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Décisions

Cass. com., 12 octobre 2022, n° 21-12.702

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Mollard

Rapporteur :

M. Maigret

Avocats :

SCP Alain Bénabent, SCP Waquet, Farge et Hazan

Douai, du 23 janv. 2020

23 janvier 2020


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 23 janvier 2020), par un acte sous seing privé du 3 juin 2014, M. [U] [O], Mme [X] [F], épouse [O], M. [B] [O] et M. [R] [O] (les consorts [O]) ont cédé à la société KFPLM la totalité des parts qu'ils détenaient dans le capital de la société [B] [O]. A cette convention était attachée une garantie d'actif et de passif, plafonnée à 50 000 euros.

2. Le 27 juillet 2016, les sociétés KFPLM et [B] [O] ont assigné les consorts [O], notamment en paiement, au titre de la garantie d'actif et de passif, d'une somme supérieure au plafond de celle-ci ainsi qu'en paiement de sommes à titre de diminution du prix et de dommages-intérêts.

3. Les sociétés [B] [O] et KFPLM ont été respectivement mises en liquidation judiciaire les 29 avril et 6 juillet 2020. La société MJS Partners Selas a été désignée en qualité de liquidateur.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa cinquième branche

Enoncé du moyen

4. Les sociétés KFPLM, [B] [O] et MJS Partners Selas font grief à l'arrêt de limiter à 50 000 euros la condamnation des consorts [O] au titre de la garantie d'actif ou de passif, alors « que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en jugeant qu'il ne résultait pas de la comptabilisation des stocks en valeur TTC une manoeuvre destinée à tromper le cessionnaire au motif qu'il s'agirait là d'une "pratique dans la société", sans répondre au moyen des sociétés KFPLM et [B] [O] selon lequel une telle méthode de comptabilité était une violation manifeste et grave des méthodes comptables qui ne pouvait avoir été faite que dans l'intention de tromper le cessionnaire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :

5. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.

6. Pour limiter la condamnation des consorts [O] à payer la somme de 50 000 euros au titre de la garantie d'actif et de passif, l'arrêt relève que la comptabilisation des stocks en valeur TTC, d'une part, n'est pas contestée par les cédants, qui expliquent, sans être contredits, qu'il s'agissait d'une pratique courante de la société, et d'autre part, était réalisée par le comptable, lequel travaillait sous le contrôle d'un expert-comptable qui était également celui de l'acquéreur et employait l'épouse de ce dernier.

7. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions des sociétés KPLM et [B] [O], qui soutenaient que les consorts [O] leur avaient présenté une comptabilité inexacte, qui aboutissait à gonfler artificiellement la valeur des stocks de 19,6 % et constituait une violation tellement flagrante des principes généraux de la comptabilité qu'elle ne pouvait être ignorée des cédants, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.

Portée et conséquence de la cassation

8. La cassation intervenue sur le chef de dispositif qui, en réponse à la demande tendant à écarter le plafond de la garantie d'actif et de passif, limite à la somme de 50 000 euros la condamnation des consorts [O] au titre de cette garantie s'étend nécessairement, en vertu de l'article 624 du code de procédure civile, à celui déboutant la société KFPLM de sa demande en diminution du prix de la cession des parts sociales de la société [B] [O], les deux demandes étant fondées sur l'existence d'un dol.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il limite à 50 000 euros la somme due par les consorts [O] au titre de la garantie d'actif et de passif, et déboute la société KFPLM de sa demande relative à la diminution du prix de la cession des parts sociales de la société [B] [O], l'arrêt rendu le 23 janvier 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée.