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Décisions

Cass. 1re civ., 23 septembre 2020, n° 19-13.652

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Batut

Rapporteur :

M. Avel

Avocat général :

M. Lavigne

Avocats :

Me Balat, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Grenoble, du 3 avr. 2018

3 avril 2018

Faits et procédure

1. Selon les arrêts attaqués (Grenoble, 3 avril et 11 décembre 2018), M. A... a acquis un véhicule d'occasion auprès de M. I..., qui l'avait lui-même acheté à M. G..., lequel s'en était rendu propriétaire auprès de M. T....

2. Après avoir obtenu en référé une mesure d'expertise, M. A... a assigné M. I... en résolution de la vente, en invoquant l'existence d'une modification du kilométrage affiché au compteur. M. I... a appelé en garantie M. G..., lequel a attrait en la cause M. T....

3. La résolution de la vente intervenue entre M. I... et M. A... a été prononcée.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. M. G... fait grief à l'arrêt du 11 décembre 2018 de le déclarer irrecevable en son opposition à l'arrêt du 3 avril 2018 le condamnant à garantir M. I..., alors :

« 1°/ que, lorsque l'un au moins des défendeurs ne comparaît pas, la décision est rendue par défaut à l'égard de tous, dès lors que la décision n'est pas susceptible d'appel et que l'une au moins des parties qui n'a pas comparu n'a pas été citée à personne ; qu'en l'espèce, dans son arrêt du 3 avril 2018 statuant sur l'appel de M. A..., la cour d'appel de Grenoble a constaté que M. T..., cité à la personne de son épouse le 19 février 2016, n'avait pas constitué avocat ; qu'en affirmant que « l'arrêt du 3 avril 2018 n'a été rendu par défaut qu'à l'égard de M. T..., mais n'a pas été rendu par défaut à l'égard de M. G... puisqu'il a été cité à sa personne », la cour d'appel a violé l'article 474 du code de procédure civile ;

2°/ que la partie défenderesse qui n'a pas comparu est défaillante à l'instance et, partant, recevable à former opposition, peu important qu'elle ait été citée à personne dans le cadre de l'instance à l'issue de laquelle la décision par défaut, contre laquelle elle forme opposition, a été rendue ; qu'en l'espèce, il ressort des énonciations de l'arrêt rendu le 3 avril 2018 par la cour d'appel de Grenoble que M. G..., intimé, n'a pas constitué avocat et n'a donc pas comparu devant la cour ; qu'en affirmant que « W... G... qui, bien qu'informé de la procédure d'appel par une citation délivrée à sa personne, n'a pas constitué avocat est irrecevable en son opposition », la cour d'appel a violé l'article 571 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

5. En application de l'article 571 du code de procédure civile, l'opposition, qui n'est ouverte qu'au défaillant, tend à faire rétracter un jugement rendu par défaut. Il résulte des articles 473 et 474 du même code que, seul constitue un arrêt par défaut celui qui a été rendu en l'absence de comparution d'un défendeur, auquel la citation n'a pas été délivrée à personne. Il découle de la combinaison de ces textes que seul ce défendeur a la qualité de défaillant, au sens du premier texte.

6. Il ressort des mentions de l'arrêt du 3 avril 2018 que, si M. G... n'a pas constitué avocat, il a été cité à sa personne, de sorte que c'est à bon droit que la cour d'appel en a déduit qu'il n'avait pas la qualité de défaillant au sens de l'article 571, et que, dès lors, son opposition était irrecevable.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

8. M. G... fait grief à l'arrêt du 3 avril 2018 de le condamner à relever et garantir M. I... des condamnations prononcées à son encontre au bénéfice de M. A..., et de le condamner à indemniser le préjudice moral subi par M. I..., alors, « que le juge est tenu de s'assurer que les conclusions de l'intimé ont été régulièrement signifiées à un co-intimé défaillant à l'encontre duquel il forme des demandes et doit, à défaut, prononcer d'office l'irrecevabilité desdites conclusions à l'égard du co-intimé concerné ; qu'en s'abstenant de vérifier si les conclusions d'intimé de M. I..., qui sollicitait, à titre subsidiaire, la garantie et la condamnation à dommages-intérêts de M. G..., son co-intimé défaillant à l'instance, avaient été régulièrement signifiées à ce dernier, la cour d'appel a violé l'article 911 du code de procédure civile, dans sa version antérieure au 1er septembre 2017, ensemble l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 911 du code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, ensemble l'article 6 de la
Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

9. Si, en application du premier de ces textes, l'intimé est tenu, comme l'appelant, de notifier ses conclusions aux avocats des parties dans le délai de leur remise au greffe de la cour d'appel, l'exigence d'un procès équitable implique qu'il signifie ses conclusions à un co-intimé qui n'a pas constitué avocat et à l'encontre duquel il émet des prétentions.

10. Pour condamner M. G..., qui n'avait pas constitué avocat, à relever et garantir M. I... de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre, ainsi qu'au paiement de dommages-intérêts à l'égard de celui-ci, l'arrêt retient que M. G... a fait le choix de ne pas participer aux opérations d'expertise ni de constituer avocat en cause d'appel pour faire valoir ses explications et la défense de ses intérêts et que M. I... est bien fondé en ses prétentions.

11. En statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait de vérifier si les conclusions déposées par M. I..., qui formulait des prétentions contre M. G..., avaient été régulièrement signifiées à celui-ci, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen, la Cour :

REJETTE le pourvoi en ce qu'il est formé contre l'arrêt rendu le 11 décembre 2018 ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. G... à relever et garantir M. I... de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre au bénéfice de M. A... et à payer à M. I... les sommes de 1 000 euros en réparation de son préjudice moral, et 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 3 avril 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon.