsieur A. fait valoir en cause d'appel que les comptes de la caisse d'épargne faisant l'objet de la saisie sont alimentés exclusivement par ses pensions de retraite ;

Attendu cependant que l'appelant ne rapporte pas la preuve de l'alimentation exclusive desdits compte d'épargne par ses pensions de retraite, qu'au demeurant il n'établit pas avoir signé des ordres de virement auprès de ses organismes payeurs afin que tout ou partie de ses pensions soit versées sur les comptes d'épargne ;

Attendu en conséquence que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a dit n'y avoir lieu d'ordonner la mainlevée de la saisie litigieuse en ce qu'elle porte sur les comptes d'épargne ;

Sur le montant des sommes réclamées

Attendu que c'est par des motifs précis et pertinents que la Cour adopte, que le premier juge a retranché du débit du compte figurant à l'acte de saisie :

d'une part la somme de 272,70 € se décomposant comme suit :

- frais de signification certificat de non-contestation 92,93 €

- frais de certificat de non-contestation 51,48 €

- frais de mainlevée 74,91 €

- frais de la vie de mainlevée 53,38 €

d'autre part les frais de signification à concurrence de 87,12 € et les frais de procédure à concurrence de 363,47 € ;

Attendu que le jugement déféré sera donc confirmé sur ce point, qu'il le sera également en ce qui concerne les frais de dénonciation de la saisie attribution à concurrence de 105,79 € et la provision pour intérêts à venir à concurrence de 61,60 € ;

Attendu en effet que Monsieur A. n'établit pas en cause d'appel en quoi ces deux sommes seraient indues, qu'en effet les frais de dénonciation de la saisie attribution ont été effectivement exposés, étant précisé par ailleurs que la provision pour intérêts à venir est prévue par les dispositions du code des procédures civiles d’exécution ;

Attendu que le jugement déféré a considéré que eu égard à la situation du débiteur et compte tenu du montant des sommes restant dues, il convient de l'exonérer de la majoration prévue par l'article L. 313-3 du code monétaire et financier, mais seulement pour l'avenir à compter de la date du jugement ;

Attendu que si l'article L. 313-3 du code monétaire et financier dispose que le juge de l' exécution peut, à la demande du débiteur ou du créancier, et en considération de la situation du débiteur, exonérer celui-ci de la majoration de cinq points du taux de l'intérêt légal ou en réduire le montant, M. A. n'établit pas que sa situation nécessite une exonération en totalité ;

Attendu que le jugement déféré sera confirmé sur ce point ;

Sur les délais de paiement

Attendu que Monsieur A. n'a pas présenté de plan d'apurement de sa dette résiduelle, qu'en conséquence le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à octroi d'un délai de paiement ;

Sur les autres demandes

Attendu que Monsieur A. qui succombe sera condamné aux dépens d'appel ;

Attendu que l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Déboute les parties de toutes demandes plus amples ou contraires ;

Condamne Monsieur Alain A. aux dépens de l'instance d'appel.