Livv
Décisions

Cass. 3e civ., 30 mars 2023, n° 21-25.920

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Teiller

Rapporteur :

M. Zedda

Avocats :

SARL Cabinet Rousseau et Tapie, SARL Le Prado - Gilbert, SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, SCP Gadiou et Chevallier, SCP Sevaux et Mathonnet

Reims, du 7 sept. 2021

7 septembre 2021

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société Baptemil du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Isolapro.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Reims, 7 septembre 2021), M. [G] a confié la maîtrise d'oeuvre de l'aménagement d'une boulangerie à M. [C], assuré auprès de la Mutuelle des architectes français (la MAF), et M. [L], assuré auprès de la société Axa France IARD (la société Axa).

3. L'exécution des travaux a été confiée par M. [G] aux entreprises suivantes :
- les lots démolition, terrassement, maçonnerie, revêtements des sols et murs à la société Entreprise [F], assurée auprès de la société Aviva assurances, aujourd'hui dénommée Abeille IARD et santé ;
- les lots plâtrerie, faux-plafonds, isolation thermique, charpente en bois, menuiserie en bois et quincaillerie à la société Isolapro, assurée auprès de la société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (la SMABTP) et auprès de la société Areas dommages ;
- le lot plomberie sanitaire, VMC à la société Martin & fils, devenue Clim&Lec, assurée auprès de la société MMA IARD ;
- le lot électricité, chauffage, téléphone à M. [V], assuré auprès de la société Axa.

4. Par acte du 28 mars 2000, M. [G], agissant au nom de la société en formation Baptemil, a pris les locaux à bail commercial.

5. Les statuts de la société Baptemil ont été enregistrés au registre du commerce et des sociétés le 12 avril 2000, avec reprise du bail commercial.

6. Les travaux ont été réceptionnés le 19 juin 2000.

7. Se plaignant de désordres, la société Baptemil a assigné les constructeurs et leurs assureurs pour obtenir l'indemnisation de ses préjudices, principalement sur le fondement de la garantie décennale.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses troisième et quatrième branches

8. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

9. La société Baptemil fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes fondées sur la garantie décennale, la subrogation et la responsabilité contractuelle de droit commun, alors « que la reprise par une société locataire, régulièrement immatriculée, des contrats de louage d'ouvrage souscrits par les personnes ayant agi au nom de la société en formation peut résulter de la reprise du contrat de bail, lorsque ce dernier mentionne expressément les contrats de louage conclus au nom de la société en formation, nécessaires à la jouissance des locaux ; qu'en déboutant la société Baptemil de ses demandes, après avoir constaté que les statuts de la société Baptemil mentionnaient expressément la reprise du contrat de bail et que ce contrat de bail contenait lui-même une clause conférant au preneur l'obligation de procéder, à ses frais, aux travaux d'aménagement des locaux, ce dont il résultait nécessairement que ces contrats de construction avaient aussi été repris par la société Baptemil en même temps que le contrat de bail et les obligations en découlant, la cour d'appel a violé l'article 1843 du code civil. »

Réponse de la Cour

10. Conformément aux articles 1843 du code civil, L. 210-6 du code de commerce, et 6 du décret n° 78-704 du 3 juillet 1978, la reprise des contrats de louage d'ouvrage ne peut être implicite et doit résulter soit de la signature des statuts, lorsque l'état prévu au troisième des textes cités plus haut a été préalablement annexé à ces statuts, soit d'un mandat donné avant l'immatriculation de la société et déterminant dans leur nature ainsi que dans leurs modalités les engagements à prendre soit d'une décision prise à la majorité des associés après l'immatriculation de la société.

11. Dès lors, la reprise d'un bail commercial conclu au nom d'une société alors qu'elle était en formation, n'emporte pas reprise des marchés de travaux conclus par des tiers pour l'aménagement du bien loué du seul fait que le bail oblige le preneur à effectuer ces travaux.

12. La cour d'appel a relevé que les statuts de la société Baptemil ne faisaient aucune mention d'une reprise des marchés de travaux, que si les statuts conféraient à M. [G], à compter de leur date, tous pouvoirs pour réaliser au nom et pour le compte de la société, tous actes et engagements entrant dans le cadre de l'objet social et de ses pouvoirs de gérant, ils avaient prévu que ces actes seraient soumis à l'approbation de l'assemblée générale ordinaire des associés et qu'il n'était versé aux débats aucun procès-verbal d'assemblée générale des associés approuvant la reprise des contrats litigieux.

13. Elle en a souverainement déduit que la preuve d'une telle reprise n'était pas rapportée.

14. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

15. La société Baptemil fait le même grief à l'arrêt, alors « que lorsque le contrat de bail comporte une clause conférant au preneur l'obligation de procéder à ses frais aux travaux d'aménagement des locaux et précise que ces travaux d'aménagement n'accéderaient au bailleur qu'en fin de bail, le preneur a qualité à agir contre les constructeurs sur le fondement de la garantie décennale ; qu'en déboutant la société Baptemil de ses demandes, après avoir constaté l'existence d'une telle stipulation figurant dans le contrat de bail signé le 28 mars 2000, la cour d'appel a violé l'article 1792 du code civil. »

Réponse de la Cour

16. La cour d'appel, qui a souverainement retenu que les contrats de louage d'ouvrage n'avaient pas été conclus par la société Baptemil ni repris par elle, a exactement déduit de ce seul motif que cette société n'était pas le maître de l'ouvrage et ne pouvait agir, à ce titre, sur le fondement de la garantie décennale.

17. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.